L’utilisation privative du domaine public

Les utilisations privatives du domaine public

L’utilisation privatise du domaine public concerne la situation dans laquelle une personne dispose sur la base d’un titre nominatif de la possibilité d’occuper de manière exclusive ou de manière privilégiée une dépendance du domaine public. Cette occupation privatise se traduit par l’existence d’un droit à l’occupation privatise. Celle-ci doit être compatible avec l’affectation mais elle peut correspondre à une utilisation conforme donc les règles applicables aux occupations privatises sont valables qu’ils s’agissent d’utilisations conformes ou compatibles.

Le but de la personne publique est de favoriser son domaine public donc l’occupation privative du domaine public répond à un certain nombre de règles, règles générales applicables aux utilisations privatives du domaine public et par ailleurs des règles spécifique en cas d’utilisations s’accompagnant de la constitution de droits réels.

 

§1 : Les règles générales

Le code général précise ses règles, il mentionne la nécessité d’un titre d’occupation, autorisation préalable frappé par un caractère de précarité et autorisation préalable délivrée en contrepartie du versement d’une redevance.

  • A) La nécessité d’une autorisation préalable

Principe : il ne peut y avoir d‘occupation sans titre. C’est ce qu’affirme l’article L 2122-1 du CODE GÉNÉRAL DE LA PROPRIÉTÉ DES PERSONNES PUBLIQUES « Nul ne peut, sans disposer d’un titre l’y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d’une personne publique mentionnée à l’article L. 1 ou l’utiliser dans des limites dépassant le droit d’usage qui appartient à tous. ». Régime d’autorisation justifié par la circonstance que la personne qui va occuper le domaine public l’occupe au-delà des limites du droit d’usage.

1.Les caractères de cette autorisation préalable

Ce que l’on peut dire est que ses autorisations d’occupation privative peuvent prendre la forme d’un acte unilatéral ou encore d’un contrat lorsqu’est en cause un acte unilatéral. On parlera de permission de voirie ou autorisation de voirie. Lorsqu’il s’agit d’un contrat, on parlera de concession de voirie ou encore de contrat portant occupation du domaine public ou encore convention d’occupation domaniale. Quel que soit la forme de l’autorisation, cette autorisation présente nécessairement un caractère administratif et le contentieux de ses actes relève de la compétence exclusive de la juridiction administrative, compétence fondée sur une interprétation large du décret-loi du 17 juin 1938 et compétence administratives qui résulte aujourd’hui de l’article L 2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques. « Sont portés devant la juridiction administrative les litiges relatifs : « Aux autorisations ou contrats comportant occupation du domaine public, quelle que soit leur forme ou leur dénomination, accordées ou conclus par les personnes publiques ou leurs concessionnaires».

Que sont ses concessionnaires qui peuvent conclure des contrats portant occupation du domaine public ? Ces concessionnaires visent la personne privée qui a conclu avec une personne publique un contrat portant occupation du domaine public : concessionnaire de voirie qui conclurait avec une autre personne privée une convention portant occupation du domaine public ? Depuis une décision Tribunal des Conflits 10 juillet 1956, société des Sheplle shels de France le Tribunal des Conflits a interprété la notion de concessionnaire et le concessionnaire dont il s’agit est nécessairement celui d’un Service Public. Le concessionnaire d’un Service Public peut conclure avec une personne privée une convention d’occupation domaniale, pourtant soumise à la juridiction administrative en vertu de l’article L 2331-1.Règle réaffirmé par le Tribunal des Conflits dans un arrêt du 14 mai 2012 ; Madame G contre société coquelicot promotion

L’autorisation a un caractère administratif et elle doit être expresse, cela signifie que l’autorisation ne peut jamais être tacite. C’est ce qu’a réaffirmé le Conseil d’Etat dans une décision du 21 mars 2003 Sipperec . Dans cette décision, le Conseil d’Etat censure la mise en place d’un régime d’autorisation tacite d’occupation du domaine public. Donc la personne publique ne peut pas dans l’acte d’autorisation prévoir un certain nombre de prescriptions et obligations à la charge de l’occupant qui lui permettent de garantir que l’occupation sera compatible avec l’occupation du domaine public.

L’autorisation est nécessairement temporaire et elle présente un caractère personnel (intuitu personae).

 

2.Les conditions de délivrance de l’autorisation

Les règles de compétence pour la délivrance de ses autorisations sont rappelées par l’article R2122-2 du CODE GÉNÉRAL DE LA PROPRIÉTÉ DES PERSONNES PUBLIQUES et c’est ici la personne publique proprio de la dépendance qui est en principe compétente pour délivrer l’autorisation mais il peut s’agir de la personne publique gestionnaire en ce qui concerne l’hypothèse d’un transfert de gestion.

S’agissant des occupations privatives, en principe l’administration dispose d’un large pouvoir discrétionnaire pour accorder ou refuser de délivrer une autorisation d’occupation privative. Pouvoir constamment réaffirmé par la jurisprudence ; arrêts de section du 29 avril 1966 société d’affichage girodi et 20 décembre 1957 Société nationale d’édition cinématographique. jurisprudence constante. Pouvoir très étendu qui confère la possibilité à la personne publique de réglementer tant dans l’intérêt du domaine public et de son affectation que dans l’Intérêt Général, ….

Plusieurs applications de ce pouvoir discrétionnaire qui trouve comme limite : l’intérêt général, application jurisprudentielle concernant les bouquinistes le long des quais de seine 6 nombre 1998. Association amicale des bouquinistes de Paris. Délivrance des permis de stationnement, le maire de paris à inclure à un certain nombre de critères pour classer les candidats en fonction de leur qualité professionnel, ancienneté de leur commerce ETC ;

L’occupation privative doit être compatible avec l’affectation de la dépendance et c’est au vue de cette occupation compatible que le maire va délivrer ou refuser de délivrer une autorisation d’occupation du domaine public et cette compatibilité est contrôler par le Juge Administratif en cas de litige ; façon de contrôler l’utilisation du pouvoir discrétionnaire de l’autorité compétente.

Ex : décision de section 23 juin 1995 Ministre de la culture : installation d’une fête foraine sur l’esplanade des tuileries, cette autorisation délivrée aux forains a été jugé compatible avec les vocation et destination de ce jardin, destinés au loisirs et à la récréation.

C’est ce qui a conduit le Conseil d’Etat a censuré en revanche l’exercice du pouvoir d’autorisation en ce qui concerne l’installation de fêtes foraines aux tuileries sans limitation de temps. le Conseil d’Etat a considéré que l‘absence de limitations temporelles est incompatibles avec la destination du jardin des tuileries. L’autorité n’est jamais tenue d’accorder une autorisation d’occupation privative mais en cas de refus, il doit être motivé par un Intérêt Général ou par la bonne gestion de l’intérêt publique. Le refus d’accorder une autorisation doit respecter le principe d’égalité.

Décision société EDA (autorisation conforme) et arrêt RATP (autorisation compatible) : question de l’exercice du pouvoir d’autorisation lorsqu’est en cause une autorité éco. La LCI n’est pas la source d’un droit à l’occupation du domaine public lorsque cette occupation n’est pas compatible avec l’affectation. La LCI ne peut être la source d’un droit à l’occupation du domaine public.

La LCI est inopérante pour contester un refus d’autorisation lorsque l’occupation est simplement compatible. Il y a des hésitations mais la LCI ne permet pas d’obtenir l’annulation d‘une décision de refus d’occupation privatise même lorsque l’occupation est incompatible avec l’affectation.

4 les sanctions de l’occupation dans titre

En cas d’occupation sans titre du domaine public, soit parce que l’autorisation n’a jamais été délivré soit parce qu’elle n’existe plus et qu’un occupant se maintient sur la dépendance qu’il occupe sans titre. L’administration est en droit de poursuivre l’expulsion des occupants qui se maintiennent dans les lieux et de poursuivre l’enlèvement des installations. Droit reconnu par la jurisprudence arrêt du 13 juillet 1961 Dame Lauriau et si l’administration parvient pas par ses propres moyens à obtenir départ de l’occupant sans titre, elle pourra saisir la juridiction administrative qui est en principe compétente pour ordonner l’expulsion et qui le sera dans le cadre d’une procédure d’urgence qui est celle de l’article L 521-3 du code de justice administrative qui concerne le référé mesures utiles. Selon cet article référé mesures utiles, tout autre mesure utile peut être ordonné par le juge des référés, deux conditions à remplir : la demande doit présenter un caractère d’urgence et cette demande ne doit se heurter à aucune contestation sérieuse sans quoi la demande n’est pas recevable. Cette notion de contestation sérieuse est importante, confirmé par le Conseil d’Etat arrêt de section du 16 mai 2003 SARL Icomatex : l’appréciation de la condition d’urgence relève du pouvoir souverain du juge des référés.

Le juge des référés doit motiver son ordonnance en précisant les raisons de fait et de droit pour lesquelles il considère que l’urgence est en effet de nature à justifier la demande d’expulsion. D’autre part, il y a urgence à expulser en cas d’absence de paiement ? IRRGULARITé de l’occupation sans titre justifie à qualifier l’urgence ? La jurisprudence se montre protectrice des droits de l’occupant. Pour qu’il y ait urgence il faut soit que l’occupation irrégulière du domaine public compromette la continuité ou le bon fonctionnement du service public qui s’y exerce sans quoi il n’y a pas urgence sans quoi l’occupation irrégulière fait obstacle à la réalisation d’un projet de réaménagement ou bien à l’arrivée d’un nouvel occupant et enfin, l’urgence eut résulter de considérations liées à la sécurité et à l’ordre public.

  • B) La précarité de l’occupation privative

L’occupation privative est précaire et révocable, c’est ce qu’affirme l’article L 2122-3 et l’article L 2122-2 rappelle quant à lui le caractère temporaire de l’occupation privative. La reprise d’une jurisprudence constante, jurisprudence qui a réitéré que l’occupant privatif n’a aucun adroit acquis au renouvellement de l’autorisation, règle qui est protectrice du domaine public puisque l’administration en a ainsi toujours la libre disposition, justifiée par les besoins d’intérêt Général, d’utilité publique qui constitue la finalité de l’utilisation normale du domaine public. Occupant privatif se trouve en situation de fragilité mais il bénéficie d’une forme de protection.

L’occupant privatif est protégé vis-à-vis des tiers qui viendraient troubler son droit à l’occupation privative. Il doit pouvoir occuper paisiblement, sans trouble, la dépendance du domaine public. Il dispose d’un certain nombre d’actions qu’il peut opposer à des tiers et également l’administration, propriétaire ou gestionnaire de la dépendance, ne doit pas troubler l’activité de l’occupant pendant la période de validité de l’occupation. L’autorité administrative ne peut prendre des mesures qui feraient obstacles à l’exercice de l’activité de l’occupant, surtout s’il exerce une activité économique elle ne peut pas effectuer de travaux sur la dépendance pendant la validité de l’occupation sauf si ses travaux sont réalisés dans l’intérêt même de la dépendance domaniale, l’occupant devra supporter ses travaux sans bénéficier d’une quelconque indemnisation.

Les travaux effectués sur la dépendance domaniale pour un intérêt autre que la conservation du domaine ont droit à indemnisation. Tout dépend de ce qui motive la réalisation de ses travaux.

En cas de décision qui viendrait abroger le titre d’autorisation ou refuserait le renouvellement de l’autorisation, l’occupant peut contester ses décisions devant le Juge Administratif sachant que l’abrogation et le non renouvellement doivent être justifiés par des motifs qui tiennent à l’intérêt du domaine, motif contrôlé par le Juge Administratif. Lorsque que l’abrogation (et aussi renouvellement) est décidée à tire de sanction, dans ce cas, le régime des sanctions administratives trouvent à s’appliquer et l’occupant doit être mise en mesure de présenter ses observations. Décision de 1944 Dame veuve Trompier ou gravier

Néanmoins l’intérêt du domaine est entendu largement par le Juge Administratif donc il est rare que le refus de renouvellement ou l’abrogation soit sanctionné par le juge administratif. Souvent intérêts propres à la dépendance et également sauvegarde d’autres intérêts généraux.

Le refus de renouvellement n’ouvre jamais droit à indemnisation en revanche, qu’en est –il lorsqu’il y a une fin anticipé à un motif d’Intérêt Général, en cas de résiliation avant terme de la convention d’occupation du domaine, le cocontractant bénéficie-t-il d’un droit à l’indemnisation ?

Le Conseil d’Etat a précisé sa doctrine dans une décision du 31 juillet 2009 Jonathan Loisirs. Si l’autorité domaniale peut mettre fin pour un motif d’intérêt général avant le terme de la convention en l’absence de faute de l’occupant droit à l’indemnisation du cocontractant sous réserve des stipulations contractuelles négociées et acceptées par les parties.

L’élément de précarité existe toujours, la convention d’occupation reste précaire. L’indemnisation pouvait ici couvrir la perte d’éléments du Fonds de commerce exploité par l’occupant privatif sur le domaine public ? En principe il n’est pas possible de constituer un fonds de commerce sur le domaine public et donc le Conseil d’Etat en déduit qu’il n’est pas possible d’obtenir une indemnisation à raison de la perte du fonds de commerce. Cette précision résulte également de cet arrêt.

Il y a comme même ici un angle mort au regard du droit au respect des biens du premier protocole de la

CEDH

  • C) Obligation de verser une redevance, contrepartie à l’occupation privative du domaine public

Principe réaffirmé par l’article 2125-1 du CODE GÉNÉRAL DE LA PROPRIÉTÉ DES PERSONNES PUBLIQUES. Ce principe connait quelques exceptions cas notamment lorsque l’occupation ou l’utilisation du domaine public est la condition naturelle ou forcée de l’exécution de travaux ou de la présence d’un ouvrage intéressant un service public qui bénéficie gratuitement à tous (article 2125-1) cas des cabanes construites sur les plages et destinés à la surveillance de la baignade ou pose de canalisations d’égouts.

Aussi lorsque l’utilisation ou l’occupation du domaine public ne présente pas un caractère commercial pour son bénéficiaire c’est pour ça que les communes mettent à dispositions des locaux à des associations ; Cas également lorsque l’utilisation concerne l’installation par l’Etablissement d’équipements destinées à assurer la sécurité routière (radars) arrêt de 2007 qui intervenait sur une procédure de suspension et législateur par une loi de finances en 2008 a considéré qu’il y occupation du domaine public routier qui ne donne pas lieu au versement d’une redevance

Calcul de la redevance suit un régime si generis car la redevance pour occupation du domaine public n’est pas une imposition, une taxe, une redevance pour service rendue ; Elle suit un régime propre et qui fait l’objet de beaucoup d’incertitudes.

Le calcul de la redevance doit tenir compte des avantages de toute nature procurés au titulaire de l’autorisation. C’est ce qui résulte de l’article 2125-3 du CODE GÉNÉRAL DE LA PROPRIÉTÉ DES PERSONNES PUBLIQUES. Partie fixe calculée sur la base de la valeur locative analogue ou comparable à la dépendance occupée. Partie variable liée au CA réalisé par l’occupant sans qu’il y ait une règle d’équivalence. Il est parfois difficile de calculer la redevance en se fondant sur la valeur locative car cela suppose de comparer la dépendance domaniale à un bien comparable donc souvent elle dépend de la deuxième partie, des avantages de toute nature ; Possibilité inaugurée par une décision du 11 octobre 2004 CE Prouvoyeur, décision aux conclusions de M olléon. La personne publique peut calculer la redevance en tenant compte des seuls avantages de toute nature et pas nécessairement tenant compte de la valeur locative en comparaison à une propriété privée qui aurait les mêmes caractéristiques.

 

§2 : Les règles spécifiques applicables aux autorisations constitutives de droits réels

Problématique des droits réels ; lorsque autorisation constitutive de droits réels un certain nombre de règles protectrice du titulaire vienne s’appliquer. Concernant les AOT (Autorisation d’occupation temporaire ) délivrées par les Collectivité Territoriale, on trouve au CODE GÉNÉRAL DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES un article L 1311-5 alinéa 1 les Collectivités Territoriales peuvent délivrer sur leur domaine public des AOT constitutive de droits réels, ce qui signifie que le titulaire de l’autorisation n’est pas nécessairement titulaire d’une autorisation constitutive de droits réels. Le droit réel doit être expressément prévu par l’autorisation. En revanche en ce qui concerne les AOT (Autorisation d’occupation temporaire ) délivrés par l’Etat, il résulte de l’article L 2122-6 DU CODE GÉNÉRAL DE LA PROPRIÉTÉ DES PERSONNES PUBLIQUES, que le titulaire d’une AOT (Autorisation d’occupation temporaire ) A UN DROIT réel sur les ouvrages les constructions les installations de caractère immobilier qu’il réalise pour l’exercice de l’activité qui fait l’objet de l’autorisation sauf prescriptions contraires du titre d’occupation. L’Etat peut s’opposer à la constitution d’un droit réel. Il y a eu un certain nombre de débats sur la portée de ce droit réel. Durant la durée d’utilisations, le titulaire a un droit réel sur les ouvrages, qu’il peut bâtir sur la dépendance domaniale, droit sur les ouvrages mais au-delà il bénéficie d’un droit réel qui est un véritable droit d’occupation du domaine public pour la construction d‘ouvrage, droit qui porte sur l’occupation même du domaine public = droit de superficie sur la dépendance domaniale elle-même (droit qu’il peut valoriser en tant que tel) et droit sur les ouvrages, et installations qu’il peut bâtir sur la dépendance domaniale, la valorisation passera sur la valorisation du droit d’occupation du domaine public.