la seconde république (1848-1851)

Le moment démocratique : l’avènement de la seconde république (1848-1851)

Comme en 1830, tout commence en 1848 par une mini révolution. Mais les promesses enthousiastes du printemps 1848 et l’espoir d’une République démocratique sociale et militante, vont laisser la place au réalisme et au désenchantement de la République conservatrice qui conduira, avec le retour du suffrage universel, à un coup d’E.

& 1. Le printemps révolutionnaire : l’espoir d’une République sociale, démocratique et militante

La Révolution de 1848 surpris autant le gouvernement qui tomba sans même lutter, que les républicains les plus décidés qui ne s’attendaient pas à une victoire si soudaine et si facile.

Les circonstances historiques dans lesquelles éclatent la révolution de 1848 (crise morale avec corruption suffrage, crise politique, crise éco et sociales) ne sont pas sans rappeler la révolution de 1830.

C’est un banquet initialement prévu à Paris le 22.02.1848 qui est annulé. Il est alors remplacé par une manifestation de protestat°. Le lendemain, le roi mobilise la garde nationale. Comme souvent dans les manifs, un climat insurrectionnel s’installe dans la capitale. La chambre des députés est envahie. Le soir même, Guizot démissionne. Mais il est déjà trop tard. Un affrontement sanglant entre les manifestants et les troupes royales vont transformer l’insurrection en révolution.

Louis Philippe abdique et s’enfuit en Angleterre. Un gouvernement provisoire regroupant un très large éventail au niv politique est mis en place. On va trouver des républicains modérés comme Alphonse de LAMARTINE, ARAGO, CREMIEUX, MARRAST, ils sont majoritaires, des « démoc-socs » dont LEDRU-ROLLIN, un socialiste radical : Louis BLANC, et enfin, un représentant de la classe ouvrier : « l’ouvrier Albert » (Alexandre MARTIN). Ils forment ce gouvernement provisoire. On proclame la République et c’est là qu’apparait en tant que telle la devise « liberté, égalité, fraternité ».

Les républicains modérés veulent surtout promouvoir les réformes politique que Guizot avait refusé. Elles sont rapidement mise en œuvre : suffrage universel masculin, liberté publique (liberté de presse de réunion), abolition de la peine de mort en mat politique, abolition de l’esclavage.

Les démoc-socs, les sociaux radicaux et « Albert » veulent aller beaucoup plus loin dans les réformes : ils veulent des réformes sociales, le droit au w, la limitation de sa durée et sa conséquence : la création des ateliers nationaux.

Ces réformes sociales sont adoptées entre la fin février et la mi mars dans un enthousiasme républicain, une euphorie, caractéristique de cette génération romantique et du socialisme qui rejette l’individualisme libéral et la modernité capitaliste.

Mais, alors que la situation éco s’assombrit, avec notamment la persistance du chômage, l’extrême gauche, avec BLANQUI, pratique la surenchère en mat sociale alors que se profile l’échéance des élect° au suffrage universel qui inquiète les modérés.

Un décret du 5 mars 1848 a repris les conditions établies en 1792-1793, phase radicale de la révolution : l’âge de la majo électorale est abaissé à 21, l’éligibilité à 25 ans, le corps élect porté à 9 millions d’électeurs et le vote secret est établi.

Les républicains commencent à craindre cette élection au SU et vont obtenir son report temporaire. Ledru Rollin en appelle au vote pour les républicains de la veille (ceux qui sous la monarchie de juillet se battaient pour l’instauration de la Rép).

Leur hantise s’avère fondée car le verdict du Suff univ est une cruelle désillusion. Les élections du 23 avril consacrent la défaite des « hommes de la veille » qui n’obtiennent que 200 sièges contre 400 aux républicains modérés, tandis que les royalistes déguisés en répu du lendemain font un retour avec 300 députés .

La peur du nombre, des classes laborieuses, a abouti à une condamnation claire du radicalisme parisien par le SU. On en tire deux enseignements :

1- le SU se révèle conservateur,

2- une révolution parisienne peut être remise en cause par la Province.

On verra que ce SU va aboutir à la naissance d’une République conservatrice.

& 2. La république conservatrice et l’établissement de la Constitution du 4 nov. 1848

  • A) le désenchantement : la naissance sanglante de la République conservatrice

Officiellement proclamée le 4 mai 1848, la République commence à travailler sur la forme des institutions. Une commission de constitution est désignée, majoritairement composée de modérés. Cepandant, la gauche radicale, sonnée par le verdict du SU, reprend des couleurs en portant la contestation dans la rue. On retrouve au printemps 1848 comme un écho de la division révolutionnaire entre girondins et jacobins.

Les nouveaux girondins, avec à leur tête LAMARTINE, tiennent les rennes du pouvoir et de l’assemblée, tandis que les nouveaux jacobins s’expriment sur le terrain social et dans la rue. Les souvenirs de la 1er République hantent les méditations sur la seconde.

Le jacobinisme social est un facteur de l’explosion de juin 1848. La cause des journées de juin réside dans la dissolution brutale des ateliers nationaux le 21.06.1848, qui apportaient subsistance à près de 100 000 chômeurs. Ils sont dissous sous le motif qu’ils constituent des foyers d’agitations.

Le 23 juin Paris se couvre de barricades, on entend « du pain ou du plomb, la liberté ou la mort ». C’est la seconde alternative que choisissent les députés, forts de leur légitimité conférée au Suffrage Universel. Ces députés vont investir le général CAVAIGNAC, ministre de la guerre, des pleins pouvoirs. Le lendemain, le 24.06.1848, Paris est agité par de violents combats mais la province, à l’exception de Marseille, ne réagit pas. Le général Cavaignac décide de mater la révolte et donne l’ordre à la garde nationale de tirer sur les insurgés. Le 26.06 les dernières barricades tombent : 4500 blessés ou tués parmi les insurgés dont 1500 exécutions. 4000 condamnés à la déportation en Algérie. « L’ordre a triomphé de l’anarchie, vive la République » dira Cavaignac, symbolisant ainsi la fin du rêve romantique.

  • B) la Constitution du 04.11.1848 ou les paris constitutionnels risqués des constituants

La Constitution de la 2nde République procède à une synthèse risquée entre différentes traditions constitutionnelles : les traditions révolutionnaire, parlementaire et plébiscitaire.

1) l’héritage révolutionnaire

La Constitution de 1848 emprunte à la trad. révolution celle de 1789 et 1793. Inspirée par les valeurs de l’antiquité, les constituants demeurent persuadés qu’il ne peut y avoir de vrai République sans vertue. De ce fait il s’agit de faire parvenir les citoyens à un degré tjrs plus élevé de moralité, de lumière et de bien être.

Le droit au travail et l’idée d’une déclaration des devoirs sociaux sont évoqués mais très vite abandonnés, ce qui oriente l’œuvre constitutionnelle dans un sens conservateur.

La République a pour principe la liberté, égalité et fraternité, elle a pour base la famille, le travail, la proprio, et l’ordre public. La République doit assurer au citoyen la protection, l’instruction et procurer aux nécessiteux du w dans les limites de ses ressources. La notion de fraternité occupe une place essentielle puisque tous les citoyens sont appelés à concourir au bien commun en s’aidant fraternellement les uns les autres.

Les principes libéraux ne st pas oubliés, avec la réaffirmation du droit de proprio. Du point de vu constitutionnel, l’héritage révolutionnaire se laisse clairement percevoir à travers la définition de la souveraineté : « la souveraineté réside dans l’universalité des citoyens français, elle est inaliénable et imprescriptible, aucun individu ni aucune fraction du peuple ne peut s’en attribuer l’exercice ».

On retrouve dans ce texte la méfiance viscérale des révolutionnaires français envers le pouvoir exécutif. Les constituants vont vouloir subordonner l’exécutif tout en conférant à son chef, le PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE, élu au SU masculin, une légitimité démocratique incontestable. La question du mode d’élection du PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE va faire débat mais c’est LAMARTINE qui va triompher. Le PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE sera élu au SU. Si les constituants se rangent à sa solution, c’est parce qu’ils estiment avoir fait le nécessaire pour éviter toute dérive du PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE vers un pouvoir personnel.

En effet le PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE est élu pour 4 ans comme son homologue américain. Il doit être né français, et âgé de 30 ans minimum et il ne peut être réélu de suite pour un 2nd mandat. Avant son entrée en fonction, le PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE doit prêter un serment devant l’AN, Dieu et le peuple français, de rester fidèle à la République démocratique, une et indivisible. La Constitution consacre son impuissance en mat législative même s’il peut faire présenter des projets de loi par ses ministres.

Il y a un net déséquilibre en faveur de l’assemblée en mat légis. Il existe un CE, auxiliaire du législatif, chargé d’examiner les projets de lois issus du gouvernement. Dans la sphère exécutive le PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE est également en dépendance du CE, qui prépare les règlements d’administration générale. Le PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE nomme et révoque les ministres, mais la révocation des autres agents de l’exécutif et l’exo du droit de grâce, sont soumis au contrôle du CE.

Enfin, le PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE dispose de la force armée, sans jamais pouvoir la commander en personne. Il ne peut ni dissoudre ni proroger l’AN. (=rallonger=proroger). Toute tentative serait considérer comme un crime de haute trahison et il serait déchu de toute ses fonctions, le pouvoir exécutif passant de plein droit à l’AN.

2) la trad. Parlementaire

Tout parlementarisme n’est pas exclu de cette Constitution de 1848. En effet, depuis 1815, le régime parlementaire a commencé à s’acclimater à la France. La 2ème République recueille une partie de l’héritage parlementariste : le ministre a un droit de parole devant l’assemblée nationale et le PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE peut présenter des projets de loi.

Cependant la Constitution de 48 consacre un retour en arrière en mat de parlementarisme. C’est une assemblée unique composée de 750 députés élus pour 3 ans au SUD. Avec le retour de la trad. révolutionnaire de 1791 et 1793, ce pouvoir légis latifunitaire est assez fort pour le cas échéant prendre les rennes du pays en cas de crise. Cette assemblée vote seule la loi mais ne dispose d’aucun moyen pour engager la responsabilité politique des ministres. De son côté le PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE ne dispose d’aucun droit de dissolution ou de véto. C’est le CE qui sert de « sous pape » entre l’exécutif et le législatif, tout deux issus du suffrage universel.

Il n’y a pas d’irresponsabilité politique prévue. Cette Constitution rend le PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE responsable à l’égal de ses ministres de tous les actes du gouvernement et de l’administration. La responsabilité politique des ministres n’est plus le corolaire de l’irresponsabilité du monarque ou même le complément du droit de dissolution.

Ainsi on pensait avoir éloigné tout risque de dérive Présidentiel vers un pouvoir personnel. C’était négliger le fait que cette responsabilité du PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE, loin de diminuer son autorité, pouvait lui permettre de la renforcer et c’était sous estimer la dimension plébiscitaire du suffrage universel.

Le décret du 28.10.1848 vient confirmer l’élection du PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE au SU et fixe celle-ci au 10.12.1848.

  • C) l’amère ironie du suffrage universel : « le crétin » président

Alors que la France va élire pour la 1ère fois son PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE au SU, les républicains apparaissent très divisés sur le candidat à présenter :

– Lamartine, républicain modéré, Ledru Rollin républicain avancé, Cavaignac républicain d’autorité et Raspail républicain socialiste.

L’opposition conservatrice est fédérée par la peur d’une République rouge. Regroupée derrière Thiers, elle choisit un outsider en la personne de Charles Louis Napoléon Bonaparte, (neveu de napoléon 1er). Ce dernier est un activiste politique. Il a été emprisonné, s’est échappé déguisé en maçon et Thiers, persuadé que le nom de napoléon pourra servir la cause de son parti, commet la même erreur que Sieyès. Sur plus de 7 millions de votant, Lamartine prônant le SU obtient 18 000 voix, Raspail 36000, Ledru Rollin 370000, Cavaignac 1,5 million, et Louis Napoléon Bonaparte 75 % des suff exprimés, plus de 5 million de voix.

Les républicains rouges ont été désavoués par leur propre électorat.

Le 13.05.1849, les résultats de l’élection législative (40 % d’abstention) confirment la défaite des républicains et le grand retour des monarchistes. Plus de 450 monarchistes élus, fruit de l’association réussie des orléanistes et des légitimistes contre la république.

Les républicains modérés ont 70 sièges et Lamartine n’est même pas élu. Les démoc soc, n’obtiennent que 180 sièges. Cette situation inédite ne vas pas tarder à entrainer une paralysie du système et un affrontement entre le PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE et l’assemblée se fait jour, rendant inéluctable le recours au coup d’E.

& 3. La paralysie du système et l’inéluctable coup d’Etat

Ce coup d’Etats s’explique car il est la seule voie de sortie de la solution aberrante qu’a produit le SU qui voit un PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE en apparence républicain s’opposer à une assemblée monarchiste bien décidée à orchestrer le retour de la monarchie.

Le 31.10.1849, Louis Napoléon s’adresse au Prés de l’assemblée qu’il juge trop rétive « pour raffermir la République tant menacée, pour assurer l’ordre, pour maintenir à l’extérieur le nom de la France, il faut des hommes animés d’un dévouement patriotique comprenant la nécessité d’une direction unique et ferme et d’une politique nettement formulée ».

Le jour de ce discours, il rompt avec toute tradition parlementaire et renvoi le prés du Cl Barrot. Il fait disparaitre le titre de Prés du cl et annonce que les ministres ne sont plus que les commis du PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE et que celui-ci a seul la responsabilité de l’exécutif et du gouvernement de la France.

Dès lors les tensions entre l’assemblée et le PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE s’aggravent et après l’échec d’une tentative de Révolution de la Constitution au printemps 1851, devant permettre sa réélection immédiate, Louis Napoléon va habilement manœuvrer pour couper l’assemblée du reste du pays en s’attirant les sympathies des républicains. Il demande notamment à l’assemblée monarchiste, qui a en 1850 adoptée toute une série de loi anti républicaine qui restreignent la liberté de la presse et de l’enseignement, d’abroger la loi électorale du 31.05.1850 qui porte atteinte au SUD et donc à la souveraineté du peuple.

L’assemblée refuse d’abroger cette loi. Le 02.12.1851, Louis Napoléon décide d’en finir avec elle. Par 4 décrets, il dissout l’AN, rétablit le SUD, convoque les électeurs à se prononcer sur son maintien au pouvoir pendant les 10 prochaines années comme PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE avec pouvoir constituant. Le plébiscite passe largement. L’histoire se répète, on rejoue le 18 brumaire et comme il l’avouait plus tôt, le nom de napoléon est à lui seul un programme : à l’intérieur, ordre, autorité, religion, bien être du peuple, à l’extérieur, dignité nationale.