La théorie du contrat social face à l’absolutisme

 La théorie du contrat ou pacte social face à la théorie royale de l’absolutisme

Les théoriciens du contrat social se sont développés au 16 eme siècle. Ils vont se heurter aux constructions et aux affirmations des textes de l’absolutisme.

1) L’idée de Contrat

La thèse du fondement populaire du pouvoir avait prédominé au moyen âge.

C’est un lieu commun de la doctrine romaine comme de la théologie chrétienne au moins depuis la formule attribuée à Thomas d’Aquin:  » Toute puissance vient de Dieu mais par l’intermédiaire du peuple ».

Transgression de la formule de St Paul: « Tout pouvoir vient de dieu ».

Dès le postulat de St Thomas 2 tendances vont se séparer:

-Celle de l’origine directe du pouvoir, du Droit divin.

-Celle qui l’interprète comme un Contrat.

Dans la seconde moitié du 16 eme siècle, la théorie du contrat conditionnel et révocable avait été répandue par les protestants extrémistes mais aussi par les catholiques extrémistes >>> la ligue Catholique.

Les protestants et catholiques se trouvent d’accord en ce qu’ils expriment des thèses semblables. Ils proclament comme légitime la résistance à la tyrannie que constituait pour eux la monarchie absolue. On les appelle les monarchomaques: opposés à l’expression du pouvoir royal par un seul.

Cette doctrine s’inscrit dans la droite ligne du tyrannicide.

Pour les chrétiens, cela pose problème car cela ne s’accorde pas avec l’interdiction de tuer. Le débat fut vif dès le 13ème siècle avec Thomas d’Aquin. Il distingue l’usurpateur qui pouvait toujours être éliminé et le prince légitime qui exerçait de façon nuisible sont pouvoir.

S’il était établi que le Droit de choisir un prince appartenait au peuple, alors ce dernier pouvait renverser le prince. Cette théorie fut balayée par les légistes qui, de façon habile, retournaient cela au profit du roi en qualifiant de tyran celui qui essayait de renverser le roi.

Les théoriciens légitiment l’assassinat politique.

Même si des formations politiques se rejoignent, il est inefficace de dire qu’elles se ressemblent.

1) Chez les protestants

François Hotman ( 1524/1590). Il considère que à l’origine, la souveraineté résidait dans le peuple du royaume. Il s’élève contre l’absolutisme à la fois en fait et en Droit. Il suggère un retour aux anciennes coutumes des francs qui furent « gens merveilleusement sages et avisés ». Hotman rappelle combien les institutions politiques de ces francs étaient tempérées. Il rappelle que les carolingiens et les premiers capétiens devaient leur couronne à l’élection.

Hugues Capet a d’abord été élu par les grands du royaume et ensuite sacré. Les grandes assemblées symbolisaient la souveraineté populaire. La royauté se trouvait composée et tempérée. La source du pouvoir royal résidait donc dans le peuple qui avait délégué au roi une partie de son pouvoir. Sans pour autant s’être dessaisi se sa souveraineté. Donc le monarque n’existe que par la volonté du peuple. Que par ce contrat initial. Cela fait que le monarque n’existe que par ce contrat primordial passé avec ses sujets qui fait du salut de ce peuple la cause fidèle du gouvernement monarchique.

Les EG revendiquent le fait que c’est en eux que réside le principe de souveraineté. Le roi doit les convoquer et c’est un devoir. C’est une obligation de convoquer les EG et de voir s’étendre leur compétence aux affaires du Gouvernement et à la loi en particulier.

Hotman introduit des conceptions que l’on peut qualifier de révolutionnaires. Ou du moins précoces.  » Si le roi ne gouverne plus pour l’utilité générale, il y aura rupture du pacte et surtout légitimité de la révolte ».

2) Les ligueurs catholiques

Les catholiques tiennent des propos proches de ceux des protestants. « Certes l’autorité du roi ne peut donc procéder que de Dieu mais par le peuple ». Les sujets du roi ont donc, sur la monarchie, un droit de contrôle qui s’exprime par la réunion des EG. Lorsque le roi ne remplit pas ses engagements et en particulier si il ne respecte pas la promesse qu’il fait le jour de son sacre de protéger l’Eglise catholique et si il ne respecte pas son devoir de réprimer l’hérésie. « Si le roi ne tient pas ses engagements, alors le peuple pourra déposer le roi et en élire un autre à sa place ». Régner n’est alors rien d’autre qu’exécuter un contrat conclu avec le peuple. C’est la conception d’une monarchie tempérée. C’est cette conception qui est combattue et refusée par les théoriciens de l’absolutisme.

2) Les doctrines de l’absolutisme

Attaquant le mal à la racine, les théoriciens de l’absolutisme réfutent l’idée d’un pacte entre le roi et ses sujets. Cardin Lebret considère qu’à l’origine le peuple avait la souveraineté mais qu’il a concédé définitivement cette souveraineté. Sa prétention à vouloir reprendre la souveraineté est nulle et non avenue et sans fondement. Désormais, c’est de Dieu et de Dieu seul que le roi tient ses droits et ses pouvoirs ainsi que son royaume. Monarque qui a le total exercice de la souveraineté qui est puissance supérieure et cette puissance supérieure ne peut pas se diviser.

Les EG ont un pouvoir consultatif qui ne dépend que du bon plaisir du roi.

Bossuet est évêque de Beaux et il était le précepteur du Dauphin. La conception de Bossuet est encore plus absolutiste que les absolutistes. Il va beaucoup plus loin dans son analyse et développe une pensée originale. « Le pouvoir est conféré immédiatement et sans intermédiaire ». Pour Bossuet, la souveraineté n’a jamais pu faire l’objet d’un transfert. « La souveraineté n’a jamais pu faire l’objet de cession de la part du peuple car il n’a jamais possédé la souveraineté ».  » Dieu gouverne tous les peuples et leur donne des rois à tous ».  » Le trône royal n’est pas le trône d’un homme mais le trône de Dieu lui même ». Dans ces conditions, on comprend facilement que la souveraineté populaire et le contrat social ne sont que des utopies qu’il faut combattre et condamner. Le refus total de tout contrôle du peuple est complété par le refus de l’ingérence des Grands.

3) Le refus d’un Gouvernement aristocratique

  • a) Si la monarchie n’a pas rompu avec la conception d’une société tripartite

La monarchie souhaite exercer son pouvoir sans partage. Le monarque redoute l’état d’esprit qui règne parmi les nobles. Les Grands du royaume ont toujours l’idée qu’ils pourraient renverser le roi et instaurer une monarchie parlementaire. Ces exigences sont totalement incompatibles avec l’absolutisme royal. Le monarque s’attache à réprimer tout ce qui peut porter ombrage à la plénitude de son autorité. Sa démarche est claire. Si le roi consent de combler les grands de titres, d’honneurs, ou même de subvenir à l’entretien de la noblesse, ce n’est pas par grandeur mais pour les mieux réduire. Les caser dans un lieu et leur refuser tout empiètement sur les prérogatives royales.

Le roi soleil ne manque pas de surveiller sa famille de près. Il la confine dans une prison dorée >>> Versailles. Louis XIV s’appuie sur des individus qu’il a choisis.

  • b) Le clergé 17 janvier 2012

C’est une institution très forte. Le clergé régulier et séculier est hiérarchisé et exerce une très forte influence sur les sujets du roi: « l’opinion » du clergé peut constituer une force de résistance à l’autorité royale. Incompatible avec le pouvoir absolu. Dans la tradition Gallicane, le roi de France est le protecteur naturel de l’Eglise de France en son royaume. C’est en cette qualité que le roi peut intervenir dans la nomination des évêques mais aussi dans la nomination des abbés qui sont à la tête des congrégations. En principe, le roi ne se mêle pas des questions qui relèvent du domaine spirituel mais il y a l’appel comme d’abus.

Dans le domaine temporel, le roi exige d’être obéi par les clercs qui sont les sujets du roi de France. « Ce n’est pas la qualité de clercs qui fait que le clergé a une situation à part ». Pour remercier le Clergé des services rendus, le roi reconnaît aux clercs des privilèges. En récompense, la monarchie concède au clergé des privilèges en matière fiscale.

L’ordre ecclésiastique dans la plus pure tradition gallicane est d’abord et avant tout dans le royaume de France et à ce titre, l’ordre du clergé est soumis comme les 2 autres ordres à l’intérêt supérieur de l’Etat. Le Clergé comme les autres ordres sont soumis à la volonté de celui qui incarne un intérêt supérieur >>> Le roi.

Au 17ème siècle, l’Etat s’est imposé dans la pensée politique. C’est cette notion qui permet de comprendre la théorie royale de l’absolutisme.

Théorie qui hérite de la pensée politique de Richelieu (1624/ 1642).

La pensée de Richelieu est la raison d’Etat.  » La seule chose nécessaire à l’Etat est la puissance ». C’est pourquoi le monarque doit détenir seul tout ce qui fait la force de son pouvoir politique et il doit tenir en ses mains les finances.

Louis XIV décidera d’être l’ordonnateur des finances. Voila pourquoi le roi ne peut accepter aucune opposition. C’est toujours au regard de la raison d’Etat que le pouvoir du monarque doit être pur. Louis XIV, sans renier les idées de Richelieu, s’en écarte sur un point car il est le roi. Pour Richelieu, le roi incarne le pouvoir absolu mais il lui faut un Gouvernement dirigé par un principal ministre. Pour Louis XIV, celui dans lequel le pouvoir s’incarne est aussi celui qui doit gouverner.

Car seul le roi connaît la raison d’Etat. Le roi est sacré. Il est un être humain d’essence supérieure. C’est cette essence supérieure qui opère l’articulation entre le Droit divin et la raison d’Etat.

Pour l’Angleterre, le roi dépend des hommes

Le roi dépend des hommes

Louis XIV regarde avec beaucoup de tristesse le devenir des rois d’Angleterre dont Charles II ( 1660-1685) et Jacques II ( 1685-1688).

Charles II respecte les droits du Parlement anglais mais les liens qu’il a noués avec le royaume de France irritent les parlementaires. Ils sont d’autant plus irrités que Charles II a noué des liens forts avec les catholiques.

Les parlementaires vont adopter de la façon la plus légale 2 mesures

– Le Bill du test en 1672: C’est un projet de loi et il devient loi quand la majorité des membres du Parlement l’adoptent. Les fonctions publiques sont réservées aux protestants. « Je déclare, en présence de Dieu tout puissant, que je ne crois pas que l’Eglise romaine soit la seule Eglise catholique et universelle, hors de laquelle il n’y a point de salut; ou que le Pape ait une quelconque juridiction sur l’Eglise catholique en général ni sur moi ». Le roi d’Angleterre s’est proclamé chef de l’Eglise anglicane. Ce bill du test est une catastrophe pour les catholiques car ils doivent renier l’Eglise catholique et le Pape.

C’était le moyen pacifique pour éliminer les catholiques de la fonction publique anglaise.

– Le Bill de l’Habeas Corpus est adopté en 1679: « Toute personne arrêtée par un puissant doit être présentée dans les trois jours à un juge qui peut décider de sa libération.

Chaque fois que quelqu’un présentera une demande d’Habeas Corpus à un shérif, un geôlier ou tout autre officier, pour une personne soumise à leurs gardes, ceux-ci devront, dans les 3 jours, présenter l’individu devant le lord chancelier ou alors devant les juges de la cour.

Lutte contre l’arbitraire royal car les parlementaires font référence à la charte des libertés. Ces réformes sont soutenues par les factions libérales. Celle qui réunit la faction bourgeoise libérale. Ces réformes sont combattues par les conservateurs.

Charles II a exercé 25 ans sans trop de difficultés car il ne s’est pas opposé à ces 2 bill. Quand Charles II meurt il y aura Jacques II en 1685.

Exemple parfait d’un roi tout à fait incompréhensif. Il est catholique et imbibé de la conviction de la monarchie absolue de Droit divin.

Il monte sur le trône comme Louis XIV.

Il impose le catholicisme. Il s’assied allègrement sur ces bills qu’il balaye. Fondamentalement, il pense qu’il peut gouverner sans le Parlement d’Angleterre. Il refuse systématiquement les décisions du Parlement.

1688: Les parlementaires utilisent le Droit et qui peut les séparer du roi. Les parlementaires ont tous les outils pour leur permettre de voter la déchéance du roi Jacques II.

Pendant que Jacques II s’enfuit, le Parlement propose le pouvoir à la fille de Jacques II >>> Marie qui est l’épouse du gouverneur de Hollande. Il est lui aussi protestant comme elle.

Les anglais appellent cela: la glorieuse Révolution

Marie et Guillaume sont proclamés après avoir prêté serment sur un texte >>> la Déclaration des droits adoptée en 1689. Ce texte affirme que le Parlement est le représentant de la nation anglaise. Un contrat a été passé.

Ce texte est capital pour l’histoire du royaume d’Angleterre mais aussi pour d’autres théoriciens qui vont s’en inspirer.

Le Parlement d’Angleterre avait fourni les armes du Droit pour voter la déchéance du roi Jacques II. Les Parlementaires ont en leurs mains l’orientation constitutionnelle du royaume d’Angleterre. Ils choisissent le nouveau roi et la nouvelle reine.

Ce texte énumère les libertés reconnues au peuple anglais depuis la grande charte de 1215. « Le décideur est le Parlement ». Il est composé de lords spirituels(le clergé) et temporels (la noblesse). La seconde chambre est la chambre des communes.

Art 1 de la Déclaration des droits:  » Que le prétendu pouvoir de suspendre l’exécution des lois sans autorisation du Parlement est contraire aux lois ».

Le roi doit respecter les droits et les coutumes. Toutes les lois et toutes les coutumes de ses prédécesseurs. Mais aussi son administration. Cet article visait particulièrement le roi Jacques II car il se croyait au dessus des lois.

Article 4 et 5: Le roi ne lève pas les impôts sans l’accord du Parlement.

Le roi ne peut pas non plus, sans le consentement du Parlement, emprisonner quelqu’un de manière abusive.

L’armée: le roi ne peut pas lever les armées permanentes. Il n’y a pas, en Angleterre d’armée permanente.

Article 8: Impose au roi des élections des membres du Parlement. Elections qui doivent être libres.

Article 13: Confère au Parlement le droit de se réunir en session régulière.

Dès 1689, le roi admet un partage du pouvoir. « Le roi ne peut pas agir sans le consentement du Parlement ».

Le Parlement vote les lois, les crédits.

 

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