La sanction pénale en droit romain

Les peines sous l’empire Romain (le droit pénal romain)

l’Empire romain est né en 27 av JC et s’est terminé en 476. En 27 av. J.-C., l’Empire romain est dirigé par un premier empereur nommé Caïus Cesar Octavianus Augustus : il est devenu le maître de tout le monde occidental civilisé, constitué au sud des Alpes par le monde méditerranéen, et au nord par la Gaule, et l’Helvétie et bientôt (sous son règne et celui de ses successeurs), d’une bonne partie de l’Europe centrale jusqu’aux rives du Danube (Bavière, Autriche, Hongrois, Yougoslavie et Bulgarie). Quelles sont les sanctions pénales à l’époque romaine?

  • &1 : Les fonctions de la peine
  • A) La vengeance privée (vindicatio)

La vengeance est censée procurer une satisfaction. Le mal infligé doit compenser le mal subi. De plus, en matière d’homicide, la mort du coupable doit satisfaire à la fois la famille de la victime mais également le défunt lui-même dont on assure le repos. Lorsque la vengeance est règlementée par la coutume, la loi du Talion ou par l’obligation d’accepter une poena, la victime accepte de renoncer à se venger le plus souvent en échange d’une somme d’argent. Ce stade de l’évolution du droit pénale est illustré à Rome par la loi des XII Tables qui combine à la fois la loi du Talion et les poenas.

  • B) L’intérêt public : l’exemplarité de la peine

Lorsqu’une infraction lèse les intérêts de la communauté civique, il est nécessaire d’apaiser les dieux protecteurs de la cité pour le bien commun en éliminant le coupable. Du même coup, la défense sociale est assurée car le facteur de désordre disparait. A l’époque classique, l’ordre public devient une priorité, ce qui se traduit par une répression exemplaire que l’on veut dissuasive. Les magistrats, titulaires du pouvoir de coercitio, sont incités par Cicéron à contraindre les délinquants par des amendes, des chaines, des coups de fouet. A partir de là, le vocabulaire du droit pénal révèle que la peine a une fonction de rétribution mais aussi de prévention, elle permet d’avertir les éventuels délinquants. Pour Cicéron, la République ne peut pas être gouvernée sans crainte et sévérité, c’est pour cela qu’il faut porter devant les magistrats les faisceaux de licteurs, il faut construire des prisons et infliger des supplices. Pour Sénèque, la peine a trois fonctions : la première est de corriger le délinquant, la deuxième est de rendre les autres meilleurs par l’exemple du châtiment et la troisième est d’assurer l’ordre public en supprimant les délinquants. Le grammairien Aulu-Gelle distingue deux formes de prévention : une prévention spéciale pour les délinquants qui seraient simplement négligeants et une prévention générale pour la population toute entière. C’est pour renforcer la valeur préventive de la peine que la peine de mort et la peine d’élimination (exil) se généralisent sous l’Empire. De plus, de nouvelles peines apparaissent toujours qualifiées de poena. Ainsi, le mot poena servira à désigner les châtiments corporels. L’idée d’une politique criminelle apparait dans la mesure où on module les sanctions des infractions en fonction de leur fréquence, du temps, des lieux etc. Sous le Bas empire, les empereurs cherchent à intimider les délinquants. Ils prescrivent des peines caractérisées par la severitas ou l’atrocitas. Il faut terroriser les délinquants potentiels pour les détourner du crime. Sous l’influence du Christianisme, la peine semble parfois envisagée comme une pénitence destinée à l’amendement du coupable (en vue de le corriger, le rendre meilleur) mais c’est assez rare. En général ce droit pénal du Bas Empire est très répressif, il est destiné à éliminer et mettre les délinquants hors d’état de nuire.

Œil pour œil, dent pour dent, la vengeance chez les Romains | Raconte-moi l'Histoire

  • &2 : L’arsenal répressif : l’éventail des peines

A) Les peines capitales

  1. La mort physique

A l’origine, la peine de mort se pratiquait par pendaison ou décapitation par le biais de la hache, parfois précédé des flagellations (coup de fouet). Mais il existe d’autres types de mise à mort et notamment la précipitation du haut de la Roche Tarpeienne qui sanctionne les actes de trahison (la loi des XII Tables la prévoit également pour des vols manifestes). C’est une peine qui était réservée à tous ceux qui manquaient à leur devoir de Fides c’est-à-dire leur devoir de loyauté. On trouve également l’emmurement vif et on le trouve notamment pour les prêtresses qui manqueraient à leur devoir de chasteté ou encore pour les femmes convaincues d’ivrognerie. Ensuite, on trouve à côté de la peine de mort simple, des formes d’exécution spectaculaire, complexe que l’on appelle les supplicia à savoir la condamnation aux bêtes dans le cirque). C’est un spectacle qui est tombé en désuétude après Constantin à cause de l’hostilité de l’Eglise tout comme le supplice de la croix (le patibulum). Il y a également des condamnations au feu, au bûcher pour les esclaves malveillants (ceux qui dénoncent leur maitre), la désertion, le faux monnayage, l’homosexualité, le rapt de jeunes filles, l’automutilation et certaines formes d’hérésie. Il existe aussi la peine du sac pour les parricides. La nourrice qui n’empêchait pas le rapt de l’enfant dont elle avait la garde subissait le supplice du plomb fondu dans la bouche.

  1. La « mort civile »

C’est à partir du IIème siècle après JC que la peine de mort est parfois remplacée par des peines d’élimination qui varient selon le rang social des condamnés. Les humbles (humiliores) et les esclaves sont condamnés aux travaux forcés sous la forme de l’ouvrage public (opus publicum) ou sous une forme plus pénible, celle du travail dans les mines. Constantin va l’adoucir en supprimant la marque au visage pour les condamnés. Dans les mêmes cas, les honestiores sont condamnés à l’exil. A l’origine, c’était l’interdiction de l’eau et du feu, cette peine sera concurrencée dans le cas de la procédure extraordinaire par la déportation, le plus souvent sur une île. C’est une sanction perpétuelle qui entraine la perte de la citoyenneté et de toutes les dignités (y compris celle des paters familias), il y a donc dissolution du mariage et confiscation des biens. B) Les peines non capitales

  1. Les peines physiques

La prison n’est pas conçue comme une véritable peine, c’est seulement un moyen de s’assurer de la présence d’un prévenu jusqu’à son procès ou son exécution. Selon le Digeste, « la prison doit être considérée comme un moyen de contenir les hommes, non de les punir ». Les Romains préfèrent appliquer la relégation qui est une peine plus douce que la déportation car elle est temporaire et n’emporte pas de perte de la citoyenneté ou du patrimoine. Le condamné est parfois interné dans un lieu fixé (monastère) ou bien se voit interdire la fréquentation de certains lieux.

  1. Les peines patrimoniales

Le droit du Bas Empire se présente en ce domaine, comme une juxtaposition de systèmes très différents qui témoignent de l’évolution du droit pénal romain. On y trouve notamment le vieux système des compensations pécuniaires versées aux victimes, comme par exemple la peine du quadruple pour le vol manifeste. Il existe également le système de l’amende (la multa) qui était due au FISC et qui intervient dans des hypothèses de plus en plus nombreuses et notamment pour les infractions au règlement administratif. Enfin, il existe des peines de confiscation avec soit une confiscation générale des biens soit une confiscation spéciale (qui ne porte que sur un bien).

  1. L’infamie

En droit classique, le prêteur romain a attaché à certaines condamnations publiques un ensemble de conséquences juridiques automatiques qui sont des interdictions de droit privé (exemple : privation de la dignité de paters familias) mais ce sont aussi des incapacités de droit public (privation du droit d’agir en justice, d’être tuteur) qui sont regroupées sous le terme générique d’infamie. A côté de cette infamie classique, le droit du Bas Empire a expressément prévu une série de cas, de situations ou un condamné subit des déchéances : Par exemple, un condamné peut être déchu d’une dignité comme l’appartenance au Sénat ou pouvait être frappé également d’une interdiction professionnelle précise (avocats malhonnêtes renvoyés de leur ordre par exemple). En droit postclassique, l’infamie sera même parfois considérée comme une peine principale. On dit alors que le condamné est « noté d’infamie ».

  • &3 : Le choix des peines (arbitraire ou peines fixes ?)

Sous le Principat, les peines applicables par les juges impériaux (que l’on qualifie d’extraordinaires) n’étaient en général pas fixées avec précision par les textes d’incrimination, alors que les lois de l’ordo de l’époque républicaine prévoyaient en général des sanctions précises. Le prince fait confiance à ses délégués et dans ses décisions, il laisse toujours une marge de manœuvre, une marge d’appréciation à ces juges que l’on appelle l’arbitrium. Selon Ulpien, « Si aucune peine spéciale n’est imposée par les rescrits des princes, celui qui juge la cause détermine la sanction à son libre arbitre ». Il admet même que le juge impérial peut, dans le cadre d’une procédure extraordinaire, « prononcer la sentence qu’il veut, plus lourde ou plus légère, à condition que dans l’un ou l’autre sens il ne dépasse pas la mesure ». Parfois, le rescrit fixe seulement une peine maximale. Sous le dominat, l’évolution s’inverse car le pouvoir impérial se renforce. A partir de Constantin, les peines fixes se multiplient et le Code Théodosien de 438 ne mentionne pratiquement pas l’arbitrium du juge. L’empereur est devenu le seul maitre de la peine, en effet, lui seul peut la moduler.

  • &4 : La grâce

A l’époque Républicaine, le droit d’interrompre une poursuite (abolitio) ou de dispenser un condamné de l’exécution de sa peine (venia) appartenait aux comices (assemblées populaires). Au IIème siècle après JC (le Principat) le droit de gracier revient à l’empereur notamment parce que les comices ne sont plus réunis mais aussi car le pouvoir de dispenser de la peine est lié à celui de l’édicter. Cette idée se renforce sous le Bas Empire notamment parce que l’empereur chrétien réunit deux attributs divins : la justice et la miséricorde. Les jurisconsultes rattachent la grâce à l’équité car selon eux, elle permet d’écarter la stricte application du droit au nom d’un principe supérieur afin d’attendre la solution la plus juste. Le droit romain ne distingue pas entre l’amnistie et la grâce. La grâce entraine une véritable restitutio in integrum c’est-à-dire que le gracié recouvre intégralement tout ce qu’il a perdu, de manière rétroactive.