Le roi est maître de l’impôt

Le roi est maître de l’impôt

Depuis la fin du 12ème siècle, la royauté s’est frottée à des difficultés financières et fiscales car les besoins ont toujours été croissants.

L’idée que le roi exerce tout pouvoir sur les finances étatiques est un mirage. Une affirmation théorique assez éloignée de la réalité politique.

Dès le 13ème siècle, les difficultés de la royauté s’expliquent par le fait que le roi et le royaume doivent vivre des revenus du domaine royal >>> » Vivre du sien ».

Les revenus de son domaine:

– Le Cens: En donnant le cens, le censitaire reconnaît symboliquement être assujetti à celui dont il tient son fonds ; en recevant le cens, le seigneur direct confirme son obligation d’assurer au censitaire une possession juste et paisible. La convention entre le censitaire et le seigneur fait l’objet à chaque mutation, d’une « reconnaissance » ou d’une « investiture » ou « investizion » lorsque c’est une censive roturière, mais aussi parfois un hommage quand c’est un domaine noble.

– Les péages: droits de passage

– Les banalités: Les banalités sont, dans le système féodal français, des installations techniques que le seigneur est dans l’obligation d’entretenir et de mettre à disposition de tout habitant de la seigneurie. La contrepartie en est que les habitants de cette seigneurie ne peuvent utiliser que ces installations seigneuriales, payantes. Ce sont donc des monopoles technologiques.

1) Ressources ordinaires et Ressources extraordinaires

Depuis le Moyen-Âge, on distingue les finances ordinaires, couvrant les dépenses de fonctionnement de la puissance publique, des finances extraordinaires, prenant en charge des opérations ponctuelles, principalement militaires, au coût insupportable pour les seules ressources ordinaires. Il s’agissait, par souci de bonne gestion, d’éviter que le fonctionnement courant soit financé par des recettes exceptionnelles. Mais, les finances extraordinaires permettaient aussi de s’affranchir des règles ordinaires de gestion, de plus en plus contraignantes avec le temps, ce qui explique leur maintien.

  • Les recettes ordinaires proviennent, à l’origine, essentiellement du domaine royal, constitué de l’ensemble des terres et des droits appartenant en propre au roi. Les finances extraordinaires sont des revenus supplémentaires, au départ provisoires, levés par le roi sous la forme d’impôts. Elles apparaissent au XIVe siècle avec quatre nouveaux prélèvements (les aides, la gabelle, les traites et le fouage) pour financer la guerre de Cent ans et soutenir l’accroissement du pouvoir royal.
  • Jusqu’à l’Empire, tous les régimes ont recours aux finances extraordinaires, parfois gérées par une caisse particulière (ex : caisse de l’Extraordinaire pour la vente des biens du clergé sous la Révolution). Alors qu’à la Restauration, le principe d’unité budgétaire met fin à cette distinction, celle-ci renaît rapidement pour des grandes opérations d’investissement. Depuis la IIIe République, cette pratique décline. Aujourd’hui, seuls demeurent des dispositifs voisins, comme les budgets annexes, retraçant les comptes de certains services locaux (ex : l’eau) ou de l’État (ex : Publications officielles et information administrative)

2) Les aides

Dans la France médiévale et d’Ancien Régime, les aides étaient les impôts indirects prélevés à tous les niveaux de la société, sur les biens, les denrées, les moyens de transports, etc.

Au Moyen Âge, l’aide aux 4 cas est une obligation que le vassal doit à son suzerain.

Les aides dues au roi ont été créées, à l’initiative des États généraux en 1360 pour payer la rançon du roi Jean le Bon prisonnier des anglais depuis la bataille de Poitiers de 1356. Beaucoup de provinces assujetties s’en sont rachetées à cette occasion.

Les aides continuent d’être perçues dans les généralités d’Alençon, Amiens, Bourges, Caen, Châlons, La Rochelle, Lyon, Moulins, Orléans, Paris, Poitiers, Rouen et Soissons, ainsi que quelques élections de la Haute-Bourgogne.

À l’origine chaque aide était affermée annuellement. À partir de 1663, elles sont affermées en bloc et sont comprises dans le bail de la Ferme Générale qui souvent les confie à des sous-traitants.

À partir de 1780, Necker, soucieux de plaire à l’opinion publique très hostile à la Ferme Générale, confie la perception des aides à la Régie Générale. Les aides sont supprimées pendant la Révolution de 1789. En 1788, les aides rapportent environ 50 millions de livres.

Les litiges relatifs à ces taxes étaient jugés dans une Cour des Aides.

3) la capitation

Impôt direct établi par la déclaration du 18.01.1695 suite aux difficultés suscitées par la guerre de la ligue d’Augsbourg et à l’issue de la terrible crise économique de 1692-1694. 
Il vise à imposer tous les français, à l’exception du clergé qui se rachète en votant des dons gratuits.
Même édulcoré par le contrôle général des finances, le nouvel impôt garde un caractère profondément novateur puisque les privilégiés doivent le payer.
D’après les fonctions et titres, 22 classes sont distinguées depuis la première ( dauphin, princes du sang, ministres, fermiers généraux ) jusqu’à la dernière ( journaliers, manoeuvres, soldats ).
A l’intérieur de chaque classe, la taxation est la même, soit 2.000 livres pour la première et 1 livre pour la 22ème. Liée au conflit, la capitation est supprimée après la paix de Ryswick en 1697.
Avec la guerre de succession d’Espagne, elle est rétablie le 12.03.1701 mais le système est modifié: chaque généralité doit fournir une certaine somme à répartir entre les contribuables. Elle apparaît alors comme une augmentation de la taille puisqu’elle utilise son mode de répartition.
L’intendant fixe la capitation des nobles qui obtiennent des réductions et parfois ne la payent pas.
La déclaration de 1701 indique que l’impôt disparaîtra au plus tard 6 mois après la fin de la guerre. Mais la situation financière reste catastrophique en 1714-1715 et la capitation subsiste jusqu’à la révolution.
Son taux s’accroît en 1705, 1747 et 1760.

4) le vingtième

Le vingtième est un impôt direct voulu par le contrôleur général des finances Jean-Baptiste de Machault d’Arnouville. Il désire établir un impôt direct touchant l’ensemble de la population (tiers-état, nobles et clergé) dont le montant correspond à 5% (1/20) des revenus.

Il est adopté en remplacement du dixième. Visant à amortir les dettes du Royaume, le vingtième entre en vigueur le 19 mai 1749, le jour même de son enregistrement, tandis que l’édit pour la suppression du dixième ne sera établi qu’à compter du 1er janvier 1750. Contrairement aux habitudes fiscales ce nouvel impôt est créé en période de paix et donc devient définitif.

Le clergé et les provinces émettent de vives protestations et attisent des émeutes. Louis XV suspend l’impôt en décembre 1751 pour le foncier de l’Église catholique mais le conserve pour les provinces.

Avec le début de la guerre de Sept Ans en 1756, un deuxième vingtième est mis en place. La guerre continuant, un troisième vingtième est mis en place en 1760. La guerre finie, ce dernier vingtième est supprimé en 1763, les deux autres subsistant.

Le vingtième porte sur les revenus de l’industrie et du commerce établis d’après la déclaration des taxables. Il taxe aussi les propriétés dont les bénéficiaires doivent déclarer, la nature, l’étendue et le produit net moyen annuel. Un système de contrôle est mis en place au niveau de chaque généralité sous l’autorité de l’ intendant.

Cet impôt de conception moderne, heurte profondément les mentalités attachées aux privilèges. Nombreux sont les particuliers et les corps constitués qui lui substituèrent l’abonnement fiscal ou le rachat définitif. Beaucoup de nobles s’arrangent pour ne pas le payer. En 1763, le parlement de Paris, après avoir bataillé contre les contrôles, obtient que les cotes du vingtième ne soient plus réévaluées. Cela conduit à un manque à gagner pour le Trésor à une époque où les prix agricoles s’envolent. En 1787, devant la faillite financière de la monarchie, il est décidé de supprimer toutes les exemptions. C’était trop tard. En 1789, les deux vingtièmes rapportaient environ 57 millions de livres.