Sécurité sociale : qu’est-ce que la sécurité sociale ?

La Sécurité sociale

Comme de nombreux pays européens, la France a choisi en 1945 de construire un système de sécurité sociale dont l’objectif est de couvrir l’ensemble de sa population, au travers d’une affiliation obligatoire qui s’impose à la fois aux employeurs, aux salariés et aux travailleurs indépendants.

Cette volonté est inscrite dans l’exposé des motifs de l’ordonnance du 4 octobre 1945 : « La sécurité sociale appelle l’aménagement d’une vaste organisation nationale d’entraide obligatoire qui ne peut atteindre sa pleine efficacité que si elle présente un caractère de très grande généralité à la fois quant aux personnes qu’elle englobe et quant aux risques qu’elle couvre ».

La sécurité sociale est divisée par le gouvernement français en quatre branches : maladie, vieillesse/retraite, famille, accident du travail et maladie professionnelle. D’un point de vue institutionnel, la sécurité sociale française est composée de divers organismes. Le système est divisé en trois grands régimes : le régime général, le régime agricole et le régime des travailleurs indépendants. En outre, il existe de nombreux régimes spéciaux antérieurs à la création du système étatique au milieu et à la fin des années 1940.

Le régime général obligatoire couvre les salariés des secteurs privés de l’industrie, du commerce et des services. A partir de 2018, son champ d’application a été étendu aux travailleurs indépendants et aux professions libérales (pour l’assurance maladie).

Il est organisé en cinq branches :

  • la branche santé, maternité, paternité, invalidité et décès et
  • la branche accidents du travail et maladies professionnelles, qui sont gérées séparément par la Caisse Nationale d’Assurance Maladie
  • la branche vieillesse, gérée par la Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse (CNAV),
  • la branche famille, gérée par la Caisse Nationale d’Allocations Familiales (CNAF)
  • la branche cotisations et recouvrement, gérée par l’Agence Centrale des Organismes de Sécurité Sociale (ACOSS), qui regroupe les Unions de Recouvrement de Cotisations de Sécurité Sociale et d’Allocations Familiales (URSSAF) qui sont chargées du recouvrement de l’ensemble des cotisations patronales.

sécurité sociale définition

  • A/ La Sécurité Sociale en elle-même.
  • B/ Sécurité sociale et protection sociale.
  • 1. Distinction entre Sécurité sociale organisation et l’aide et l’action sociale.
  • 2. Distinction entre Sécurité sociale et indemnisation du chômage.
  • 3. Confrontation entre la Sécurité Sociale organisation et la protection sociale complémentaire.

A) définition de la sécurité Sociale

Tout le monde croit savoir ce qu’est la Sécurité Sociale et pourtant, c’est une notion très complexe qui peut désigner 2 réalités tout à fait différentes selon le sens qu’on lui donne, et selon l’orthographe qu’on lui donne. En effet il y a 2 orthographes possibles (« sécurité sociale » et « Sécurité sociale).

La « sécurité sociale » sans majuscule.

La sécurité sociale désigne ce que l’on peut appeler un « objectif social » ou un « but social », ou encore une sorte « d’idéal collectif » ou de « valeur social » → C’est donc un «horizon social». Dans ce sens, la sécurité sociale représente ce que l’on souhaite garantir à tous les résidents d’un pays.

Pierre Laroque, créateur du système de sécurité sociale en 1945 : « avec la sécurité sociale, nous voulons assurer à tous et spécialement aux travailleurs, la sécurité du lendemain« .

Cette vision dépasse donc le système de Sécurité Sociale proprement dit.

Exemple : cette sécurité du lendemain suppose par exemple, non seulement un système de Sécu, mais aussi une protection contre les licenciements abusifs. Parce que s’il n’y a pas cette protection, il est clair qu’il n’y a pas de sécurité du lendemain. De la même façon cette sécurité du lendemain suppose qu’il y ait un système de soin et hospitalier efficace, sinon il n’y a pas de sécurité du lendemain.

On voit donc que cette notion, ainsi entendue, dépasse de beaucoup le système de Sécurité sociale proprement dit.

C’est donc elle qui explique la création des systèmes de Sécurité Sociale.

La Sécurité sociale avec un S majuscule.

On désigne l’organisation cohérente, systématique, qui permet dans une certaine mesure, de se rapprocher de cet objectif, parce qu’il n’y a pas de sécurité sociale au premier sens du terme sans une organisation de la Sécurité sociale.

Parce que dans ce sens, la Sécurité Sociale est fondamentalement une organisation (cotisations, organisation qui versent des prestations).

Article L 111-1 alinéa 1 Code de Sécurité Sociale → «L’organisation de la Sécurité Sociale est fondée sur le principe de solidarité nationale.» La sécurité sociale est donc une organisation, et celle-ci fonctionne sur le principe de solidarité nationale.

Il y a donc deux définitions qui ne sont pas sur le même plan :

–>«la sécurité sociale horizon»: c’est a dire au fond, l’idéal que représente la Sécurité Sociale et ce à quoi on voudrait parvenir (sécurité pour tous).

–>Et la «Sécurité sociale organisation», c’est a dire l’organisation concrète et effective, qui dans un pays, a été mise en œuvre et fonctionne pour, dans une certaine mesure, essayer d’atteindre cet objectif général.

A propos de l’organisation on peut se poser la question à nouveau, entre le droit du travail et celui de la Sécurité Sociale.

Il est clair que le droit de la Sécurité Sociale est fondamentalement le droit d’une organisation. En revanche le droit du travail n’est pas fondamentalement le droit d’une organisation.

Par exemple il n’y a pas plus d’organisation dans le contrat individuel de travail que dans n’importe quel autre contrat spécial.

En revanche, pour ce qui est des rapports collectifs du travail et notamment de la représentation du personnel, de l’entreprise, ou de l’action syndicale, là, il y a quelque chose qui effectivement ressemble à une organisation. Il y a par exemple des instances de représentation du personnel, et des syndicats qui sont des organismes aussi.

B/ Sécurité sociale et protection sociale.

Dans le langage courant et même dans le langage académique, les expressions Sécurité Sociale et protection sociale, sont, au moins en apparence, absolument interchangeables. Ce sont quasiment de pures et simples synonymes.

L’expression de « protection sociale » qui vient originairement du droit européen, est plus large que la « Sécurité sociale organisation » et sans aucun doute moins large que la « sécurité sociale horizon ».

La protection sociale est plus large que la Sécurité Sociale organisation → car intègre la Sécurité Sociale organisation qui prend l’appellation de système de Sécu, ainsi que d’autres composantes, qui sont au nombre de 3 :

  • l’aide et l’action sociale
  • l’indemnisation du chômage
  • la protection sociale complémentaire.
  1. Distinction entre Sécurité sociale organisation et l’aide et l’action sociale.

Cette distinction repose sur l’idée que les prestations de Sécurité Sociale sont des prestations contributives. Cela signifie qu’elles sont financées, en tout ou en partie, par les assurés sociaux eux-mêmes, sous forme de cotisations assises sur leurs revenus professionnels.

ASSURANCE CONTRIBUTIVE.

Au contraire les prestations d’aide sociale, et l’aide sociale, ne sont pas financées par leurs bénéficiaires, parce que, par hypothèse, ils ne pourraient pas les financer, puisque ces prestations d’aide et d’action sociale permettent de répondre aux besoins fondamentaux d’une personne, quand cette personne n’a pas les revenus professionnels pour satisfaire ces besoins. Elles sont donc fondamentalement des prestations non contributives

ASSISTANCE NON CONTRIBUTIVE.

S’agissant de l’assurance, en Sécu, ce n’est pas n’importe quelle assurance. C’est ce qu’on appelle l’assurance sociale, c’est-à-dire une assurance qui est organisée dans un esprit de solidarité. Par exemple, les assurés sociaux contribuent au financement des prestations de Sécurité Sociale en fonction de leurs revenus, et non en fonction de leurs risques.

Quant à l’assistance, c’est aussi aujourd’hui, un droit de citoyenneté. Le citoyen qui ne peut pas travailler, a droit en fonction de textes constitutionnels, notamment dans le préambule de 1946, à des moyens convenables d’existence de la part de l’État.

Pour éviter cette opposition excessive, on peut aussi se référer au sens de la sécurité sociale horizon. Si on veut vraiment garantir à tous la sécurité du lendemain, il faut naturellement verser des prestations de Sécurité Sociale à ceux qui les finance, mais il faut aussi venir au secours de ceux qui sont dans l’indigence par des prestations non contributives.

  1. Distinction entre Sécurité sociale et indemnisation du chômage.

L’indemnisation du chômage ne fait pas partie en France, du système de Sécurité sociale. Il y a bien en France depuis 1968 une indemnisation du chômage assez favorable d’ailleurs, mais elle est organisée à l’extérieur du système de Sécurité sociale, autrement que dans le cadre de la Sécurité sociale. Elle fait donc partie de la protection sociale.

Cette situation ne se retrouve pas dans tous les pays. Et dans un certain nombre de pays voisins, comme la Belgique, l’indemnisation du chômage fait partie de la Sécurité sociale. D’ailleurs, aucunes raisons techniques, ne s’oppose à l’intégration de l’indemnisation du chômage dans le système de Sécurité sociale. Cette indemnisation est en effet financée par des cotisations calculées en fonction du salarie (comme les cotisations de la Sécurité sociale), et elle est servie sous forme de prestation en espèce, d’indemnité journalière, qui ressemblent en tout point, aux prestations de Sécurité sociale. Donc rien ne s’opposerait techniquement à ce que l’indemnisation du chômage fasse partie du système de Sécurité sociale.

Pourquoi n’est-ce pas le cas en France ?

Il y a des raisons politiques, et peut-être une raison plus philosophique.

La raison politique au sens large, est que l’indemnisation du chômage n’a été organisée en France que tardivement. Elle a été mise en œuvre à la suite d’un accord par les partenaires sociaux du 31 décembre 1958.

La raison est sans aucun doute que la France s’est industrialisée plus lentement que les pays voisins (RU et Allemagne). La France est restée beaucoup plus longtemps un pays à majorité rurale, puisque jusqu’au début des années 1930’s, la population vivant dans les campagnes était majoritaire en France. Alors qu’aujourd’hui il ne s’agit que de 7% de la population globale.

Or dans une société de type rurale, il n’y a pas banalisation du chômage, dans la mesure où le chômage est surtout un risque industriel. Du reste les chômeurs sont souvent considérés comme des paresseux. Le chômage n’est pas du tout perçu comme un risque social dans les sociétés traditionnels.

Dans les années 1945 (libération), le chômage n’est pas un véritable problème, car la France est en pleine reconstruction après la IIGM, et donc le taux de chômage est peu élevé.

Les choses changent en 1958 pour plusieurs raisons. La France devient d’abord un pays industriel, et à majorité urbaine. De plus l’ouverture des frontières européenne à la suite du Traité de Rome de 1957 (CEE), fait prendre conscience qu’il y a désormais un risque de chômage. Cette ouverture des frontière va introduire une concurrence qui peut être dangereuse pour des entreprises mal équipées, et fragiles.

Évidemment les pouvoirs publics ont insisté auprès des partenaires sociaux pour qu’ils mettent en place une indemnisation du chômage ce qui sera fait en 1958.

Mais cela est trop tard pour que ce soit intégré dans le système de Sécurité Sociale (mis en place en 1945). C’est trop tard parce que le patronat s’est ressaisi. En 1945, le patronat n’avait pas le poids pour s’opposer au système de Sécurité Sociale avec des caisses gérées par des Conseil d’administration dans lesquels les représentants des salariés sont majoritaires.

Mais en 1958 il reprend de la force, et veut des organismes pour lesquels les représentants des employeurs soient en nombre égal à ceux des employés. Il considère que cette représentation majoritaire des salariés a conduit au déficit de la Sécurité Sociale. A partir de là il arrive à imposer à la création d’une organisation propre à l’indemnisation du chômage dont les Conseil d’administration sont gérés selon un strict paritarisme salarié / patronat.

La raison plus philosophique tient au fait que du point de vue de la théorie générale de la Sécu, et de la protection sociale, l’indemnisation du chômage ne ressemble pas à la couverture des autres risques sociaux. Et cela pour au moins 2 raisons.

Raison 1: Le chômage ne ressemble pas dans sa nature même aux autres risques sociaux, comme la maladie, les accidents, la maternité, l’invalidité, la vieillesse, et le veuvage.

Ces risques sociaux touchent la personne en son physique. Alors qu’avec le chômage, c’est la situation économique et l’emploi de l’assuré qui est en cause.

D’ailleurs le chômage n’est pas un risque comme la maladie et l’accident qui sont aléatoires, mais c’est une situation. Dans le chômage, l’événement est antérieur au chômage. Par exemple le salarié est licencié et ne retrouve pas de travaille. Le chômage est la situation qui résulte de la combinaison de l’événement du licenciement et de l’impossibilité de retrouver un emploi.

Raison 2 : Aujourd’hui dans l’indemnisation du chômage il y a à la fois des prestations contributives et des prestations non contributives.

Les prestations contributives concernent l’assurance chômage, qui est financée par des cotisations patronales et salarialeset qui consiste en des prestations versées selon une durée déterminée par la durée des cotisations.

Les prestations non contributives sont versées à des chômeurs, soit qui n’ont pas cotisés du tout, soit qui n’ont pas assez cotisés, soit qui sont en chômage depuis trop longtemps pour bénéficier encore de prestations assurantielles.

La raison politique reste la raison essentielle.

Les dispositions légales touchant l’indemnisation du chômage ne sont pas dans le Code de la Sécu, mais dans le Code du Travail.

  1. Confrontation entre la Sécurité Sociale organisation et la protection sociale complémentaire.

Il est extrêmement rare que les prestations de Sécurité Sociale (versés par les organismes de Sécu) couvrent l’intégralité des conséquences économiques des risques ou des charges garanties.

Exemple 1 : L’assurance maladie

L’assurance maladie peut verser aussi bien des prestations en nature (remboursement des dépenses de santé ou leur prise en charge) que des prestations en espèce (la compensation des salaires perdus du fait de l’arrêt de travail causé par la maladie ou l’accident).

S’agissant des prestations en nature, le principe est que sauf exception, elles ne couvrent pas l’intégralité de la dépense de santé (environ 70%). Un certain pourcentage reste à la charge de l’assuré (on l’appelle «ticket modérateur »). La raison de ce ticket modérateur est le soucis de responsabiliser les assurés sociaux (ne pas aller voir sans arrêts voir les médecins sans raison) et équilibrer les dépenses de la Sécurité Sociale.

Quant aux prestations en espèce, elles ne compensent que de façon partielle (aux alentours de 50% seulement et encore dans la limite d’un plafond qui ne correspond pas forcément au salaire perçu).

Par conséquent, pour être mieux rembourser, il faut cotiser auprès d’une mutuelle ou d’une compagnie d’assurance, qui en contrepartie remboursera tout ou partie du ticket modérateur.

Exemple 2 : L’assurance vieillesse :

La pension de retraite (financée par cotisations patronales et salariales) est au maximum de 50% du salaire moyen d’activité, et là aussi dans la limite d’un plafond mensuel (3000e) qui ne correspond pas aux salaires élevés.

Par conséquent s’il n’existait que les pensions de retraite de la Sécu, il y aurait baisse significative de leur niveau de vie.

Il fallait donc les laisser payer des cotisations complémentaire auprès d’organismes complémentaires, pour bénéficier de retraites complémentaire pour s’ajouter à celle de base de la Sécurité Sociale.

Comment ce fait-il que la Sécurité Sociale ne puisse pas tout payer ? Les raisons sont financières.

La protection complémentaire prend une place grandissante à la mesure des difficultés financières de la Sécurité Sociale. Car l’État veut toujours réduire la couverture de base de la Sécurité Sociale pour maîtriser les déficit de celle-ci en disant qu’il n’y a qu’à faire appel aux complémentaires.

Exemple 3: La Cour des Comptes dans ses derniers rapports sur les comptes de la Sécurité Sociale : fait aux alentours de 80 propositions de réformes.

Parmi elles, l’une parle du remboursement des lunettes par la Sécurité Sociale (qui rembourse mal l’optique). La proposition serait de dire autant que la Sécurité Sociale arrête les remboursement, puisque celui-ci est déjà dérisoire. Et que donc il ne faut aller qu’à la protection complémentaire (mutuelle).

La protection sociale complémentaire, surtout pour les salariés, et la protection sociale des entreprises est à l’intersection du droit du travail et du droit de la Sécurité Sociale.

Concernant la sécurité sociale horizon :

Celle-ci est naturellement plus large que la protection sociale. D’abord par la sécurité de l’avenir qui pose également d’autres problèmes que ceux concernés par la protection sociale, comme les problèmes de logement, d’environnement, des problèmes d’hygiène publique. Et ensuite, la protection sociale reste quand même très organisationnelle dans sa présentation. Donc de ce point de vue la protection sociale est plus proche de la sécurité sociale organisation qu’elle englobe et dépasse, que de la sécurité sociale horizon dont elle est un moyen de s’approcher le plus possible.