La répartition des compétences entre ordre judiciaire et ordre administratif
En cas de difficulté ou de doute sur le point de savoir si une affaire relève de la compétence administrative ou de celle des tribunaux ordinaires, la question est résolue par le Tribunal des Conflits. Il s’agit d’une juridiction spécialement créée à cet effet, composée de cinq juges de la Cour de cassation (la plus haute juridiction civile) et de cinq juges du Conseil d’État. Le ministre de la justice, en sa qualité de garde des sceaux, peut parfois présider et départager les voix.
L’existence de 2 ordres juridictionnels compétents pour connaître des activités de l’administration amène nécessairement des conflits de compétence.
Pour régler et éviter ces conflits, un organe arbitral a été créé, il s’agit du tribunal des conflits et des procédures ont été institué.
§1. Le tribunal des conflits
Il a été institué par la loi du 24 mai 1872.
Il s’agit d’une juridiction qui a été organisé sur un type arbitral qui s’exprime dans sa structure paritaire qui consiste à assurer en son sein une représentation égalitaire du Conseil d’État et de la Cour de Cassation. Il comprend 4 conseillers dans le Conseil d’État et 4 dans la cour de cassation. Il est présidé par le ministre de la justice.
Cette présidence du garde des sceaux ne joue que d’une manière exceptionnelle, elle ne joue qu’en cas de partage des voies.
§2. Les jugements de conflits
On estime qu’il y a trois types de conflits.
A. Le conflit positif
Il y a un conflit non pas entre les 2 ordres juridictionnels mais d’un litige entre l’administration et le juge judiciaire.
C’est l’hypothèse dans laquelle un litige porté devant le juge judiciaire alors que l’autorité administrative (l’administration) soutient que ce litige ne relève pas de la compétence du juge judiciaire.
Le Tribunal des Conflits distingue entre faute personnelle (juge judiciaire) et faute professionnelle, de service.
C’est donc une procédure qui a pour objet de protéger l’administration contre les empiètements de l’autorité judiciaire. Et c’est une procédure assez complexe.
C’est le préfet de département où siège la juridiction judiciaire qui est saisi pour mettre en œuvre cette procédure.
Le préfet adresse au tribunal un déclinatoire de compétences dans lequel il précise les textes et les raisons, les motifs sur lesquels il se fonde pour lui dénier compétence.
La juridiction judiciaire est tenue de statuer sur sa compétence.
Elle peut soit se déclarer incompétente, elle peut aussi rejeter le déclinatoire de compétence. Mais dans ce cas, elle doit surseoir à statuer.
Le préfet peut alors soit abandonner soit persévérer et élever le conflit en prenant un arrêté de conflit. Et ceci oblige le juge judiciaire à surseoir à statuer jusqu’à ce que le tribunal des conflits se prononce sur l’ordre juridictionnel compétent. Le tribunal des conflits a un délai de 3 mois pour statuer. Il faut préciser que le tribunal des conflits ne se prononce pas sur le fond de l’affaire mais uniquement sur l’ordre juridictionnel compétent.
B.Le conflit négatif
Le conflit négatif a une signification totalement différente du conflit positif. Il vise à protéger le justiciable contre un risque de déni de justice et non pas à protéger l’administration. Le conflit négatif concerne l’hypothèse dans laquelle aucun ordre juridictionnel ne s’estime compétent. Chaque juridiction estimant que le litige relève de l’autre ordre juridictionnel.
Dans ce cas, c’est au justiciable de saisir le tribunal des conflits.
Il faut dire que c’est une situation rarissime du fait des procédures de prévention qui ont été instituées par un décret du 25 juillet 1960.
Ce décret a mis en place 2 procédures de prévention.
–La procédure dite du renvoi juridictionnel facultatif :
Cette procédure ne concerne que le Conseil d’État et la Cour de cassation. Donc ces 2 hautes juridictions peuvent directement saisir le tribunal des conflits si elles estiment que les litiges dont elles ont à connaître soulèvent une grave difficulté de compétence.
Dans ce cas il n’y a pas à proprement parler un conflit, mais un risque de conflit.
–La procédure dite du renvoi juridictionnel obligatoire :
Elle concerne une situation différente de la précédente. C’est le cas lorsqu’une juridiction judiciaire ou administrative a par une décision devenue définitive déclarée incompétent l’ordre juridictionnel auquel elle appartient, toute juridiction de l’autre ordre qui est saisie à son tour doit si elle estime incompétent l’ordre dont elle relève renvoyer obligatoirement la question de compétence devant le tribunal des conflits.
C. Le conflit de décisions au fond
Situation rarissime.
Le conflit se produit lorsque 2 juridictions appartenant chacune à un ordre différent rendent sur le même dossier 2 décisions rigoureusement contraires entraînant un déni de justice. Ce n’est pas un conflit dans ce cas qui porte sur la compétence mais un conflit qui porte sur le fond même du droit.
Dans ce cas, le conflit doit être porté devant le tribunal des conflits qui statue alors au fond comme le ferait une juridiction ordinaire.