L’EXÉCUTION DE LA SANCTION PÉNALE
Le juge prononce la peine de son choix mais seulement dans le cadre de la peine encourue. Il peut prononcer la totalité des peines encourues ou prononcer une seule peine. Il ne peut pas dépasser le maximum prévu par le texte mais il peut l’abaisser jusqu’au minimum d’existence de la peine. Cette faculté est discrétionnaire : le juge n’a pas à motiver sa décision.
Le juge peut même décider d’accorder une dispense de peine ou d’ajourner son prononcé en matière correctionnelle ou contraventionnelle (article 132-58 du Code pénal.) malgré la déclaration de culpabilité de la personne. Trois conditions pour la dispense de peine doivent être réunies : le reclassement du coupable doit être acquis, le dommage réparé et le trouble résultant de l’infraction doit avoir cessé. Pour l’ajournement, ces trois conditions doivent être en voie d’être réunies. La décision d’accorder une dispense ou un ajournement de la peine relève du pouvoir discrétionnaire du juge.
Le juge peut aussi assortir l’exécution de la décision d’un sursis (Section 1) ou prévoir que l’exécution de la peine s’effectuera selon certaines modalités (Section 2).
Section I : Le sursis à l’exécution de la peine
Le juge peut décider qu’il sera sursis à l’exécution de la peine. Il le fera en fonction de l’infraction commise et selon le passé pénal du délinquant. Le juge doit avertir l’intéressé des effets de la mesure dont il bénéficie. Le sursis, sauf révocation avant terme, rendra la condamnation non avenue (article 132-
29 du Code Pénal.). Trois sortes de sursis existent : le sursis simple (§1) et le sursis avec mise à l’épreuve (§2)
et le sursis assorti de l’obligation d’accomplir un travail d’intérêt général (§3).
- 1 : Le sursis simple
Le sursis peut s’appliquer totalement ou partiellement à la peine prononcée. (article 131-31 et 131-39 du Code Pénal)
Deux conditions doivent être réunies pour prononcer le sursis :
– concernant le passé pénal du délinquant : il ne doit pas avoir été condamné au cours des 5 ans précédant les faits à une peine d’emprisonnement ou de réclusion pour crime ou délit de droit commun (article 132-30 et 132-33 du Code Pénal) ;
– concernant la peine à assortir du sursis : l’emprisonnement jusqu’à 5 ans, la peine d’amende, la peine de jour-amende, certaines peines restrictives ou privatives de droit de l’article 131-6 et certaines peines complémentaires. Les peines de réclusion criminelle ne peuvent être assorties du sursis. Peu importe en revanche l’infraction commise. Le sursis peut assortir une peine d’emprisonnement prononcée pour un crime.
Si le condamné ne commet pas d’autres infractions dans le délai de 5 ans (2 ans pour les contraventions), il n’exécutera jamais sa peine.
Si le condamné récidive, le sursis sera révoqué et s’ajoutera à la deuxième peine. Par décision spéciale et motivée, le tribunal pourra dispenser l’auteur de la révocation totale ou partielle du ou des sursis antérieurs. Une peine d’emprisonnement avec sursis ne peut être révoquée que par une peine d’emprisonnement ferme.
- 2 : Le sursis avec mise à l’épreuve (ou sursis probation)
Concernant les conditions du sursis avec mise à l’épreuve :
– il peut être prononcé quel que soit le passé pénal du condamné.
– il ne peut être assorti qu’à une peine d’emprisonnement de 5 ans maximum.
Le condamné à un sursis avec mise à l’épreuve doit se soumettre à diverses obligations comme celle de travailler, de suivre une formation professionnelle, de rembourser la victime. (article 132-45 C. pén.) Les obligations peuvent faire l’objet d’une modification pendant la période de probation.
Il peut faire l’objet de mesures de surveillance et doit répondre aux convocations, recevoir les visites des délégués à la probation et justifier de ses revenus. Le suivi du sursitaire est assuré par le Comité de probation et d’assistance aux libérés (CPAL). Ce comité apporte également une aide matérielle et morale au condamné. Le CPAL agit sous le contrôle du juge de l’application des peines (J.A.P.).
Le délai de mise à l’épreuve est fixé par le tribunal entre 18 mois et 3 ans. (article 132-42 du Code Pénal)
Si le condamné se soumet aux obligations du sursis et ne récidive pas, sa peine sera considérée comme non avenue même s’il y a eu un emprisonnement partiel. Le tribunal peut admettre une cessation anticipée de la mise à l’épreuve. (article 743 C. produ Code Pénal)
Si le condamné récidive, le sursis sera révoqué partiellement ou totalement, ou le délai d’épreuve prolongé.
- 3 : Le sursis assorti de l’obligation d’accomplir un travail d’intérêt général
La juridiction peut, dans les conditions et selon les modalités prévues pour le sursis avec mise à l’épreuve, prévoir que le condamné accomplira, pour une durée de 40 à 240 heures, un travail d’intérêt général au profit d’une personne morale de droit public ou d’une association habilitée à mettre en œuvre des travaux d’intérêt général (article 132-54 C. pén.). Un examen médicalement devra être subi pour vérifier que le condamné n’est pas atteint d’une affection dangereuse pour les autres travailleurs et s’assurer qu’il est médicalement apte au travail auquel il est envisagé de l’affecter (article 132-5 2° du Code Pénal)
Le prononcé de ce type de sursis suppose, sinon l’accord du condamné, du moins sa non-opposition. Ce sursis assorti de l’obligation d’accomplir un travail d’intérêt général ne peut être prononcé que si le condamné est présent.
Le condamné doit également satisfaire aux mesures de contrôle qui sont ordonnées. (article 132-5 1°, 3°,
4° et 5° du Code Pénal)
Section II : Les modes d’exécution de la peine
Lors du prononcé, le juge peut aménager ses modes d’exécution (§1). Une fois prononcée, la peine peut, à nouveau connaître des aménagements destinés à préparer la réinsertion sociale du condamné
(§2).
- 1 : L’aménagement de la peine lors de son prononcé
Le juge peut personnaliser les peines. Il peut ainsi décider :
– que la peine d’emprisonnement prononcée sera exécutée sous le régime de la semi-liberté, à condition que la peine ne soit pas supérieure à 1 an et que le condamné puisse justifier d’une activité professionnelle ou de son assiduité à un enseignement ou une formation professionnelle, de sa participation essentielle à la vie de sa vie de famille ou de la nécessité de subir un traitement médical (article 132-25 du Code Pénal) ;
– que les peines d’emprisonnement d’une durée inférieure ou égale à un an, d’amende, de jours- amende ou de suspension de permis de conduire seront, pour des motifs grave d’ordre médical, professionnel ou social- exécutées par fraction (article 132-27 et 132-28 C. pén.) La juridiction peut étaler sur une durée de 3 ans l’exécution de la peine pour que celle-ci se morcelle.
Le juge peut aussi décider d’assortir toute peine privative de liberté d’une durée supérieure à 5 ans non assortie du sursis, quelle que soit l’infraction commise, d’une peine de sûreté (période pendant laquelle le condamné ne peut bénéficier des mesures du régime ouvert) dans la limite des deux tiers de la peine prononcée ou 22 ans en cas de condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité (article 132-23 du Code Pénal)
- 2 : L’aménagement de la peine en vue la réinsertion sociale du condamné
La matière a fait l’objet d’une récente réforme par la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d’innocence et les droits de la victime.
S’agissant de l’aménagement de la peine, les changements les plus importants tiennent à la
« juridictionnalisation » de l’application des peines dont la plupart sont applicables depuis le 1er
janvier 2001.
Il faut faire dorénavant une distinction entre les mesures juridictionnalisées et les autres.
1) Les mesures non juridictionnalisées
Ne sont pas juridictionnalisées, les mesures d’administration judiciaire qui concernent les réductions
de peines, les autorisations de sortie sous escorte et les permissions de sortir.
Elle relève de la compétence du juge de l’application des peines (JAP) détermine les modalités de traitement pénitentiaire de chaque condamné à une peine privative de liberté. Ce magistrat est assisté d’un comité de probation et d’assistance aux libérés (CPAL).
2) Les mesures juridictionnalisées
Sont juridictionnalisées, les mesures de placement à l’extérieur, de semi-liberté, de fractionnement et de suspension des peines et les libération conditionnelle.
Ces mesures de réinsertion sociale sont destinées à permettre le reclassement du détenu à sa sortie de prison. Elles peuvent bénéficier aux détenus qu’à l’issue de la période de sûreté, s’il en a été prononcé une.
Dorénavant, ces mesures devront être prises après un débat contradictoire tenu en chambre du conseil et au cours duquel le condamné pourra être assisté d’un avocat. Elles devront être motivées et seront susceptibles d’appel devant la Chambre des appels correctionnels (article L. 125 du Code pénal). L’appel du parquet, s’il est formé dans les 24 heures, suspendra l’exécution de la décision.
Ces mesures ont des finalités diverses :
– les réductions de peine : Elles sont accordées en fonction de la conduite du détenu, de sa réussite à des examens ;
– Les permissions de sortir : Elles sont utiles pour réadapter progressivement le détenu à sa future sortie ;
– Le placement à l’extérieur : Pendant la période de détention, certains condamnés peuvent travailler à l’extérieur sous la surveillance du personnel pénitentiaire ;
– La semi-liberté : Pendant la journée, le condamné travaille, suit un enseignement,
reçoit une formation professionnelle ou subit un traitement médical. Le soir, il retourne en prison et y passe la nuit. Le JAP peut révoquer la semi-liberté en cas de nouvelle infraction ou de mauvaise conduite du condamné ;
– Le libération conditionnelle : La mesure de libération conditionnelle suspend la peine
d’emprisonnement. Elle intervient lorsque le condamné a déjà exécuté une partie de sa peine. Cette mesure peut être prononcée par le JAP si la peine est inférieure ou égale à 10 ans, ainsi qu’aux peines dont la durée restant à subir est inférieur à 3 ans (depuis la loi du
15 juin 2000).
Dans les autres cas (peines criminelles de plus de 10 ans, sauf pendant les 3 dernières années), ont été instituées :
– des juridictions régionales de libération conditionnelle, compétente en premier ressort dans chaque cour d’appel
– une juridiction nationale de la libération conditionnelle, compétente en appel composée de conseillers à la Cour de cassation ;
– Le Ministre de la Justice a perdu toute prérogative en matière de liberté conditionnelle.
La libération conditionnelle est assortie d’un délai d’épreuve et d’obligations particulières. Elle peut être révoquée en cas de nouvelle infraction, d’inobservation des obligations ou inconduite.