La distinction contrat synallagmatique et contrat unilatéral

Contrat synallagmatique et contrat unilatéral. 

1°/ Principe de la distinction. 

Le contrat synallagmatique (il est synallagmatique ou bilatéral lorsque les contractants s’obligent réciproquement les uns envers les autres : article 1102 du Code civil) est caractérisé par la réciprocité des obligations corrélatives en découlant : chacune des parties est à la fois créancière ou débitrice de l’autre. Dans la vente le vendeur s’oblige à donner (obligation de donner) et à livrer (obligation de faire) la chose, l’acheteur s’oblige à payer le prix ; dans le bail, le bailleur s’oblige à mettre à disposition le bien pour une jouissance paisible, le preneur s’oblige à payer le loyer ; idem avec le contrat de travail. 

Le contrat unilatéral (Il est unilatéral lorsqu’une ou plusieurs personnes sont obligées envers une ou plusieurs autres, sans que de la part de ces  dernières il y ait d’engagement : article 1103 du Code civil) ne génère d’obligation qu’à la charge d’une des parties, celle-ci n’est que débitrice et l’autre n’est que créancière. Le contrat unilatéral est un acte bilatéral, c’est l’œuvre de deux personnes, alors que l’engagement (acte juridique) unilatéral n’est l’œuvre que d’une personne : la donation est le contrat par lequel une personne, le donateur, se dépouille actuellement, irrévocablement, sans contrepartie et dans une intention libérale, d’un bien qui lui appartient, au profit d’une autre personne, le donataire, qui l’accepte. 

Les contrats unilatéraux se divisent en plusieurs types : 

Les contrats de restitution, tels que le prêt, le dépôt, dans lesquels il n’y a d’engagement que de la part de l’emprunteur, du dépositaire, qui sont tenus de restituer en fin de contrat l’objet de ce contrat. 

La promesse de payer (le paiement au sens technique est l’exécution d’une obligation quelqu’en soit l’objet : somme d’argent, remise en nature d’un bien, accomplissement d’une prestation), dans laquelle une personne promet une prestation au profit d’une autre ; il y a une différence avec l’engagement par volonté unilatérale car la promesse doit être acceptée par le créancier : c’est un contrat mais unilatéral. La promesse est appelée billet lorsqu’elle porte sur une somme d’argent (article 183 C Com), dès que le billet est remis à son destinataire qui l’accepte, le contrat est formé. 

La promesse de contracter, dans laquelle une personne s’engage à conclure tel contrat avec une autre mais seulement dans le cas où cette autre personne le lui demande dans un délai déterminé. 

 

Deux observations : 

  1. a)  L’assouplissement de la distinction : le caractère d’un contrat dépend non seulement de sa dénomination et de la description qu’en donne le code civil mais aussi de la volonté des parties : un contrat de restitution peut devenir synallagmatique par adjonction d’une clause.
  2. b)  Les contrats synallagmatiques imparfaits sont au centre d’une controverse : en cours de contrat de restitution, le débiteur de la restitution peut être conduit à engager des dépenses pour assurer la conservation de la chose (protection contre l’incendie), il va être lui aussi créancier, d’une indemnité. Puisque le dépositaire devient créancier de l’autre partie, n’est-on pas devant un contrat synallagmatique au lieu d’un contrat unilatéral ? La doctrine majoritaire répond non car dans cette hypothèse la créance d’indemnité est purement accidentelle, elle résulte d’un fait postérieur à la formation du contrat et surtout elle est extérieure au contrat.

Cette créance indemnitaire naît en réalité d’une gestion d’affaire, à l’occasion d’un contrat ; elle aurait très bien pu naître au profit d’un tiers au contrat. Il n’existe entre les obligations des deux contractants qu’une juxtaposition fortuite, ce n’est pas une corrélation ; or, c’est la corrélation, l’interdépendance, entre les obligations assumées de part et d’autre qui se servent mutuellement de cause, qui caractérise le contrat synallagmatique. Ces contrats restent unilatéraux, on n’applique pas les règles qui gouvernent les contrats synallagmatiques. 

  

2°/ Intérêt de la distinction. 

Sur le terrain de la preuve : un acte sous seing privé constatant un contrat synallagmatique doit être rédigé en respectant la règle du double original (les actes sous seing privé qui contiennent des conventions synallagmatiques ne sont valables qu’autant qu’ils ont été faits en autant d’originaux qu’il y a de parties ayant un intérêt distinct : article 1325 du Code civil) alors qu’un acte sous seing privé constatant un acte unilatéral est soumis à l’article 1326 du Code civil (l’acte juridique par lequel une seule partie s’engage envers une autre à lui payer une somme d’argent ou à lui livrer un bien fongible doit être constaté dans un titre qui comporte la signature de celui qui souscrit cet engagement ainsi que la mention, écrite par lui-même, de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffres). 

Sur le fond : les obligations réciproques que crée le contrat synallagmatique sont interdépendantes, les obligations naissant à charge de chaque partie se servent mutuellement de cause. 

Les trois règles qui empêchent que l’équilibre ne se rompe ne se conçoivent que par cette interdépendance. 

L’exception d’inexécution : une partie peut refuser d’exécuter son obligation tant que son co-contractant n’a pas offert d’exécuter la sienne. 

 La règle de résolution pour inexécution du contrat : la partie qui a fournit la prestation dont elle est débitrice, sans recevoir la prestation dont elle est créancière, peut obtenir la résolution du contrat : c’est le retour au statu quo ante par anéantissement rétroactif du contrat. 

La théorie des risques : un événement constitutif d’une force majeure, dès lors qu’il libère l’un des contractants de son obligation, fait tomber sa créance. 

 

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