L’erreur du contrat (sur la personne, la cause, la valeur…)

L’ERREUR, UN VICE DU CONSENTEMENT

Pour que le contrat soit conclu il faut que le consentement de chacune des parties soit donné de manière libre et éclairée. Pour atteindre ce but il y a 2 voies possibles :

  • – Le 1er système de protection est un mode classique et traditionnel : la théorie des vices du consentement. Il s’agit de permettre à la partie dont le consentement n’a pas été libre ou n’a pas été éclairé d’obtenir l’anéantissement du contrat et l’annulation du contrat conclu. Ce mode de protection est a posteriori. Le droit vient remédier à un vice du consentement qui a eu lieu.
  • – Le 2ème système est plus moderne : il s’agit de faire en sorte que le consentement soit donné de façon libre et éclairée. le droit n’intervient plus a posteriori pour remédier à une atteinte déjà consommée mais intervient a priori afin de prévenir tout atteinte au consentement.

L’art 1109 prévoit 3 vices du consentement :

  • -l’erreur,
  • – le dol qui portent atteinte au caractère éclairé du consentement
  • – la violence qui porte atteinte à la liberté du consentement.

L’erreur d’une manière générale suppose qu’une partie se soit trompée sur un élément du contrat. Aussitôt l’erreur subsiste une difficulté de politique juridique. D’un coté il peut paraître logique de dire que si une partie s’est trompée, alors le contrat doit être annulé puisque le consentement donné par une partie n’est pas valable. D’un autre coté il faut se préoccuper de l’exigence qui tient à la sécurité de la transaction. On ne peut pas s’en tenir qu’au principe de l’autonomie de la volonté. Cette sécurité serait menacée si une partie pouvait se dégager d’un contrat, au prétexte de n’importe quelle erreur commise.

Il faut trouver un équilibre entre la protection de la victime de l’erreur et l’impératif de la sécurité de la transaction. La victime de l’erreur est appelée l’errants.

L’erreur sur la substance

Article 1110 du code civil : énonce que « l’erreur n’est une cause de nullité de la convention que lorsqu’elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l’objet. Pour plus de précision, voir le lien suivant : l’erreur sur la substance

L’erreur sur la personne

Article 1110 al 2 : l’erreur sur la personne est une cause de nullité à condition que la considération de la personne soit la cause principale du contrat. Pour que l’erreur sur la personne soit prise en considération, pour qu’elle soit retenue pour nullité du contrat, il faut que la considération du cocontractant ait été déterminante pour l’errant. Tel est le cas lorsque le contrat est conclu intuitus personae.

On peut faire la différence entre contrat à titre gratuit et à titre onéreux.

Les contrats à titre gratuit sont des contrats intuitus personae. Dans ce type de contrat la considération de la personne du bénéficiaire du contrat est déterminante.

Les contrats à titre onéreux ne sont pas intuitus personae, mais par exception, il arrive qu’ils le soient tout de même (ex : contrat de travail, ou le contrat de bail car la considération du locataire est déterminante pour le bailleur).

L’erreur sur la cause objective

La cause objective (ou cause de l’obligation) se définit comme la justification économique de l’obligation. L’obligation a une cause objective dès lors qu’elle a une justification économique.

Or, il peut arriver que le débiteur commette une erreur sur la cause objective. Celle-ci pourra être annulée (ex : une personne se croit responsable d’un dommage. Elle s’engage à indemniser la victime. Or, il apparaît que les conditions de la responsabilité du débiteur ne sont pas réunies. Juridiquement le débiteur n’est pas responsable. Le débiteur s’est trompé sur la justification économique. L’obligation peut être annulée.

Les erreurs indifférentes : l’erreur sur la valeur

Il y a 2 hypothèses qu’on connaît déjà : d’abord ne peut être prise en considération une erreur sur une qualité non substantielle de la chose. De plus, ne peut être pris en considération une erreur sur la personne si la considération de la personne n’est pas déterminante pour l’errant.

Reste deux hypothèses :

L’erreur sur la valeur

L’erreur sur la valeur consiste en une évaluation erronée de la prestation (ex: l’acheteur a acheté trop cher ou le vendeur a vendu trop bon marché). Cette erreur sur la valeur n’est pas une cause de nullité.

La raison de cette solution réside dans le fait que sauf exception, la lésion n’est pas une cause de nullité du contrat. La lésion peut être définie comme une disproportion affectant les valeurs des prestations réciproques.

Puisque la lésion n’est pas prise en considération donc n’est pas une cause de nullité, l’erreur sur la valeur n’est donc pas une cause de nullité.

Mais attention : si l’erreur sur la valeur n’est pas cause de nullité, il peut arriver qu’elle soit la conséquence de l’erreur sur la qualité substantielle de la chose (ex : erreur sur l’authenticité d’un tableau, sur l’ancienneté d’un meuble). Dans cette hypothèse, l’erreur sera sanctionnée par la nullité. Mais il n’y a aucune dérogation à ce principe. Dans cette hypothèse la source de cette nullité réside dans une erreur de la substance et non pas de la valeur.

L’erreur sur les motifs déterminants

Il s’agit ici de l’erreur commise par une partie sur des motifs qui l’on déterminé à conclure le contrat. Peut-on admettre qu’une telle erreur sur un motif déterminant extérieur soit une cause de nullité du contrat? Pour plus d’informations, voir le lien suivant : L’erreur les motifs déterminants

Les caractères de l’erreur

Pour que l’erreur débouche sur la nullité, il faut qu’elle soit excusable. A contrario, l’erreur inexcusable n’est pas prise en considération. Celle ci est celle que l’errant aurait pu facilement éviter. Pour savoir si l’erreur est excusable ou pas, est prise in concreto au cas par cas.

L’errant est un profane ou un professionnel qui agit en compétence.

Sont retenues aussi bien les erreurs de fait, que les erreurs de droit : l’erreur de droit est l’erreur qui repose sur une fausse interprétation du droit (ex : le propriétaire d’un immeuble en offre la vente à son locataire parce qu’il croit que le locataire jouit d’un droit de préemption. Or il se trouve que les textes n’attribuent à ce locataire aucun droit de préemption. Dans ce cas le vendeur aura commis une erreur de droit susceptible d’entraîner la nullité du contrat de vente.

Le fait que « nul n’est censé ignorer la loi » ne fait pas obstacle. Cette maxime signifie qu’il n’est pas possible d’échapper à l’application de la loi en prétextant son ignorance. L’hypothèse couverte par cette maxime n’a rien à voir avec l’espèce traitée ici.

Art. 1131.- Les vices du consentement sont une cause de nullité relative du contrat.
Art. 1132.- L’erreur de droit ou de fait, à moins qu’elle ne soit inexcusable, est une cause de nullité du contrat lorsqu’elle porte sur les qualités essentielles de la prestation due ou sur celles du cocontractant.
Art. 1133.- Les qualités essentielles de la prestation sont celles qui ont été expressément ou tacitement convenues et en considération desquelles les parties ont contracté.

L’erreur est une cause de nullité qu’elle porte sur la prestation de l’une ou de l’autre partie.

L’acceptation d’un aléa sur une qualité de la prestation exclut l’erreur relative à cette qualité.

Art. 1134.- L’erreur sur les qualités essentielles du cocontractant n’est une cause de nullité que dans les contrats conclus en considération de la personne.
Art. 1135.- L’erreur sur un simple motif, étranger aux qualités essentielles de la prestation due ou du cocontractant, n’est pas une cause de nullité, à moins que les parties n’en aient fait expressément un élément déterminant de leur consentement.

Néanmoins l’erreur sur le motif d’une libéralité, en l’absence duquel son auteur n’aurait pas disposé, est une cause de nullité.

Art. 1136.- L’erreur sur la valeur par laquelle, sans se tromper sur les qualités essentielles de la prestation, un contractant fait seulement de celle-ci une appréciation économique inexacte, n’est pas une cause de nullité.
Art. 1137.- Le dol est le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manœuvres ou des mensonges.

Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie.

Art. 1138.- Le dol est également constitué s’il émane du représentant, gérant d’affaires, préposé ou porte-fort du contractant.

Il l’est encore lorsqu’il émane d’un tiers de connivence.

Art. 1139.- L’erreur qui résulte d’un dol est toujours excusable ; elle est une cause de nullité alors même qu’elle porterait sur la valeur de la prestation ou sur un simple motif du contrat.