L’adoption simple : procédures et effets
L’adoption simple est une procédure permettant d’établir une nouvelle filiation adoptive tout en maintenant les liens juridiques entre l’adopté et sa famille biologique. Contrairement à l’adoption plénière, elle n’efface pas la filiation d’origine et confère à l’adopté une seconde famille sur le plan légal. Pour rappel, il existe deux formes d’adoption :
- Adoption plénière : Elle rompt définitivement les liens juridiques avec la famille d’origine. L’enfant acquiert une filiation exclusive avec la famille adoptive, avec les mêmes droits et devoirs que s’il y était né biologiquement.
- Adoption simple : Elle conserve la filiation biologique, tout en ajoutant une filiation adoptive. Les adoptants sont les seuls titulaires de l’autorité parentale, mais les liens juridiques entre l’adopté et sa famille biologique subsistent, notamment pour les droits successoraux.
Section 1 – La procédure de l’adoption simple
1) Introduction de la demande
L’adoption simple ne peut être prononcée que par voie judiciaire, conformément aux articles 361 et 353 du Code civil. La procédure débute par le dépôt d’une requête par l’adoptant devant le tribunal judiciaire compétent.
- Le droit des couples (mariage, Pacs, divorce…)
- Le concubinage : définition, effets, preuve
- La procédure de l’adoption simple et les conséquences
- Les conditions de l’adoption simple
- L’adoption plénière : procédure et conséquences
- Les conditions de l’adoption plénière
- La séparation de corps
2) Rôle du juge
- Vérification des conditions légales : Le juge examine si toutes les conditions prévues par le Code civil sont remplies (âge, consentement, intérêt de l’adopté).
- Critère de l’intérêt de l’adopté : Le juge s’assure que l’adoption sert l’intérêt supérieur de l’enfant ou du majeur adopté, qui reste le fondement principal de toute décision en matière d’adoption.
- Prononcé de l’adoption : Si les conditions sont satisfaites, l’adoption est prononcée par jugement. Elle prend effet rétroactivement à la date du dépôt de la requête.
3) Recours et oppositions
- Opposition pour dol ou fraude :
Les tiers intéressés (notamment les parents biologiques) peuvent s’opposer au jugement d’adoption dans un délai de 30 ans s’ils invoquent un dol ou une fraude. Cette garantie protège contre les abus ou les dissimulations (articles 361 et 353-2 du Code civil). - Appels et pourvoi en cassation :
Les parties au procès et les tiers ayant été notifiés de la décision peuvent interjeter appel dans les 15 jours. Un pourvoi en cassation est également possible dans les conditions du droit commun.
4) Effets du jugement
- Transcription à l’état civil : Une fois définitif, le jugement est transcrit sur les registres d’état civil du lieu de naissance de l’adopté, dans un délai de 15 jours, à la requête du procureur de la République (article 362 du Code civil).
- Maintien de l’acte de naissance d’origine : Contrairement à l’adoption plénière, l’acte de naissance original de l’adopté n’est pas annulé, mais complété par une mention de l’adoption (article 354 du Code civil).
Section 2 – Les effets de l’adoption simple
L’adoption simple, contrairement à l’adoption plénière, conserve les liens juridiques entre l’adopté et sa famille biologique tout en créant une nouvelle filiation avec la famille adoptive. Les effets de l’adoption simple ne sont pas rétroactifs, prenant effet uniquement à partir du dépôt de la requête, conformément aux articles 361 et 355 du Code civil.
I/ L’entrée de l’adopté simple dans la famille de l’adoptant :
A- Les rapports entre l’adopté et l’adoptant
L’adoption simple établit une filiation légale entre l’adopté et l’adoptant, tout en conservant les liens de l’adopté avec sa famille biologique. Cette filiation confère des droits et obligations réciproques, bien que ceux-ci soient moins étendus que dans le cadre d’une adoption plénière.
a. Modification du nom de famille de l’adopté
1) Principe général :
- Le nom de l’adoptant s’ajoute au nom de l’adopté.
- Si l’adopté est majeur, son consentement est requis pour cette modification.
2) Particularités introduites par la loi du 17 mai 2013 :
-
Lorsque l’adopté et/ou l’adoptant porte un double nom de famille, le nom de l’adoptant est ajouté dans la limite d’un seul nom pour chacun.
- Le choix du nom ajouté appartient à l’adoptant.
- L’adopté âgé de plus de 13 ans doit consentir par écrit au choix du nom et à l’ordre des noms.
-
En cas de désaccord :
- L’enfant portera par défaut son premier nom d’origine, suivi du premier nom de l’adoptant selon l’ordre alphabétique (article 363 alinéa 2 du Code civil).
3) Adoption par deux époux :
- L’enfant adopté portera son nom d’origine, auquel s’ajoutera un seul nom choisi par les adoptants (dans la limite d’un nom pour chacun des époux).
- Si l’adopté a un double nom, les époux déterminent ensemble le nom conservé et son ordre, sous réserve du consentement de l’adopté âgé de plus de 13 ans.
- À défaut d’accord, le nom est déterminé selon l’ordre alphabétique (article 363 alinéa 3 du Code civil).
4) Adoption simple de l’enfant du conjoint :
- Le nom de l’adoptant peut être ajouté ou substitué au nom d’origine de l’enfant.
- Si l’adopté est majeur ou âgé de plus de 13 ans, son consentement est indispensable pour toute modification.
5) Demande de substitution totale du nom :
- À la demande de l’adoptant, le tribunal peut autoriser que l’adopté porte uniquement le nom de l’adoptant.
- Dans le cas d’une adoption par deux époux, le nom substitué peut être celui de l’un d’eux ou une combinaison de leurs deux noms, dans la limite d’un seul nom par personne.
- Cette demande peut être formulée après l’adoption, sous réserve du consentement de l’adopté âgé de plus de 13 ans.
b. Droits et obligations réciproques entre l’adoptant et l’adopté
-
Obligation alimentaire :
- Une obligation alimentaire réciproque existe entre l’adoptant et l’adopté, conformément à l’article 376 du Code civil, tel que modifié par la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance.
-
Droits successoraux :
- L’adopté a les mêmes droits successoraux qu’un enfant biologique dans la succession de l’adoptant.
- Toutefois, l’adopté ne bénéficie pas de la qualité d’héritier réservataire à l’égard des ascendants ou collatéraux de l’adoptant (article 368 du Code civil).
c. Révocation de l’adoption simple
L’adoption simple peut être révoquée dans des cas exceptionnels, sous réserve de motifs graves.
-
Demandes de révocation :
- Une demande de révocation peut être formulée par :
- L’adoptant.
- L’adopté.
- Le ministère public, si l’adopté est mineur.
- Une demande de révocation peut être formulée par :
-
Conditions et effets :
- La révocation est prononcée par le tribunal lorsque des motifs graves sont démontrés.
- Les juges du fond apprécient souverainement la gravité des motifs (article 370 alinéa 2 du Code civil).
-
Conséquences de la révocation :
- La révocation met fin à l’adoption pour l’avenir, sans annuler rétroactivement ses effets.
- L’adopté conserve néanmoins la modification de son prénom.
-
Formalités liées à la révocation :
- Le jugement de révocation doit être motivé.
- Son dispositif est mentionné en marge de l’acte de naissance de l’adopté ou de la transcription de l’adoption sur les registres de l’état civil (articles 370-1 et 370-2 du Code civil).
B- Les rapports entre l’adopté et la famille de l’adoptant
- Empêchements au mariage : Les prohibitions au mariage fondées sur la parenté s’appliquent entre l’adopté et les membres de la famille adoptive, conformément à l’article 366 du Code civil. Une dispense judiciaire peut toutefois être accordée, notamment pour un mariage entre l’adopté et les enfants de l’adoptant.
- Obligation alimentaire : Il n’existe pas d’obligation alimentaire entre l’adopté et les membres de la famille de l’adoptant.
- Droits successoraux limités : L’adopté et ses descendants n’ont pas la qualité d’héritiers réservataires à l’égard des ascendants ou collatéraux de l’adoptant, conformément à l’article 368 du Code civil. Les droits successoraux de l’adopté se limitent à la succession directe de l’adoptant.
II / Le maintien des liens de l’adopté avec sa famille d’origine :
-
Conservation des droits successoraux : L’adopté conserve ses droits dans sa famille d’origine, y compris les droits successoraux. En cas de décès sans descendant, ses biens sont partagés entre ses deux familles (adoptive et biologique) conformément à l’article 368-1 du Code civil.
-
Empêchements au mariage : Les prohibitions au mariage entre l’adopté et les membres de sa famille biologique demeurent en vigueur, comme stipulé aux articles 161 et 164 du Code civil, confirmés par l’article 364 alinéa 2.
-
Obligation alimentaire subsidiaire des parents biologiques : L’adoption simple transfère l’obligation alimentaire à l’adoptant. Toutefois, les parents biologiques conservent une obligation subsidiaire, applicable uniquement si l’adoptant est dans l’incapacité de subvenir aux besoins de l’adopté (article 367 du Code civil).
-
Autorité parentale transférée : L’autorité parentale est intégralement transférée à l’adoptant, conformément à l’article 365 du Code civil. Les parents biologiques ne peuvent plus contester les décisions de l’adoptant devant le juge des tutelles.
-
Droit de visite pour les parents biologiques : Bien que privés de l’autorité parentale, les parents biologiques peuvent demander un droit de visite afin de maintenir des relations personnelles avec l’enfant. Cette demande est soumise à l’appréciation du juge et doit être compatible avec l’intérêt de l’enfant.