La responsabilité pénale des personnes morales en droit pénal du travail
Introduction sur la responsabilité des personnes physiques ou morale en droit pénal du travail. En droit pénal du travail, la responsabilité concerne classiquement 2 catégories de personnes :
- – Les personnes physiques
- – Les personnes morales.
Parmi les incriminations prévues par le code du travail, certaines ne comportent pas d’imputation spéciale (ex : article L21-46-1 : entrave à exercice droit syndical : c’est à celui qui invoque l’entrave de déterminer qui est l’auteur de celle-ci).
Le droit pénal général ne connait que 2 manières d’être pénalement responsable :
- – Être l’auteur ou le coauteur
- – Être le complice.
Article 121-1 : nul n’est pénalement responsable que de son propre fait.
- Droit pénal du travail
- Les infractions relatives à l’hygiène et la sécurité au travail
- Le harcèlement moral et sexuel au travail
- La discrimination au travail : définition, sanction
- Le prêt de main d’œuvre illicite
- Le travail dissimulé : définition, sanction
- La responsabilité pénale de l’employeur
Une personne ne peut voir sa responsabilité pénale engagée que si elle n’a pas elle-même participé à l’infraction. Ce principe exclut donc la responsabilité pénale du fait d’autrui.
Le droit pénal a une fonction préventive, on va donc rechercher la pénalisation du véritable pôle de décisions. Pour être préventive, la loi pénale ne doit pas se tromper de cible.
En droit pénal du travail, on recherche donc les personnes réelles qui prennent les décisions intéressant les travailleurs. Le droit pénal du travail est spécifique car, dans certains cas, on recherche dans certaines hypothèses, la responsabilité pénale de la personne morale.
Le droit pénal du travail se divise en 2 catégories :
- Textes à spectre large:
Ex : harcèlement moral : peut être une infraction commise soit par un collègue, soit par un supérieur ou un subordonné, soit par un chef d’entreprise).
délit d’entrave : arrêt 1986 : des salariés avaient été poursuivis pour délit d’entrave à l’exercice du droit syndical car ils étaient opposés à la réintégration d’un DS qui avait été irrégulièrement licencié.
atteinte volontaire à la personne.
- Textes qui visent des personnes déterminées:
Ex : art 12-27-1 : le fait pour le directeur ou un salarié de révéler un secret de fabrication et puni […].
Le chef d’entreprise va souvent être visé soit explicitement, soit implicitement (ex : travail le dimanche : si l’entreprise ne respecte pas ces réglementation, c’est l’organisation toute entière qui va être mise en cause).
Ancien débat sur l’admission de la responsabilité des personnes morales.
Avant le 1er mars 1994, la personne morale était irresponsable pénalement, sauf cas prévus expressément prévu par la loi ; elle encourrait une responsabilité civile et administrative.
Arguments contre la responsabilité pénale Adage societas delinquere non potest : la délinquance de la société n’est pas possible. |
Arguments pour la responsabilité pénale |
Le groupement est une fiction juridique qui est incapable de volonté personnel |
La théorie de la fiction juridique a été abandonnée en droit civil ; il n’y a donc pas de raison de la conserver en droit pénal. Une personne morale peut avoir d’un point de vue juridique, une volonté propre qui est exprimée par le truchement de ses organes distinct de la volonté individuelle de chacun de ses membres. |
En droit civil, la reconnaissance juridique des groupements suppose l’existence d’un objet social, qui ne peut en aucun cas consister en la commission d’une infraction. |
En effet, la commission d’une infraction ne peut être un objet social de la société. En revanche, la société peut par son objet social donnée lieu à la commission d’infractions ; que cela consiste l’objet occulte de la personne morale ou qu’elle doit accidentelle. Ex le travail non déclaré |
Un groupement ne peut faire l’objet d’une peine, car par nature la peine n’est applicable qu’à des personnes physiques |
Dans la mesure où la société dispose de droits ou d’un patrimoine, une personne morale peut faire l’objet de sanctions supprimant ou restreignant ses droits ou atteignant son patrimoine. |
La responsabilité pénale des personnes morales, porte atteinte au principe de la personnalité des peines ; puisqu’elle revient à punir indirectement tous les membres du groupement, y compris ceux qui n’ont pas voulu la commission de cette infraction |
L’argument contre est une conception erronée du principe de la personnalité des peines. D’autres condamnations ont des répercutions sur des innocents : ex l’incarcération d’une personne ou la condamnation de cette personne à une lourde amende peut priver la famille de cette personne de tout revenu. Il n’y a pour autant pas atteinte au principe de la personnalité des peines, car la condamnation n’est pas directement exécutoire à l’encontre de la famille du condamné. |
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Si les personnes morales ne sont pas responsables les sanctions seraient totalement inéquitables et absurdes. En effet, tout agissement d’une société reposerait sur les épaules du dirigeant ; or celui-ci, personne physique, ne tire généralement aucun avantage personnel du fait délictueux. |
Cette controverse à cessé a partir de la publication du nouveau code pénal et de la loi du 9 mars 2004 (loi PERBEN) qui reconnait explicitement la responsabilité pénale des personnes morales.
Section 1 Domaine de la responsabilité pénale des personnes morales
§1 Le principe général de responsabilité
L’article 121-2 Code Pénal a entendu instituer un principe général de responsabilité des personnes morales. Seul est exclu expressément l’Etat (ministère public poursuit + assure la protection des intérêts généraux ; dont les CT, sauf lorsqu’elles commettent des infractions dans l’exercice d’activités susceptibles de faire l’objet de convention de Service public c’est-à-dire par des activités qui aurait pu être assurées par d’autres personnes, notamment une personne de droit privé).
Entre dans le champ de cette loi les associations à but lucratifs ou non, les syndicats, les IRP et les sociétés.
§2 Exigence de la personnalité morale
L’article L121-2 al suivant, ne concerne que les groupements qui disposent de la personnalité morale. Le principe est que pour qu’un groupement engage sa responsabilité, il doit avoir la personnalité morale.
Parfois, la loi dispose clairement que tel ou tel groupement ne dispose pas de la personnalité morale. Ex société en participation. Mais toutes les sociétés qui sont immatriculées au RCS disposent d’une personnalité morale.
D’autres fois, la loi ne précise pas si le groupement dispose d’une personnalité morale. Il faut alors rechercher si le groupement à la personnalité morale : on applique la théorie de la réalité.
Civ 28 janv 1954 « la personnalité morale n’est pas une création de la loi et qu’elle appartient en principe à tout groupement pourvu d’une possibilité d’expression collective pour la défense d’intérêts licites, dignes par suite d’être juridiquement protégés ».
Crim en application du principe de stricte application de la loi pénale, ne va mentionner que les groupements citer par la loi.
§3 Applications
A- En cas de fusion-absorption
La société absorbante n’hérite pas du passé pénale de la société absorbée. Donc la société absorbante n’est pas pénalement responsable des faits antérieurs à l’absorption.
B- La personne morale en cours de liquidation
Lorsqu’il y a liquidation judiciaire la personne morale subsiste pour les besoins de la liquidation. Donc les infractions commises durant la liquidation pourront engagées la responsabilité pénale de la personne morale.
Section 2 Conditions de la responsabilité pénale des personnes morales
Article 121-1 Code Pénal pose le principe de la responsabilité personnelle : « nul ne peut voir sa responsabilité pénale engagée s’il n’a pas lui-même participé à la perpétration de l’infraction ».
Ce principe s’applique aussi bien aux personnes physiques que morales. Donc pour que la personne morale soit responsable pénalement, il faut que l’infraction lui soit matériellement et personnellement rattachable. Article 121-2 Code Pénal dispose que « Les personnes morales sont responsables pénalement des infractions commise pour leur compte, par leur organes et représentants ».
&1 L’infraction doit être commise par un organe ou un représentant de la personne morale
Le chef d’entreprise peut déléguer ses pouvoirs. Donc la responsabilité pénale de la personne morale, ne va pas être engagée que si c’est le chef d’entreprise qui commet l’infraction, mais aussi si le délégataire commet l’infraction.
Il y a souvent un cumul de responsabilité entre la responsabilité pénale de la personne morale et la personne physique. Il peut aussi y avoir une responsabilité pénale alternative ; comme le parquet à l’opportunité des poursuites, le procureur peut décider de poursuite, soit la personne morale, soit la personne physique, soit les deux. Crim 20 juin 2006 homicide involontaire du a un défaut d’aménagement d’un des locaux : responsabilité pénale de la personne morale alors que l’on ignorait l’identité de la personne physique.
&2 Une infraction commise pour le compte de la personne morale
Il ne faut pas que l’organe ait agit pour son intérêt personnel. Ex le vol commit par un dirigeant. Mais à la lecture des arrêts de la chambre criminelle, l’on observe qu’il est difficile de rechercher la responsabilité de personne morale, car « pour le compte de la personne morale » ne doit pas forcément être un bien chiffrable. L’infraction peut par exemple être utile pour l’entreprise (ex un gain de temps). Ex une discrimination raciale.
Section 3 Sanctions applicables
Les peines applicables à la personne morale sont un peu spéciales (article L131-1 CP) : elles ne seront que des amendes puisque l’on ne peut pas l’emprisonner. L’amende sera toujours le quintuple de l’amende prévue pour une personne physique. Ex crime 1 millions d’euros.
Autres peines Article 131-39 Code Pénal dissolution de la société, interdiction temporaire ou définitive d’exercer une activité, exclusion des marchés publics, la confiscation de la chose ayant servi à l’infraction, la publication et l’affichage de la condamnation.
Section 4 L’articulation des responsabilités pénales des personnes morales et des personnes physiques
§1 Le principe de la possibilité de cumul de responsabilité
Art 121-2 al 3 La responsabilité pénale des personnes morales n’exclue pas la responsabilité des personnes auteurs ou complices des méfaits. Le législateur a consacré un principe de dualité des responsabilités. La responsabilité peut être cumulative ou alternative.
§2 Les exclusions du cumul de responsabilité
La responsabilité pénale des personnes morales est subordonnée à la responsabilité pénale de la personne physique (l’organe qui commet l’infraction) pour le compte de la personne morale.
Il y a une certaine atténuation lorsque l’infraction est commise par un organe collégial. Il est alors impossible de déterminer le rôle de chacun des membres. L’organe engagera la responsabilité pénale de la personne morale.
Article 121-2 al 3 « …sous réserve des dispositions du 4ème alinéa de l’article 121-3 Code Pénal ». L’article 121-3 al 4 Code Pénal instaure deux liens de causalités permettant d’attribuer la responsabilité pénale en fonction d’une hiérarchie des fautes :
- Causalité directe : n’importe qu’elle faute d’imprudence peut engager la responsabilité
- Causalité indirecte:
- Seule une faute caractérisée ou la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de sécurité, imposée par la loi ou le règlement, engage la responsabilité de son auteur.
- En cas de faute simple : la responsabilité pénale de la personne physique ne peut être retenue ; seule la responsabilité pénale de la personne morale sera engagée