Le mariage au Moyen-âge

  • Le mariage au Moyen-âge : la primauté du droit canonique

La chute de la dynastie carolingienne accélère la disparition du pouvoir public, certains rois mérovingiens s’étaient montrés inefficaces, incapables de gouverner. Mais ces rois jouissaient d’un prestige lié à leurs origines et lié à la restauration de l’empire.

Le roi capétien se trouve dans une situation – favorable, le 1er est élu par les grands seigneurs il est don leur deb. Il ne dispose pas d’une autorité supérieure à la leur, il est leur égal. Le roi capétien reste le chef symbolique de la France mais en réalité il ne règne que sur ses terres.

La fin du 10ème correspond à la mutation féodale, c’est à dire que le pouvoir passe des mains du roi à celle des princes/ contes voir à celle de simples seigneurs locaux.

Dans ce contexte on assiste à un resserrement des liens familiaux, le groupe familial prime sur l’individu, il ne pet exister qu’au sein du groupe.

Les anciennes lois germaniques et les capitulaires tombent en désuétude, ils sont remplacés par la pratique coutumière, propre à caque ressort. Il n’existe pas de droit central. Le seul droit général c’est le droit canonique. En effet, ‘église connait un processus inverse de celui de l’état, elle se renforce. Dès 11ème avec la réforme grégorienne elle gagne en puissance. Elle en profite pour imposer sa vision des rapports familiaux.

Il faut attendre le 16ème pour que le roi intervienne à nouveau dans le domaine du droit privé, il v légiférer en droit privé et se poser en concurrent des règles canoniques. Ce droit de la famille repose sur les mêmes points clés.

La conception dominante du mariage sous l’ancien régime c’est une conception charnelle qui correspond à la vision de l’église. Pour l’église les individus se marient pour se donner l’un à l’autre. C’est ce qui explique que le droit canonique s’intéresse de près à la sexualité des époux, alors que le droit germanique passe sous silence ce passage. L’église légifère dans ce domaine, elle est un peu intrusive : elle défini ce que doivent être les rapports entre époux et sanctionne les pratiques déviantes. Pour l’église la sexualité est un aspect essentiel du mariage. Cette conception charnelle est concurrencée par l’importance politique et sociale du mariage, il met en jeu les intérêts des familles.

Dès le 16ème la dimension contractuelle du mariage prend de plus en plus d’importance, c’est à dire que le mariage est considéré comme un sacrement mais aussi comme un contrat. Selon POTIER « le mariage c’est un contrat élevé à la dignité de sacrement par Jésus ». En raison de cette dimension contractuelle, l’état va de plus en plus s’immiscer dans le mariage, le mariage va cesser d’être l’affaire exclusive des époux pour devenir en partie celle de l’état.

  • Le poids de la condition sociale
  • Le mariage de la vassale

Initialement, le fief n’est pas un bien héréditaire, c’est la terre librement concédée par le seigneur à son vassal à charge de services nobles. Progressivement le fief va tomber dans le patrimoine du vassal et à partir du 13ème l’hérédité du fief devient la règle.

Quand le vassal décède en laissant un fils, celui-ci est investit du fief et il reprend à sa charge les services vassaliques, il prend la place du père. En revanche, si le vassal laisse une fille, la fille n’est pas e mesure de s’acquitter des services nobles. Ces services consistent en obligations militaires essentiellement : service d’host et de chevauchées. La femme doit en charger un représentant et ce représentant va être le mari. Il est logique que le seigneur donne son avis su ce mariage de la vassale. Les règles varient selon les ressorts coutumiers.

La règle la plus stricte reconnait au seigneur le doit d’obliger la vassale à se marier, cette règle va être appliquée à Jérusalem, à l’époque où il existe un empire chrétien de Jérusalem dirigé par une famille française. Cet empire est régi par un texte « les assisses de Jérusalem » dans ce texte, le seigneur peut contraindre a vassale à se marier entre 12 et 60 ans. Dans cette tranche d’âge le seigneur propose jusqu’à 3 prétendants à la femme, si elle les repousse tous les 3, elle perd son fief, le seigneur reprend son fief.

Dans les coutumes de l’ouest de la France, coutume de Normandie ou de l’Anjou : la vassale est mariée par le conseil de famille avec l’accord du seigneur.

En dehors de ces règles, le seigneur ne peut s’immiscer dans le mariage de la vassale, mais il peut indirectement la pousser à se marier. Car la tutelle propre aux nobles disparait au moment du mariage. Elle entre en possession du fief qu’une fois mariée, donc ca doit l’encourager à se marier.

Dès le 13ème le seigneur ne se mêle plus du mariage de sa vassale, mais le souverain dispose de la main de toutes ses sujettes, il peut librement marier toutes les femmes célibataires de son royaume. Sous les carolingiens, le roi va accorder la main d’une célibataire à un chevalier pauvre en récompense.

Dès le 13ème ce droit va devenir une arme politique entre les mains du roi, dès qu’une femme a un héritage, il la donne à un de ses proches. De la sorte il va augmenter son réseau d’alliés. On retrouve des traces de cette pratique jusqu’à la fin du règne de louis XIV. Pour ne pas être privé de ce droit, le roi exige des riches héritières le serment de ne pas se marier sans son accord. L’église qui prône un mariage consensuel, était choquée par cette pratique. Mais cette pratique présente une utilité sociale et politique, donc l’église ne la condamne pas officiellement. L’église se contente de reconnaitre le mariage célébré sans le consentement du roi ou du seigneur.

En revanche, en cas de mariage arrangé, l’église ne considère pas a violence faite à la femme comme un empêchement. Pour l’église, pour qu’il y ait violence et donc mariage nul, il faut que la femme se soit opposée de manière constante à son mariage. Cette violence doit être suffisamment rave pour vicier le mariage, la simple crainte révérencielle (qui oblige à obéir), la peur de perdre son fief ne constitue pas des violences (à la différence des menaces ou violences physiques).

  • Les unions inégales

Du point de vue de l’église tous les hommes sont égaux et la femme est l’égal de l’homme, mais cette égalité n’existe pas du point de vue social.

L’union entre individus de conditions différentes est possible mais elle engendre des Conséquences différents suivant que ce soit l’homme ou la femme qui appartient à la condition la plus élevée. Ces règles variant d’une province à l’autre.

Lorsqu’un homme épouse une femme libre non noble, elle suit la condition de son mari, elle devient noble.

Si un noble épouse une serve, tout dépend si celle-ci lui appartient ou non. Si la serve appartient à une autre seigneurie, elle reste serve et ses enfants seront serfs. Si le noble épouse sa propre serve, celle-ci est affranchie par le mariage, elle devient libre mais pas noble. Il y a une exception que l’on retrouve dans la coutume de bourgogne : si le noble épouse une serve, celle-ci va devenir noble, tant que le mariage dure la serve bénéficie des privilèges, si le mari décède, elle redevient serve. Dès 15ème on va assouplir cette règle et on considère que la femme devenue libre le reste après son veuvage.

Quand une femme libre épouse un serf, elle va suivre la condition de son mari et devenir serve, mais cette servitude cessait en cas de veuvage, l’épouse peut retrouver la liberté au décès de son mari à condition de quitter la terre où elle demeurait avec son mari. Dans le délai d’un an et un jour, elle doit renoncer à tout héritage de son mari pour redevenir libre.

La transmission de la noblesse : l’enfant est noble si le père est noble. Si c’est la mère qui est noble, l’enfant reste roturier, il existe une exception dans la coutume de champagne : si la mère est noble l’enfant l’est aussi.

Transmission de la servitude : à partir du 13ème: règle appliquée est celle selon laquelle l’enfant suit la condition de la mère, on applique une règle tirée du droit romain puis cette règle va être adoucie par l’église. On va considérer que si la mère est devenue libre pendant la grossesse, l’enfant sera libre au moment de sa naissance.

 

  • Le principe consensuel

Pour l’église le mariage est un sacrement, le mariage est un remède aux appétits de la concupissance. Le mariage permet d’avoir des enfants.

A position de l’église n’a pas toujours été très claire sur un point : le mariage résulte t-il seulement du consentement ou du consentement suivi de la consommation ?

Pour les théologiens, c’est à dire auteurs qui réfléchissent aux choses sacrées, le consentement suffit pour créer un lien parfais. Ils étaient partisans du consensualisme pur.

Pour les canonistes, le consentement ne suffit pas. Au moment des fiançailles, il y a un échange des consentements mais elles peuvent être rompues, donc l’engagement n’est pas suffisant.

Au 12ème Pierre LOMBART semble résoudre le problème en distinguant 2 formes d’engagements :

  • Les promesses échangées lors des fiançailles = promesses par parole du futur. Promesses révocables.
  • Les promesses par lesquelles l’homme et la femme déclarent se prendre pour époux dès cet instant = promesses par paroles du présent. Elles suffisent à créer un lien parfait, un lien indissoluble.

Fin 12ème, Pape Alexandre III s’efforce de concilier les deux tendances, il reprend la distinction de LOMBART et il ajoute que le mariage non suivi de consommation peut être annulé. Si les fiancés ont des rapports sexuels, ils sont considérés comme mariés. Le consentement et la consommation sont les éléments fondamentaux du mariage.

Le consentement doit être libre et éclairé, ce qui semblerait exclure le consentement de l’aliéné, et pourtant l’église reconnait le mariage du fou à condition qu’il ait donné son consentement dans un instant de lucidité. La violence peut vicier le consentement s’il s’agit de menaces ou violences physiques. Le dol ne remet pas en cause la validité du mariage car il conduit à l’administration d’un sacrement, le sacrement rachète l’intention dolosive, le dol c’est la séduction, la tromperie. En revanche, certaines erreurs pouvaient conduire à la nullité du mariage : erreur sur l’identité physique de la personne, erreur sur la condition juridique (ex de la femme qui épouse un serf pensant épouser un homme libre), ni l’erreur sur la condition sociale ni sur la fortune ne sont prises en considération.

Il existait des conditions de forme.

  • Le mariage in facie ecclesiae

Le mariage repose sur le consentement, il est d’usage qu’il soit accompagné de rites, ils assurent la pub du mariage. Ils permettent à l’individu d’un empêchement au mariage d’intervenir. Ils permettent de distinguer le mariage du concubinage. On parle de mariage in facie ecclesiae c’est à dire mariage aux portes de l’église.

L’exigence d’une publicité remonte au 4ème, le plus souvent ils sont tirés de vieux usages romains ou germaniques. Ils sont fortement recommandés par l’église mais en leur absence, le mariage n’est pas nul.

Ces rites reposent sur 3 éléments :

  • La publication de banc, bancs étaient publiés à la messe dominicales, ils pouvaient faire l’objet d’une dérogation
  • Echanges publiquement des consentements
  • Bénédiction nuptiale délivrée par le prêtre.

En l’absence de registre paroissial, la preuve du mariage est rapportée par témoins.

Le non respect n’entraine pas la nullité du mariage, ce qui n’est pas le cas des empêchements.

  • Les empêchements

Ce sont des interdits édictés par l’église, ce sont des obstacles au mariage, ils entravent la formation du lien matrimonial. On distingue 2 sortes d’empêchements :

  • Empêchements dirimants, ceux qui correspondent aux règles les plus importantes, ils sont sanctionnés par la nullité de l’union. Ils s’opposent à toute union dans l’absolu ou à l’union avec une personne précise.

  • Ne peuvent se marier les individus déjà mariés. En pratique on retrouve plusieurs cas de bigamie qui concernent les femmes. Dans ce cas, la femme pouvait être punie comme adultère. L’église estime que seul le 1er mariage existe donc la femme doit retourner auprès de ce 1er
  • Les impubères (filles avant 12 ans et garçons avant 14 ans) ne peuvent se marier
  • Les impuissants ne peuvent se marier. L’impuissance concerne la femme comme l’homme. Pour la femme on parle d’ARCTATION c’est à dire une malformation. Pour l’homme l’impuissance pouvait résulter de trois causes : en raison de malformation ; en raison d’un maléfice qui l’empêche de s’unir à sa femme ; en raison de froideur, c’est à dire l’incapacité de s’unir à n’importe quelle femme.

 

Cette classification résulte des canonistes au 12ème mais quand on examine l’œuvre des médecins on ne retrouve pas cette classification, on retrouve d’autres causes d’impuissance (ex l’homme peut être impuissant en raison du climat). Il existe un décalage entre les écrits des canonistes et ceux des médecins. Ce sont les médecins qui sont mandaté par les juges d’église pour se prononcer sur l’impuissance. Cette question de l’impuissance est au cœur de procès pour annulation de mariage.

Dans le droit germanique, l’impuissance était une cause de divorce. Quand le mariage devient indissoluble, quand l’église impose cette règle. Les hommes d’église se posent la question du devenir de l’impuissance. On voit une divergence entre l’église de Rome et l’église de France (considère qu’il faut prendre en compte cet état). Pour éviter les excès l’impuissance va devenir un empêchement.

Quand la femme après le mariage, réalise l’impuissance de son mari elle se rend devant le juge d’église, demande l’annulation du mariage et pour se faire elle prononce la formule consacrée (« je veux être mère et avoir des enfants »). Se pose le problème de la preuve. Le juge d’église pouvait se fonder sur 3 preuves : La visite corporelle, faite par des experts. La cohabitation triennale, c’est à dire que le juge demande au conjoint de cohabiter pendant 3 ans, si à l’issue de ce délai le mariage n’st toujours pas consommé cela prouve l’impuissance du mari (tombe en désuétude au 15ème). Le congrès, c’est à dire que le juge d’église va demander aux époux sous le regard d’experts.

En revanche, quand l’impuissance survient après le mariage, elle ne casse pas l’union.

  • Les moines et clercs qui ont reçu les ordres majeurs (prêtres, diacres, sous diacres) ne peuvent se marier.

  • Les parents trop proches, qu’il s’agisse de parenté naturelle, spirituelle ou par alliance.

Le concile de Rome interdit le mariage entre parents au 14ème degré civil, c’est à dire 7ème degré canonique. Cette règle va se révéler intenable. L’église va se rendre compte que cette règle favorise les annulations de mariage. L’église ramène l’empêchement au 4ème degré canonique. Par ailleurs, il est admit que la Pape peut accorder des dispenses.

  • Les empêchements prohibitifs, correspondent à des règles mineures, ils ne sont pas sanctionnés. Le mariage n’est pas nul pour autant, les contrevenants en courent des peines spirituelles.

Ex d’empêchement : quand on se marie avec un autre que son fiancé. Quand on se marie durant de l’année liturgique c’est à dire période de l’année pendant laquelle le mariage est interdit (ex du carême). Dans un diocèse quand l’évêque soupçonne l’existence d’un empêchement dirimant, il interdit aux fiancés de se marier, cette interdiction est un empêchement prohibitif. Si les individus passent outre, et que l’empêchement dirimant existe, le mariage est nul, mais s’il n’y a pas d’empêchement dirimant, il y aura peine spirituelle.

Le mariage entaché d’un empêchement dirimant est nul, c’est à dire tellement vicié qu’il n’est sensé n’avoir jamais existé. Or, la nullité est rétroactive c’est à dire produit ses effets non pas à compter du jugement mais dès les débuts de l’union. Les conjoints vont être considérés comme des concubins, les enfants sont considérés comme enfants naturels. Pour ne pas pénaliser les enfants, ni le conjoint de bonne foi, le droit canonique va créer une théorie, celle du mariage putatif au 13ème.

Selon cette théorie, quand le mariage a été contracté alors que l’un des époux était de bonne foi, la nullité ne produit pas d’effet à son égard ni à l’égard des enfants. Ce mariage putatif est une fiction du droit canonique créé pour palier l’injustice de certaines situations.

Par contre le mariage ne peut être dissous.

  • Indissolubilité et séparation de corps

Cette indissolubilité du mariage n’est pas admise sans mal. Elle va à l’encontre des mœurs romains et germaniques. Elle ne sera retenue définitivement qu’au début du 13ème.

Dès ce moment le divorce et la répudiation ne sont plus admis. Dans la pratique, on retrouve le terme de divorce, mais dès le 13ème ce terme est synonyme de séparation de corps, c’est la seule solution offerte aux époux qui ne veulent plus cohabiter. Les époux n’étaient pas libres de se séparer, un juge d’église doit prononcer la séparation. Initialement, le droit canonique ne reconnaissait que 2 causes de séparation de corps : adultère et l’hérésie. Les juges d’église vont reconnaitre une 3ème cause : les sévices graves infligés par l’un des époux, mais ils doivent faire craindre pour la vie de l’époux concerné, les coupes portés à l’épouse soient fréquents, injustifiés et d’une certaine gravité. L’église va être plus soucieuse du sort des femmes que les parlements qui vont e prononcer au 16ème.

En cas de séparation de corps elle entraine automatiquement une séparation de biens. C’est à dire que la communauté de biens entre époux est liquidée. En revanche, quand le juge ne prononce qu’une séparation de biens, elle n’entraine pas de séparation de corps. En cas de séparation de corps les époux ne sont plus tenus de résider ensemble, mais ils sont toujours liés par les liens sacrés du mariage donc ils se doivent fidélité.

En cas de simple mésentente passagère, les juges d’église créent une séparation d’habitation, elle produit les mêmes effets que la séparation de corps, mais les époux se doivent toujours le devoir conjugal. D’ailleurs la fréquence du devoir pouvait être fixée par le juge d’église.

Ces règles qi traduisent l’importance de l’église sont observées jusqu’au 16ème, c’est à dire jusqu’au moment où le mariage va passer sous le contrôle de l’état.