L’ouverture de la succession (causes, lieu, date)

L’ouverture de la succession

La dévolution de la succession consiste à savoir qui recueille la succession c’est-à-dire qui sont les héritiers et quelle est la part qui leur est reconnue? La question de savoir qui recueille la succession suppose au préalable de se pencher sur les conditions de la succession. L’ouverture d’une succession soulève 3 questions :

  • quelles sont les causes d’ouverture?

  • à quel date s’ouvre-t-elle?

  • le lieu de l’ouverture.

Section 1 : Les causes d’ouverture de la succession

Au terme de l’article 720 du Code civil, les successions s’ouvrent par la mort au dernier domicile du défunt. C’est la mort qui déclenche l’ouverture de la succession et la mort civile ayant été abolit depuis 1854, seule la mort naturelle ouvre aujourd’hui la succession d’une personne. Le constat de mort donne lieu à l’établissement d’un acte de décès dressé par l’officier d’état civil dans les conditions inscrites à l’article 78 du Code civil. Constat effectué sur la base d’un certificat médical de décès. Dans certains cas particuliers, l’établissement de cet acte de décès ne sera pas toujours possible. Le constat matériel de mort ne pouvant être effectué, c’est l’hypothèse de la disparition. Dans le cas de l’absence, le décès de la personne résultera du jugement déclaratif d’absence qui emporte les effets d’un décès conformément à l’article 128 alinéa 1 du Code civil. Dans le cas de la disparition, au sens juridique du terme, c’est le jugement déclaratif de décès prononcé en cas de disparition d’une personne dans des circonstances de nature à mettre sa vie en danger, quand son corps n’a pu être retrouvé tiendra lieu de mort.

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Section 2 : La date d’ouverture de la succession

Elle pose la question de sa fixation dans le cas général mais aussi dans le cas particulier où plusieurs personnes décèdent dans un même événement.

I. Les règles générales de fixation de la date d’ouverture de la succession

A. Les principes

La date d’ouverture de la succession obéit à des règles différentes selon la cause d’ouverture :

  • décès matériellement constaté dans un acte de décès.

  • lié au cas particulier de l’absence ou de la disparition.

Dans le cas du décès constaté dans un acte de décès, la date du décès qui marque l’ouverture de la succession est énoncée dans l’acte conformément aux prescriptions inscrites à l’article 79 du Code civil qui prévoit que l’acte de décès énonce l’heure et le jour du décès.

Dans le cas de l’absence, le décès résultant du jugement déclaratif d’absence qui emporte les effets du décès à compter de sa transcription sur les registres de l’état civil, c’est la date de transcription du jugement qui ouvre la succession.

Dans le cas de la disparition, c’est la déclaration judiciaire qui fixe la date du décès et donc la date de l’ouverture de la succession en tenant compte des présomptions tirées des circonstances de la cause.

B. Les enjeux attachés à la date de l’ouverture de la succession

La date à laquelle s’ouvre la succession emporte des conséquences importantes :

  • c’est cette date qui fixe la vocation successorale. C’est à cette date que l’on apprécie la successibilité de celui qui est appelé à hériter et c’est à cette date que l’on se place pour apprécier si un héritier a les qualités légales pour hériter.

  • cette date permet aussi de savoir quelle loi est applicable à la succession en cas de conflit de loi dans le temps. Le principe en la matière est que la loi successorale applicable est celle qui est en vigueur au jour de l’ouverture de la succession sous réserve des dispositions de droit transitoire contenues dans les lois successorales récentes qui d’une manière générale prévoit des dispositions différentes de l’application de la loi nouvelle pour permettre au praticien de maitriser de nouvelles règles. Ou bien encore règle de façon particulière l’entrée en vigueur de certaines dispositions notamment lorsque ces dispositions améliorent les droits des successions.

  • cette même date interviendra aussi de façon déterminante dans les différentes étapes du règlement successoral notamment quand il s’agira d’apprécier la date du transfert des biens à l’héritier, quand il s’agira de fixer la date de naissance de l’indivision successorale, lorsque l’on devra fixer la date d’évaluation en valeur des biens ou la date d’exercice de l’option successorale.

II. Le cas particulier du décès de plusieurs personnes dans un même événement

Concernant la date du décès fixant la vocation successorale, des difficultés peuvent survenir lorsque plusieurs personnes meurent dans un même événement alors qu’elles sont appelées à la succession des unes des autres.

Exemple : une famille complète décède dans un accident de voiture : savoir qui est mort en premier? Problème.

Grâce aux énonciations des actes de décès, les constatations médicales qui ont pu être faites pour procéder à l’établissement de ces actes de décès et dans ce cas là il n’y aura aucune difficulté particulière. Les successions vont être réglées en suivant l’ordre qui aura pu être établit.

A l’inverse, si l’ordre des décès ne peut pas être établit même par tous moyens, la difficulté est de savoir qui succède à qui? L’enjeu est fondamental car c’est le dernier décédé qui a vocation à recueillir tous les biens.

Pour régler ce problème, à l’origine le code civil avait prévu de régler la difficulté grâce à la théorie des co-mourants. Cette théorie était basée sur des présomptions de survie qui étaient fondées sur l’âge, sur le sexe. Présomptions qui indiquaient qui était supposé avoir survécu à l’autre et qui permettait d’établir de façon artificielle l’ordre des décès.

Exemple : quand 2 personnes décédées dans un même événement avaient moins de 15 ans, on partait du principe que la plus âgée était supposée avoir survécu à la plus jeune. Autre exemple, à âge égal, l’homme était censé avoir survécu à la femme.

Ces présomptions étaient totalement artificielles et donc critiquables et difficiles à mettre en œuvre. Ce qui explique l’abrogation de cette théorie des co-mourants dans la loi du 3 décembre 2001 et son remplacement par de nouvelles dispositions beaucoup plus simples inscrites à l’article 725 du Code civil. Au terme de cet texte, lorsque 2 personnes dont l’une avait vocation à succéder à l’autre périssent dans le même événement, l’ordre des décès est établit par tous moyens. Si cet ordre ne peut pas être déterminé, la succession de chacune d’elle est dévolue sans que l’autre y soit appelée. Toutefois, si l’un des co-décédés laisse des descendants ceux-ci peuvent représenter leur auteur dans la succession de l’autre lorsque la représentation est admise. L’application de ce texte conduit à considérer en fait que lorsque 2 personnes ont péri dans un même événement et que l’un des co-mourants avait vocation à recueillir la succession de l’autre, 2 hypothèses devront être envisagées :

  • soit l’ordre des décès peut être établit et dans ce cas, les successions sont réglées dans l’ordre établit

  • soit l’ordre des décès ne peut être établit et dans ce cas, la règle subsidiaire qui est inscrite à l’article 725 alinéa 2 du Code civil conduit à considérer que les 2 succession seront dévolues indépendamment l’une de l’autre. On présume que les 2 personnes sont mortes simultanément et par conséquent qu’elle n’hérite pas l’une de l’autre. Par exception à cette règle, le texte prévoit dans son alinéa 3 une hypothèse où les successions ne seront pas réglées indépendamment l’une de l’autre, l’hypothèse qui est visée est celle où l’un des co-décédés laisse des descendants. Dans ce cas, les descendants pourront représenter leur auteur dans la succession de l’autre lorsque la représentation est admise.

Exemple pratique : soit une famille composée d’un père et de ses 2 fils et personne d’autre dans la famille. Si le père et l’un de ses fils décède dans le même accident de voiture sans que l’on puisse déterminer l’ordre des décès l’application de l’article 725 alinéa 2 aboutit au résultat suivant : la succession du père est dévolue entièrement au fils survivant sans que le fils co-mourant y soit appelé. La succession du fils va entièrement à son frère sans que le père co-mourant y soit appelé.

Soit une famille composée d’un père M. Dupont et de ses 2 fils Pierre et Jean (= Jean a un fils prénommé Julien). Si Dupont, le père, et Jean, son fils, décèdent dans un même accident sans que l’on puisse savoir qui est mort le premier, la solution sera la suivante : Julien, fils de Jean recueille toute la succession de son père Jean et à cette part va s’ajouter la moitié de la succession de son grand père Dupont, succession qui se partage entre Pierre (= le fils survivant) et Julien (= le petit fils qui a la succession en représentation de son père Jean). Cette dernière solution résulte de l’application de l’article 725 alinéa 3 car en effet, Jean l’un des co-décédés laisse un descendant Julien qui peut représenter son père dans la succession de Dupont.

Section 3 : Le lieu d’ouverture de la succession

I. Détermination du lieu de l’ouverture

L’article 720 du Code civil prévoit que le lieu d’ouverture de la succession est fixé au dernier domicile du défunt. Les notions de lieu d’ouverture de la succession et lieu du domicile sont différentes.

La notion juridique du « domicile » correspond au lieu de son principal établissement au jour du décès au sens de l’article 102 du Code civil et non au lieu de son décès tel qu’indiqué par l’acte de décès.

II. Les enjeux liés ou attachés au lieu d’ouverture de la succession

C’est ce lieu qui va commander, conditionner un certain nombre de règles de compétence.

Ce lieu d’ouverture de la succession fixe la compétente territoriale de la juridiction qui sera amenée à connaître des litiges intéressant la succession notamment les demandes formées entre héritiers, par les créanciers du défunts, relative à l’exécution des dispositions à cause de mort.

Ce lieu fixe également le lieu où seront faite les déclarations d’acceptation de la succession à concurrence de l’actif net ou encore de renonciation à la succession, ces déclarations devant être faite au greffe du TGI du dernier domicile du défunt.

Dans les successions qui comportent un élément d’extranéité c’est-à-dire les successions internationales, les règles de droit international privé déterminent la loi applicable à la succession autour de 2 grands principes :

  • la succession immobilière est régie par la loi du lieu de situation des immeubles.

  • en revanche, la succession mobilière est régie elle par la loi du dernier domicile du défunt

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