Les droits du contribuable en vérification de comptabilité

Les garanties propres à la vérification de comptabilité

Elles sont nombreuses, précises et lourdes pour l’administration. Si elles ne sont pas respectées, la sanction est radicale puisque l’administration ne pourra pas tirer des conséquences financières et fiscales de la vérification de comptabilité effectuée. Si elle le fait, le contribuable pourra demander au juge de l’impôt une décharge sur la base d’un vice de procédure.

C’est une procédure contradictoire qui ménage par différents moyens un débat entre l’entreprise et l’administration fiscale. Les garanties tiennent au fait que cette vérification est temporellement encadrée.

A) Le champ d’application de la vérification de comptabilité

Il s’agit de d’indiquer dans quelles situations cet outil particulier peut être utilisé pour contrôler un contribuable.

La vérification de comptabilité ne peut être appliquée que pour les contribuables qui sont tenus des obligations comptables. Ex. les particuliers ne peuvent pas être contrôlés au titre de traitements et salaires par le biais d’une vérification de comptabilité ex. non plus pour les revenus fonciers ou les revenus sur les capitaux. L’administration peut l’utiliser pour contrôler les revenus catégoriels soumis à l’IR pour lesquels il y a une obligation de comptabilité : BIC, BNC, BA. + IS. + TVA. + taxes sur les salaires et les taxes annexes. La question s’est posée de savoir si la procédure pouvait être utilisée pour vérifier les droits d’enregistrement. Après un débat jurisprudentiel, la Cour de cassation a admis que la vérification de comptabilité soit l’outil adapté lorsque le redevable de ces droits est un professionnel et lorsqu’il est tenu pour le contrôle de ces droits d’avoir une comptabilité ex. par un professionnel de l’immobilier, les droits sur les mutations. C’est la même chose pour les taxes versées par les assurances.

B) Les garanties procédurales

La vérification de comptabilité doit ménager un débat contradictoire entre le vérificateur et l’entreprise vérifiée. En droit fiscal, la déclaration bénéficie d’une présomption de sincérité. Cette présomption de sincérité a pour conséquence que c’est à l’administration en principe d’établir la preuve que ce qui a été déclaré, n’est pas conforme à ce qui aurait du être déclaré. Mais dans tous les cas, avant de tirer les conséquences de son contrôle, l’administration sera obligée d’engager avec le contribuable qu’elle vérifier, un débat contradictoire. L’objectif des garanties est d’éviter le contentieux.

Le débat contradictoire sera garanti par la mise en place d’un certain nombre de garanties procédurales :

      L’avis de vérification 

L 47 du Livre des procédures fiscales

Cette une garantie que le législateur considère comme fondamental. Si l’avis n’est pas envoyé, il y aura nullité des impositions.

Il doit être envoyé avant le début des opérations de vérification à l’entreprise vérifiée. Objectif : il s‘agit de permettre à contribuable de se mettre dans la situation qui lui permettra d’assister aux opérations de contrôle, d’être disponible, de préparer les documents etc. A l’inverse des perquisitions qui sont des contrôles inopinés, l’avis doit comporter des mentions obligatoires et il doit être envoyé suffisamment tôt.

Mentions obligatoire :

      1.      Le contribuable a la faculté de se faire assister d’un conseil. Ce conseil peut faciliter le débat contradictoire. Il peut s’agir du comptable ou d’un avocat.
      2.      Les années ou périodes soumises à vérification
      3.      Les impôts faisant l’objet du contrôle
      4.      Le nom et la qualité du vérificateur sans que la signature de ce vérificateur soit obligatoire
      5.      Le nom et la qualité du supérieur hiérarchique du vérificateur que le contribuable pourra solliciter pendant le contrôle

L’avis doit être accompagné en application de l’article L 10 du Livre des procédures fiscales, de la charte des droits et des obligations du contribuable vérifié. Le législateur a considéré que ce document soit donné en amont de la vérification. Si la Charte n’est pas jointe à l’avis, la procédure sera viciée. Dans certains cas, dans cette Charte l’administration introduit des garanties supplémentaires au profit du contribuable. Le contenu de cette charte est opposable à l’administration fiscale. Si l’administration ne respectait pas les garanties qu’elle s’est imposées elle-même en plus, y aura un vice de procédure. Dans les faits, la Charte prévoit peu de garanties supplémentaires. Quand par hasard, l’administration se serait fait prendre à glisser des garanties de manière non intentionnelle, elle les a fait vite effacer.

L’ensemble, charte plus avis, doivent être notifiés au contribuable. La plupart du temps, par courrier recommandé avec accusé de réception. Le vérificateur peut dans certaines situations se déplacer pour remettre avis accompagné de la charte, au contribuable.

Ils doivent être envoyés suffisamment en amont. L’art L 47 du Livre des procédures fiscale s’est gardé de fixer ce délai en amont, « il faut un délai utile ». L’administration fiscale soutient que le délai utile est de 15 jours. Mais la jurisprudence considère qu’il y a un vice de procédure que lorsque le délai entre la réception de l’avis de vérification et le début de la vérification est inférieur à 2 jours, non compris le jour de la réception et le jour du début de la réception. Le délai utile ne concerne que les véritables opérations de vérification de comptabilité (répond aux critères de la jurisprudence). Ex. le vérificateur qui veut vérifier une entreprise, peut très bien arriver un matin dans l’entreprise de manière inopinée, remet l’avis et la charte, il n’est pas obligé de repartir tout de suite pour respecter le délai utile. Il peut voir le directeur et visiter les locaux. Il peut demander au chef de l’entreprise de montrer la comptabilité. Il prend contact passif avec l’entreprise, pas d’examen critique, pas de comparaison avec la déclaration. il est obligé de repartir et de revenir plus tard.

      L’exigence d’un débat oral et contradictoire 

Contrairement à la vérification des particuliers, s’agissant de contrôle des entreprises, la vérification de comptabilité sous peine de nullité doit ménager un débat contradictoire. Les conditions de ce débat oral et contradictoire, sont en principe réunies parce que la vérification de comptabilité est un contrôle qui se déroule dans les locaux de l’entreprise, sur place pour permettre au vérificateur de prendre connaissance de conditions réelles d’exploitation se qui peut avoir des conséquences sur la manière dont il va aborder sa vérification de comptabilité. Le lieu : celui du principal établissement et non pas celui de son siège.

Dans certains cas, cette présence du vérificateur peut être un handicap pour l’entreprise. Certaines entreprises n’ont pas de locaux disponibles pour accueillir le vérificateur. La jurisprudence s’est assouplie. La vérification peut avoir lieu sur demande du contribuable dans les locaux du comptable qui détient les documents de l’entreprise ou dans les locaux de l’administration. Dans ce cas là, l’administration fera signer au contribuable un document listant l’ensemble des documents comptables emportés. Que ce soit dans les locaux ou hors entreprise, la vérification doit être ponctuée de rencontres entre le vérificateur et le chef d’entreprise sinon elle ne serait pas orale ni contradictoire. Quand le contrôle a lieu hors entreprise, le vérificateur est obligé de solliciter des entretiens avec le chef d’entreprise vérifié. Le nombre d’entretiens dépend des situations. Systématiquement, deux entretiens (au début pendant lequel le vérificateur explique ce qu’il va faire ou où le chef d’entreprise présente son entreprise et explique son fonctionnement ; entretien de synthèse en fin de vérification : il présente ses constations, etc.). Entre les deux, on peut avoir plusieurs entretiens, cela dépend de la taille de l’entreprise, de l’ampleur du contrôle.

Si le défaut du débat oral et contradictoire est du fait du contribuable lui-même, il n’y aura pas d’irrégularité.

La vérification de comptabilité se termine de manière quasi systématique par une réunion de synthèse. Elle n’est cependant pas obligatoire. La jurisprudence n’exige pas que le vérificateur lors de cette dernière entrevue informe le contribuable de ce que seront exactement les rectifications qui lui seront notifiées ultérieurement (montant exact et les pénalités). Le vérificateur avant de notifier, va pouvoir travailler sur le dossier dans les locaux.  Il va pouvoir rédiger la proposition de rectification. 

Si ce caractère contradictoire n’est pas respecté, ce défaut doit être prouvé par le contribuable. Les rectifications qui seront notifiées suite au contrôle, seront irrégulières. On aura une décharge. Pour s’assurer, l’administration recommande à ses agents de garder trace écrite de tous les rendez vous proposés et réalisés au cours de la vérification de comptabilité.

Dans certains cas, il existe une possibilité : la procédure de régularisation spontanée.

      La procédure de régularisation spontanée

A l’issue de la vérification de comptabilité, il arrive que le vérificateur constate un certain nombre d’erreurs volontaires ou non, commises par le contribuable, qui donnent lieu à l’envoi d’une proposition de rectification. Si le vérificateur a bien mené son débat contradictoire, le contribuable peut à la fin de vérification être convaincu du bien fondé d’un certain nombre de rectifications qui s’annoncent. Le contribuable va pouvoir demander le bénéfice de la procédure de régulation spontanée. L 62 du livre des procédures fiscales. Elle permet au contribuable de demander à réparer les erreurs commises spontanément, contre un avantage, la ristourne sur le taux d’intérêts qui accompagne les suppléments d’impôts (0,4 % par mois – 30 % sur taux = 0,28 % par mois de retard).

Avant la notification, lors de la réunion de synthèse le contribuable va demander à en bénéficier. Le vérificateur peut lui proposer sans pouvoir l’imposer. Si la demande est acceptée par le vérificateur, va conduire le contribuable à déposer une déclaration rectificative. Le contribuable s’engager à acquitter les rappels de droit dans les 30 jours à compter du dépôt de la déclaration rectificative.

Pour l’administrative, l’avantage se conçoit en termes de recouvrement de l’impôt (recouvrement supplémentaire et très rapide).

Cette procédure n’est ouverte que lorsque le vérificateur n’entend pas remettre en cause la bonne foi du contribuable.

Le fait d’avoir produit la déclaration complémentaire, n’interdit pas au contribuable de contester ultérieurement le redressement payé. Il peut le faire dans le cadre d’une réclamation contentieuse. C’est une procédure longue. En attendant il aura fait les avances au Trésor public.

C) Des garanties dans le temps

Limitations sont de deux types :

    1. Pour les petites entreprises, les vérifications sur place sont limitées dans le temps.
    2. Il est interdit à l’administration de renouveler une vérification de comptabilité qui a déjà été réalisée.
      La limitation de la durée de la vérification de comptabilité pour les petites entreprises 

Le législateur a fait preuve d’un pragmatisme. Il a considéré que pour les petites structures les opérations se déroulant sur place peuvent constituer une gêne au bon déroulement de la vie d’entreprise. L 52 du Livre des procédures fiscales prévoit sous peine de nullité expresse, que la durée des vérifications pour les petites entreprises ne peut pas excéder trois mois.

Toutes les entreprises ne sont pas concernées. Les petites entreprises sont définies L 52 par référence à leur chiffre d’affaires hors taxe ou leurs recettes brutes hors taxe. Sont considérées comme des petites entreprises les entreprises qui ne relèvent pas de régime réel normal d’imposition, celles qui sont au forfait, au micro ou régime réel simplifié.

Le passage du seuil pose un problème lorsque la vérification de comptabilité pose plusieurs exercices. Le CE a considéré que dès lors que la vérification porte sur plusieurs exercice, il suffit que les limites soient dépassées pour un exerce pour que la garantie ne soit plus appliquée.

La Charte du contribuable prévoit que la vérification de comptabilité ne peut pas durer plus de 9 mois. C’est un engagement de l’administration qui n’a pas de valeur obligatoire. Si le délai de 9 mois est dépassé pour els grandes entreprises, il n’y a pas d’irrégularité. Il s’agit plus d’une norme interne.

Dans certains cas, L 53 prévoit des exceptions à la règle de 3 mois. Il s’agit des petites entreprises. Lorsque l’administration peut établir que la comptabilité est dépourvue de valeur probante parce que par ex. il y a des ventes sans facture, le délai est de 6 mois. C’est un délai opposable. L’administration ne peut pas aller au-delà de 6 mois auquel il y aurait irrégularité. 

Si la vérification de comptabilité doit s’opérer dans un délai limité, il faut définir quelles sont les opérations qui doivent avoir été réalisées dans ce délai de 3 mois. Quand commence la vérification ? La fin de la vérification ?

    •      La vérification commence à la date du début de vérification indiquée sur l’avis de vérification. Si cette date a été repoussée, la date sera celle à laquelle le vérificateur est intervenu pour la première fois dans l’entreprise.
    •     La fin n’est pas obligatoire marquée par la proposition rectification. Le vérificateur n’a pas obligation de notifier la proposition dans le délai de 3 mois, cela peut se faire plus tard, sans irrégularité. On retient que la fin de la vérification dans le délai de trois mois est marquée par la dernière intervention sur place du vérificateur : la réunion de synthèse ou toute autre investigation supplémentaire. La dernière intervention sur place

Dans certains cas, la dernière intervention sur place ne marque par la fin du délai de trois mois. La fin de la vérification de comptabilité est une question de fait. 

Dans certains cas, on peut avoir en cours de vérification plusieurs propositions de rectification notifiées à des moments différents pour éviter les seuils de prescription (31/12). Dans ce cas là, la proposition de rectification peut également marquer la fin du délai de trois mois.

* La décharge (contentieuse) doit être demandée par le contribuable

– L 51 du Livre des procédures fiscales : interdiction de vérifications de compatibilité successives

Lorsqu’un exercice a été contrôlé sur une période donnée, les conséquences de ce contrôle ont été tirées, ce contrôle donne un quitus à l’entreprise. L’administration ne peut pas revenir sur ce contrôle dans le cadre d’une nouvelle vérification de comptabilité.

Cette règle est très importante parce qu’elle va interdire à l’administration de renouveler des vérifications de comptabilité notamment pour rectifier les irrégularités commises au cours d’un contrôle antérieur. Elle rend les vérifications de comptabilité définitives.

Cette règle doit être nuancée cependant. Pour qu’il y ait vérifications de comptabilités successives, il faut que les périodes vérifiées soient identiques.

Cette règle n’interdit pas de contrôler successivement plusieurs impôts pour une même période. Cette possibilité peut se heurter à l’article L 52 du livre des procédures fiscales pour les PME. Le CE est intervenu. Il a considéré que lorsqu’un vérificateur contrôle successivement des impôts différents pour une même période dans le cadre de vérification distincte pour apprécier le délai de trois mois, on va cumuler les durées de présence sur place du vérificateur au cours de deux vérifications successives. Le tout doit rester dans le délai de 3 mois (CE 13 janvier 2006 Gravas).

Quand le vérificateur renouvelle une vérification de comptabilité en contradictoire avec l’article L 51, la jurisprudence considère que cette irrégularité justifie la décharge des impositions mais que cette décharge ne concerne que les rectifications qui procèdent de la seconde vérification.

D) Des garanties propres à la vérification de comptabilité informatisée

Voir dans le chapitre suivant

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