L’auteur du consentement au contrat et la représentation

Qui est l’auteur du consentement ? 

Pour que le contrat soit légalement formé (les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites : article 1134 du Code civil), l’article 1108 dispose que « 4 conditions sont essentielles pour la validité d’une convention : le consentement de la partie qui s’oblige ; sa capacité de contracter ; un objet certain qui forme la matière de l’engagement ; une cause licite dans l’obligation. » A ces conditions générales s’ajoutent les conditions propres du contrat. 

 En matière de contrat, le terme consentement reçoit une double acception : au sens étymologique, il s’agit de l’accord de deux (ou plusieurs) volontés, celle du débiteur qui s’oblige et celle du créancier envers lequel le débiteur s’oblige, c’est cet accord qui forme le contrat ; dans un sens plus étroit, le consentement signifie l’acquiescement que donne chacun des contractants. 

Qui est l’auteur du consentement?

Il s’agit de toutes les parties au contrat ; mais le contrat peut-il être conclu par l’intermédiaire d’un représentant ? Il n’est pas nécessaire que les contractants donnent personnellement leur accord, le droit admet la possibilité de représentation en matière contractuelle comme pour tous les actes juridiques. 

La représentation est le procédé juridique par lequel une personne agit pour le nom et pour le compte d’une autre, de telle sorte que les effets de l’acte passé par le représentant vont se développer directement sur la tête du représenté relativement à son patrimoine, comme si c’était le représenté qui avait directement passé l’acte, et le représentant n’est pas personnellement partie à l’acte et n’en subit pas les effets. 

  

1°/ Le pouvoir du représentant. 

Le représentant doit avoir le pouvoir de représenter celui pour le compte duquel il agit. 

Ce pouvoir peut résulter de la volonté des intéressés et procède alors d’un contrat de mandat (le mandat ou procuration est un acte par lequel une personne donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom. Le contrat ne se forme que par l’acceptation du mandataire : article 1984s cc), c’est une représentation conventionnelle. 

Ce pouvoir peut avoir pour origine la justice, c’est une représentation judiciaire : la gestion de biens d’une personne physique ou morale peut être confiée à un administrateur judiciaire, le juge détermine l’étendue de ses pouvoirs. 

Ce pouvoir peut venir du jeu de l’article 491-5, al. 2 du Code civil (sauvegarde de justice : le juge pourra désigner un mandataire spécial à l’effet de faire un acte déterminé ou une série d’actes de même nature…) ou de l’article 219 du Code civil (si un époux se trouve hors d’état de manifester sa volonté, l’autre peut se faire habiliter par justice à le représenter…, les conditions et l’étendue de cette représentation étant fixées par le juge). 

  

Ce pouvoir peut résulter de la loi, c’est la représentation légale. Ainsi les parents sont administrateurs légaux des biens de leurs enfants mineurs (si l’autorité parentale est exercée en commun par les 2 parents, ceux-ci sont administrateurs légaux : article 389 du Code civil), le tuteur de ceux du mineur (il accomplit seul comme représentant du mineur tous les actes d’administration : article 456 du Code civil) ou d’un incapable majeur (tutelle ouverte quand un majeur a besoin d’être représenté d’une manière continue dans les actes de la vie civile : article 492 du Code civil). 

  

2°/ Le dépassement de pouvoir. 

Si le représentant dépasse les pouvoirs qu’il tient du juge, de la loi, de son mandat, les actes qu’il a accompli ne seront pas opposables au représenté. Il en est ainsi lorsque les tiers au contrat auront connu les limites de ces pouvoirs ou s’ils ont eu la négligence de les vérifier. 

La jurisprudence, dans le souci d’assurer la sécurité des relations juridiques, admet depuis longtemps en matière de représentation conventionnelle que les effets de la représentation puissent jouer même en cas de dépassement par le représentant de ses pouvoirs, même en cas d’absence de pouvoir, lorsque les tiers avaient de sérieuses raisons de croire que celui avec lequel ils ont traité avait qualité pour traiter avec eux. Le mandant peut être engagé sur le seul fondement de la théorie de l’apparence, si la croyance des tiers en les pouvoirs du mandataire a été légitime, ce caractère supposant que les circonstances autorisaient les tiers à ne pas vérifier les limites du pouvoir. 

Il existe en matière de société des dispositions légales spéciales destinées à assurer la protection des tiers (les clauses statutaires limitant les pouvoirs des gérants sont inopposables aux tiers : article 1849, al. 3 du Code civil). 

Le représenté peut également être tenu de ce que son représentant a fait en son nom, mais au-delà de ses pouvoirs (voire sans) dans deux cas : dans le contrat de mandat lorsque le mandant a ratifié les actes expressément ou tacitement, et dans la gestion d’affaire lorsqu’il y a eu gestion utile au sens de l’article 1375 du Code civil (le maître dont l’affaire a été bien administrée doit remplir les engagements que le gérant a contractés en son nom, l’indemniser de tous les engagements personnels qu’il a pris, et lui rembourser toutes les dépenses utiles ou nécessaires qu’il a faites). 

  

3°/ La nature juridique de la représentation. 

 Selon la doctrine classique, la représentation est une fiction, par laquelle le représenté est censé manifester sa volonté par l’intermédiaire du représentant, il n’y a donc aucune exception au principe de l’effet relatif des contrats. Les analyses modernes s’écartent de cette doctrine car il convient d’accorder plus d’importance à la volonté du représentant, elles rejettent cette idée de fiction, cela a trois conséquences. 

  

C’est bien le représentant qui passe l’acte, une volonté émane bien de lui ; par conséquent il doit être capable, non pas de s’obliger, mais de vouloir : les vices du consentement devront s’apprécier en sa personne ; si son consentement a été vicié, le contrat sera annulable sur la demande du représenté. Inversement, le représenté subit les conséquences de la connaissance qu’aura pu avoir son représentant de certains faits, ou du dol qu’aura pu commettre le représentant dans sa mission. La loi admet ainsi très facilement la représentation des incapables dont la volonté serait en elle-même insuffisante. 

Dans la gestion d’affaire, même si le maître de l’affaire refuse de ratifier ce qu’a fait le gérant, la loi admet la valeur et la validité de la gestion d’affaire dès lors que la gestion a été utile pour le maître (article 1375 du Code civil). 

  

4°/ Les intérêts collectifs : distinction du représentant et de l’organe. 

Dans le domaine des intérêts collectifs, la représentation présente une physionomie particulière qui ressort de l’importance plus grande qu’il convient d’apporter à la volonté du représentant lui-même. En principe, l’activité du représentant doit épouser totalement la volonté de celui qui est représenté ; or, cela est à peu près impossible en présence d’intérêts collectifs qui sont divers voire contradictoires. 

C’est très net en matière de personnalité morale, les organes de la personne morale (gérants, administrateurs) ne peuvent pas recueillir pour tous les actes qu’ils devront passer l’unanimité des membres du groupement qu’ils représentent. On a du donner aux organes représentant la personne morale un pouvoir de décision et un pouvoir de direction, ces organes expriment une volonté collective qui n’est pas nécessairement la somme de toutes les volontés individuelles des membres composant le groupement. 

La législation sur les sociétés s’est de plus en plus inspirée de l’idée que l’organe de représentation n’est pas un simple représentant mais qu’il est doté de pouvoirs propres ; en contrepartie il supporte une responsabilité plus lourde que celle d’un représentant ordinaire. 

  

5°/ Les effets de la représentation. 

En matière contractuelle, l’effet essentiel est que les créances ou les obligations vont naître au profit ou à l’encontre, non pas du représentant, mais du représenté. La représentation génère elle-même des obligations dans les rapports entre représentant et représenté variant selon la source de la représentation (conventionnelle, légale ou judiciaire), mais également selon la nature de la représentation (d’un individu, d’une personne morale) : pour le représentant, se conduire en bon père de famille dans l’exercice de sa mission et rendre compte en fin de mission, pour le représenté essentiellement rembourser les avances et frais exposés par le représentant. 

  

Le représentant n’est donc pas tenu à l’égard des tiers contractants des obligations du contrat, cependant il aura pu en garantir personnellement l’exécution, et par ailleurs il répond à l’égard de la victime éventuelle des fautes qu’il aurait pu commettre personnellement dans l’exercice de sa mission (Le mandataire qui a donné à la partie avec laquelle il contracte en cette qualité une suffisante connaissance de ses pouvoirs, n’est tenu d’aucune garantie pour ce qui a été fait au delà, s’il ne s’y est personnellement soumis : article 1997 du Code civil a contrario).

 

Laisser un commentaire