L’hypothèque : définition, effets, extinction, transmission

Les effets de l’hypothèque, son extinction, sa transmission :

Définition de l’hypothèque : Une hypothèque est une sûreté immobilière constituée sur un bien immeuble apporté en garantie de la dette par le débiteur ou un tiers. Elle confère au créancier un droit de préférence et un droit de suite qui lui permettent de poursuivre la vente en quelques mains que le bien se trouve. Cette garantie est souvent utilisée par les banques en couverture d’un crédit bancaire. Le bien hypothéqué est saisissable par le Créancier si les échéances ne sont pas payées, afin de le mettre en vente et de récupérer les sommes dues.

Section I : les effets de l’hypothèque :

  • 1°)- dans les rapports du créancier hypothécaire et le constituant :

A)- avant l’échéance de la créance garantie :

Principe : le constituant conserve la propriété pleine et entière de l’immeuble grevé.

Il conserve le pouvoir d’en disposer (vente ou constitution d’une nouvelle hypothèque), il conserve le pouvoir d’en jouir (fruits) et d’en user.

Il conserve la maîtrise juridique et matérielle.

Tempéraments :

  • – celui qui vend un immeuble hypothéqué, ne percevra le prix que diminué des créances garanties.
  • – celui qui a déjà hypothéqué un immeuble, a souvent du mal à trouver un créancier qui se contente d’une 2nde hypothèque (2e rang).

B)- à l’échéance de la créance garantie :

Si le créancier est payé la créance s’éteint et l’hypothèque avec, sauf si l’hypothèque est rechargeable.

Si le créancier n’est pas payé, il y a lieu de réaliser l’hypothèque :

– la saisie immobilière : débouche sur adjudication de l’immeuble.

Le créancier hypothécaire exercera son droit de préférence sur le prix de l’adjudication, et l’adjudication éteindra toutes les hypothèques qui grevaient l’immeuble (+++)Code civil 2458.

– attribution judiciaire de l’immeuble.

– attribution conventionnelle de l’immeuble, en vertu d’un pacte commissoire stipulé dans la convention de l’hypothèque : Code civil 2459.

L’attribution judiciaire et conventionnelle supposent une expertise de l’immeuble et si la valeur de l’immeuble expertisée excède la créance garantie de l’hypothèque, le créancier hypothécaire doit la différence (une sûreté n’enrichit jamais le créancier).

En l’absence d’autres hypothèque sur le même immeuble, il paye la différence au constituant, si d’autres hypothèques, il consigne l’excédent.

En outre, ni l’attribution judiciaire ni conventionnelle, n’est possible si l’immeuble constitue le logement principal.

  • 2°)- les rapports entre le créancier hypothécaire et le tiers acquéreur :

Le créancier hypothécaire dispose d’un droit de suite, donc d’un droit qui lui permet de saisir l’immeuble entre les mains d’un tiers acquéreur et donc d’exproprier ce dernier, mais cette expropriation est très rare.

Presque toujours le tiers acquéreur échappe à cette expropriation, en versant au créancier la valeur de l’immeuble, à hauteur de la valeur de la créance.

Ce faisant, il purge l’immeuble de l’hypothèque.

A)- le droit de suite du créancier sur l’immeuble :

Code civil 2461.

1°)- domaine :

a)- quant aux personnes contre qui il est exercé :

Le droit de suite est utile au créancier, contre ceux qui ont la qualité de tiers acquéreur de l’immeuble et ne sont pas personnellement tenus à la dette.

Si l’immeuble n’est que détenu par le tiers, le créancier n’a pas besoin de droit de suite pour le saisir, si l’immeuble appartient toujours dans le patrimoine du constituant.

Si le tiers acquérant est personnellement tenu à la dette (car héritier du constituant), pas besoin du droit de suite pour saisir. Le tiers est exposé au droit de suite et hypothéqué ???

Les personnes réunissant ces deux conditions sont les ayants-causes à titre particulier du constituant (coacheteur, donataires, coéchangiste, légataire à titre particulier) et les ayants-causes à titre universel, qui ont accepté la succession à concurrence de l’actif.

b)- quant aux actes que le droit de suite permet d’ignorer :

Ce sont tous les actes de disposition portant sur l’immeuble, actes d’aliénation, et tous les actes de constitution de droits réels (usufruit, servitude).

2°)- exercice :

Le créancier hypothécaire peut exercer son droit de suite à deux conditions :

– la créance doit être exigible.

– l’hypothèque doit être opposable à ce tiers, convenablement publiée.

Le tiers acquéreur est à l’abri du droit de suite, si l’acquéreur a publié son droit avec le créancier.

3°)- effets :

Cas où l’immeuble a été vendu.

Le créancier hypothécaire commence par adresser une sommation au tiers acquéreur de payer ou de délaisser, mais le tiers acquéreur dispose d’une option entre quatre partis :

– purger l’immeuble de l’hypothèque, neutralisant le droit de suite.

– se laisser saisir, la saisie suit son cours aboutissant à l’adjudication de l’immeuble et donc à l’expropriation du tiers acquéreur, sauf s’il se porte adjudicataire (mais paye deux fois).

– délaisser l’immeuble, le tiers abandonne la détention, mais pas la propriété de l’immeuble, avantage : n’apparaît pas dans la procédure de saisie, mais cette procédure suit son cours : adjudication et expropriation.

– payer le créancier hypothécaire, en fait cela suppose que le tiers n’ait pas encore payé le prix de l’immeuble, au lieu de payer son vendeur, il payera le créancier hypothécaire.

Après quoi, une compensation s’opère entre sa dette de prix et la créance garantie dans laquelle il est subrogé.

Mais ce paiement n confère toute sécurité au tiers acquéreur que si deux conditions sont réunies :

∙ le prix doit être au moins égal à la créance garantie.

A défaut, le tiers reste exposé au droit de suite du créancier, pour la fraction de la créance qui excède le prix.

∙ il ne doit pas exister d’autres hypothèques inscrites sur l’immeuble.

A défaut, les autres créanciers hypothécaires peuvent exercer leur droit de suite sur l’immeuble, le tiers acquéreur pourra alors leur opposer l’hypothèque qui appartenait au créancier qu’il a payé, dans laquelle il a été subrogé en payant le créancier.

Mais cette hypothèque dans laquelle il a été subrogé, ne lui permet de se rembourser sur le prix de saisie de l’immeuble, qu’à concurrence de la somme qu’il a versé au créancier.

Il en résulte que les autres créanciers auront toujours un intérêt à saisir l’immeuble, dès lors que la valeur actuelle de l’immeuble, sera supérieure au prix auquel le tiers l’a acquis, cela pouvant résulter du simple jeu de l’inflation.

B)- La faculté du tiers de purger l’immeuble de l’hypothèque

–> purge: consiste à nettoyer, à affranchir l’immeuble des hypothèques qui le grèvent en payant aux créanciers inscrits la valeur avérée de l’immeuble.

La somme représentant cette valeur est répartie entre les créanciers inscrits, en respectant l’ordre des inscriptions, et si les derniers inscrits ne reçoivent rien : tant pis !!!

L’utilité de la purge apparaît lorsque le passif garanti excède la valeur de l’immeuble.

Un tiers acquéreur ne serait absolument tranquille, qu’en payant le montant entier de toutes les créances, du passif par hypothèse supérieure au prix : il ne se présenterait aucun tiers adjudicataire, l’immeuble ne pourrait alors pas être réalisée.

La purge est une institution majeure du crédit.

1°)- personnes admises à purger :

Ce sont les personnes que le droit de suite menace, au 1er chef, le tiers acquéreur.

2°)- l’époque de la purge :

Le tiers acquéreur peut purger lorsque les créanciers inscrits exercent leur droit de suite.

Le cas échéant, il doit se décider dans les 30 jours de la sommation de payer ou de délaisser.

Il peut aussi purger avant toute saisie, à titre préventif :

– soit lors de l’acquisition de l’immeuble, par une convention passée avec tous les créanciers inscrits : purge conventionnelle.

– soit après avoir acquis et publié son droit : purge unilatérale.

Code civil 2475 et 2476.

La purge la plus usuelle est celle préventive et conventionnelle, due à la pratique notariale, codifiée par l’ordonnance 2006.

3°)- procédure de la purge :

La procédure de purge vise à dégager la vraie valeur de l’immeuble.

Cela explique d’abord que la purge se produire parfois de plein droit, sans procédure particulière.

Il en est ainsi dans les cas où les circonstances de l’aliénation garantissent la vérité du prix, la valeur de l’immeuble :

– adjudication sur saisie

– adjudication sur surenchères

– adjudication aux vues d’une procédure collective.

– expropriation pour cause d’utilité publique.

Il faut distinguer la purge conventionnelle des autres purges.

a)- la purge conventionnelle :

Lors du projet de vente, le notaire demande un état des inscriptions à la conservation des hypothèques, aux vues de cet état il contacte les créanciers inscrits, les informe du prix convenu et négocie avec eux la répartition du prix, si le montant de la créance garantie excède le prix.

S’il obtient l’accord des créanciers :

– le droit de préférence des créanciers hypothécaires est reporté sur le prix de la vente amiable.

– ce droit de préférence est opposable à tout ayant-cause du vendeur qui ferait valoir un droit sur cette créance de prix.

Ex : un créancier saisissant ou un cessionnaire de la créance.

– le paiement des créanciers hypothécaires purge l’immeuble.

b)- les autres purges :

La purge qui intervient alors que les créanciers hypothécaires exercent leur droit de suite, ou préventive et unilatérale.

Le tiers acquéreur offre aux créanciers inscrits, la somme qui selon lui représente la valeur de l’immeuble.

Cette offre est irrévocable et doit être accompagnée d’un état du passif hypothécaire afin que chaque créancier inscrit puisse savoir s’il recevra quelque chose.

Les créanciers répondent à cette offre sous 40 jours :

– soit ils acceptant l’offre, si le prix proposé est égal à la valeur de l’immeuble. Double effet :

∙ fixer définitivement la valeur de l’immeuble à leur égard.

∙ faire du tiers acquéreur, leur débiteur personnel de cette somme, pouvant être poursuivi sur tous ses biens.

– soit rejettent l’offre, l’estimant insuffisante, l’immeuble vaut plus.

Le tiers acquéreur n’a pas purgé à titre préventif, mais le débiteur ne paye pas, et des années après les créanciers exercent leur droit de suite, mais le prix de l’immeuble a augmenté entre temps.

Mais alors il doit requérir la mise aux enchères du bien et surenchérir du 10e du prix.

Ils s’engagent à se porter acquéreur de l’immeuble, pour un prix égal à la somme égale majorée de 10% si aucun acquéreur ne se présente.

Ce qui conduit toujours à l’adjudication, et donc à l’éviction du tiers acquéreur sauf s’il se porte lui-même adjudicataire.

Dans un cas comme dans l’autre, le résultat est le même :

– l’immeuble est libéré de toutes les hypothèques qui le grevaient, même si certains créanciers inscrits n’ont pas étaient totalement payés : tant pis pour eux !!!!!

– les hypothèques avec leur droit de préférence sont reportées soient sur la somme offerte soit sur le prix de l’adjudication.

  • 3°) les rapports entre le créanciers hypothécaires et les autres créanciers du constituant :

À l’égard des autres créanciers, le créancier hypothécaire exerce son droit de préférence.

A)- quant à son objet :

Le droit de préférence s’exerce sur les deniers représentant l’immeuble.

En principe il s’agit de la somme dégagée par la procédure de saisie, le prix d’adjudication, ou par la procédure de purge.

Exceptionnellement, il peut s’agir d’une indemnité d’assurance, ou d’expropriation.

Mais il n’y a pas en matière hypothécaire de principe général de subrogation, par conséquent, en cas de vente amiable sans purge, le droit de préférence n’est pas reporté sur le prix, le créancier hypothécaire est protégé par son droit de suite.

B)- quant aux rangs :

Le créancier hypothécaire prime les créanciers chirographaires MANQUE,

Mais il est primé par les titulaires d’un privilège général mobilier et immobilier, sauf celui de la procédure collective en cas de liquidation judiciaire.

La situation se résume en quatre règles :

– Le créancier hypothécaire doit déclarer sa créance et subi la suspension des poursuites individuelles, pendant la période d’observation, sauf si l’immeuble est vendu au cours de cette période, il peut recevoir un paiement provisionnel sur autorisation spéciale du juge commissaire.

– il est primé par le privilège de la conciliation et par celui de la procédure collective aux cas de sauvegarde et de redressement judiciaire.

– aux cas de sauvegarde ou de redressement judiciaire avec continuation de l’entreprise, il peut se voir imposer une constitution de sûreté et subit les délais imposés par le tribunal. Code de commerce ; L626-22.

– aux cas de cession de l’entreprise, le créancier hypothécaire ne peut pas contester la fraction du prix affectée à l’immeuble.

L paiement du prix de cession de l’entreprise purge l’immeuble de l’hypothèque.

Section II : la transmission de l’hypothèque :

L’hypothèque peut être transmise à titre accessoire, c’est à dire avec la créance garantie, cette transmission est automatique, l’hypothèque suit la créance, peu importe la cause de la transmission (cession, subrogation, saisie attribution, décès du créancier).

L’hypothèque peut être transmise à titre principal, sans la créance, mais cette transmission est susceptible de degrés :

– le créancier cède l’intégralité de sa sûreté, il cède toutes les prérogatives attachées à l’hypothèque (droit de préférence et de suite), il devient un simple créancier chirographaire.

On parle alors de subrogation à l’hypothèque.

– ou le créancier hypothécaire ne cède que son droit de préférence, à un autre créancier hypothécaire, qui en contrepartie lui en cède le sien, de moins bon rang.

On parle alors de cession d’antériorité.

Ces deux transmissions à titre principal, deux observations :

– elles sont soumises à publicité purement informative, ne changeant rien pour les tiers ;

– le cessionnaire de l’hypothèque ou de l’antériorité ne peut acquérir plus de droit que n’en a le cédant, la garantie ou l’antériorité sont plafonnées au montant de la créance du cédant, qui disparaît avec elle.

Section III : l’extinction de l’hypothèque :

Code civil 2488.

Elle s’éteint à titre accessoire, par suite de l’extinction de la créance garantie : paiement, prescription, compensation.

Tempéraments :

– la novation peut laisser subsister l’hypothèque reportée sur la nouvelle créance, mais il faut une convention expresse.

– l’hypothèque rechargeable ne s’éteint pas par l’extinction de la créance garantie, elle sera disponible pour de nouvelles créances.

Elle peut aussi s’éteindre à titre principal, alors que la créance garantie subsiste, mais son extinction est susceptible de degrés :

– parfois l’hypothèque disparait complètement : droit de préférence et droit de suite.

Ex : renonciation du créancier, aux cas de purge.

– parfois, l’hypothèque ne disparait que pour partie : uniquement quant au droit de suite.

Ex : report de l’hypothèque sur le prix de la vente de l’immeuble hypothéqué.