Le principe de la légalité de l’action administrative

La soumission de l’action de l’administration au principe de la légalité.

L’action de l’administration, bien qu’autonome dans certains domaines, est encadrée par des règles de droit. Ces règles l’habilitent à agir, déterminent les procédures à suivre, fixent les conditions de fond de ses interventions, et protègent les droits des administrés. Ce cadre repose sur un principe fondamental : le principe de légalité, qui impose à l’administration de se soumettre au droit.

Plan du cours :

Définition et portée du principe de légalité : Le principe de légalité signifie que toute action de l’administration doit être conforme aux règles juridiques applicables. L’administration ne peut agir que dans les limites fixées par le droit.

  • Implication pour l’administration :

    • Respecter les normes issues de la Constitution, des lois, des règlements, et des principes généraux du droit.
    • Protéger les droits des administrés face à l’arbitraire.
  • Implication pour les administrés :

    • Garantir que leurs droits sont protégés contre des abus de pouvoir.
    • Offrir des voies de recours en cas d’atteinte à ces droits.

L’état de droit comme fondement du principe de légalité. Ce principe repose sur le concept d’État de droit, dans lequel :

  • L’administration est soumise aux mêmes règles que les citoyens.
  • Toutes ses actions sont contrôlées par des juridictions, comme les tribunaux administratifs ou le Conseil d’État.

Section 1.  Les origines et l’évolution du principe de légalité

A. Une reconnaissance progressive

La soumission de l’administration au droit ne s’est pas imposée sans difficulté, notamment dans l’histoire juridique française.

  • Sous l’Ancien Régime : L’administration relevait directement du roi, et ses actes échappaient à tout contrôle juridictionnel.
  • Avec la Révolution française : La loi est devenue l’expression de la volonté générale, et l’administration a été progressivement soumise à des normes de droit public.
  • À partir du XIXᵉ siècle : L’émergence du Conseil d’État a renforcé le contrôle de l’administration. L’arrêt Blanco (1873) a marqué une étape majeure en établissant l’autonomie du droit administratif tout en soumettant l’administration à ses règles.

B. Une application variable selon les périodes

Le principe de légalité varie en fonction du contexte, notamment entre périodes ordinaires et périodes exceptionnelles.

  1. En période ordinaire : L’administration doit respecter scrupuleusement l’ensemble des règles juridiques (Constitution, lois, règlements, traités).
  2. En période exceptionnelle ou de crise :Le principe de légalité peut être temporairement limité par des mesures exceptionnelles (état d’urgence, état de siège).
    • Exemple :Pendant la pandémie de COVID-19, le gouvernement a pris des ordonnances d’urgence pour restreindre certaines libertés (confinement, couvre-feu). Ces mesures, bien qu’exceptionnelles, doivent rester conformes à la Constitution et aux engagements internationaux de la France.

 

 

Section 2. Les sources de la légalité.

La constitution, les lois organiques, les traité internationaux, les lois, la jurisprudence…

1. La constitution.

A. Source fondamentale du droit

La constitution, en tant que norme suprême, établit les règles fondamentales relatives à l’organisation et à l’exercice du pouvoir politique.

  • Rôle principal :

    • Elle définit les institutions de la République, leur fonctionnement et les rapports entre les citoyens et les pouvoirs publics.
    • Elle encadre les droits et libertés fondamentaux, garantis par des textes à valeur constitutionnelle.
  • Le bloc de constitutionnalité :

    • La constitution de 1958 intègre plusieurs éléments fondamentaux, formant ce que l’on appelle le bloc de constitutionnalité :
      1. La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 (DDHC), qui consacre des droits universels comme la liberté, l’égalité et la propriété.
      2. Le préambule de la constitution de 1946, qui affirme des droits économiques et sociaux, tels que le droit au travail, à la santé et à la protection sociale.
      3. La Charte de l’environnement de 2004, intégrée en 2005, reconnaissant des droits et devoirs liés à la protection de l’environnement et au développement durable.

B. La pleine valeur juridique du préambule

Pendant longtemps, le préambule de la constitution (incluant les textes qu’il incorpore) était considéré comme ayant une valeur symbolique plutôt que juridique.

  • Évolution jurisprudentielle :
    • Depuis une décision historique du Conseil constitutionnel (1971, Liberté d’association), le préambule est pleinement intégré au bloc de constitutionnalité, ayant ainsi une valeur contraignante.
    • La Charte de l’environnement, bien qu’introduite plus tard, bénéficie également de cette force juridique.

C. Principes fondamentaux reconnus par les lois de la République (PFRLR)

Le préambule de 1946 évoque les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République (PFRLR), qui ont une valeur constitutionnelle. Ces principes sont dégagés par le Conseil constitutionnel et doivent remplir plusieurs conditions :

  1. Être issus de lois adoptées sous la République.
  2. Avoir une portée générale.
  3. Refléter un consensus historique et juridique.
  • Exemples de PFRLR :
    • Droits de la défense (CC, 1976).
    • Indépendance de la justice administrative (CC, 1980).
    • Liberté d’association (CC, 1971).

D. Hiérarchie et autorité

Au sommet de la hiérarchie des normes, la constitution s’impose à toutes les autres normes juridiques : lois, règlements, actes administratifs. Le contrôle de la conformité à la constitution est assuré par le Conseil constitutionnel.

Conclusion sur la Constitution : Des débats récurrents portent sur une révision possible de la constitution, notamment pour :

  • Inclure de nouveaux droits sociaux ou environnementaux ou les droits numériques : des réflexions sont en cours pour inclure des garanties relatives à l’écologie, à la protection des données personnelles et à la cybersécurité.
  • Modifier l’organisation des pouvoirs publics pour renforcer la participation citoyenne (référendum, consultation populaire).
  • Le bloc de constitutionnalité évolue et a intégré la protection de l’environnement, avec la Charte de l’environnement, qui influence de nombreuses décisions administratives et judiciaires.

 

2. Les lois organiques.

Les lois organiques sont supérieures aux lois ordinaires, mais inférieures à la constitution. Une loi ordinaire ne peut contredire une loi organique.

A. Définition et rôle des lois organiques

Les lois organiques sont des lois spéciales qui complètent la constitution en précisant ses modalités d’application.

  • Fonctions principales :

    • Régler les conditions d’application des articles de la constitution.
    • Compléter et encadrer des domaines essentiels à l’organisation des institutions.
  • Exemples courants de lois organiques :

    1. La loi organique relative au Conseil constitutionnel, qui précise son fonctionnement et ses procédures.
    2. La loi organique fixant les règles d’élection du Président de la République.
    3. Les lois encadrant les compétences des collectivités territoriales, notamment en application des articles relatifs à la décentralisation.

B. Procédure d’adoption

Les lois organiques suivent une procédure particulière pour garantir leur conformité à la constitution :

  1. Adoption par le Parlement :
    • Elles doivent être votées par une majorité absolue des membres présents dans chaque chambre.
  2. Contrôle obligatoire par le Conseil constitutionnel :
    • Une loi organique ne peut entrer en vigueur qu’après validation par le Conseil constitutionnel.
    • Cela garantit qu’elle est conforme à la constitution et au bloc de constitutionnalité.

Les lois organiques sont supérieures aux lois ordinaires, mais inférieures à la constitution. Une loi ordinaire ne peut contredire une loi organique.

 

3. Les traités internationaux.

Les traités internationaux jouent un rôle essentiel dans la hiérarchie des normes et sont une source importante de légalité en droit interne. Ils constituent un cadre pour les relations entre États, mais aussi un levier pour protéger les droits fondamentaux des individus.

1. Les principes fondamentaux des traités internationaux

A. Article 55 de la Constitution française

Selon l’article 55 de la Constitution de 1958, les traités internationaux ratifiés et publiés ont une autorité supérieure aux lois nationales, sous certaines conditions :

  1. Ratification ou approbation :
    • Les traités doivent être ratifiés par le président de la République après autorisation par le Parlement, si nécessaire (article 53 de la Constitution).
    • Exemple : Le traité de Lisbonne (2007) a été ratifié après un vote au Parlement français.
  2. Publication :
    • Les traités doivent être publiés pour entrer en vigueur et être opposables.
  3. Condition de réciprocité :
    • Les autres États signataires doivent appliquer le traité de manière réciproque. Si un État ne respecte pas ses obligations, la France peut suspendre l’application de ses engagements.

B. Les difficultés d’application des traités

Pour l’administration, appliquer les traités peut être complexe :

  • Multitude de traités : La France est partie à des centaines de traités bilatéraux et multilatéraux, rendant leur connaissance exhaustive difficile.
  • Interprétation des normes : Certaines dispositions des traités sont générales et nécessitent une interprétation juridictionnelle pour être appliquées concrètement.

2. Les règles de l’Union européennes

Le droit de l’Union européenne (UE) constitue une source majeure de légalité et s’impose directement aux États membres, y compris à leurs administrations nationales.

A. Le traité de Rome et ses compléments

Le traité de Rome (1957), à l’origine de la Communauté économique européenne (CEE), est une pierre angulaire du droit communautaire. Il a été complété par des traités successifs :

  • Acte unique européen (1986),
  • Traité de Maastricht (1992),
  • Traité de Lisbonne (2007).

Ces textes forment le socle du droit primaire de l’Union européenne.

B. Le droit dérivé : règlement, directive et décision

  1. Les règlements européens :

    • Directement applicables dans tous les États membres dès leur publication au Journal officiel de l’Union européenne (JOUE).
    • Ils priment sur les lois nationales.
    • Exemple : Le RGPD (Règlement général sur la protection des données) de 2016 s’applique automatiquement dans tous les États membres.
  2. Les directives européennes :

    • Elles lient les États membres sur les objectifs à atteindre, mais leur transposition en droit interne est laissée à la discrétion de chaque État (loi ou règlement).
    • Obligation de transposition :
      • En cas de non-transposition dans les délais, un État peut être condamné pour manquement à ses obligations.
      • Exemple : L’arrêt Commission c. France (2005), où la France a été condamnée à une amende de 10 millions d’euros pour non-transposition d’une directive sur la libéralisation du marché de l’énergie.
  3. L’interprétation des règles communautaires :

    • En cas de doute sur l’interprétation d’un texte européen, les juridictions nationales peuvent saisir la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) pour une question préjudicielle.
    • Exemple : La CJUE a été saisie pour clarifier des dispositions relatives au détachement des travailleurs dans l’UE.

3. La Convention européenne des droits de l’homme (CEDH)

A. Origine et contenu

La CEDH, adoptée à Rome en 1950, est un traité international signé par les membres du Conseil de l’Europe. Elle garantit des droits civils et politiques fondamentaux, tels que :

  • Article 6 : Droit à un procès équitable dans un délai raisonnable.
  • Article 8 : Droit au respect de la vie privée et familiale.
  • Article 10 : Liberté d’expression.

La CEDH a été élaborée pour éviter les abus constatés durant la Seconde Guerre mondiale et promouvoir les droits humains dans les États signataires.

B. Mécanisme de recours individuel

  1. Saisine de la Cour européenne des droits de l’homme (Cour EDH) :

    • Les individus peuvent saisir la Cour EDH pour contester une violation de leurs droits par un État, mais uniquement après avoir épuisé les voies de recours internes.
    • Exemple : Un citoyen français qui conteste une décision administrative devant le Conseil d’État peut ensuite saisir la Cour EDH si ses droits fondamentaux n’ont pas été respectés.
  2. Impact des décisions de la Cour EDH :

    • Les États condamnés doivent se conformer aux arrêts de la Cour, qui peuvent imposer des modifications législatives ou administratives.
    • Exemple : L’affaire Eon c. France (2013), où la Cour EDH a jugé que la condamnation d’un manifestant pour offense au président de la République violait la liberté d’expression.

4. L’influence des traités internationaux sur l’administration française

Les traités internationaux, qu’ils soient d’origine européenne ou issus d’autres organisations, influencent directement l’action administrative :

A. Cas des actes administratifs contraires aux traités

  • Si un acte administratif est contraire à un traité international, il peut être annulé par un juge administratif via un recours pour excès de pouvoir.
  • Exemple : Une circulaire administrative contraire au RGPD peut être annulée sur ce fondement.

B. Primauté des traités sur les lois nationales

  • Un traité prime sur une loi nationale, même postérieure, conformément à l’arrêt Nicolo (1989) du Conseil d’État.
  • Exemple : Les lois nationales limitant la libre circulation des personnes peuvent être écartées si elles contreviennent au droit européen.

4. Le règlement.

A. Définition et nature des règlements

Les règlements sont des actes émanant de l’exécutif, pris en vertu du pouvoir réglementaire conféré par l’article 21 de la Constitution au Premier ministre. Ils précisent les lois, complètent leur application ou, dans certains cas, interviennent de manière autonome.

  • Règlements d’application des lois :

    • Ces règlements précisent les modalités pratiques d’application des lois votées par le Parlement.
    • Exemple : Un décret peut fixer les conditions d’attribution d’une subvention prévue par une loi.
  • Règlements autonomes (article 37) :

    • Ces règlements interviennent dans des domaines où la loi n’a pas à légiférer. Ils confèrent à l’exécutif une liberté d’action proche de celle du législateur.
    • Exemple : Le Code de la route est en grande partie régi par des règlements autonomes.

B. Encadrement et contrôle des règlements

  1. Subordination à la loi :

    • Les règlements d’application doivent respecter la loi qu’ils complètent. Un règlement ne peut ni la contredire ni en dénaturer le sens.
    • Exemple : Un décret d’application ne peut instaurer une obligation non prévue par la loi.
  2. Contrôle du juge administratif :

    • Les règlements sont soumis au contrôle de légalité exercé par le juge administratif. Un règlement contraire à la loi, à la Constitution ou à un traité international peut être annulé par un recours pour excès de pouvoir (REP).
    • Exemple jurisprudentiel : Le Conseil d’État a annulé un décret instituant une taxe illégale sur des entreprises dans l’arrêt Jamart (1936).

C. Types de règlements

  1. Actes pris par l’exécutif national :

    • Décrets :
      • Signés par le Premier ministre ou le Président de la République (dans certains cas).
      • Exemple : Décret portant sur les modalités d’accès au RSA.
    • Arrêtés :
      • Prises par des ministres, préfets ou maires.
      • Exemple : Un arrêté municipal réglementant les horaires d’ouverture des commerces.
  2. Actes des autorités locales et spécialisées :

    • Les collectivités territoriales disposent d’un pouvoir réglementaire pour gérer leur territoire (articles 72 et suivants de la Constitution).
    • Les autorités administratives indépendantes (AAI) et les autorités publiques indépendantes (API), comme la CNIL, peuvent également édicter des règlements dans leur domaine de compétence.

 

5. Les ordonnances de l’article 38.

A. Définition et processus d’adoption de l’ordonnance

Les ordonnances permettent au gouvernement d’intervenir dans le domaine législatif après avoir obtenu l’autorisation du Parlement.

  • Étapes d’élaboration :

    1. Le Parlement vote une loi d’habilitation définissant le champ d’intervention et la durée de l’habilitation.
    2. Les ordonnances sont délibérées en Conseil des ministres, après avis du Conseil d’État.
    3. Elles sont signées par le Président de la République et entrent en vigueur immédiatement.
  • Exemple : Les ordonnances prises en 2017 pour réformer le Code du travail.

B. Statut juridique des ordonnances

  1. Avant ratification par le Parlement :

    • Les ordonnances ont une nature réglementaire et peuvent être contestées par un REP.
    • Si le Parlement refuse de ratifier une ordonnance, elle devient caduque et disparaît de l’ordre juridique.
  2. Après ratification par le Parlement :

    • Les ordonnances acquièrent valeur législative et ne peuvent plus être contestées devant le juge administratif.

 

6. La jurisprudence et les principes généraux du droit.

A. La jurisprudence comme source de droit

La jurisprudence administrative est une source essentielle en droit public. Elle se forme à travers les décisions des juridictions administratives, notamment celles du Conseil d’État.

  • Rôle du juge administratif :
    • Contrôler la conformité des actes administratifs aux normes supérieures.
    • Compléter les lacunes du droit écrit en interprétant les textes ou en établissant des principes généraux.

B. Les principes généraux du droit (PGD)

Les PGD sont des règles dégagées par le juge administratif à partir des valeurs fondamentales d’une société démocratique. Ils sont non écrits mais s’imposent à l’administration, même en l’absence de texte législatif.

  • Exemples de PGD :
    • Droits de la défense : Décision Aramu (CE, 26 octobre 1945).
    • Principe d’égalité devant le service public : Décision Société des concerts du Conservatoire (1951).
    • Non-rétroactivité des actes administratifs : Les actes administratifs ne peuvent produire d’effets avant leur adoption, sauf si un texte l’autorise expressément.
  • Position dans la hiérarchie des normes :
    • Les PGD ont une valeur supérieure aux actes réglementaires mais inférieure aux lois.
    • Ils sont infra-législatifs et peuvent donc être modifiés par le législateur, sauf s’ils sont consacrés dans le bloc de constitutionnalité.

 

Chapitre 2. La hiérarchie des normes source de la légalité.

La hiérarchie des normes constitue une structure pyramidale qui garantit la cohérence et la légalité du système juridique. Chaque norme doit respecter celles qui lui sont supérieures dans cette hiérarchie. Le respect de cette organisation assure le bon fonctionnement de l’État de droit.

1. La Constitution au sommet de la hiérarchie

La Constitution est la norme suprême de l’ordre juridique français. Elle définit les principes fondamentaux de la République, organise les pouvoirs publics, et garantit les droits et libertés des citoyens.

  • Rôle du Conseil constitutionnel :

    • Le Conseil constitutionnel est chargé de contrôler la conformité des lois à la Constitution, dans le cadre du contrôle de constitutionnalité.
    • Il intervient également pour examiner la conformité des traités à la Constitution avant leur ratification (article 54 de la Constitution).
  • Exemple : Modification de la Constitution pour intégrer un traité :

    • Le traité de Maastricht (1992) a accordé aux citoyens de l’Union européenne résidant en France le droit de voter aux élections municipales.
    • Cette disposition, contraire à l’article 1er de la Constitution selon lequel le droit de vote est réservé aux citoyens français, a nécessité une révision constitutionnelle pour permettre la ratification du traité.

2. Les traités internationaux

Les traités et accords internationaux, une fois ratifiés et publiés, sont supérieurs aux lois nationales, conformément à l’article 55 de la Constitution.

  • Conditions pour qu’un traité prime sur la loi :

    • Le traité doit être ratifié selon les règles constitutionnelles.
    • Il doit être réciproquement appliqué par les autres parties signataires.
  • Rôle du Conseil constitutionnel, du Conseil d’État et de la Cour de cassation :

    • Le Conseil constitutionnel ne contrôle pas la conformité des lois aux traités.
    • Cette tâche revient aux juridictions ordinaires (Conseil d’État et Cour de cassation), qui écartent l’application des lois contraires aux traités.

Chronologie jurisprudentielle de la supériorité des traités sur les lois

  1. Arrêt Fraisse (Cour de cassation, Assemblée plénière, 2 juin 2000)

    • Résumé : La Cour de cassation confirme que la Constitution demeure la norme suprême, même par rapport aux traités internationaux, réaffirmant ainsi la primauté de la Constitution sur les engagements internationaux
  2. 1. Arrêt des Semoules (Conseil d’État, 1er mars 1968)

    • Résumé : Le Conseil d’État refuse de contrôler la conformité d’une loi postérieure à un traité international, estimant que ce contrôle relève du Parlement.
  3. Arrêt Nicolo (1989) Conseil d’État, 20 octobre 1989

    • Résumé : Le Conseil d’État a affirmé la supériorité des traités sur les lois nationales, y compris les lois postérieures. Dans cette affaire, il a été jugé que les dispositions d’un traité international prévalaient sur une loi nationale postérieure.
  4. Arrêt Sarran et Levacher (1998) Conseil d’État, 30 octobre 1998

    • Résumé : Le Conseil d’État a réaffirmé la supériorité des traités sur les lois, même lorsque ces lois sont postérieures. Cet arrêt a confirmé que les dispositions d’un traité international doivent être appliquées même si elles contredisent une loi nationale ultérieure.
  5. Arrêt GISTI (2003) Conseil d’État, 8 décembre 2003

    • Résumé : Le Conseil d’État a appliqué le principe de la supériorité des traités sur les lois dans le cadre du droit des étrangers. Il a jugé que les dispositions d’un traité international devaient prévaloir sur une loi nationale contraire.
  6. Arrêt Arcelor (2007) Conseil d’État, 8 février 2007

    • Résumé : Le Conseil d’État a confirmé la supériorité des traités sur les lois nationales, y compris les lois postérieures, dans le cadre d’un litige concernant des aides d’État. Il a appliqué les dispositions d’un traité international malgré l’existence d’une loi nationale contraire.
  7. Arrêt Jacques Vabre (1975) Cour de cassation, 24 mai 1975

    • Résumé : Bien que cet arrêt concerne la supériorité du droit communautaire (aujourd’hui droit de l’Union européenne) sur le droit national, il a également des implications pour la supériorité des traités en général. La Cour de cassation a jugé que les dispositions d’un traité international devaient prévaloir sur une loi nationale contraire.

Application pratique

  • Une loi contraire à un traité entre en vigueur, mais elle peut être écartée par les juges si elle est jugée non conforme au traité dans un litige particulier.
  • Exemple récent : En matière de protection des données personnelles, les juges écartent l’application de lois nationales contraires au RGPD (Règlement général sur la protection des données), un règlement européen.

3. Les lois : hiérarchie entre loi organique et loi ordinaire

La loi organique

  • Les lois organiques complètent la Constitution et précisent son application, notamment sur l’organisation des pouvoirs publics.
  • Elles doivent être conformes à la Constitution et font l’objet d’un contrôle obligatoire par le Conseil constitutionnel avant leur promulgation (article 46 de la Constitution).

La loi ordinaire

  • Les lois ordinaires sont adoptées par le Parlement et doivent respecter :
    • La Constitution.
    • Les traités internationaux.

4. Les règlements et actes administratifs

En dessous des lois, les règlements et actes administratifs (arrêtés, décrets, circulaires) doivent respecter les normes supérieures dans la hiérarchie.

  1. Les règlements autonomes (article 37 de la Constitution) :

    • Ils sont adoptés dans les domaines ne relevant pas de la compétence législative.
    • Ils doivent respecter les principes constitutionnels et les lois en vigueur.
  2. Les règlements d’application :

    • Ces règlements visent à préciser les modalités d’application des lois et doivent strictement s’y conformer.
  3. Les actes administratifs individuels :

    • Décisions (exemple : permis de construire, sanction disciplinaire) qui doivent respecter la légalité des textes supérieurs.

5. La hiérarchie émettrice : respect des compétences

Chaque niveau émetteur de normes (Union européenne, État, collectivités territoriales) doit respecter les limites de ses compétences.

Les normes européennes

  • Les règlements européens sont directement applicables et priment sur les lois nationales en cas de contradiction.
  • Les directives européennes imposent un résultat à atteindre, laissant aux États membres le choix des moyens.

Les collectivités territoriales

  • Les actes des collectivités (délibérations municipales, arrêtés préfectoraux) doivent respecter les lois, règlements, et normes constitutionnelles.
  • Exemple : Un arrêté municipal restreignant une liberté fondamentale, comme le droit de manifester, peut être annulé pour excès de pouvoir s’il ne respecte pas la loi ou la Constitution.

En conclusion, la hiérarchie des normes garantit la cohérence et la légalité de l’ordre juridique français. La Constitution, au sommet, guide l’ensemble des normes. Les traités internationaux et le droit européen imposent une exigence supplémentaire de conformité pour les lois et règlements. Les jurisprudences Vabre et Nicolo ont confirmé la primauté des engagements internationaux

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