L’ordre successoral de la couronne

Les règles de dévolution de la couronne : l’ordre successoral

Aux 16, 17, 18ème siècles, les règles de la dévolution de la couronne prolongent celles apparues au long du Moyen âge.

Quant au domaine royal, bientôt confondu avec le royaume, il y a un Edit de Moulins qui affirme en 1566 le caractère inaliénable de ce domaine.

Il apparaît que l’absolutisme renforce l’idée que ces lois qui régissent la désignation du roi, la succession au trône sont du Droit public.

-Hérédité

-Masculinité

-Primo-géniture

Les lois relatives au statut de la couronne sont également de Droit public.

Le principe :  L’ordre successoral est intangible

Assure et garantit la stabilité de l’Etat.

La loi dispose que: « la succession dans le royaume de France se fait de mâle en mâle par ordre de primo-géniture à l’exclusion des femmes et des descendants mâles par les femmes ». Cette loi va régir l’accession au trône de tous les rois suivants.

Le futur roi est roi dans l’ordre de succession

Le futur roi a, du vivant du roi en exercice, un « jus ad rem » >>>  » un droit sur la chose ».

Ce droit sur la royauté, le roi le tient des LFR.

  • Le roi est roi à la mort de son prédécesseur.

Un futur roi n’est pas un héritier mais un successeur.

Cette pratique consacrée en 1420, on l’appelle la théorie statutaire de Jean de Terre Vermeille.

L’Etat gagne en stabilité et en continuité.

  • a) l’extinction de la branche régnante

Au 14ème siècle, les trois fils de Philippe IV le bel étaient morts.

On avait eu recours à la substitution de branche et Philippe de Valois, fils du comte de Valois, devient roi sous le nom de Philippe VI.

En face, il y avait les revendications du roi d’Angleterre qui était le successible légal et légitime.

En 1589, les trois fils du roi Henri II >>> François II, Charles IX, Henri III sont morts.

Donc, comme en 1328, avaient disparu les capétiens directs.

En 1589 disparaît la maison des Valois.

Cela fait de la branche des bourbons la branche collatérale aînée >>> Henri de Navarre, placé en 21ème position dans l’ordre de la succession.

Ce successible est protestant >>> il apparaît comme dangereux. Le roi de France est dit « fils aîné de la très sainte Eglise catholique, apostolique et romaine ».

Le roi de France doit être catholique.

Dès le 16ème siècle, on adopte le « cuju regio ejus religio  » >>> A chaque pays sa religion.

Cela veut dire que chaque sujet doit adopter la religion du roi.

La France ne sait pas où se placer car le roi Henri III avait éssayé de concilier les 2 parties (Catholiques et protestants).

Henri IV va essayer de faire cohabiter les deux religions.

Ce successible va révolter les extrêmistes catholiques.

Ils vont faire en sorte qu’une LFR exige la catholicité du roi.

Cette loi est née d’une situation de crise.

– La crise:

Les catholiques ligueurs vont exiger, avec l’appui des EG, que le roi adopte, en 1588, une loi royale appelée l’Edit de l’union.

Par cet Edit, était imposé le principe d’orthodoxie.

C’est en réalité le principe de catholicité.

Henri III:  » Henry (…) Considérant l’infinie et spéciale obligation que nous avons à Dieu notre créateur qui nous a mis en main le sceptre du plus noble royaume qui soit au monde (…) A ces causes, remettant devant nos yeux ce à quoi le devoir de bon roi très chrétien et premier fils de l’Église nous oblige, avons résolu (…) de pourvoir (…) à ce que de notre vivant il soit établi au fait de notre dite religion catholique et romaine un bon et assuré repos (…) Ce qu’ayant dès longtemps par nous été mis en considération, et eu sur le tout le très bon et très prudent avis de la reine notre très honorée dame et mère, des princes et seigneurs de notre conseil, avons voulu, statué et ordonné, voulons, statuons et ordonnons et nous plaît que les articles suivants soient tenus pour loi inviolable et fondamentale de (…) notre royaume.

  1. – Et premièrement nous jurons et renouvelons le serment par nous fait en notre sacre, de vivre et mourir en la religion catholique et romaine, promouvoir l’avancement et conservation d’icelle, employer de bonne foi toutes nos forces et moyens, sans épargner notre propre vie, pour extirper de notre royaume, pays et terres de notre obéissance, tous schismes et hérésies condamnés par les saints conciles et principalement par celui de Trente, sans faire jamais aucune paix ou trêve avec les hérétiques ni aucun édit en leur faveur.
  2. – Voulons et ordonnons que tous nos sujets, princes, seigneurs, (…) ecclésiastiques, gentilshommes, habitants de villes et plat pays qu’autres, de quelque qualité et condition qu’ils soient, s’unissent et joignent en cette cause avec nous et fassent pareil serment d’employer avec nous toutes leurs forces et moyens jusques à leurs propres vies, pour l’extermination desdits hérétiques.
  3. – Jurons et aussi promettons de ne les favoriser ni avancer de notre vivant ; ordonnons et voulons que tous nos sujets unis jurent et promettent dès à présent et pour jamais, après qu’il aura plu à Dieu de disposer de notre vie sans donner des enfants, de ne recevoir à être roi (ni) prêter obéissance à prince quelconque qui soit hérétique ou fauteur d’hérésie.
  4. – Déclarons et promettons de n’employer (…) à jamais aux charges militaires de notre royaume que personnes qui seront catholiques et feront notoirement profession de la religion catholique, apostolique et romaine ; et défendons très expressément que nul (ne) soit reçu à l’exercice d’aucun office de judicature et de finance en (…) notre royaume, pays et terres de notre obéissance, qu’auparavant il n’apparaisse de sa religion catholique, apostolique et romaine « .

– L’hérésie:

En octobre 1588, les EG de Blois ratifient cette loi royale et par cette ratification lui confèrent le statut de LFR. Dès octobre 1588, le principe de catholicité nécessaire est loi inviolable et fondamentale de notre royaume.

Les catholiques extrêmistes étaient certains qu’Henri de Navarre ne pourrait pas être reçu comme roi.

La loi salique et la loi de catholicité font maison commune. La loi de catholicité est une des LFR. Elle s’inscrit dans la même idée que la loi salique. Ici réside la portée juridique de l’arrêt Lemaistre. La loi de catholicité n’est pas une règle supérieure aux autres LFR contrairement à ce qu’affirment les catholiques extrêmistes. Loi salique et loi de catholicité sont cosubstantielles.

Le successible ne peut être que Henri de Navarre. Il est le successeur légitime car depuis le 15ème siècle, un roi est roi à la mort de son prédecesseur.

La loi de catholicité a un caractère nouveau seulement car elle est écrite.

  • b) Imposer ses successeurs

Affaire qui concerne surtout Louis XIV

Il voyait disparaître beaucoup de ses successeurs. Grande fut pour lui la tentation d’imposer ses successeurs.

Il va le faire en empruntant au Droit romain qui autorisait l’empereur à organiser sa succession.

Dans les années 1713, Louis XIV regarde ceux qui pourraient lui succéder.

Il porte un coup aux LFR. Il essaie de bouleverser l’ordre de la succession. Il lui reste son petit-fils, Philippe V déjà roi d’Espagne.

Il lui reste aussi un arrière petit-fils qui avait 5 ans et qui était de santé fragile.

Les calculs de Louis XIV n’étaient pas exacts. A part l’arrière petit-fils, la branche des bourbons comportait encore 6 princes de sang.

La crainte de voir s’éteindre la race des bourbons était sans fondement. Mais il se méfiait de ces princes de sang qui ont failli emporter la monarchie.

Louis XIV, qui savait qu’il ne pouvait ajouter des successeurs à la liste, oblige le Parlement à enregistrer l’Edit de Marly en 1714.

Le Parlement est obligé de souscrire à cet Edit de Marly.

Harouel:  » les tuteurs du pouvoir royal ».

Louis XIV ouvre l’affaire des « batârds légitimés ».

Cet Edit de Marly hisse au rang de successeurs deux fils batârds de Louis XIV.

Que Louis XIV reconnaisse les fils qu’il a eus avec des maîtresses, ce n’est pas trop grave.

Mais que Louis XIV confère à ces bâtards le rang de princes de sang, c’est impossible car il en fait des successeurs potentiels.

Louis XIV ne peut en aucun cas changer l’ordre normal et légitime. Il ne peut pas disposer de la couronne.

Louis XIV avait mis au pas les parlementaires qui n’ont pas osé critiquer et s’opposer à cet Edit.

Mais dès le 1er septembre 1715, tout le monde se déchaîne. Les parlementaires, les grands du royaume…

Certains comme St Simon, qui s’étaient couchés sur le testament, villipendent l’Edit de Marly en le qualifiant d’attentat contre la couronne et contre l’Etat.

L’Edit de Marly fut déféré devant le conseil du roi qui, en 1717, rend un jugement sous forme d’Edit et révoquant l’Edit de Marly.

Ce jugement déclare:  » puisque les LFR nous mettent dans une heureuse impuissance d’aliéner le domaine de notre couronne, nous nous faisons gloire de reconnaître qu’il nous est encore moins possible de disposer de notre couronne ».

On peut dire que 3 siècles après la théorie statutaire de Jean Vermeil, l’ensemble des règles « qui président à la succession royale » constituent un ordre statutaire dont le roi ne peut disposer.

Ces mêmes règles garantissent la continuité de l’Etat.

En dépit de la tentative de Louis XIV, le roi ne peut pas disposer entièrement de la couronne.

  • c) la régence

Il faut se rappeler de 3 ordonnances, celle de

1°) 1374: établit la majorité du roi à 14 ans et adoptée par Charles V.

2°) et 3°) 1403 et 1407 qui disposent que  » le roi en France ne meurt pas »,  » le roi en France est toujours majeur ».

Etant donné que depuis le 15ème siècle, l’instantanéité du pouvoir est établie par les théoriciens du pouvoir.

Les théoriciens du 16ème siècle vont relier cette règle de l’instantanéité à une autre notion: celle de la continuité de l’Etat « perpétuel et éternel ».

L’idée est qu’à un Etat éternel répond l’action ininterrompue de la souveraineté de l’Etat.

Le régent des 17ème et 18ème siècles est, à la différence des régents des époques précédentes, en charge de gouverner au nom du roi mineur alors que au moyen âge, le régent exerçait le pouvoir au nom du conseil de régence.

Qui exerce la régence? la monarchie se tourne vers l’usage.

Ce sont les reines veuves qui l’exercent. C’est d’autant plus important que 3 veuves ont exercé le pouvoir au nom de leur fils.

De Médicis( 1560); Marie de Médicis( 1610); Anne d’Autriche avec Mazarin exerce la régence pour Louis XIV.

Régence par Philippe d’Orléans à la mort de Louis XIV. Louis XIV n’en voulait pas.

Dans la pratique, l’attribution de la régence était fonction des rapports de force politiques.

Ce sont des moments dangereux pour la monarchie.

La tentation est grande pour le roi en exercice de désigner par avance les futurs membres du conseil de régence.

Louis XIII et Louis XIV ont rédigé un testament en 1643 et 1715. Louis XIII se méfiait des capacités de sa femme et Louis XIV avait une confiance nulle en Philippe d’Orléans, son neveu.

Dans les 2 cas, les mesures testamentaires prises pour désigner le futur conseil de régence étaient excellentes car elles peuplaient le conseil de régence d’hommes de confiance capables.

Mais ces mesures étaient inapplicables car contraires au principe d’indisponibilité de la couronne et contraires au principe selon lequel le roi est toujours majeur.

Le Parlement, gardien des libertés fondamentales, en 1643 et en 1715, déclare nulles les dispositions testamentaires des deux rois car même partiellement, ils avaient disposé de la couronne en empiétant sur le règne de leurs successeurs respectifs.  » Cette même heureuse impuissance  » à modifier l’ordre de succession.

 

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