Le harcèlement sexuel

Le harcèlement sexuel

  • le harcèlement sexuel est le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.Ces faits peuvent être punis d’un an d’emprisonnement et de 15.000 euros d’amende.
  • Même s’ils ne se sont produits qu’une seule fois, sans aucune répétition, seront assimilés à du harcèlement sexuel les faits à connotation sexuelle se produisant en usant de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d’obtenir une relation de nature sexuelle, à son profit ou à celui d’un tiers.
    Dans ce cas, l’auteur des faits risque deux ans d’emprisonnement et 30.000 euros d’amende.
  • S’il y a des circonstances aggravantes, la sanction est alors alourdie. Ainsi, si le harcèlement est effectué par une personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions, s’il est exercé à l’encontre d’un mineur de moins de 15 ans ou d’une personne d’une particulière vulnérabilité (les cas sont cités dans la loi) et s’il est effectué par plusieurs personnes, qu’elles soient auteurs ou complices. La sanction est alors de trois ans d’emprisonnement et de 45.000 euros d’amende.

C’est une infraction qui est envisagée à l’article 222-33 du Code pénal, et qui a fait l’objet de mouvements législatifs. C’est une infraction qui a été modifiée à plusieurs reprises, et qui a vu son périmètre progressivement s’élargir.

  • Les différentes lois relatives aux harcelements sexuels

D’abord, une première modification par la loi de modernisation sociale de 2002, qui fut la plus essentielle : dans un premier temps, le texte visé le harcèlement sexuel dans des relations de travail. De ce point de vue, ce qu’avait envisagé le législateur dans la rédaction originelle était le harcèlement dans un rapport de supériorité. Il fallait alors constater l’existence d’une autorité de l’auteur de l’abus et puis le texte ajoutait l’exigence d’une violence, menace ou contrainte. On visait finalement une hypothèse spécifique que l’on appelait le harcèlement vertical. Cette définition était conforme au principe de la légalité criminelle, mais car elle était précise, elle présentait une limite : elle n’envisageait le harcèlement sexuel que dans un cas particulier, qui pouvait paraître comme étant trop limité, certains considérant qu’il fallait prendre en compte également le harcèlement horizontal, pour des personnes qui ne sont pas en rapport de subordination.

La loi de 2002 va modifier la rédaction initiale en supprimant les deux composantes invoquées (menace, violence, contrainte) et le rapport de supériorité. Restait alors la formule « le harcèlement sexuel est le fait harceler autrui dans le but d’obtenir des faveurs sexuels ». Ce n’est pas précis. Ce texte poserait des difficultés au regard du principe de légalité criminelle qui implique la clarté de la loi pénale. Une QPC a été posée. Le Conseil constitutionnel, dans un arrêt du 4 mai 2012, a constaté que cette disposition pénale contrevenait au principe de la légalité criminelle et devait donc être abrogé avec effet immédiat. Des associations de protection des femmes ont demandé de combler ce vide juridique.

Le législateur a voté le 6 aout 2012 un nouveau texte, que l’on trouve sur legifrance (autorisé à l’examen). La numérotation de l’article reste la même : article 222-33 du Code pénal : « le harcèlement sexuel est le fait d’imposer à une personne de façon répétée des propos ou comportements à connotation sexuelle qui, soit, porte atteinte à sa dignité en raison de son caractère dégradant ou humiliant, soit créé à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.

Est assimilé au harcèlement sexuel le fait non répété d’user de toute forme de répression grave dans le but d’obtenir des faveurs sexuelles … ». Le troisième paragraphe distingue quant aux peines.

Cette même loi du 6 aout 2012 a modifié les peines applicables au harcèlement moral pour les aligner à celles sur le harcèlement sexuel : 2 ans d’emprisonnement et 30 000€ d’amende. Le harcèlement moral n’est incriminé maintenant que dans le Code pénal.

S’agissant du harcèlement sexuel, il faut faire une remarque sur l’effet de l’abrogation par le Conseil constitutionnel : elle est d’effet immédiat. Toutes les poursuites engagées sur le fondement de l’ancien texte sont dépourvues de base légale. Une circulaire du ministère de la justice dispose que les parquets peuvent requalifier les faits. Mais en revanche une poursuite exclusivement fondée sur harcèlement sexuel ne peut aboutir, les prévenus doivent être relaxés. Le moyen le plus facile serait d’envisager une tentative d’agression sexuelle.

Quant aux éléments constitutifs, on va distinguer comme le fait le législateur entre le harcèlement sexuel exigeant des actes répétés et le harcèlement sexuel n’exigeant pas un acte répété donc résultant d’un acte unique.

On peut distinguer l’acte lui-même de son résultat.

a) L’acte

Il présente plusieurs caractéristiques. C’est un acte tout d’abord d’asexué, au sens où l’acte de harcèlement peut être le fait d’un homme ou d’une femme, et corrélativement la victime peut être un homme ou une femme. Ce n’est pas car socialement le harcèlement est plutôt le fait d’un homme envers une femme que le contraire ne serait pas une infraction. C’est également un acte imposé. On est face à une infraction qui suppose l’absence de consentement de la victime. S’il y a consentement, l’infraction est alors inapplicable. C’est ensuite un acte répété. C’est important, ça donne de la précision à l’infraction antérieure, enfin c’est relatif car quand on se réfère à la notion de harcèlement dans un dictionnaire implique la répétition. Il faut donc une conjonction d’actes : propos, gestes, envoies de courriers, de SMS, des attitudes, … Ensuite, il faut que ces propos ou ces comportements aient une connotation sexuelle, c’est le plus important. Il faut être clair. On parle de propos ou comportement à connotation sexuelle. Ça ne veut pas dire que le harcèlement sexuel suppose une relation sexuelle, ni un contact sexuel.

Ex : mettre une main aux fesses de sa secrétaire n’est pas un harcèlement sexuel mais une atteinte sexuelle.

De plus, cela n’impose pas la nudité. Il n’est pas nécessaire que l’acte soit explicitement ou directement de nature sexuelle, il suffit qu’il soit suffisamment suggestif. Au-delà, les propos ou comportements de nature sexuelle peuvent être variés. Mais, et c’était la difficulté sous l’ancien texte, ce qu’il y a à débâtir est le véritable acte d’harcèlement et l’acte de séduction.

b) Le résultat

Le texte, dans ce premier paragraphe, vise ensuite un certain résultat, que le législateur a défini dans des périphrases infligentes, même si on retrouve cette formule dans une directive européenne. Il n’est pas certain que la formule du législateur soit si précise que cela.

Il faut que l’acte soit porte atteinte à la dignité, soit créé à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante. D’abord, un problème de principe : une première question, quel est le bien juridique protégé par l’infraction ? Le fondement de l’infraction ? Puis une question technique : le résultat est-il exigé, c’est une infraction matérielle ou formelle ?

  • Première question : a priori, le harcèlement sexuel est une infraction contre les mœurs. Mais en faisant référence à la dignité de la personne et à son honneur on crée un malaise quant au bien juridique protégé et on se demande quelle est la différence entre le harcèlement sexuel et le harcèlement moral, car la formule de ce nouveau texte est proche voir identique à celle sur le harcèlement moral. De plus cette infraction ne se trouve pas dans la partie du Code pénal s’intitulant des atteintes à la dignité. C’est flou. Est-ce une conception des mœurs ? Un attribut personne de la victime ?
  • Une question technique : les périphrases s’ajoutent-elles à la commission d’un acte à connotation sexuelle ou ça résulte seulement de la constatation de l’acte d’harcèlement ? C’est la jurisprudence qui doit le dire. En tant que juriste on peut penser être face à une infraction matérielle, et donc constater d’abord un acte et ensuite un résultat, c’est-à-dire une atteinte. Mais à la place du parquet ou du juge correctionnel, face à une hypothèse, il faut démontrer d’un côté un acte d’harcèlement (imposé, répété, à connotation sexuelle) et il faut au surplus constater que la victime a été atteinte à la dignité ou placée dans une situation offensante. Ce n’est pas évident.

Exemple : 15 fois par jour SMS à un collègue : c’est un acte imposé, répété, et à connotation sexuelle car les propos sont de nature sexuelle. Le premier élément est rempli. Mais ensuite : qu’en est-il du second élément ? Ça n’apporte rien à la précision du texte. Il faudrait que la jurisprudence déduit de l’atteinte à la dignité de la constatation du caractère de l’acte imposé et répété à connotation sexuelle, sinon on risque de ne jamais pouvoir engager cette infraction. C’est donc confus.

  • Le harcèlement assimilé au harcèlement sexuel : le harcèlement résultant d’un acte unique

C’est intéressant. C’est juste de dire que c’est un harcèlement qui est assimilé. Car par sa définition le harcèlement suppose une répétition. Ici on a pensé à l’acte unique qui est très grave, qui s’analyse comme un chantage. C’est ce chantage que le législateur a envisagé. Il a eu raison de le faire dans une disposition particulière.

Deux éléments apparaissent dans cette partie du texte : d’abord, il faut une pression grave, ce qui résultera de l’existence d’une contrepartie, qui peut être de double nature, un gain ou une perte évitée. Ensuite, au-delà de la pression grave, c’est la finalité de la pression qui est envisagée par le texte. Le texte vise le but d’obtenir d’un acte sexuel, recherché au profit de l’auteur ou d’un tiers. Il faut donc que la pression grave est une certaine finalité, de nature sexuelle. D’abord, la finalité n’est pas forcément une relation sexuelle. C’est un acte simplement de nature sexuelle qui est envisagée. Donc, la relation sexuelle consommée ou un simple contact physique. Ensuite, et de ce point de vue, c’est une infraction formelle dans cette hypothèse, il suffit que la finalité existe, l’infraction sera caractérisée alors même que l’acte de nature sexuelle n’a pas été consommé. Enfin, le texte envisage celui qui harcèle à son profit ou qui harcèle au profit d’un tiers. Cette précision figurait auparavant dans l’article L.1151 du Code du travail. Il n’y a pas encore de jurisprudence sur cette infraction.

Les peines ont été portées à deux ans d’emprisonnement et 30 000€ d’amende, donc elles ont été doublées par rapport aux peines prévues auparavant. C’est une infraction plus grave, et elle se confond avec le harcèlement moral du point de vue des peines.

Le législateur a prévu des circonstances aggravantes : 3 ans et 45 000 € dans 5 cas. Ex : harcèlement commis sur un mineur ou sur une personne vulnérable.

Le principal apport de la loi est d’avoir envisagé la répétition et d’avoir rappelé que l’absence de consentement est une composante de l’infraction.

La discrimination suite à un refus sexuel sera également punie en vertu de l’article 225-1-1 du Code pénal.