Définition et critères du contrat de travail

LES CRITÈRES DU CONTRAT DE TRAVAIL.

On chercherait vainement dans le Code de travail ou Civil une définition du contrat de travail ; il n’y a pas de définition légale du contrat de travail. C’est en réalité le juge qui a dégagé les critères du contrat de travail ; malgré l’importance de l’apport jurisprudentiel, demeurent des difficultés résolues par le législateur, ou par la jurisprudence.

La loi n’en donne pas de définition, c’est donc la jurisprudence qui s’est efforcée de dégager les critères du contrat de travail, en fonction des circonstances de fait. Ceci étant, le juge n’est pas lié par la qualification donnée par les parties a leur contrat ; ce sont les éléments de fait qui sont déterminants.

Définition donnée par la jurisprudence, par la Cour de Cassation dans un arrêt de 1954 : « il y a un contrat de travail quand une personne s’engage à travailler pour le compte et sous la direction d’une autre moyennant rémunération ».

Définition : Le contrat de travail est la convention par laquelle une personne s’engage moyennant rémunération à fournir une prestation de travail au profit d’une autre personne sous la subordination de laquelle elle se place.

Dans toutes ces définitions, 3 éléments : –fourniture d’une prestation de travail, –moyennant une rémunération –sous la direction d’une autre personne, l’employeur.

Si les deux premiers élément sont nécessaires pour le contrat du travail, ne sont pas suffisants pour distinguer le contrat du travail d’autres contrats. En réalité, le critère déterminant c’est l’existence du lien de subordination.

PARAGRAPHE 1 : LES ÉLÉMENTS LIÉS AUX OBLIGATIONS RÉCIPROQUES DES PARTIES (TRAVAIL ET RÉMUNÉRATION) : ELEMENTS NÉCESSAIRES MAIS NON SUFFISANTS.

L’artisan maçon n’est pas le salarié du maître de l’ouvrage. Le notaire n’est pas salarié de son client. Le versement d’une rémunération, quel que soit son mode, ne suffit pas à caractériser son mode de paiement. Les obligations réciproques des parties au contrat de travail ne sont pas des critères positifs du contrat de travail ; en revanche, négativement, la réunion de ces deux éléments est nécessaire.

  1. LA REUNION NECESSAIRE DES DEUX ELEMENTS.

En leur absence, la qualification de contrat de travail est exclue.

  1. FAUTE DE TRAVAIL…

Faute de travail fourni personnellement par une personne, celle-ci ne saurait être considérée comme salariée.

« Faute de travail » : est-ce qu’un conseiller pour une société qui a une rémunération forfaitaire annuelle, est-ce un véritable travail ? La jurisprudence a estimé qu’aucun contrat de travail ne la liait à la société (pas d’heures fixes, objectifs du travail très vagues).

Faute de travail à finalité matérielle : la jurisprudence a périodiquement à connaître du lien unissant un ministre du culte à sa communauté confessionnelle : arrêt du 18 janvier 1993 par exemple. Des lors qu’on est loin de la finalité religieuse, le principe peut être écarté : professeur de théologie.

Faute de travail fourni personnellement : lorsque le prétendu salarié peut se faire remplacer, ou bien lorsque ce prétendu salarié peut lui même embaucher des salaries pour effectuer le travail demandé, il n’y a pas contrat de travail. La jurisprudence a estimé que le fait d’employer un ou plusieurs aides de travail est exclusif du contrat de travail.

  1. FAUTE DE REMUNERATION…

Il n’y a pas de contrat de travail. L’activité exercée sans rémunération, des lors qu’on ne démontre pas une fraude, est exclusive d’un contrat de travail. Il n’y a pas de contrat de travail à titre gratuit. Ainsi, il n’y a pas de contrat de travail en principe en cas d’assistance bénévole, en cas d’assistance amicale ou familiale. Ou en cas d’entre aide agricole.

Il y a malgré tout un certain nombre de difficultés.

Il y a nombre d’association humanitaires, caritatives, et il y a pas mal de contentieux sur un certain nombre de cas qui concerne aussi bien les compagnons d’Emmaüs (indemnisation forfaitaire tous les mois), les accompagnateurs de la Croix-Rouge.

La question peut être posée pour le conjoint qui collabore a l’activité de son époux et son épouse : L784-1 du Code du Travail : sont applicables au conjoints du chef d’entreprise salariés de l’entreprise. Des lors qu’un conjoint exerce une activité a titre professionnelle, et perçoit une rémunération, est présumé conjoint salarié. Arrêt 6 novembre 2001 : la Cour de Cassation n’a pas cherché a savoir s’il y avait lien de subordination.

Faute de rémunération, peu importe le mode de rémunération, peut être une rémunération en nature, lorsque l’avantage en nature prend la forme d’une mise a disposition du logement : exemple du gardien d’immeuble (concierge).

Mais peuvent demeurer des difficultés. On peut se demander si l’on se trouve dans certains cas en présence d’un locataire s’acquittant de son loyer en fourniture de prestations en nature, ou un salarié rémunéré en nature ?

  1. LES ENSEIGNEMENTS DE CES DEUX CRITERES NEGATIFS.
  2. LES CARACTERES DU CONTRAT DE TRAVAIL.

Est nécessairement un contrat à titre onéreux. Il n’y a pas de contrat de travail à titre gratuit. Mais on peut souligner 3 autres caractères :

1-Le contrat de travail est un contrat synallagmatique, dans la mesure où les parties contractantes sont réciproquement la cause l’une de l’autre. Le salarié a droit a une rémunération, et inversement l’employeur rémunéré le salarié parce qu’il travaille. Cette double interdépendance appelle quelques remarques : ce n’est pas tant la prestation de travail même qui justifie corrélativement la rémunération que le fait du salarié être a la disposition de son employeur pour effectuer le travail fixé. Exemple : le salarié qui ne peut pas travailler parce que établissement est occupé par les grévistes, a droit a son salaire, car est a la disposition pour travailler. On a pu dire qu’il existe un salaire d’inactivité. Dans les faits, depuis année 77 et 78, le salarié malade à droit pendant la durée de son absence a une indemnité versée par l’employeur. En pratique, les conventions collectives prévoient que tout salarié malade pendant un certain temps aura l’intégralité de son salaire, et l’employeur se fera rembourser la moitié par la caisse d’assurance maladie.

En sens inverse, il y a un certain durcissement du contrat synallagmatique. Pour le chômage technique ou partiel ; dans ce cas, le salarié ne peut prétendre a son salaire, il a droit a une indemnité de chômage partiel. Si l’employeur ne fait pas les démarches pour ceci, le salarié n’aura pas droit a l’indemnité de chômage partiel, il aura droit a intégralité de son salaire, car l’employeur a commis une faute. Désormais, depuis les arrêts du 10 juillet 2002, les clauses de non concurrence ne sont valables que s’il y a une contrepartie.

2-Exécution successive : en cas de nullité ou résolution du contrat de travail, les prestations des salariés sont insusceptibles de répétition. A supposer que la nullité soit prononcée, la résolution a nullité n’opère pas de manière rétroactive.

3-Contrat conclu intuitu personae : en considération de la personne. L’observation ne se vérifie pleinement que du cote des salariés. Ce caractère personnaliste explique par exemple que le salarié ne puisse pas se faire remplacer par quelqu’un d’autre. Cela explique aussi que le contrat est intransmissible a cause de mort. Du cote de l’employeur, le contrat est aussi intuitu personae ; lors du recrutement, l’employeur choisi le salarié. Ce caractère peut être battu en brèche par la suite. Article L122-12 al 2 du Code de Travail, qui dit qu’en cas de changement d’employeur, les contrats de travail des salariés sont transférés au nouvel employeur. Il y a une sorte de transfert automatique mécanique du contrat de travail.

  1. CRITERES : DES ELEMENTS DE PREUVE.

Ce sont des éléments de fait qui viennent conforter l’existence d’un lien de subordination. Le fait de travailler, de fournir une prestation de travail au profit d’une seule personne est un éléments souvent pris en considération par la jurisprudence : c’est un élément qui fait présumer l’idée de participation a l’entreprise d’autrui. L’exclusivité fait habituellement présumer l’existence d’un lien de subordination.

Par ailleurs, le mode de rémunération, même si une rémunération a la tache ne sont pas exclusives d’un contrat de travail, est souvent un indice que la fixité et que la régularité d’une rémunération fait présumer l’existence d’un contrat de travail : « Constituent de forts indices de ce que le travail est effectue sous la direction et le contrôle direct de la personne qui rémunère ».

PARAGRAPHE 2 : LE LIEN DE SUBORDINATION

Ce qui caractérise le contrat de travail, c’est que le salarie effectue son travail sous la rémunération d’une autre personne ; c’est un critère jurisprudentiel. Le législateur confirme ce critère Exemple d’une loi du 31 décembre 1990 reformant les professions judiciaire et juridiques ; l’avocat n’est soumis à un lien de subordination envers son employeur que pour la détermination à ses conditions de travail.

Selon une jurisprudence constante, ce rapport de subordination constitue le facteur essentiel « que le salariat soit lié a une certaine subordination, c’est une évidence ; mais quelle subordination ? ».

6 séries d’observations :

1-Economique ou juridique ?La réponse est simple parce que la jurisprudence a toujours décidé que cette subordination était juridique ; par la possibilité de l’employeur de donner des directives, instructions, etc.

A plusieurs reprises, une partie de la doctrine a souhaité que soit substituée à cette idée de subordination juridique, l’idée de subordination économique. L’idée est que l’infériorité caractéristique du salarié vient de ce qu’il a besoin pour vivre du travail que lui fournit l’employeur, et du salaire qu’il lui verse. Initialement, il s’agissait d’étendre le bénéfice du droit social a certains salariés sous-protégés (salaries a domicile…). Plus récemment, l’idée a été reprise en fonction de nouvelles situation économiques, avec le développement de la sous-traitance. La généralisation de contrats de distribution exclusive, les contrats d’intégration en agriculture, et les nouvelles formes de travail (télématiques, à domicile…). Ces nouvelles situations économiques généralisées manifestent une nouvelle dépendance.

Pour le sous-traitant, il n’y a pas de dépendance juridique, seulement économique. Arrêt de 1931 de la Cour de Cassation, qui a rejeté la subordination économique. La Cour de Cassation a de nouveau manifesté son hostilité au critère de dépendance économique, ce critère étant beaucoup trop extensif et imprécis. Certains auteurs ont parfois pris prétexte de certains arrêts disant que la jurisprudence allait évoluer : Arrêt de la Chambre criminelle du 29 octobre 1985, on a pu observer que ce critère aurait pu orienter le juge vers la qualification du contrat de travail. La Cour d’Appel, dans un arrêt cassé du 19 décembre 2000, la dépendance économique ne suffit pas à caractériser le lien de subordination.

2-La relativité de la notion de subordination :la relativité doit être d’emblée soulignée selon la place dans la hiérarchie au sein de l’entreprise du salarié. Selon la situation hiérarchique, il est clair que la notion de subordination ne se conçoit pas de la même manière pour un ouvrier, employé, ou cadre de chef de service. De même, la notion de subordination ne se conçoit pas de la même manière selon la profession du salarié (le lien de subordination ne se conçoit pas de la même façon pour un maçon et pour un artiste). Il y a nécessairement une plus grande relativité de lien de subordination.

3-On a assisté à une généralisation professionnelle du salariat :il fut un temps ou une subordination était conçue comme incompatible avec l’exercice de certaines professions dites libérales. La question a été particulièrement posée pour les médecins ; on faisait valoir que la nécessaire indépendance des médecins dans le diagnostic était inconciliable avec la dépendance juridique qu’implique le contrat de travail. La jurisprudence n’en a pas moins permis l’exercice de la médecine dans le cadre d’une dépendance juridique. L’indépendance technique n’exclut pas la subordination juridique dans l’exercice de la médecine, il y a compatibilité entre les deux.

Le problème s’est posé pour d’autres professeurs, interprètes, traducteurs, etc. on a utilisé le terme de collaboration ; la Cour de Cassation a souvent cassé cette qualification donnée par les parties au contrat.

4-Comment va-t-on trouver l’indice de l’existence du lien de subordination?La Cour de Cassation le définit comme l’accomplissement du travail dans le cadre d’un service organisé. La subordination juridique est démontrée par l’accomplissement du travail dans le cadre de service organisé. Circonstances de lieu aussi ; ou même selon un itinéraire déterminé, ou une zone déterminée. Circonstance de temps : impossibilité pour l’intéressé de définir ses heures de travail. La mise a disposition de travail, de fournitures, etc.…

5-Plusieurs arrêts récents marquant une notion d’unification du travailleur, et qui marque le retour a un critère commun,et nuance le rôle du critère du service organisé qui n’est pas le critère du contrat de travail, mais un simple indice du lien de subordination. Dans plusieurs arrêts : arrêt Société Générale du 13 novembre 1996.

Attendu que le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler exécution, et de sanctionner les manquements de son subordonné. Attendu que le travail au sein d’un service organisé peut constituer un indice du lien de subordination lorsque l’employeur détermine unilatéralement les conditions exécution du travail. Le service organisé peut être un indice, mais ne se substitue pas au critère qui demeure le lien de subordination.

6-L’Arrêt Labanne. L’arrêt est cassé par la Cour de Cassation,qui considère qu’il y a un état de subordination (par le chauffeur de taxi) ; certains auteurs ont parlé de mosaïque du contrat de travail. Pour autant, arrêt de principe reste arrêt Société générale