La dévolution successorale volontaire ou mixte

 LA DÉVOLUTION SUCCESSORALE VOLONTAIRE OU MIXTE

  En cas d’absence de dispositions particulières (une donation ou un testament), la loi dicte l’ordre de succession. On distingue donc les dévolution légales et les dévolutions volontaires ou mixtes (avec testament ou donation) :

  • En l’absence de testament, les successions sont dévolues selon les règles posées par la loi. . Donc en l’absence de dispositions volontaires, ce sont les règles de dévolution successorale légale qui s’appliquent. Ainsi, l’article 731 du Code civil : « La succession est dévolue par la loi aux parents et au conjoint successibles du défunt dans les conditions définies ci-après ». Les règles relatives à la dévolution successorale, lorsque le défunt n’avait pas de conjoint, se divisent en trois grandes catégories : la répartition par ordre, puis degré
  • – En présence de testament (on parle de « dévolution volontaire »), il faudra respecter les dernières volontés du défunt tout en tenant compte de certaines règles légales !
  • – La dévolution mixte : ll arrive que le de cujus ne règle pas uniquement sa succession par des dispositions volontaires. Une part est régie par le droit des libéralités, le reste par la dévolution ab intestat. 

 

CHAPITRE 1 : LA DÉVOLUTION VOLONTAIRE

Section 1 : Les différents modes de dévolution volontaire 

                     I : La dévolution volontaire anticipée : les donations entre vifs faîtes par le de cujus à un héritier 

            Habituellement, ces donations ne sont pas présentées comme un mode de dévolution volontaire. Elle ne constitue pas à proprement une dévolution successorale.

            Hypothèse où la donation s’adresse à des futurs héritiers (héritiers présomptifs) ; dans l’esprit du donateur, il n’est pas rare que cette donation soit une façon d’anticiper la dévolution successorale.

Raisons :  

          le donateur veut immédiatement avantager cet héritier par rapport aux autres : il le précise dans la donation, il dit que cette donation est faîte hors part successorale. Cette donation sera placée en dehors de la succession : cette donation ne sera pas intégrée dans les comptes de succession. Ce type de donation est appelé donation préciputaire non rapportable.

          hypothèse où le donateur veut demander aider son héritier mais il n’a pas dans l’idée de désavantager les autres héritiers. Il veut seulement faire une avance à un des héritiers. La donation devra être rapportée à la succession : on parlait d’une donation en avance d’hoirie.

                     II : Les donations de biens à venir 

            On parle d’institution contractuelle : on institue par contrat un héritier. Ces donations ne sont valables qu’entre époux pendant le mariage, ou au profit des époux par contrat de mariage. La forme est contractuelle : une personne va donner à une autre tous les biens ou une partie des biens qui se trouveront dans la succession au jour de son décès. On peut envisager une institution contractuelle portant sur un bien à venir.

            La donation doit être réalisée par un acte authentique : pas de don manuel, pas donation déguisée ou indirecte.

            Le régime de l’institution contractuelle est spécifique : la spécificité apparaît surtout lors du vivant de l’instituant. Il reste, malgré l’institution contractuelle, propriétaire de ses biens et peut les aliéner à titre onéreux. C’est une faculté d’ordre public. L’institué n’a qu’un droit éventuel et ne peut disposer de son droit car les pactes sur succession futur sont interdits. En cas de pré décès de l’institué, l’institution contractuelle est caduque. Les héritiers de l’institué ne recueille pas l’institution contractuelle à sa place. Il y a une exception dans le cas d’une institution contractuelle par contrat de mariage faîte par un tiers : l’institution contractuelle vaut au profit des descendants nés du mariage. Il peut prendre des mesures conservatoires si cela s’avère nécessaire.

            L’institution contractuelle par contrat de mariage est irrévocable car l’instituant ne peut disposer à titre gratuit des biens qui font l’objet de l’institution contractuelle. Il peut disposer du bien à titre onéreux.

            L’institution contractuelle entre époux pendant le mariage est toujours révocable. L’instituant peut disposer des biens à titre gratuit ou à titre onéreux. Article 1096 alinéa 1er du Code civil.

            Au moment du décès, l’institué va prendre le titre de successible dès lors que les biens sont présents au jour du décès dans le patrimoine de l’instituant.

                     III : Les libéralités partage 

            On trouve la donation partage et le testament partage.

            La plus utilisée est la donation partage : c’est un contrat par lequel une personne partage de son vivant ses biens en tout ou partie. Le donateur a l’intention de faire une libéralité et un partage. La propriété des biens est transmise immédiatement au bénéficiaire. En revanche, la qualité d’héritier ne leur sera acquise qu’au décès du donateur.

                   IV : Les testaments 

            Ce sont des libéralités à cause de mort. A l’intérieur des testaments, on trouve différents types de legs :

          legs particuliers ou à titre particulier : c’est le legs d’un ou plusieurs biens déterminés ou déterminable. Ces biens peuvent être des corps certains ou des droits. La quantité des choses léguées importe peu. C’est seulement un acquéreur particulier et non le continuateur du défunt : il est étranger aux dettes de son auteur.

          legs à titre universel : il donne vocation à une partie du patrimoine du de cujus c’est-à-dire à une cote part de la succession et non à tel ou tel bien désigné. Il est parfois difficile de distinguer ces deux types de legs. Le légataire à titre universel reçoit un actif et un passif.

          le legs universel : il porte sur tout le patrimoine que le de cujus laisse à son décès. Le legs universel ne donne pas au légataire universel la certitude de tout recueillir. Le légataire ne pourra pas garder pour lui la réserve (legs réservé au proche). Il a la vocation à tout recevoir. Si les bénéficiaires de ces droits ne veulent pas de ces droits, c’est lui qui en profite. Le titre se distingue de l’émolument. Bien qu’ayant le titre de légataire universel, son émolument peut être réduit. Le légataire universel est tenu aux dettes. Une disposition du Code civil prévoit qu’il peut y avoir plusieurs légataires universels : cela ne jouera que si l’un renonce. Si aucun ne renonce à la succession, ils partageront à égalité la succession.

          le legs de la quotité disponible : a priori, il s’agit d’un legs à titre universel. En réalité, on estime qu’il s’agit d’un legs universel car si le bénéficiaire refuse à la réserve, le légataire aura toute la succession. Le légataire de nue propriété a vocation à recevoir toute la succession le jour où la succession lui reviendra : c’est un legs universel.

Section 2 : Les limites aux pouvoirs de la volonté : le respect impératif de la réserve 

            Le but est de protéger les héritiers proches du de cujus. C’est une idée de solidarité familiale autour des proches. Le moyen utilisé c’est de limiter le pouvoir de la volonté : limite impérative, d’ordre public. Lorsque le de cujus a fait des libéralités par donation, par testament, il ne peut se rendre « insolvable ». Au moment de la succession, on va faire des comptes : on peut imposer de réduire des libéralités trop importantes qui auraient été faîtes afin de restaurer la réserve attribuée aux proches du de cujus.

            Il faut qu’il existe des héritiers réservataires : ce sont les descendants du de cujus quelle que soit la nature de la filiation avec une exception : l’enfant adopté simple n’est pas héritier réservataire dans la succession de ses grands parents.

Jusqu’en 2006, si le de cujus n’avait pas de descendants, les parents étaient réservataire. Mais la loi du 23 juin 2006 a supprimé la réserve des ascendants. Néanmoins, depuis 2001, il y a un autre héritier réservataire (à défaut de descendant), c’est le conjoint survivant. Ils ne sont pas ensemble héritier réservataire : c’est l’un ou l’autre par ordre hiérarchique.

Ils doivent accepter la succession. C’est une part de la succession qui échappe à la volonté. Au sein de cette part, on va suivre les règles de la dévolution ab intestat. On va suivre au sein de l’ordre des descendants, la règle du degré. La réserve est donc, comme le dit Réunies, 28 novembre 1863 « la réserve est la succession elle même diminuée de la portion des biens fixée par la loi dont le de cujus peut librement disposer du moins s’il en a disposé ».

            Le patrimoine du de cujus lorsque celui-ci a fait des libéralités va se séparer entre la réserve (qui se partage entre les enfants) et la quotité disponible (pour les libéralités). La loi fixe la quotité disponible et par soustraction en en déduit la réserve. La quotité disponible habituelle est néanmoins par faveur pour le conjoint élargie lorsque le de cujus a réalisé des libéralités au profit du conjoint.

            Il y a une quotité disponible et une quantité disponible entre époux.

                     I : La quotité disponible ordinaire 

            On la trouve en l’absence de libéralité au conjoint survivant. On est en présence de descendants : la quotité disponible varie selon le nombre de descendants. Lorsque le de cujus laisse un seul descendant, la quotité disponible est de moitié donc la réserve est de moitié. Si le de cujus laisse deux enfants, la quotité disponible est d’un tiers de la succession et la réserve de deux tiers (1 tiers chacun).  Lorsque le de cujus laisse trois enfants, la quotité disponible est d’un quart de la succession, la réserve globale est de trois quart et chaque enfant a le droit à une part réservataire d’un quart. Si le de cujus laisse quatre enfants, la quotité disponible reste d’un quart, la réserve globale reste de trois quarts et chaque enfant aura une part réservataire d’un quart de trois quart. Si le de cujus laisse six enfants, la quotité disponible est toujours d’un quart, la réserve de trois quarts et chaque enfant à trois quart d’un sixième (un huitième).

S’il n’y a pas de descendant, mais que le de cujus laisse un conjoint survivant : le conjoint survivant bénéficie d’une réserve. Ce conjoint survivant a une réserve égale à un quart de la succession. La quotité qui reste disponible pour les libéralités est de trois quart. Pour que le conjoint survivant en bénéficie, il en doit pas être divorcé du de cujus. Avant 2006, d’autres conjoints ne pouvaient être réservataire : en cas de séparation de corps, en cas d’action engagée pour divorce et séparation de corps. La loi de 2006 a supprimé ces cas.

           

S’il y ni descendant, ni conjoint survivant, la réserve est égale à zéro et tout est disponible.

                     II : La quotité disponible spéciale entre époux 

Il n’y a plus de conjoint survivant ou d’héritiers réservataires. De cujus qui a fait des libéralités à son conjoint survivant dans une succession classique.

L’époux survivant n’est pas réservataire : il devrait ne pouvoir recevoir des libéralités que dans la limite de la quotité. Par faveur, la quotité disponible sur laquelle on peut lui faire des libéralités peut être élargie, le cas échéant, cela conduira à diminuer la réserve des descendants. En présence de descendants, cet élargissement est possible mais l’élargissement n’est possible qu’en usufruit : hypothèse où le conjoint survivant est plus âgé que le de cujus, l’usufruit s’éteindra et viendra sur la nue propriété des enfants. Cet élargissement se produit que si le de cujus ne s’y est pas opposé. Si on n’arrive pas à déceler sa volonté, on présume qu’il a voulu que le conjoint survivant choisisse. S’il y a élargissement, celui-ci peut prendre différente forme : article 1894-1 du Code civil : le conjoint a 3 possibilités :

          s’en tenir à la quotité disponible ordinaire : tout en propriété

          choisir de recevoir un quart de la succession en pleine propriété + trois quarts en usufruit : mixte

          il peut renoncer à tous droits en pleine propriété et prendre droits en usufruit : cela peut aller jusqu’à la totalité de la succession : tout en usufruit. $

            Cette solution se comprend lorsque le conjoint survivant est le parent du descendant. Dans les familles recomposées, cela est plus complexe. Le projet de loi de 2006 avait prévu que cette disposition ne s’appliquerait qu’en cas d’enfants communs des deux époux. A l’occasion des discussions parlementaires, cette proposition a été supprimée.

                     III : La combinaison des quotités disponibles 

            Comment faire lorsque le de cujus a fait des libéralités au conjoint et à d’autres personnes ?

            Le cumul des deux quotités disponibles est interdit : il ne peut faire des libéralités sur les deux quotités disponibles additionnées.

 

Conjoint survivant 

            Chaque gratifié ne peut pas recevoir plus que la quotité disponible qui lui est propre. La jurisprudence a considéré que si le de cujus dispose en faveur de son conjoint de la totalité de l’usufruit, il pouvait néanmoins encore disposer au profit d’un de ses enfants de la nue propriété de la quotité disponible ordinaire. On interprète cette solution comme valant aussi aux libéralités faites aux autres personnes.

 

USUFRUIT

 

 

 

 

Quotité disponible    Réserve

 

NUE PROPRIETE

 

            La réserve minimale qui correspond à la quotité disponible spéciale entre époux peut se trouver encore réduite au détriment du réservataire alors qu’aucun texte ne le prévoit.

            Au décès du conjoint survivant, l’usufruit du conjoint survivant reviendra aux enfants réservataires qui retrouveront la réserve en pleine propriété. L’atteinte à la réserve est réelle mais n’aura été dans ce cas que temporaire.

 

CHAPITRE 2 : LA DEVOLUTION MIXTE

            Il arrive que le de cujus ne règle pas uniquement sa succession par des dispositions volontaires. Une part est régie par le droit des libéralités, le reste par la dévolution ab intestat. 

Section 1 : Les conséquences d’une dévolution mixte sur les droits ab intestat du conjoint survivant 

                     I : En présence de libéralités à d’autres personnes que le conjoint survivant 

            Avant la loi du 3 décembre 2001, les droits du conjoint survivant étaient en usufruit. Ce droit se calcule sue les biens dans le patrimoine du de cujus au décès. On ne compte les legs. Dans cette masse de calcul, on trouve aussi les libéralités rapportables faîtes aux héritiers.

            Après on passe à une masse d’exercice : le conjoint ne peut exercer ses droits ni sur la réserve, ni sur les biens légués, ni sur les biens donnés. La masse de calcul est plus importante que la masse d’exercice. Il arrivait que le conjoint exerce son usufruit sur peu de biens. 

            Depuis la loi du 3 décembre 2001, si les conjoints ont uniquement des enfants communs : les enfants peuvent choisir d’avoir tout en usufruit. C’est l’usufruit de la totalité des biens existants (biens laissés par le de cujus à son décès). Faut-il compter les biens légués ? La plupart des auteurs considèrent que les biens légués ne doivent pas être considérés dans cette masse. Cela est discutable dans un legs rapportable. Cet usufruit peut-il s’exercer sur les biens existants réservés aux descendants ? On considère que ces biens vont être grevés d’usufruit puisque par hypothèse, les enfants sont communs, ils récupéreront plus tard, les biens objets de l’usufruit. Si les enfants en préféré un quart en pleine propriété : si on a pas de descendants, mais des ascendants, l’article 658-5 du Code civil explique comment faire pour calculer les droits de chacun : distinction entre la masse de calcul et la masse d’exercice. La masse de calcul comprend les biens existants et les libéralités rapportables qui ont été faîtes à des successibles. La masse d’exercice, ce sont les biens qui n’auront fait l’objet, ni de donation, ni de legs pour le de cujus, ni de la réserve, ni des éventuels droits de retour.

                     II : En présence de libéralités au conjoint survivant 

            Le conjoint survivant peut-il recevoir à la fois des libéralités sur la quotité disponible entre époux et ses droits ab intestat ?

Les droits ab intestat ne sont que supplétifs : ils sont appelés à jouer si le de cujus n’a pas fait de libéralité suffisante pour le conjoint. C’est un minimum légal qui n’est pas une réserve. Le conjoint survivant ne peut pas additionner le montant des libéralités sur la quotité disponible et le montant sur ses droits ab intestat. L’article 758-6 de la loi du 23 juin 2006 donne clairement la réponse à cette question : soit le conjoint reçoit peu de libéralité du de cujus (montant inférieur aux droits ab intestat) il peut demander le complément pour atteindre ce montant ; s’il reçoit des libéralités pour un montant supérieur à ses droits ab intestat, il ne peut rien recevoir au titre des droits ab intestat et les libéralités que le de cujus lui a faites rencontre un butoir : la quotité disponible spéciale entre époux.

Section 2 : L’intérêt de faire des libéralités au conjoint survivant 

                     I : Elles permettent au conjoint d’augmenter ses droits théoriques 

  1. En présence de descendants

            Sa part est de 1 quart

            La quotité disponible ordinaire : dès qu’il y a moins de 3 enfants, cela est intéressant.

            On peut demander à voir au titre de la quotité disponible entre époux : 1 quart en pleine propriété et 3 quarts en usufruit. Par rapport à la vocation légale, c’est mieux.

            On peut demander tout en usufruit : soit c’est pareil, soit avec le quart en pleine propriété, il y a des droits de natures différentes.

  1. En présence d’ascendants

            La vocation légale est de la moitié de la succession en pleine propriété. S’il y a donc les deux ascendants privilégiés, on a 3 quarts de la succession en pleine propriété. Si on fait des libéralités, elles vont pouvoir en présence d’ascendants être beaucoup plus larges puisqu’il n’y a plus la réserve des ascendants. 

                        II : Elles permettent au conjoint d’augmenter ses droits en pratique

            La vocation légale du conjoint survivant face à des descendants ou à des ascendants privilégiés. Elle ne peut s’exercer qu’après des libéralités. En présence de descendants, on va pouvoir exercer les droits du conjoint survivant sur la partie qui n’a pas fait l’objet de libéralité. Si la quotité disponible est insuffisante, on va voir qu’il va falloir réduire les libéralités. L’ordre de réduction des libéralités n’est pas fonction de la personne du bénéficiaire, il est fonction de la date de la libéralité.

            On va essayer de montrer qu’avec les libéralités on arrive à donner plus, et on peut choisir les modalités.

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