Responsabilité fondée sur la confiance en droit suisse

 

LA RESPONSABILITÉ FONDÉE SUR LA CONFIANCE

 

Cette responsabilité basée sur la confiance est celle qui pèse sur une personne qui a créé puis déçu de manière contraire à la bonne foi. Il faut qu’il existe entre le lésé et l’auteur de ces rapports de confiance un rapport spécial de confiance.

La responsabilité basée sur la confiance est donc une création des tribunaux de la jurisprudence fédérale et n’est prévue par aucune disposition légale.

 

En 1944, tout va bien dans le ciel helvétique, Swissair est florissante. Swissair a à ce moment-là une filiale (IGR) qui offrait à ces clients contre paiement anticipé d’une certaine somme la jouissance de résidences de vacances. C’était un modèle fréquent et très prisé par beaucoup de personnes. Le problème c’est que cette filiale a été vendue par la maison mère à une autre entreprise qui a fait faillite ultérieurement. Le tribunal fédéral a admis la responsabilité de la société mère en raison de la confiance que cette maison mère avait créée en faveur d’un client de la filiale qui a fait faillite (Wibru Holding). Le tribunal en est arrivé là car Swissair avait laissé sur ses prospectus de vente des déclarations assez fortes selon lesquelles cette filiale IGR était fiable car faisant partie de Swissair, marque de qualité helvétique. Ce qui ne fut pas le cas. Le problème c’est qu’entre Wibru Holding qui avait contracté avec IGR et pris des périodes de vacances pour ses actionnaires, associés et clients, il n’y avait aucun rapport contractuel. Il n’y avait pas en réalité de responsabilité délictuelle, aucun acte illicite n’avait été commis par la maison mère Swissair. Il n’y avait aucun enrichissement illégitime. Tout à fait logiquement, quand Wibru a ouvert action contre Swissair, les avocats se disaient qu’il n’y avait aucune accroche possible. Aucun des 3 types de sources d’obligation.

Qu’elle ne fut pas la surprise de Swissair quand le tribunal fédéral a admis la responsabilité de Swissair qui en laissant sa filiale faire une publicité de la sorte a trompé la confiance de ses clients. Une confiance avait été créée et a été déçue.

Beaucoup croyaient que cette jurisprudence n’allait pas persister. Hors l’année d’après, le tribunal va persister.

 

Conditions spéciales :

  • Il faut un rapport spécial entre le lésé et le responsable : les parties doivent être unies par des liens qui fondent un rapport de confiance. C’est-à-dire quelque chose qui fait naître des attentes légitimes entre les parties. Dans l’affaire Swissair, l’appartenance d’IGR à celle-ci ne suffisait pas à créer un rapport de confiance spécial entre Swissair et Wibru Holding. Ce qui a été déterminant, c’est qu’en réalité, dans les documents publicitaires d’IGR il apparaissait effectivement qu’on mettait en avant le soutien du groupe Swissair aux activités d’IGR. Wibru a eu sa confiance confortée par Swissair. En cela laissait le rapport spécial de confiance exigé pour ce type deresponsabilité.
  • Il faut que le responsable ait provoqué des attentes chez la victime : le responsable doit avoir suscité des espoirs légitimes chez la victime. Dans l’arrêt Swissair, la documentation connue de la maison mère faisait effectivement naître l’idée que par son appartenanceàSwissair,IGRauraitmoyendefairefaceàsesresponsabilitésfinancières.
  • Responsable a déçu les attentes du lésé : il faut avoir déçu les attentes légitimes. Pour Wibru, en réalité les informations transmises sur IGR se sont avérées fort optimiste quand la faillite fut venue. Par conséquent, cette confiance a évidemment étédéçue.
  • Toute responsabilité doit répondre aux conditions générales de la responsabilité.

Conditions générales :

  • Le préjudice : péjoration de la situation de la victime qui regroupe le dommage (corporel et financier) et le tort moral (souffrance psychique). Dans l’arrêt Swissair, le préjudice correspondait au montant perdu dans la
  • Le rapport de causalité : il doit être non-naturel, il doit être adéquat : il faut que ce dommage ait été créé raisonnablement par la violation du droit en question. Pour Swissair, on peut en discuter dans la mesure où il fallait établir que Wibru n’aurait tout simplement pas contracté avec IGR si celle-ci ne s’était pas précisément prévalue de ne pas être associée à Swissair. Les juges ont été convaincus par le tapage publicitaire d’IGR qui mettait en avant son appartenance à
  • La faute : il s’agit d’un manquement, d’un devoir imposé par un acte juridique. Dans l’affaire Swissair, la faute résidait probablement dans la négligence du groupe en laissant sa filiale tromper ses clients, en faisant apparaître de manière trop évidente un support financier qui n’existait

Prescription :

La responsabilité basée sur la confiance dont la source est connue, la jurisprudence. Mais celle-ci n’a pas défini la question de la prescription. Elle n’a pas été tranchée par le tribunal fédéral. On peut s’attendre de manière évidente que le tribunal fédéral ait la même approche pour la responsabilité précontractuelle que pour celle basée sur la confiance car toutes deux fondées sur la jurisprudence. Prescription relative : 1 an, absolue : 10ans.

ARRET GROSSEN

 

« La Fédération suisse de lutte amateur (FSLA) a fixé les critères de sélection du candidat qui représentera la Suisse aux championnats du monde de lutte.

René Grossen remplissait l’ensemble des critères de sélection. Il a assisté au camp d’entraînement en vue de cette compétition et s’est rendu à un tournoi préparatoire àBratislava. Dans la mesure il estsalarié,ilaprendredescongésnonpayéspourserendreà cetournoietàcestage.

Toutefois, la FSLA a choisi un autre concurrent, Ludwig Küng, qui ne remplissait pas tous les critères mais qui a vaincu René Gossen peu avant les championnats du monde dans un combat que la FSLA a organisé spécifiquement pour les départager.

René Grossen a ouvert action contre la FSLA. »

Y’a-t-il une responsabilité contractuelle. Grossen n’était même pas membre de la FSLA, simplement un candidat externe. On voyait mal comment on pouvait construire une éventuelle responsabilité contractuelle.

Y’avait-il une responsabilité délictuelle civile de la FSLA ? Quel devoir avait-elle violé ? Là encore à part le fait que franchement elle avait pris une décision de mauvaise foi, on ne voyait pas une base juridique nécessaire et suffisante pour donner raison à Mr. Grossen.

Enrichissement illégitime ? Mr. Grossen s’était appauvri mais la FSLA ne s’était pas enrichie. Ici le tribunal fédéral va générer pour la deuxième foi dans son histoire va construire cette responsabilité fondée sur la confiance. Peu importe si elle n’avait pas d’obligation envers Grossen, la FSLA a créé des attentes légitimes et a déçu celles-ci. Elle va devoir réparer le dommage créé à Mr.Grossen.

Dès qu’il existe une responsabilité réglementée il ne peut pas y avoir plac