Les marchandises
Ce sont des objets destinés à être vendus à la clientèle dans l’état où ils ont été achetés ou vendus après transformation (s’il s’agit d’une entreprise industrielle). Les marchandises sont des meubles corporels. Elles ne deviennent jamais des immeubles par destination car elles ont vocation à circuler.
Il n’est pas toujours aisé de savoir si on est présence d’une marchandise ou du matériel. Ce qui va déterminer cette distinction va être le rôle dans l’entreprise.
La distinction entre matériel et marchandise ne tient pas de la nature de la chose considérée mais de son rôle dans l’entreprise.
Section 1 : Le financement de l’achat par la CRP
Le problème de financement sera résolu par l’appel au crédit. Le fournisseur du crédit exige une garantie. La clause de réserve de propriété est extrêmement utilisée en cas d’achat de marchandises. La CRP (clause de réserve de propriété) profite au vendeur mais aussi à la banque qui avance les sommes nécessaires à l’achat des marchandises.
En recevant le principal (la créance), la banque se voit aussi transférer, par subrogation, le bénéfice de la clause de réserve de propriété => transmissibilité de la CRP, mise au service du nouveau titulaire de la créance : Chambre commerciale 15 Mars 1988. Si on déroge à la transmission de la CRP il se passe que le banquier devient créancier du prix dans les droits du vendeur et la CRP s’éteint dans le patrimoine du vendeur puisqu’elle n’a plus de support nécessaire que constitue la créance accessoire.
Pour l’ouverture de la procédure, il faut déclarer ses créances. Pour autant, la créance n’est pas éteinte, elle est hors procédure. La CRP la garantit mais la propriété est inopposable.
Section 2 : Comment en faire une source de crédit ?
Pour celui qui consent un crédit à l’entreprise, les marchandises constituent une garantie moins efficace que le matériel, elles ne restent jamais très longtemps dans l’entreprise contrairement au matériel. Elles n’en sont pas moins utilisées pour garantir des crédits à court terme.
Diverses techniques :
Avant, le gage supposait une dépossession. Le gage se conciliait donc mal avec la vie des affaires. D’où le succès de la technique des « warrants », car elle repose sur une dépossession qui n’encombre pas le créancier (l’entreprise, les locaux du créancier).
Depuis la réforme du 23 mars 2006 sur le droit des sûretés, il existe des gages sans dépossession.
Le succès de cette pratique est né de la nécessaire dépossession que suppose la constitution d’un gage. La pratique a imaginé de remettre les marchandises qui servent de garantie à un tiers dont la spécialité et le dépôt et la garde des marchandises. Le code Napoléon prévoyait cela dans son article 1876.
On qualifiait autrefois cela « d’entiercement ». Une loi de 1948 a perfectionné la pratique en créant les magasins généraux (L 522-1 et suivants) = établissements à usage d’entrepôts agréés par l’administration, qui doivent respecter un cahier des charges et respecter certains tarifs.
Ils sont placés sous le contrôle de l’Etat. En contrepartie de son dépôt, chaque déposant reçoit un titre « récépissé-warrant », composé du récépissé qui fait la preuve que la marchandise a été déposée dans le magasin général et le warrant qui représente le gage consenti sur cette même marchandise.
Les deux parties peuvent être transmises séparément par endossement (signature au dos du titre). En endossant le warrant au déposant qui fait crédit, le warrant concède un gage aux marchandises dont il s’agit. Le déposant peut endosser ce titre qu’est le récépissé et en endossant le récépissé à un tiers, le déposant transfère au tiers la propriété de la marchandise. Ce tiers endossataire ne peut récupérer la marchandise que si le porteur du warrant a été payé de sa créance.
Cela marche comme un gage mais cela respecte l’obligation du dessaisissement tout en le rendant gérable.
Ce sont des titres négociables qui représentent un gage sur des marchandises déterminées.
Mais ici, cette marchandise-là reste entre les mains de son propriétaire, à son domicile. Pour cela, il a fallu qu’une loi intervienne pour déroger au principe de la dépossession. Chaque warrant à domicile est donc régit par un texte ad hoc. Pour les entreprises commerciales, il existe trois sortes de warrants : le warrant industriel, le warrant pétrolier, le warrant hôtelier. Ils sont peu utilisés.
Ils présentent deux inconvénients : ils font l’objet d’une publicité qui jette le discrédit et la suspicion sur le débiteur. De plus le créancier court le risque de la disparition de la marchandise vu qu’il n’y pas dépossession.
Le seul warrant à domicile utilisé de façon effective est le warrant agricole (il date de 1898 et loi de 1906 incorporée dans le Code rural). L’exploitant agricole qui veut obtenir un crédit peut consentir un warrant sur tout ou partie de sa récolte au profit de l’établissement créditeur (CF : code rural). Ce dernier jouira d’un droit de préférence comme tout créancier gagiste.
Deux règles particulières :
Si la récole est vendue, le créancier ne peut pas se prévaloir d’un droit de suite contre le tiers acquéreur de bonne foi.
Dans la vie des affaires, le gage était une rareté car il suppose la dépossession aussi bien à l’égard du matériel que des marchandises. Mais l’entreprise ne peut pas se déposséder de cela puisqu’elle en a besoin pour son activité. Une ordonnance du 23 mars 2006 sur les sûretés a révolutionné la matière en créant un gage de droit commun sans dépossession ainsi qu’un nouveau gage des stocks.
Le gage de droit commun confère sur la marchandise grevée un droit de préférence au créancier qui en bénéficie (Article 2233 du Code civil). Il est régit par le code civil mais le code de commerce apporte deux dérogations simplificatrices :
— Faire vendre la chose engagée et se payer sur son prix. Problème ? Cette vente est assez formaliste et doit se faire en justice. Au civil, cela suppose que l’on recourt à une procédure de saisie, qu’on élabore un cahier des charges (droit de l’exécution forcée). En matière commerciale, c’est plus simple, si le gage est commercial, il suffit pour procéder à la vente publique d’une simple signification faite au débiteur (article 521-3). Dans les deux cas civil comme commercial, il est impossible de dispenser le gagiste de ces formalités en autorisant la vente amiable. La clause de « voie parée » qui dispenserait du caractère judiciaire est nulle. C’est interdit dans la convention du gage mais ça peut être convenu extérieurement.
— L’autre solution : prévoir par un pacte commissoire qui est une stipulation qui autorise le créancier à s’approprier le bien grevé en cas de défaut de paiement. C’est beaucoup plus avantageux que la vente car dans la vente d’autres créanciers peuvent être servis avant moi.
Or l’appropriation du bien me met à l’abri du concours avec les autres créanciers. Traditionnellement, le pacte commissoire était interdit, mais depuis 2006 la faculté de prévoir un pacte commissoire est valide, tant pour le gage commercial que le gage civil (article 2348 du code civil). Il faudra qu’un expert intervienne pour évaluer le bien sous-évalué. Le pacte est paralysé en cas d’ouverture d’une procédure collective (article 622-7 alinéa 1er du code de commerce).
L’infirmité traditionnelle du gage concernait la dépossession du débiteur. Les banquiers n’ont pas les locaux nécessaires pour recevoir la marchandise. On a donc trouvé des artifices :
Depuis l’ordonnance de 2006, le code civil prévoit un gage soit avec dépossession, soit sans dépossession opposable aux tiers par la publicité qui en est faite sur un registre spécial tenu au greffe du tribunal de commerce dans le ressort duquel le constituant a le siège de son domicile complété par la centralisation des informations sur un fichier national des gages sans dépossession. C’est au gagiste d’assurer cette publicité. Ce gage sans dépossession ne confère pas le droit de possession mais ça rend le gage opposable aux tiers. Il peut porter sur des choses tangibles que le constituant peut aliéner à charge de les remplacer. Voilà le gage de droit commun qui marche très bien.
Article 2337 du Code civil : Le gage est opposable aux tiers par la publicité qui en est faite.
Il l’est également par la dépossession entre les mains du créancier ou d’un tiers convenu du bien qui en fait l’objet.
Lorsque le gage a été régulièrement publié, les ayants cause à titre particulier du constituant ne peuvent se prévaloir de l’article 2276.
Domaine : peut être utilisé par toutes personnes morales de droit privé et les personnes physiques professionnelles.
La loi d’habilitation sur le gage civil sans dépossession prévoyait qu’il y aurait une règlementation du gage dans le code de commerce. Il a donc fallut en créer un dans le code de commerce.
Toutes les entreprises peuvent en bénéficier. Il n’est pas réservé à la garantie des créances commerciales.
Le formalisme est plus élaboré que le gage ordinaire. Il faut rédiger un acte sous seing privé composé de 7 mentions (voir article 527-1). Une publicité à peine de nullité est organisée par l’article 527-4 sur un registre tenu par le greffe du tribunal de commerce.
Effets :
– Ce sont les mêmes effets qu’un gage sans dépossession. L’aliénation est permise et le privilège (droit du créancier gagiste) passe des stocks aliénés aux stocks substitués. Le débiteur est responsable de la conservation des stocks en qualité et quantité (527-6) et le débiteur doit tenir un état des stocks engagés.
– Le droit de préférence s’exerce au moyen soit d’une réalisation forcée soit d’une attribution de propriété. Mais comble du paradoxe le pacte commissoire est interdit (article 527-2).
Les conflits entre créanciers et gagistes sont réglés par la publicité (article 527-4). Les créanciers inscrits le même jour viennent en concurrence.
On peut imaginer que le stock fasse l’objet et d’un gage de droit commun et d’un gage de droit commercial. La priorité est donnée au premier inscrit alors même qu’il ne figure pas sur le même registre.
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