Le droit pénal des sociétés

Les caractéristiques générales du droit pénal des sociétés 

Pour nombre, le droit pénal n’a pas sa place dans le droit des sociétés. A enflé jusqu’en 1966, devenu un « gros » droit. S’il avait été aussi appliqué qu’il était gros, aurait été dangereux pour les commerçants.

         Depuis quelques années on le décomprime. Loi du 15 Mai 2001 dite NRE, lois du 1er Août 2003 (LSF, IE), ordonnances du 25 Mars et 24 Juin 2004 (un peu n’importe comment). 

         Constitution, marche et mort des sociétés. 

Section 1. Généralités sur les incriminations du droit pénal des sociétés 

         Ce droit est né en gros en 1935, petit embryon en 1867. Jusqu’en 1867 les SA étaient soumises à l’agrément du gouvernement et étaient peu nombreuses. Les autres sociétés, de personnes donc, étaient indéfiniment responsables et bien tenues de par la peur de la responsabilité illimitée. Donc pas besoin de droit pénal. 

         La fin de l’autorisation par la loi de 1867, prévoit certaines interdictions : fausses nouvelles pour appeler des souscriptions ; faire des dettes sociales et répartition du capital par dividendes… 

         La naissance du droit pénal des sociétés, ce sont les décrets du 8 août et 30 Octobre 1935 : publication de fausses nouvelles, ABS, délits papiers. Deux catégories dès lors : variantes de l’abus de confiance et escroquerie + délits papiers. 

Section 2. Généralités sur les sanctions 

         L’on retrouve la distinction entre délits papiers et autres. 5 ans et 375 000 euros pour les « autres ». Délits papiers vont de l’emprisonnement aux amendes petites moins petites. Créés au hasard du temps 

         Pas de peines complémentaires (interdiction du commerce ou de gérer), mais des peines accessoires terribles. Les personnes orales n’étaient pas responsables avant janvier 2006 avec l’abrogation du principe de spécialité. 

Section 3. L’imputation du droit pénal des sociétés 

         §1. L’élément moral du droit pénal des sociétés 

         Rupture entre délits intentionnels (ABS,…) et délits papiers qui ont une intention présumée (dits intentionnels par la Cour de cassation). 

         §2. La désignation des personnes physiques pénalement responsables 

         Ou bien un vrai délit intentionnel ou faux, mais ici la distinction est altérée car la loi désigne les responsables. 

         L.242-6 du Code de commerce : le président, administrateurs ou DG sont coupables de X et Y…La délégation ne fonctionne pas. 

         Liste, mais à propos des SA à conseil d’administration, renvoi pour membres du directoire. 

                   A. Le choix du responsable au sein du groupe des dirigeants 

         Lorsqu’il s’agit d’une SA, l’on a une liste. Quatre catégories : Président, Administrateur, Directeur Général + Directeur Général adjoints. 

                            1. L’imputation des infractions intentionnelles (les vraies) 

         L’ABS, infraction vraiment intentionnelle. Il faut donc avoir conscience de la commettre et avoir la qualité prévue par la loi. L.242-6. Il faut donc qualité + connaissance de l’ABS. L’imprudence du PDG à l’égard des Abus de biens sociaux commis par un autre n’est pas l’imprudence. 20 Mars 1997 DP n°131 ; 7 Septembre 2005 DP 2005 n°175. 

         Il est aussi arrivé que l’on est poursuivi des individus qui ont puisé dans les ressources sociales, mais n’ont pas la qualité de DG, poursuivis pour ABS…28 Janvier 2004 DP 2004 n°55 : Valeo destinée à être fermée, le DRH achète les chefs syndicaux. Abus de biens sociaux ? Non, L.242-6 ne vise pas le DRH ! Les autres peuvent être complices, 20 Mars 1997. 

                            2. L’imputation des infractions non intentionnelles 

         Donc les contraventions et les infractions formellement intentionnelles mais dont l’intention est présumée (défaut du dépôt d’une publication, irrégularités dans la convocation…). 

         Il a été soutenu par la doctrine et les motifs d’un arrêt du 15 Mai 1974 Dalloz 1976 p.226. Tous les dirigeants, administrateurs sont collectivement responsables puisque la délégation ne fonctionne pas, même les membres du conseil de surveillance. Dans la pratique, c’est toujours le plus haut dirigeant (Directeur Général dans les SA ou PDG, ou directoire si existe), et si répartition des tâches alors délégation valide qui permet de désigner l’auteur des infractions non intentionnelles. 

         Pour les SARL, choses simples car il n’y a que le gérant. 

         Dans les SA, il y a une collection d’individus visés comme étant des responsables, et la plupart des délits incriminés le sont en commençant par viser les personnes concernées par les responsables dans les SA à CA. Ne dit rien pour les autres formes de sociétés par actions : SAS, Société Européenne, Commandite par actions. La loi fait des petits articles pour leur appliquer. 

                   B. Les imputations par transposition 

                            1. L’imputation au sein des SA avec directoire 

         Articles L.241-30, L.245-17 et L.247-9, les infractions prévues par X articles seront appliquées selon leurs attributions respectives aux membres du directoire et du conseil de surveillance. La loi ne dit rien d’autre ! Donc pas d’indication précise sur la manière de transposer, pas de clé de répartition. 

         Pour les infractions intentionnelles, faut-il traiter de la même manière les membres du CS et les membre du directoire ? CS peuvent être complices par abstentions (si avait l’obligation d’agir de par ses fonctions). Pour les membres du directoire, collège agissant ensemble, c’est le président qui est généralement pris comme auteur principal des infractions. 

                            2. L’imputation au sein des commandites par actions 

         L.243-1, peines qui s’appliquent au gérant des commandites par actions. Il existe un CS (L.226-4 et –5), mais il n’est pas cité par la loi ! 

                            3. La responsabilité pénale des dirigeants des SAS 

         L.244-1 alinéa 2, les peines prévues…sont applicables aux présidents ou aux dirigeants des SAS. Donc système débrouille. 

Dans les SAS, l’on fait comme l’on veut, donc président peut être une personne morale. Le juge va donc être encore plus embêté car pas de modèle préfixe qu’il appliquera : doit lire les statuts pour voir qui a la réalité des pouvoirs. 

                            4. L’imputation au sein des sociétés européennes 

         Société Européenne qui remonte à une loi du 26 Juillet 2005, 2005-842. Nouveau chapitre dans le Code de commerce. L.229-1 à 15. 

         Organisation statutaire légale : CA ou Directoire comme les SA. 

Section 4. Les pouvoirs sanctionnateurs de l’AMF 

         Délit d’initié puni que depuis 1970. La loi pénale, générale et impersonnelle, peu mobile n’est pas douée pour cela. Il faut une règle régulatrice, souple. 

         Droit complexe, donc soustraction au droit pénal : fautes administratives. Les ricains ont créé la « securities exchanges commission », autorité administrative qui se passe d’un jury et composée d’experts en finance. La SEC ne peut imposer que des amendes et confiscations. Créée en 1934. Nous l’avons imitée. 

         A l’origine la COB, née avec une ordonnance de Novembre 1967 pour observer la Bourse. Pouvoirs de sanction suite à l’affaire Péchiney Triangle, loi du 2 août 1989 : pouvoir de sanction administrative, amendes de 10 millions de francs. 

         Absorbée par l’AMF, loi du 1er Août 2003, en fonctions le 1er Janvier 2004. Fusion entre trois organes : la COB, Le CMF, le Conseil de Discipline de la Gestion Financière. C’est une AAI prévue par le CMF. 

         §1. Les conditions de l’exercice du pouvoir sanctionnateur 

         Ne peut sévir qu’en vertu du règlement, principe de textualité. 

                   A. Les textes sanctionnés par l’AMF 

                            1. Les sources formelles des textes sanctionnés 

         La COB ne punissait que sur ses textes. L’AMF sanctionne tous les textes quels qu’en soit l’origine. L.121-14 donc l’inobservation de ses règlements, mais aussi des lois et des règlements. 

         Divisée en deux organes principaux : un collège et la commission des sanctions. L.621-2 du CMF, aucun des membres de l’un ne peut appartenir à l’autre : le collège fait le règlement, qui est sanctionné par la commission des sanctions. Respectivement 16 et 12 membres. 

         Le collège fait donc un règlement comme la COB en faisait, absorbés par un nouveau texte de l’AMF homologué parle ministère des finances (il faut cette homologation). Règlement général de l’AMF qui contient six livres, se trouve dans 3 arrêtés de 2004 : 23 Février, Octobre, 12 Novembre. 

                            2. L’objet des textes sanctionnés 

         Missions de l’AMF. 

                                      a. L’objet rationae materiae 

         L.621-1 du CMF, donne les missions de l’AMF. A trois fonctions : protection de l’épargne ; information des investisseurs ; bon fonctionnement des marchés d’instruments financiers. 

         C’est dans ce cadre là que l’AMF rédige son règlement, et les objets de ce règlement sont énumérés dans l’article L.621-7 du CMF : très gros, 25 entrées, objets soumis au règlement de l’AMF. Surveillance des prestataires de services financiers, … 

Ce qui nous intéresse, c’est le §1 de cet article L.621-7 : règles de pratiques qui s’imposent aux émetteurs ainsi que les règles qui doivent être respectée sur les opérations sur les instruments financiers. 

                                      b. La compétence rationae loci 

         Régit les marchés financiers sous la souveraineté de l’Etat français. Question sur sa compétence avec deux personnages ayant fait une opération irrégulière (exploitation d’informations privilégiées) à Genève sur des opérations cotées en France. La Cour d’appel de Paris a dit que le marché financier n’est pas un lieu mais un ensemble de biens composé de tous les instruments financiers cotés en France. 16 Mars 1994, DP 1994 n°160. 

                   B. Les pratiques contraires au texte sanctionné 

         La loi depuis longtemps utilise un mot distinct d’infraction : les manquements, L.621-14 du CMF (exclu donc l’idée de droit pénal). 

  

         §2. Le contenu des sanctions prononcées par l’AMF 

         L’on applique les mêmes sanctions aux personnes physiques et morales (créé avant le nouveau Code pénal) 

                   A. Les sanctions applicables aux non professionnels et aux professionnels 

         Deux sortes : 

                            1. L’injonction de cesser 

         Prononcée non pas par la commission des sanctions, mais par le collège. Si l’on veut que ce soit assorti d’une « menace » il faut demander au président du TGI de Paris. Astreinte par L.621-14 §2. 

                            2. L’amende 

         L.621-15 du CMF, rédigé par les fonctionnaires du ministère de l’économie. Amende de 1 500 000 euros ou le décuple du profit si le profit est donc supérieur à 150 000 euros. Pas de différence dans le montant s’il s’agit d’une personne morale. 

Si aussi délit d’initié, alors le total ne doit pas dépasser le plus fort maximum encouru. 

                            3. La publication de la décision de sanction 

         Article L.621-15 §V. 

                   B. Les sanctions spécifiques applicables aux professionnels 

         Avertissement, blâme, radiation. L.621-15 §V A et B. 

         §3. La procédure de sanction 

         Décret du 21 Novembre 2003, L.621-15. 

                   A. La procédure du premier degré devant l’AMF 

         Article L.621-15 mais aussi article L.621-9-1. 

         Séparation des pouvoirs, le déclenchement des recherches est fait par le secrétaire général de l’AMF. Il fait un rapport qu’il communique au collège, qui décide s’il saisi ou non la commission des sanctions. Dès lors l’on communique au « mis en cause », notification du rapport examiné par le collège. Passe devant la commission qui fait un rapport. Dernier stade : audience publique. Assemblée plénière 1999, en l’absence du rapporteur pour le délibéré. 

                   B. Les voies de recours 

         Résulte de la fusion des anciens organismes. Il faut distinguer : 

                            1. Les recours contre les actes règlementaires 

         Devant le Conseil d’Etat. Le règlement de l’AMF une fois homologué est porté devant le Conseil d’Etat pour un recours, L.621-30. 

                            2. Décisions individuelles 

         Contre les professionnels, Conseil d’Etat. Peut baisser le montant de l’amende. 

Contre les non professionnels (sociétés émettrices, investisseurs), Cour d’appel de Paris. Pas un appel mais un recours de pleine juridiction. (Il a été cependant dit dans le monde que l’on ne pouvait pas aggraver les peines si chercher de nouveaux fondements). 

Section 5. Les sanctions civiles substitut des sanctions pénales 

         Injonction de faire et nullité. 

         §1. L’injonction de faire 

         Substitut intéressant, de la compétence du président du tribunal de commerce statuant en référé. Articles L.238-1 à -6 du Code de commerce. 

         Peut assortir son injonction d’une astreinte. 

         §2. La nullité des actes irréguliers 

         Grande crainte des commercialistes. Depuis les lois du 1er août 2003 LSF, deux nouveaux cas de nullité : les augmentations de capital (article L.225-149-3) qui peuvent être annulées, mais aussi « réparées ». 

 

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