Les contrats précaires

LES CONTRATS PRÉCAIRES.

   Les contrats précaires désignent les contrats à durée déterminé (CDD) et les contrats de travail temporaire.

  –  Le CDD : La conclusion d’un contrat à durée déterminée n’est possible que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire et seulement dans les cas énumérés par la loi. Il doit obligatoirement faire l’objet d’un écrit
Quel que soit le motif pour lequel il est conclu, un tel contrat ne peut avoir ni pour objet, ni pour effet, de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Conclu en dehors du cadre légal, il peut être considéré comme un contrat à durée indéterminée.

  –  Le contrat de travail temporaire (ou intérimaire) ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire, dénommée mission, et seulement dans les cas énumérés par la loi. Il ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise utilisatrice.

 

1e observation liminaire : la pratique qui a évolué. Ces contrats sont dits précaires car ne garantissent pas une stabilité de l’emploi, ce pourquoi ils sont regardés avec une certains défaveur par les législateurs successifs. Mais a s’en tenir a l’essentiel, infériorité du CDD par rapport au CDI n’est pas si évidente.

 A une époque, on mettait l’accent sur la fragilité du CDI, qui peut être résilié unilatéralement, alors que le CDD ne peut être rompu unilatéralement avant l’arrivée du terme. On insistait sur la garantie de stabilité

 Si la perspective s’est aujourd’hui complètement inversée pour 2 raisons. La première raison, c’est la conséquence du développement récent des règles protectrices du salarié en cas de rupture du contrat a durée indéterminée ; il faut une cause réelle et sérieuse de licenciement, sauf a s’exposer a des indemnités fortes.

La seconde raison, tient a la modification des pratiques : jusque dans les années 70, le CDI était peu pratiqué, et était plutôt réservé a des emplois hiérarchiquement élevés, et pour des durées longues.  Arrêt Chambre Sociale 1er juillet 1985 : CDD de 20 ans. Clauses de stabilité des emplois. On ne peut pas rompre le contrat sans faute grave.

 A partir des années 70, les pratiques changent radicalement ; le CDD est fréquemment utilisé, mais pour des contrats de faible qualification et de durée courte. Va se développer le travail temporaire. Progressivement, le CDD est devenu un moyen d’obtenir de la main d’œuvre sous-qualifiée, de permettre une flexibilité d’emploi, et de donner aux entreprises un relent d’emploi.

2e observation : la jurisprudence, soucieuse de protéger le salarié, n’a pas hésité à requalifier, disqualifier, certains contrats qualifiés de CDD. 1e démarche part de l’essence même du CDD ; d’une part il doit comporter un terme, d’autre part il ne peut pas prendre fin avant échéance du terme. De sorte que si le contrat prévoit une faculté de résiliation unilatérale, les 2 caractères ne sont pas remplis, et on requalifie le contrat en CDI. Seul le salarié peut agir en requalification.

 2e démarche de la jurisprudence : lorsqu’il y a eu des contrats, la jurisprudence s’est efforcée de lutter contre certains abus, de renouveler des CDD plusieurs fois de suite : en requalifiant l’ensemble des contrats successifs en CDI, même si chaque contrat successif était vu comme un CDD. Arrêt du 2 février 1994 : pour un employé qui avait été employé pendant plus de 20 ans.

 Malgré tout, la jurisprudence a été impuissante à lutter contre tous les abus. De sorte que le législateur a du intervenir. Loi de 1972 pour les contrats de travail temporaire, puis en 1979 premier texte sur les CDD. Puis on a assisté a des reflux d’une réglementation C’est une ordonnance du 11 août 1986, puis loi du 12 juillet 1990.

La loi de 1990 est encore intacte : malgré ces flux et reflux, on remarque 2 grandes tendances. Au-delà des contingences politiques et réactions juridiques. On a assiste a une certaine constance dans certains principes. Une principe demeure qui veut qu’un contrat précaire ne peut être conclu que pour exécution d’une tache précise et temporaire, et que d’autre part, qu’il ne peut avoir pour objet de pourvoir durablement un emploi permanent de l’entreprise.

En dépit des divergences politiques, il y a un certain consensus. Il faut permettre aux entreprises une certaine flexibilité.

Et aussi le rapprochement entre le régime juridique des CDD et le régime juridique des contrats de travail temporaire : le contenu des articles du Code du Travail sont essentiellement les mêmes Le contrat de travail temporaire établit une opération triangulaire.

 

SECTION 1 : LE RECOURS AU CONTRAT PRECAIRE.

 La durée des contrats doit avoir les formes imposées.

 

 

  PARAGRAPHE 1 : LES CAS DE RECOURS AUX CONTRATS PRECAIRES.

 Le CDD, quel que soit le motif, ne peut avoir ni pour objet, ni pour effet, de pourvoir durablement a un emploi lié a une activité normale et permanente de l’entreprise (L122-1 al1). L’alinéa 2 ajoute que le contrat de travail, comme le CTT, ne peut être utilisé que pour exécution d’une tache précise et temporaire.

 L122-3 : en aucun cas un CDD ou un CTT ne peut être conclu pour remplacer un salarié dont le contrat de travail est suspendu par suite d’un conflit collectif. 

 

  1. LES CAS DE RECOURS AUTORISÉS.

La loi du 12 juillet 1990 prévoit 3 grands cas de recours autorisés. Article L122-1-1 CDD, L124-2-1 CDT.

En cas de remplacement d’un salarié, c’est le cas le plus typique ; mais si on remplace quelqu’un qui n’est pas un salarié, ne vaut pas, arrêt 26 mars 2002.

Chambre Sociale 10 juillet 2001 : on attendait d’embaucher quelqu’un a durée indéterminée Le contrat est requalifié en CDI. ( ?)

Accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise. Si l’accroissement temporaire se reproduit régulièrement, on prend certains risques de requalification.

Et puis les cas pour lesquels il y a un régime juridique dérogatoire ; c’est les emplois a caractère saisonnier, les usages. « Pour pourvoir aux emplois a caractère saisonnier », (mais par exemple un salon annuel n’est pas un emploi saisonnier) « ou dans certains secteurs définis par décrets ou il est d’usage constant de ne pas recourir au CDI ».

2 observations a propos de ces contrats d’usage : les exploitations forestière, déménagement, spectacles, hôtellerie, audiovisuel, enseignement. Encore faut-il que ces emplois soient de nature temporaire. Exemple dans l’audiovisuel.

 

  1. CAS DE RECOURS INTERDITS.

En cas de conflit collectif, pour remplacer les travailleurs. Il est interdit d’utiliser des emplois précaires sans formation pour des métiers dangereux.

Il est interdit de recourir à des emplois précaires si l’entreprise a eu recours à des licenciements pour motifs économiques dans moins de 6 mois.

Cette interdiction ne s’applique qu’au poste concerné par le ou les licenciements économiques. Elle est écartée si le contrat n’excède pas 3 mois. Arrêt 12 février 1997.

3e interdiction : le délai de carence. Signifie qu’a l’issue d’un CDD, on ne peut embaucher la même personne pour le même poste, avant l’expiration d’un délai de carence, d’une durée équivalente d’un tiers de la mission. Ce délai de carence était porté à la moitié de la durée du 1er contrat, si le contrat est inférieur à 14 jours. Loi du 17 janvier 2002.

  Paragraphe 2 – La durée des contrats précaires

 A/ La durée initiale

 Le principe posé par la loi est que le contrat précaire (article L122-1-2) doit comporter un terme fixé avec précision dés sa conclusion du contrat mais comme souvent les principes comportent des exceptions.

 

1)      Une durée précise

 Une durée précise qui est courte même si le législateur peut prévoir des durées plus longues, c’est le cas du plan emploi-jeune, où les contrats à durée déterminée avaient en principe une durée de 5 ans.  Mais le système a été changé.

Pour le reste c’est une durée limitée, exagérément à six mois par l’ordonnance du 5 février 1982. Durée accrue avec l’ordonnance du 11 août 1986, on passe à 24 mois, et puis la durée ramenée à 18 mois avec la loi du 12 juillet 1990.

 Deux séries d’observations :

 Parfois cette durée maximum est diminuée et parfois augmentée.

 — Cette durée maximum ne vaut pas pour tous les types de contrats.

 

Elle est ramenée à 9 mois en cas d’attente de l’entrée en service effectif d’un salarié en contrat à durée indéterminée : Simplement la personne n’est pas libre tout de suite. Dans l’hypothèse de travaux urgents nécessaires pour des considérations de sécurité.

Cette durée est augmentée dans deux cas :

 

          24 mois en cas de départ définitif d’un salarié précédant la suppression de ce poste.

          Lorsque le contrat est exécuté à l’étranger, ou en cas de commande exceptionnelle à l’exportation. Dans ce cas la durée minimale est de 6 mois.

  Cette durée maximale de 18 mois est inapplicable dans le cas où le contrat est conclu au titre du 3° de l’article L122-1-1, c’est-à-dire des contrats d’usage. Ca concerne notamment les footballeurs, les sportifs professionnels.

 

2)      Les exceptions

 Lorsque le contrat est conclu pour remplacer un salarié absent il peut être conclu sans durée précise, peut ne pas comporter de terme précis mais dans ce cas, il doit être conclu pour une durée minimale. En l’absence de durée minimale, le contrat est susceptible d’être requalifié en contrat à durée indéterminée : Sociale 29 octobre 1996.

En pratique si l’absence risque très longue, vaut mieux engager un contrat à durée indéterminée.

 

B/ Le renouvellement

 La loi ne l’interdit pas mais traditionnellement, ce renouvellement est soumis à certaines conditions :

 D’abord un seul renouvellement est possible, ensuite la durée totale du contrat ne peut excéder la durée maximale autorisée par la loi (18 mois). Le principe est que normalement les conditions du renouvellement doivent être déterminées par le contrat, mais ici il suffit de prévoir un avenant au contrat avant la fin du contrat initial.

 Si le contrat de travail se poursuit après l’échéance du terme, le contrat est automatiquement requalifié en contrat à durée indéterminée. Mais rien n’empêche de remplacer un salarié sur des postes différents.

 

 Paragraphe 3 – Les formes des contrats précaires

 La loi pose l’exigence d’un écrit, à défaut il est réputé conclu pour une durée indéterminée : Article L122-3-1 du Code du travail.

Le contrat doit indiquer le motif du recours au contrat à durée déterminée. La loi prévoit que le contrat doit prévoir un certain nombre de mentions obligatoires. Il y  en a beaucoup et selon la loi de 1990, la forme ici joue au service du fond : On veut qu’il y ait un principe d’assimilation entre le salarié en contrat à durée déterminée et le salarié en contrat à durée indéterminée.

 Section 2 – Le régime juridique des contrats précaires

 Il faut examiner la situation des salariés, les droits des salariés avant d’examiner l’extinction du contrat à durée déterminée.

Paragraphe 1 – Le statut des salariés

 D’abord il existe un principe d’assimilation entre les contrat à durée déterminée et les contrat à durée indéterminée.

 

  1. A)    Le principe de l’égalité des droits

 Déjà le rapport Auroux l’expliquer bien. C’est l’idée de limiter un salariat à deux vitesses, et l’article L122-3-3 nous dit que sauf dispositions législations expresses, les dispositions légales et conventionnelles et celles résultant des usages, s’appliquent également au salarié lié par un contrat à durée déterminée.

Il faut que la convention collective soit indiquée dans le contrat et la rémunération ne doit pas être inférieure à un salarié de l’entreprise en contrat à durée indéterminée pour le même poste et même qualification.

 

  1. B)     La protection contre les accidents du travail

 C’est la protection physique des salariés précaires, l’employeur doit établir une liste des postes de travail présentant des risques pour la santé ou la sécurité du salarié sous contrat précaire. Il doit lui assurer une formation renforcée.

 

Paragraphe 2 – L’extinction des contrats précaires

 A/ L’extinction à l’échéance du terme

 Il ne peut être résilié unilatéralement sauf période d’essai. Le principe est l’extinction à l’échéance du terme de sorte que la rupture anticipée est normalement impossible.

Le principe est clair : C’est l’extinction du contrat à l’échéance du terme. 

Si la relation de travail se poursuit, le salarié peut demander la requalification automatique en contrat à durée indéterminée de plein droit. Si le contrat du salarié est suspendu pour maladie ou accident, cela n’empêche pas l’échéance du terme.

En pratique, bien souvent la relation de travail doit se poursuivre, de sorte qu’on a souvent utilisé les contrats précaires comme une sorte de pré-embauche. Le législateur fait en sorte de ne pas empêcher cette pratique.

Le principe est l’extinction du contrat mais on a voulu tenir compte de la situation précaire d’où la création de l’indemnité de précarité de l’emploi. L’accord interprofessionnel parle d’indemnité de fin de contrat. Le montant de cette indemnité est aujourd’hui identique qu’il s’agisse d’un contrat à durée déterminée ou d’un CTT depuis la loi du 17 janvier 2002, il est de 10% de l’ensemble de la rémunération perçus pendant la durée du contrat ou pendant la durée de la mission.

Cette indemnité n’est pas due dans quelques cas : CES, de même pour les contrats durée déterminée spéciaux dans le cadre de la formation. Si le salarié refuse un contrat à durée indéterminée, il n’aura pas d’indemnité de précarité.

 B/ La rupture anticipée

 1)      La rupture fautive

 Le contrat à durée déterminée ne peut être résilié avant l’échéance du terme.

Le principe est donc que la rupture qui interviendrait avant est une rupture fautive, les conséquences ne sont pas les mêmes selon que la rupture émane de l’employeur ou du salarié.

En cas de contrat à durée déterminée, si c’est l’employeur qui résilie sans raison et bien le salarié peut exiger l’intégralité des salaires qu’il aurait perçu jusqu’à l’échéance du terme.

S’il y a rupture anticipée par le salarié, depuis la loi du 17 janvier 2002, elle n’est pas toujours fautive, si le contrat à durée déterminée rompt le contrat avant l’échéance car embauché en contrat à durée indéterminée ailleurs alors sa rupture n’est pas fautive. Pour le reste s’il y a rupture fautive, il pourra être condamné à des dommages et intérêts. Il n’y a donc pas identité.

 

Dans le cas du CTT, ici on a une opération triangulaire, quelque fois c’est l’entreprise qui rompt le contrat. C’est gênant de condamner un entreprise de travail temporaire à payer. Elle devra payer si dans délai de trois jours elle ne présente pas au salarié une mission similaire.

Sauf accord des parties le contrat ne peut être rompu que pour faute grave ou force majeure.

 

Faute grave : On n’applique pas les règles du licenciement il concerne que le contrat à durée indéterminée. Il faudra respecter la procédure relative aux sanction disciplinaires. En ce qui concerne la notion de faute grave, c’est une faute liée à la personne, l’insuffisance de rendement, l’incompétence n’est pas un motif disciplinaire.

Fore majeure : Elle est entendue très strictement et que la notion de force majeure n’a qu’un rôle extrêmement résiduelle.

 

Section 3 – Les sanctions en cas de non respect des règles régissant les contrats précaires

 Paragraphe 1 – Les sanctions pénales

 Elles ont été étendues à tout les cas de conditions de formation du contrat à durée déterminée. Les peines ont été augmentées.

3500 € en cas d’infraction et 7000 € en cas de récidive.

Par ailleurs, désormais les syndicats peuvent exercer toutes les actions, même pénales ouvertes aux salariés en cas de violation des règles sur le contrat à durée déterminée ou le CTT. Il suffit simplement que le salarié ne s’y oppose pas.

 

Paragraphe 2 – Les sanctions civiles

 Ce n’est pas la nullité, c’est la requalification. La jurisprudence avait déjà utilisé ce procédé, requalification interprétation : Le juge redonne au contrat sa véritable nature. Avec les textes sur le contrat à durée déterminée, la requalification est une requalification sanction mais désormais on doit bien admettre que coexistent deux types d’actions en requalification : L’action en requalification en interprétation et l’action en requalification sanction.

 — Cette requalification sanction joue aussi bien en cas de violation des règles sur le contrat à durée déterminée qu’en cas de violation des règles sur le contrat à durée indéterminée. Lorsqu’il –requalification seule la nature du contrat change.

La requalification a pour effet essentiel de faire jouer les règles sur le contrat à durée indéterminée et les règles sur le licenciement. A priori c’est plus intéressant pour le salarié de faire requalifier son contrat mais pas sûr à cause de l’ancienneté. Donc parfois c’est plus intéressant au salarié de rester en contrat à durée indéterminée. La solution est la rupture du contrat, d’encaisser l’indemnité de précarité et ensuite demander la requalification. Arrêt du 9 mai 2001, Chambre Sociale. Dans tous les arrêts la Cour de cassation dit que seul le salarié peut demander la requalification. Arrêt  du 10 juillet 2002 qui le dit très clairement. Avant la loi de 1990, on distinguait la violation des règles de forme (présomption réfragable en contrat à durée indéterminée), violation des règles de fond (présomption irréfragable). A présent la sanction est la requalification, c’est une présomption irréfragable.

L’action devant le conseil des Prud’hommes dure longtemps, mais l’article L122-3-13 prévoit une procédure d’urgence. Le juge doit statuer dans un délai d’un mois et il n’y a pas ici de conciliation préalable : On passe directement devant le bureau de jugement : Il doit d’office ordonner le versement de l’indemnité équivalent à un mois de salaire.

Laisser un commentaire