Le trouble mental, cause d’irresponsabilité pénale

Le défaut de discernement résultant d’un trouble mental

Cette cause d’irresponsabilité est prévue par l’article 122-1 du Code pénal, qui dispose que «n’est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte au moment des faits d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes». Le deuxième alinéa du même article introduit que «la personne qui était atteinte au moment des faits d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes demeure punissable ; toutefois, la juridiction tient compte de cette circonstance lorsqu’elle détermine la peine et en fixe le régime».

La loi du 25 février 2008 relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d’irresponsabilité pénale pour trouble mental n’a pas modifié le système posé par l’article 122-1, mais a organisé la possibilité de la comparution du malade irresponsable devant la chambre d’instruction. Si à la fin de l’information, le juge d’instruction estime que la personne poursuivie souffre d’un trouble mental, il avertit le procureur et la partie civile.

A/ Le trouble mental ayant aboli le discernement

Pour exonérer la personne poursuivie de sa responsabilité pénale, trois conditions doivent ici être réunies au sens de l’article 122-1 du Code pénal :

o la personne poursuivie doit souffrir de troubles psychiques ou neuropsychiques

o le trouble psychique ou neuropsychique doit avoir aboli le discernement de la personne poursuivie

o le trouble doit avoir existé au moment de la commission de l’acte infractionnel

Il faut que la personne poursuivie souffre de troubles psychiques ou neuropsychiques : cette notion est beaucoup plus large que celle de « démence » de l’ancien Code pénal. Le législateur a voulu atteindre toutes les formes de troubles mentaux, peu importe l’origine ou la nature de ce trouble. Certaines hypothèses posent cependant problème : l’ivresse et le somnambulisme.

La doctrine a envisagé deux hypothèses pour le somnambulisme : la première est le somnambulisme naturel, hypothèse dans laquelle la doctrine considère qu’elle doit bénéficier de cette cause d’irresponsabilité pénale, encore faut-il qu’elle n’ait pas commis de faute ayant permis la réalisation du dommage (par exemple, disposer des armes à proximité du lit en se sachant atteint de somnambulisme).

Quant au somnambulisme hypnotique, les cas sont rares, mais la doctrine a considéré que soit la personne poursuivie a perdu tout son libre arbitre, auquel cas on pourra invoquer la cause d’irresponsabilité pénale, soit elle disposait encore de son libre arbitre. Dans cette hypothèse, l’hypnotiseur sera condamné comme auteur ou complice.

L’ivresse est la consommation excessive de produits alcoolisés, à la suite de laquelle on perd alors une partie de son libre arbitre. La doctrine et la jurisprudence sont très partagées sur ce point : ce n’est en réalité que lorsque la personne souffre d’un alcoolisme chronique qu’on va rentrer dans la définition du trouble mental, et ainsi pouvoir envisager l’application de la cause d’irresponsabilité pénale.

Le trouble psychique ou neuropsychique doit avoir aboli le discernement de la personne poursuivie, ou bien le contrôle qu’elle avait de ses actes. Il faut que l’individu ait perdu sa capacité de comprendre, autrement dit d’interpréter ses actes dans la réalité, ainsi que sa capacité de vouloir, c’est-à-dire qu’elle ne parvient plus à contrôler ses actes.

Les troubles qui ne font qu’entraver le contrôle des actes de la personne poursuivie ne pourront pas s’appliquer au sens de l’article 122-1 du Code pénal. Le trouble psychique ou neuropsychique dont la personne poursuivie veut se prévaloir doit être absolu : elle va devoir prouver qu’elle était privée de ses capacités de discernement.

Enfin, le trouble doit avoir existé au moment de la commission de l’acte infractionnel, ce qui signifie que les juges du fond vont devoir se replacer au jour d l’acte infractionnel pour déterminer si la personne poursuivie subissait effectivement ce trouble mental au moment des faits.

B/ Le trouble mental ayant altéré le discernement

Depuis 1994, le législateur va prendre en considération la situation des personnes qui souffrent d’un trouble psychique ou neuropsychique qui va entraver le contrôle que les personnes poursuivies peuvent avoir sur leurs actes, sans pour autant totalement détruire leur libre arbitre. L’article 122-2 du Code pénal va poser le principe que les personnes poursuivies sont responsables pénalement, mais bénéficient d’une responsabilité pénale atténuée.

Cette hypothèse pose beaucoup de problèmes en pratique, tant il est difficile de prouver que le trouble a altéré et non pas aboli le discernement. La jurisprudence a alors établi un tableau des troubles qui abolissent ou altèrent le discernement.

Ici encore, la charge de la preuve va peser sur la personne poursuivie, mais en pratique, les choses sont différentes : en matière criminelle, les examens psychiatriques sont opérés automatiquement.