Le régime des actes de commerce (preuve, juridiction compétente…)

Un régime propre appliqué à l’acte de commerce

A une différence de nature correspond une différence de régime. Si il y a une différence de qualification juridique, a cette différence doit logiquement corresponde une différence de régime, régime spécifique. C’est un principe fondamental en droit. La qualification d’acte de commerce est importante car elle détermine le régime juridique de l’acte.

1°) Les actes doublement commerciaux ou acte purement commerciaux

Certains actes sont commerciaux pour toutes les parties, ils sont soumis de manière homogène au droit commercial. Tel est le cas notamment du contrat passé entre deux commerçants dans le cadre de leur commerce est purement commercial. Par exemple : achat de fournitures par un commerçant auprès de son fournisseur. Le droit applicable à cet acte purement commercial se caractérise par des règles dérogatoires au droit commun c’est à dire au droit civil. Le régime de l’acte commercial va être irrigué par ces impératifs du monde des affaires, de souplesse, rapidité…

A) La compétence d’attribution des tribunaux de commerce

Le principe est posé par l’article L721-3 (3°) du code de commerce qui énonce notamment que les tribunaux de commerce connaissent des contestations relatives aux actes de commerce entre toute personne. Les Tribunaux de Commerce sont compétents pour statuer sur les litiges opposants les parties a un acte de commerce. Toutefois la compétence des Tribunaux de Commerce est plus générale, elle s’applique encore à toute contestation entre commerçant (1°) ou encore à toute contestation relative à des sociétés commerciale (2°).

B) La preuve des actes de commerce entre commerçants

1°) Le principe du droit civil : la limitation des modes de preuve

En droit civil, les obligations qui découlent d’un acte juridique et relatives à un acte d’un montant supérieur à 1500euros doivent être prouvées au moyen d’un écrit pré constitué. Ce principe c’est l’article 1359 du Code Civil. L’écrit s’impose au-delà d’un certain montant. Aujourd’hui c’est l’article 1377 qui restreint les conditions d’admission de la date certaine des actes juridiques. Les règles de preuve en droit commun sont très rigoureuses mais cette rigueur est aujourd’hui assouplie à bien des égards. Il existe de nombreuses exceptions civiles c’est notamment l’article 1361 et suivants du Code Civil relatifs aux règles du commencement de preuve par écrit. Exception en cas d’impossibilité matérielle ou morale de se procurer un écrit ou s’il est d’usage de ne pas établir un écrit ou lorsque l’écrit a été perdu par force majeure. L’exception la plus grande c’est l’exception qui concerne la matière commerciale. Jusqu »à la réforme de 2016, exception exprimé par l’article 1341 alinéa 2 du Code Civil qui indiquait à propos de la règle de l’alinéa 1 qu’il en allait ainsi sans préjudice de ce qui est prescrit dans les lois relatives au commerce.

2°) L’exception du droit commercial : le principe de liberté de la preuve

Le principe de liberté de la preuve est une règle emblématique propre au droit commercial c’est l’article L110-3 du code de commerce « à l’égard des commerçants, les actes de commerce peuvent se prouver par tous moyens à moins qu’il n’en soit autrement disposé par la loi ». Les exigences relatives à la date certaine des actes juridiques ne s’appliquent pas dans la matière commerciale. On peut alors prouver par écrit mais aussi par les factures, par des correspondances, par les livres tenus par les commerçants ou encore par simple témoignages. Le juge appréciera souverainement ces preuves qui sont toutes recevables devant lui.

L’application de la liberté de la preuve est cependant subordonnée à une double condition :

L’opération doit être qualifiée d’acte de commerce

La preuve doit être apportée contre un commerçant.

Ces deux critères sont cumulatifs c’est dire que la seule qualification objective de l’opération litigieuse en acte de commerce ne suffit pas à l’application du principe. En pratique, le non commerçant qui participe à un acte de commerce ne risque pas de se voir opposer une règle propre au monde des commerçants alors qu’il n’a pas intégré ce monde des commerçants. Il faut aussi ajouter que dans certains il y a des exceptions comme le cas où la loi écarte spécifiquement ce système. On peut évoquer deux exemples. (1) hypothèse des opérations sur fonds de commerce, article L141-1 du Code de commerce. (2) hypothèse des contrats de société, article 1835 du Code Civil.

L’ancien article 1330 du Code Civil disposait que les livres des marchands font preuve contre eux mais celui qui veut en tirer avantage ne peut les diviser en ce qu’ils contiennent de contraire à sa prétention. Mais cette règle ne saurait jouer contre un non commerçant. L’ancien article 1329 du Code Civil prévoyait que les registres des marchands ne jouent pas contre les personnes non marchandes des preuves. Nul ne peut en principe se constituer preuve à soit même mais ce fameux principe de liberté de la preuve en matière commerciale est un principe contraire.

Aujourd’hui c’est l’article 1378 du Code Civil remplace l’ancien article 1330 et 1329. La réforme remplace le mot marchand par le mot professionnel car le mot marchand a été considéré comme obsolète pour décrire le monde des affaires contemporain. Expansion du droit commercial qui s’applique aussi aux autres professionnels indépendants qui apparaissent de plus en plus comme acteurs du monde des affaires au même titre que les commerçants.

C) la solidarité des débiteurs tenus commercialement

1°) Définition de la notion de solidarité en droit commun

Qu’est-ce que la solidarité ? C’est une modalité de l’obligation comportant une pluralité de sujets qui en empêche la division. L’obligation est un lien de droit entre un débiteur et un créancier. Une modalité de l’obligation renvoie alors à l’idée d’une spécificité qui peut affecter l’obligation pas tout le temps puisque l’obligation peut être pure et simple si elle ne l’est pas, elle peut être affecté par une modalité particulière, spécificité qui tient à son exigibilité ou à son existence même.

L’idée c’est que lorsqu’ils y a plusieurs débiteurs qui s’engagent envers un même créancier, la solidarité autorisera le créancier à demander le paiement de la totalité de la dette a l’un quelconque des débiteurs étant précisé que le paiement fait par l’un des débiteur libère les autres. Exemple : si A et B s’engagent envers un créancier à payer 1000euros, si pas de solidarité, la dette se divise entre les deux débiteurs, le créancier pourra que réclamer que 500 à l’un et 500 à l’autre. Alors que si on ajoute une solidarité, le créancier peut réclamer les 1000euros à A ou B. Celui des débiteurs qui a payé dispose d’un recourt contre son codébiteur pour obtenir le remboursement de sa part. Or en droit commun, la solidarité ne se présume pas, le principe c’est que la dette se divise de plein droit entre les débiteurs.

La réforme de 2016 consacre de manière plus claire le principe de la division de plein droit de la dette qui s’oppose à la solidarité. La solidarité si elle ne présume pas peut être prévue dans certains cas par la loi ou stipuler conventionnellement. Exemple : les époux dont les dettes qui ont pour objet l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants, sont gouvernés par le principe de solidarité, article 220 du Code Civil.

2°) Application de la règle en matière commerciale

La règle selon laquelle la solidarité ne se présume pas n’est pas applicable en droit commercial. Au contraire, il faut ici évoquer la présomption de solidarité des débiteurs tenus commercialement. Cette présomption résulte d’un usage du droit commercial consacré par la jurisprudence. Les débiteurs sont tenus commercialement, selon l’expression de la cour de cassation, ils sont obligés de manière solidaire mais les parties ou la loi peut écarter cette solidarité. Cette règle semble remonter à un arrêt de la cour de cassation de 1929. Cet usage paraît contra legem et évince l’ancien article 1202 qui posait la règle de la dette de plein droit, aujourd’hui, article 1309.

On retrouve le débat entre commercialité objective et commercialité subjective. La question est de savoir si la présomption de commercialité est applicable aux obligations nées d’un acte de commerce (objective) ou si elle participe au régime juridique applicable aux commerçants (subjective) ? La doctrine est divisée sur ce point, certains estiment qu’un non commerçant participant à un acte de commerce devrait être tenu solidairement autrement dit prise en compte de la qualification objective de l’acte. D’autres estiment que seuls les commerçants devraient être tenus solidairement par cette règle coutumière, qualification surjective. La commercialité objective prime pour la cour de cassation => arrêt de la cour de cassation du 16 Janvier 1990. La cour de cassation énonce que la solidarité s’attache de plein droit à l’obligation de nature commerciale qui était contractée. Cependant cette solution est critiquable car conduit a imposé la règle de la solidarité a des non commerçants, alors qu’en droit commun c’est l’inverse. La rigueur de la solidarité présumée en matière commerciale ne devrait pas être imposée aux non commerçants.

D) les autres règles rattachées à la sphère commerciale

Certaines règles étaient traditionnellement rattachées au droit commercial, il en va ainsi de l’admission facilité de ce qu’on appelle l’anatocisme.

1°) L’admission facilité de l’anatocisme

On enseigne traditionnellement que le droit commercial autorise par rapport au droit civil un recourt facilité à l’anatocisme. C’est un procédé favorable au créancier impayé. Ce procédé permet la capitalisation des intérêts échus d’une somme d’argent de manière que les intérêts capitalisés produisent à leur tour des intérêts. Exemple : un débiteur doit 10000euros à la banque avec un taux d’intérêt de 5% par an, au bout d’un an il doit à son créancier 500euros d’intérêt. L’anatocisme consiste en l’intégration de cet intérêt dans le capital, le débiteur doit donc à titre principe 10500euros. Ces intérêts vont à leur tour produire de nouveaux intérêts. Au terme de la deuxième année, il devra 10 500euros + 5%.

L’anatocisme a longtemps été interdit car considéré comme une pratique dangereuse, admit de manière restreinte par le code de 1804, article 1343-2 du Code Civil, interdit pas l’anatocisme mais l’insert dans d’étroite limite, procédé exceptionnel. Cette admission restreinte en droit commun se justifie par un souci de production, pas de dette trop grande.

Il en va différemment en matière commerciale, l’article 1343-2 du Code Civil est exclu en matière commerciale. Les conditions posées par les textes en droit civil ne trouvent pas à s’appliquer dans la sphère commerciale. Par conséquent, la capitalisation des intérêts est possible en matière commerciale même pour une période inférieure à une année. Cette exclusion de la règle civile ne tient pas à la qualité des parties c’est à dire qu’on ne peut pas dire que cette règle est exclue entre les commerçants, la règle civile ne tient pas non plus la nature de l’acte. On ne peut pas dire que l’exclusion de l’article 1343-2 est valable pour les actes de commerce. Cette exclusion ne s’applique qu’en matière de compte courant. Cette exclusion de la règle civile c’est une exception jurisprudentielle qui ne concerne pas toute la matière commerciale.

C’est la cour de cassation qui a prévu cette dérogation à la matière civile dans un arrêt, civ 1 en date du 4 Décembre 1990 –> la dérogation admisse à l’article 1343-2 (ancien 1154) est limité aux seuls comptes courants. L’anatocisme n’est pas donc pas admit de manière plus souple au droit commercial, cette admission n’est que pour la technique du compte courant. Le compte courant c’est un précédé usité dans les relations d’affaires par lequel deux personnes en prévision des opérations qu’elles feront ensemble, conviennent de fusionner leurs droits et obligations réciproques en un solde unique au régime unitaire. Il est prévu que les opérations inscrite dans ce compte ne donne pas lieu à un règlement séparé mais elles se balanceront entre elles, pour ne laisser subsister qu’un solde indifférencié non exigible avant la clôture du compte .les opérations réalisées par les parties entrent dans le réceptacle du compte courant, elles perdent donc leur individualité en se transformant en article de compte (on appelle ça l’effet novatoire).

Ce mécanisme particulier sur lequel repose le compte courant autorise une intégration automatique des créances d’intérêt produites par le capital impayé sans que les conditions de l’article 1343-2 n’aient à être remplies. La créance d’intérêt lorsqu’elle fusionne avec les autres obligations des parties perd son individualité et devient apte à produire des intérêts supplémentaires.

2°) L’exécution renforcée des obligations

On enseigne classiquement une spécificité du droit commercial, une des grandes spécificités c’est que les exigences particulières du commerce commanderaient un traitement simplifié et facilité de l’exécution forcée des obligations commerciales. Une personne qui est tenue commerciale lorsqu’elle est confrontée au défaut d’exécution de son partenaire, elle doit pouvoir réagir au plus vite afin de ne pas rencontrer des difficultés financières fâcheuses, il faut être très réactif en droit commercial. Les règles doivent être plus efficaces pour ne pas nuire à la bonne marche des affaires. Certaines règles spécifiques à la matière commerciale seraient l’expression de cet impératif d’efficacité.

Cette spécificité du droit commercial est a nuancé. En réalité, beaucoup d’exemples que l’on avance habituellement ce n’est pas très convaincant.

a) la faculté de remplacement

Illustre bien que l’efficacité prétendument supérieure du droit commercial est relative. C’est une possibilité qui permet au créancier d’obtenir satisfaction en procédant lui-même à l’exécution de la prestation où en la confiant à un tiers, tout en faisant peser le poids financier de ces démarches sur le débiteur. La faculté de remplacement existe en droit civil mais le droit commercial l’admet largement, mécanisme que l’on rencontre souvent. En droit commercial, celui qui n’obtient pas livraison d’un bien promit va pouvoir s’adresser à une autre personne que son cocontractant initial pour obtenir un bien semblable. Son cocontractant initial va lui devoir la différence de prix + dommages et intérêts, or en matière commerciale, la jurisprudence admet cette faculté de remplacement sans la subordonnée à une demande en justice préalable.

Alors que, du côté du droit civil, l’article 1222 du Code Civil offre aussi une faculté de remplacement au créancier insatisfait, sauf qu’en principe il faut pour subordonner cette faculté de remplacement, une demande en justice. Le mécanisme diffère donc dans ces modalités de mise en œuvre. En matière commerciale, on disait que la faculté de remplacement était de droit, le juge ne pouvait pas la refuser si l’une des parties conteste le remplacement opéré. En matière civile, le mécanisme n’opérait pas de droit, intervention judiciaire et juge peut refuser d’autoriser le remplacement. Depuis la réforme des obligations de 2016, l’article 1222 du Code Civil n’est plus aussi clair que l’ancien article 1144 du Code Civil sur la faculté de remplacement, désormais « après mise en demeure le créancier peut aussi dans un délai et un court raisonnable pour faire exécuter lui-même l’obligation… ». Il semblerait que la faculté de remplacement en droit civil s’aligne sur celle du droit commercial, autorisation préalable pas nécessaire. Même avant la réforme, les contractants en droit civil pouvaient toujours stipuler une clause de remplacement extra judiciaire. Faculté de remplacement pas légale mais conventionnelle, pas besoin du juge pour la mettre en œuvre.

b) la réfaction du contrat

C’est un mécanisme qui permet de sanctionner une inexécution partielle d’une obligation par une révision du contrat qui consiste à diminuer de façon proportionnelle l’obligation réciproque. Mécanisme de diminution de prix en cas d’inexécution partielle du contrat. Ce mécanisme est avant tout commercial, notamment utilisé dans les contrats de vente commerciale. On admet dans ce type de contrat que l’acquéreur tenu commercialement peut en cas de non-conformité du bien acquit demander au juge la réfaction du contrat c’est à dire en pratique obtenir une diminution judiciaire du prix. Si le prix a déjà été payé on obtention le remboursement d’une fraction du prix, or jusqu’à très récemment (réforme de 2016), le droit commun de la vente ne l’autorisait pas, permit dans le ventes commerciales mais pas dans le droit commun de la vente. Plus grande efficacité de la matière commerciale par rapport au droit civil. L’article 1223 du Code Civil consacre aujourd’hui la possibilité de réfaction du contrat. Il faut la encore relativiser fortement cette spécificité du droit commercial qui ne l’est plus. Sorte d’alignement entre droit commercial et civil.

Avant la réforme, l’acheteur pouvait en droit civil obtenir des DOMMAGES ET INTÉRÊTS pour défaut de conformité de l’objet livré au créancier, DOMMAGES ET INTÉRÊTS venaient s’imputer sur le prix de vente. Même avant la réforme on avait en droit civil une forme de diminution indirecte du prix.

c) la mise en demeure

Définition : c’est une formalité nécessaire et préalable à l’exercice d’une action et au prononcé de la sanction en cause. La mise en demeurer était traditionnellement perçue comme la notification d’un retard dans l’obligation. Aujourd’hui, on l’analyse d’avantage comme un précédé qui vise d’abord à avertir le débiteur de la sanction qui va tomber dessus si il ne s’exécute pas. Mécanisme qu’on retrouve dans les deux matières.

On enseigne traditionnellement qu’en matière commerciale le mise ne demeurer est facilitée car elle peut se faire librement notamment par lettre simple. En réalité, quand on regarde du côté de la mise en demeure en droit civil, pas flagrant. Aujourd’hui, selon article 1344 du Code Civil le débiteur est mis en demeurer de payé soit par une sommation ou un acte portant interpellation suffisante soit si le contrat le prévoit par la seule exigibilité de l’obligation. La somation c’est un acte huissier, procédure lente, longue, coûteuse. Le Code Civil, acte portant interpellation suffisante –> lettre recommandée avec avis de réception en pratique. La prétendue plus grande efficacité du droit commercial est une idée fausse, une « lettre simple » suffit aussi en droit civil.

d) la réticence au délai de paiement

Le souci de rapidité qui caractérise le droit commerciale le rendrait retissent aux délais de paiement pour les débiteurs en retard pour s’exécuter dans leurs obligations, là où le Code Civil se montrait quant à lui plus accueillant. Selon l’article 1343-5 du Code Civil, le juge peut compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues. On appelle cela aussi les délais de grâce.

En réalité, là encore, il faut relativiser la différence entre le droit civil et le droit commercial. Tout au plus indique-on qu’il existerait une certaine tendance du juge commercial à refuser dans les contrats d’affaire d’accorder des délais de paiement. Ponctuellement certains textes commerciaux excluent la possibilité de demander des délais de paiement sur ce fondement. Ici, l’exemple c’est la lettre de change (article L511-81 du code de commerce). Mise à part cette exclusion ponctuelle, pas de grand particularisme du droit des affaires, simple pratique judiciaire.

Les textes ponctuels qui excluent la possibilité des demander des délais de paiement existe aussi en matière civile. Exemple : dettes d’aliments, obligation alimentaire. L’article 1343-5 alinéa 6 du Code Civil prévoit que les délais de grâce ne s’appliquent pas aux dettes d’aliments. Les dérogations ne sont pas propres à la matière commerciale.

3°) L’accélération de la prescription commerciale

Réforme importante du droit de la prescription en 2008. Avant la réforme, les règles relatives à la prescription des créances commerciales illustraient la soumission de la matière à un besoin de rapidité alors que le délai du droit commun était de 30 ans, l’article L110-4 du code de commerce prévoyait un délai plus court, 10 ans, pour les obligations nées à l’obligation de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non commerçants.

Le nouveau droit de la prescription, loi du 17 Juin 2008, a aligné les délais. La particularité du droit commercial est effacée. La réforme a abaissé le délai de droit commun à 5 ans (article 2224 du Code Civil), l’article L110-4 du Code de commerce a aussi été abaissé à 5 ans. Affaiblissement de la spécificité du droit commercial en matière de prescription dès lors que le délai de prescription est maintenant identique à celui du droit commun.

Cependant, le législateur a prévu des délais de prescription raccourci spécifique. Exemple : cas de l’action relative aux baux commerciaux, le délai est de 2 ans. Cas aussi des actions contre le transporteur, délai de prescription d’1 an. Pour l’action des professionnels pour les biens et services qu’ils fournissent aux consommateurs, délai de 2 ans, article L137-2 du code de la consommation.

Est ce qu’il y a une survie de la spécificité de la prescription commerciale depuis 2008 ?

Il reste encore une différence entre la prescription commerciale et de droit commun. Les deux prescriptions ont des modalités de fonctionnement distinctes. En droit commun, le délai de prescription ne court qu’à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer (article 2224 du Code Civil). L’article L110-4 du code de commerce ne prévoit pas cela, il ne prévoit pas un tel différé du point de départ du délai de prescription. Les deux prescriptions ne fonctionnent donc pas de la même façon, pas le même point de départ. La jurisprudence n’est pas encore très claire sur la question et on peut encore se demander si elle ne va pas unifier sa conception du point de départ de la prescription dans les deux matières.

Conclusion du I : tant la règle de l’anatocisme que les règles de prescription, que les mécanismes qui sont communs à la matière civile et commerciale, tous les points abordés convergent vers la même idée c’est l’effacement du particularisme du droit commercial. Effacement qui ne date pas d’aujourd’hui. Les réformes récentes vont dans le sens d’un effacement encore plus fort du particularisme du droit commercial, c’est à dire de la prescription du 2008 mais aussi ordonnance du 10 Février 2016 qui manifeste encore d’avantage cet effacement. Le monde civil est de moins en moins conçu comme étranger au monde des affaires. La matière commerciale s’étend, il faut plutôt parler de droit des affaires.

2°) Les actes simplement commerciaux

Actes commerciaux pour l’une des parties seulement, c’est les actes mixtes. L’exemple type c’est la vente réalisée par un professionnel commerçant avec un consommateur –> acte commercial pour le vendeur, intention pour e vendeur de revente spéculative mais pas pour le consommateur, juste un achat personnel. Ces actes mixtes ne méritent pas d’être intégralement soumis au droit commercial dès lors que pour l’une des parties l’acte n’est pas commercial mais personnel. Cet acte va être soumit a un régime dualiste c’est à dire que les règles commerciales mais aussi les règles civiles vont avoir vocation à s’appliquer. Mais ce régime dualiste peut présenter des inconvénients, on lui préfère parfois un régime unitaire aux termes duquel on va appliquer aux deux parties à l’acte mixte une règle unique.

A) le régime dualiste

L’acte mixte est un acte hybride, il est mi civil, mi commercial. Il peut se voir appliquer les règles de chacune des matières considérées. Le commerçant (tenu commercialement) peut se voir opposer les règles du droit commercial tandis que celui qui n’est pas tenu commercialement (consommateur) ne se verra pas opposer les règles du droit commercial. C’est le principe de l’application distributive symétrique des règles commerciales et civiles c’est à dire que chaque partie à l’acte se voit appliquer de manière symétrique les règles de la matière dont ils relèvent.

L’article L110-3 du code de commerce ne prévoit le principe de liberté de la preuve qu’en ce qui concerne les actes de commerce et à l’égard des commerçants. Un non commerçant peut prouver librement un acte de commerce à ‘encontre d’un commerçant mais en revanche, un commerçant ne peut bénéficier du principe de liberté de la preuve pour prouver contre un non commerçant. La présomption de solidarité ne joue qu’à l’encontre de ceux pour lesquels l’acte revêt d’une nature commerciale qu’ils soient ou non commerçants. Celui pour qui l’acte revêt une nature commercial est tenu solidairement tandis que celui pour qui l’acte ne revêt pas cette nature, reste tenu de manière divise –> principe de division de la dette de plein droit en matière civile, totalité de la dette indifféremment aux débiteurs.

Parfois, il arrive que l’application distributive du droit commercial ne soit pas parfaitement symétrique, chacune des parties à l’acte mixte peut se voir appliquer les règles dont il relève mais l’une d’elle se voit accorder compte tenu de sa situation la faculté d’obtenir l’application d’autres règles. Le droit positif offre pour celui pour qui l’acte n’est pas commercial une option, il peut choisir entre l’application des règles du droit commercial et celle du droit civil, on parle d’application distributive dissymétrique des règles. Le principe en procédure civile c’est que la juridiction compétente pour trancher un litige est déterminé en fonction de la qualité du défendeur c’est à dire que si pour le défendeur l’acte est commercial, on va aller devant les juridictions commerciales, si pour le défendeur l’acte est civil, on va trancher le litige devant les juridictions civiles. On admet néanmoins que le défendeur pour qui l’acte n’est pas commercial peut choisir entre les juridictions commerciales et les juridictions civiles.

B) le régime unitaire

On applique un régime unitaire aux actes mixtes chaque fois que les effets de la convention n’ont pas à être morcelés entre les deux parties. Il en va ainsi naturellement des règles communes aux obligations civiles et commerciales. Exemple : article 1343-5 sur les délais de paiement, même article qui s’applique à la matière civile et commerciale. Aussi, faculté de résolution judiciaire offerte aux créanciers victimes d’une inexécution contractuelle, même fondement pour les deux matières (article 1224 du Code Civil). Le régime unitaire conserve encore certaines règles propre à la matière commerciale mais ayant pour particularité de ne pas pouvoir faire l’objet d’une application distributive entre les parties à l’acte. Exemple : clauses attributive de compétence territoriale, clause doit être prévue entre personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant.

Les règles relatives à la prescription n’avaient pas vocation à se diviser entre les parties à un acte mixte, d’après l’article L110-4 du code de commerce. Cette application unitaire ne présente plus d’intérêt parce que le délai de prescription est maintenant identique pour les deux matières.