La vassalité dans la société féodale

La vassalité

Le lien vassalique: l’homme ou homo, par le hominium ou homagium, crée un lien de service auprès de quelqu’un. « Je suis votre homme. » Les étapes de l’homagium :

    • Le vassal est agenouillé, les mains jointes (prière moderne, alors que dans le passé, on prie les mains levées).
    • Le seigneur place ses mains par dessus celles du vassal : c’est le mélange des mains ou immixtio manuum. Il est pris sous la protection de son seigneur. Le vassal prononce le volo: « Je le veux ». Le seigneur relève son vassal. Ils échangent le baiser de paix (passé dans la messe) ; ils se « donnent la paix ».
    • Le vassal doit prêter le serment de fidélité. Il porte sa main sur la Bible ou sur une relique. Il s’engage devant Dieu ; on parle de sacramentum, serment ou sacrement.
    • L’hommage est porté à la résidence du seigneur. On va chez le seigneur, on ne le convoque pas. Mais, pour certains vassaux, comme le duc de Normandie, c’est un hommage en marche. Les seigneurs vont aux frontières de leurs domaines.
    • Les obligations du seigneur sont de ne pas causer de dommages physiques, de ne pas nuire aux biens ou aux possessions.
    • La concession d’un bien au vassal est appelé chasement ou casamentum à la place de beneficium. En « étant casé », le vassal obtient les moyens de s’établir. Le mot germanique latinisé : feodum (d’où fief) remplace le bénéfice et le chasement.
    • Les obligations du vassal sont le conseil ou consilium et l’auxilium. Les vassaux participent à la justice. Il doit aussi par l’auxilium assister son seigneur. Quand c’est une expédition importante, on parle d’ost ou hostis. Si c’est plus court, on parle de calvacada ou chevauchée. Il y a aussi le stage ou stagium. Pendant 40 jours, le vassal défend le territoire.
    • Le vassal fournit une aide financière dans le cas des rançons, d’adoubement, de mariage de la fille du seigneur ou de croisade.
    • Le seigneur doit protéger son fidèle. Si le vassal parjure, il est puni. Son fief peut être saisi ou connaître une commise (Jean Sans Terre). Mais, le vassal peut être libéré de sa fidélité, si le seigneur est félon ou excommunié. Un vassal puissant peut lancer un défi à son seigneur (plus tard, on jette son gant). Si un des seigneurs du vassal va en guerre, le vassal doit distinguer ses hommages. L’hommage-lige (opposé du plain) permet de favoriser l’hommage le plus ancien.

 

Section 1 : L’hommage rite créateur du lien vassalique

  • I) Rite de l’hommage
  • II) L’investiture

Acte solennel par lequel un homme libre se place volontairement dans la situation de vassal d’un chef. Cet hommage dérive de la commendatio franque (recommandation) il va être la clé de voute des rapports de personne et de pouvoir dans le monde de ceux qui commandent.

I) Rite de l’hommage

C’est un acte public et solennel qui crée un engagement personnel, permanent, inégal entre deux hommes libres. La conséquence, les deux contractants doivent être là personnellement. Le futur vassal se présente devant son futur seigneur tête nue sans arme (sans épée ni éperon).

Il s’agenouille devant le seigneur ce qui souligne l’inégalité, place ses mains jointes dans les mains du seigneur traduit la dépendance, le vassal demande au seigneur de le recevoir « comme son homme ». Il prononce une brève formule par laquelle il se reconnait vassal. Le seigneur déclare l’accepter et le relève, tous les deux s’embrassent en signe d’amitié (hommage de main et de bouche).

Cette cérémonie laïque dérive des vieilles pratiques Franques mais elle va ensuite être complétée par la « foi ». Au départ simple engagement d’honneur puis un rite religieux. Le nouveau vassal jure sur des reliques ou sur les évangiles d’être fidèle à son seigneur. Dans le système français on prête « foi et hommage ».

II) L’investiture

Il s’agit de la remise symbolique du fief du seigneur à son vassal : remise d’une motte de terre ou d’une épée. Cette remise est parfois suivie de la « montrée ». A partir du 13ème s, on va dresser un écrit de la cérémonie et même acte notarié dans le midi qui servira de preuve et qui décrira le fief concédé.

(Le « dénombrement »)

A l’origine l’investiture est une conséquence de l’hommage mais progressivement il va y a avoir renversement, en effet au bout de quelques générations les vassaux dont les fiefs deviennent héréditaires perdent de vue la concession primitive et considèrent que le fief fait partie de leur patrimoine.

A partir du 15ème s, la signification primitive de l’hommage s’est transformée, désormais on considère l’hommage comme une simple charge pesant sur le fief. Désormais on dit que l’on possède un fief « à charge de porter hommage ».

Section 2 : Les Rapports seigneur-vassal

L’hommage crée entre les deux hommes des rapports de confiance loyale et d’appui mutuel. A l’origine l’hommage a une valeur absolue c’est-à-dire qu’il crée un lien de subordination et de solidarité si fort que chaque vassal ne peut avoir qu’un seul seigneur.

Cependant avec la généralisation du système seigneurial, les seigneurs vont chercher à multiplier leur nombre de vassaux, un vassal va pouvoir être amené à prêter plusieurs hommages car ils recevront des fiefs de seigneurs différents, au 12ème siècle la situation devient très complexe. Il peut arriver qu’un chevalier soit vassal de deux seigneurs en guerre et ne sache pas quelle attitude adopter.

Pour résoudre ce problème et pour que chaque seigneur sache sur quel vassal il peut compter, le droit va créer un nouveau type d’hommage au-dessus de l’hommage ordinaire ou hommage plan apparait un hommage plus fort : « l’hommage lige ». Cet hommage lige l’emporte sur tous les autres hommages sans distinction de dates.

L’homme lige s’engage à aider son seigneur contre toute autre personne au monde, celui qui a prêté hommage lige ne peut prêter un autre hommage que sou réserve expresse de cet hommage lige. Le roi de France va exiger systématiquement l’hommage lige.

  • I) Les obligations du seigneur
  • II) Les obligations du vassal
  • A) L’aide militaire
  • B) L’aide financière
  • C) Le consilium, service de conseil et de cour
  • III) Sanctions des obligations réciproques
  • A) Les sanctions contre le seigneur
  • B) Sanctions contre le vassal
  • 1) La commise
  • 2) La saisie

I) Les obligations du seigneur

Il a un pouvoir de fidèle protection de son vassal ce qui implique l’obligation de lui rendre justice, de le défendre par les armes lui et ses biens. Cela implique l’interdiction de causer du tort au vassal (dans sa personne, sa famille, et ses biens).

II) Les obligations du vassal

« L’auxilium » revêt deux aspects :

A) L’aide militaire

Le service d’ost, pendant 40 jours d’affilée par an au frais du vassal avec son équipement complet, ce service noble par excellence va pouvoir être racheté par le vassal de deux façons soit par le versement d’une somme d’argent ou par la fourniture d’un cheval de guerre.

– Le service de garde est l’obligation pour le vassal de tenir garnison pour une durée variable selon les régions.

Le service de chevauchée, expédition rapide dans les environs immédiats : razzia sur les terres du voisin. Dans la pratique l’étendue de cette aide varie selon les coutumes locales et selon l’importance du fief concédé.

En Normandie on appelle « fief de Haubert » celui dont le titulaire doit venir à l’ost armé du haubert, de l’épée et de la lance. Il doit venir avec un écuyer et un page plus deux ou trois sergents qui sont eux même des combattants à cheval équipés légèrement. L’aide militaire tombe en désuétude dans le midi dès le 13ème siècle. Du fait du recul des guerres privées, le service personnel sera plus rarement exigé.

B) L’aide financière

Le « fief » qui est une tenure noble, se distingue de la « tenure roturière » (paysanne) car il n’y a pas versement économique régulier. Mais dans des circonstances exceptionnelles le vassal va aider son seigneur financièrement, manifestation concrète du devoir de secours, de l’amitié qu’il doit à son seigneur.

Dans la plupart des coutumes le vassal doit « l’aide aux quatre cas » :

– Contribution à la rançon si seigneur prisonnier

– Aux frais d’expédition quand le seigneur part en croisade

– Quand le fils aîné du seigneur est armé chevalier

– Pour constitution de la dot de la fille aînée du seigneur.

C) Le consilium, service de conseil et de cour

Le vassal doit se rendre auprès du seigneur et notamment pour participer aux assemblées judiciaires. Procédure lente, confuse, dont l’avantage est d’associer les vassaux aux décisions qu’ils auront à exécuter et de faire bénéficier le seigneur d’avis. Ce service de cour aussi fonction d’apparat.

La puissance d’un grand seigneur se mesure au nombre de vassaux qui l’accompagnent lors de cérémonies importantes. Dans le midi cette fonction est tellement importante qu’il existe des fiefs « honorés ». Le titulaire de ce fief a pour fonction unique d’accompagner son seigneur dans les cérémonies superbement habillés.

III) Sanctions des obligations réciproques

A) Les sanctions contre le seigneur

Si le seigneur manque gravement à ses devoirs, le vassal va l’accuser devant la cour du seigneur suzerain.

Le vassal est délié de ses engagements mais conserve le fief. Les causes sont le déni de justice, la violence ou guerre contre le vassal, la trahison, l’enlèvement.

B) Sanctions contre le vassal

1) La commise

Reprise définitive du fief, le droit féodal a limité cette sanction à 3 cas :

Le désaveu, refus formel de se reconnaître vassal et de prêter l’hommage.

La félonie (rébellion armée, trahison).

• Le suicide.

Cette reprise apparait comme normale durant la première période féodale puisque le fief constitue la contrepartie des services du vassal. Plus tard lorsque les fiefs sont devenus héréditaires la commise est apparue comme très sévère ainsi dans le midi elle disparait au 14ème s.

2) La saisie

Confiscation temporaire et le seigneur perçoit les revenus du fief jusqu’à ce que le vassal accomplisse ses obligations.

Ex : Retard dans renouvellement de l’hommage (saisi « faute d’homme »), absence à l’ost ou à la cour du seigneur.

A l’origine la saisie se transforme en commise au bout de 1 an et un jour mais petit à petit cette règle se perd et désormais le vassal pourra mettre fin à la saisie à n’importe quel moment en remplissant ses obligations.