Les différentes catégories de crimes et de criminels

Typologie des crimes et des criminels

  1. A) Typologie des crimes (différentes catégories d’actes criminels)

Contrairement à ce qu’on pourrait penser, il n’y a pas toujours des crimes avec victime. Le crime avec victime dépend si l’infraction a été réalisée ou pas. Ce n’est pas parce qu’il n’y a pas de victime qu’il n’y a pas d’infraction. Le conducteur bourré peut prendre le volant. Il est en infraction qu’il y ait dégâts ou pas. Des victimes potentielles se présentent quand même pendant son infraction. Mais il faut distinguer les victimes potentielles et les victimes réelles. Il a aussi infraction sans victime : le drogué.

Afin de dresser une typologie de crimes, il est intéressant de rechercher les différentes manifestations du comportement criminel. Les études menées sur ce point s’intéressent tantôt à la motivation du délinquant au moment de l’acte (qualitative) et tantôt elles vont prendre en compte des critères d’ordre numérique (quantitatif).

1) Classification qualitative (selon la motivation du délinquant)

  1. a) Du crime primitif au crime utilitaire

Le crime primitif résulte d’une libération soudaine de l’activité criminelle comme si une impulsion criminelle envahissait brutalement le délinquant au moment de l’acte. Cette réaction spontanée peut parfois être brutale voire violente mais dans un cas comme dans l’autre l’attitude du délinquant échappe à tout contrôle. Ex : l’homme qui rentre une heure plut tôt chez lui pour faire une surprise à sa femme et la trouve au lit avec son amant.

Le crime utilitaire, en revanche, conçoit l’acte délictueux comme le seul moyen possible pour le délinquant de sortir d’une situation compromise. Ici, l’individu se trouve dans une situation spécifique de sorte que son geste délictueux ou criminel va servir un intérêt purement personnel. Ex : la femme battue qui un soir où elle est battue une énième fois, poignarde son mari pour échapper à sa violence et sauver sa vie.

  1. b) Le crime justicier

Contrairement à l’hypothèse précédente, le délinquant va mettre son geste au service d’une cause impersonnelle. A sa façon, il pense ainsi rétablir l’ordre ou la justice qu’il estime bafouée.

Exemple : le crime idéologique comme les kamikazes avec les attentats du 11 septembre 2001, Anders Breivik qui a tué 77 jeunes personnes ou les infractions commises par altruisme comme l’euthanasie.

  1. c) Le crime organisé

Le crime organisé a pour particularité d’être commis par un délinquant que l’on pourrait qualifier de délinquant professionnel, en ce sens qu’il va faire preuve d’une certaine organisation dans la préparation de son acte. A grande échelle, on parle de criminalité organisée, ce qui correspond aujourd’hui à de véritables réseaux de délinquance (notre législateur en tient compte et il s’adapte en ce sens). Cette délinquance de réseaux est en train de prendre des proportions de plus en plus importantes de nos jours et la violence se multiplie aussi dans le processus de ces actes.

2) Classification quantitative (selon le nombre de délinquant)

  1. a) Le crime isolé

Le crime isolé comme son nom l’indique est perpétré par une seul et unique personne du début jusqu’à la fin. L’auteur de l’acte est donc seul lors de l’élaboration du plan initial, lors du passage à l’acte. L’originalité du crime isolé, c’est que dans certaines circonstances, le délinquant va atteindre ses limites soit sur le plan matériel, soit sur le plan intellectuel.

Exemple : Patrick Henry qui avait enlevé Philippe Bertrand contre une rançon et l’avait tué.

  1. b) Crime et pluralité

Il existe 2 façons de concevoir le crime en pluralité. La première est le crime en association. Les criminologues retiennent une vision globale ; ce qui leur importe c’est qu’il y ait plusieurs protagonistes soit pour préparer l’infraction, soit pour la mettre à exécution. Sur ce point, les pénalistes se montrent beaucoup plus rigoureux car ils réservent des qualifications juridiques bien précises à chaque stade du processus criminel. Par exemple, on distingue les actes préparatoires de la phase d’exécution proprement dite de l’infraction. De même, pour un même crime, le droit pénal retient des qualifications juridiques différentes en fonction du degré d’implication de chacun des protagonistes. Par exemple, quand plusieurs individus réalisent l’infraction, on appelle cela des co- auteurs. Et s’ils bénéficient d’un concours ou d’une assistance quelconque, on parle de complices.

La deuxième façon est le crime de foule. Dans ce crime, les protagonistes ne font preuve d’aucune organisation. Le plus souvent, le crime de foule se réalise lors d’un rassemblement de plusieurs individus lorsque ceux-ci vont commettre spontanément des exactions guidés le plus souvent par l’impulsion d’un meneur. En temps ordinaire, ces individus ne sont pas des délinquants mais ils ont été influencés par l’impulsion collective.

  1. B) Typologie des criminels (différentes catégories de criminels)

En suivant la logique précédente, on va s’intéresser aux différentes catégories de criminels répertoriées par les criminologues. On appelle ça une approche différentielle des criminels.

1) Le critère psychologique voire psychiatrique

  1. a) Le délinquant normal et le délinquant anormal

La notion d’anormalité est une notion délicate qui donne lieu à des appréciations différentes. Selon les pénalistes, la normalité doit être considérée de manière nuancée. Ce que le code pénal appelle aujourd’hui le trouble psychique ou neuropsychique peut être analysé de 2 manières différentes. Soit ce trouble a pour effet d’abolir les facultés mentales du sujet, auquel cas il sera retenu comme cause d’irresponsabilité pénale et par conséquent, le sujet ne verra pas sa responsabilité pénale engagée. Soit ce trouble a pour effet d’altérer simplement les facultés mentales du sujet. Dans cette dernière hypothèse, la responsabilité pénale de l’individu est quand même engagée. On recommande juste au juge pénal de tenir compte du trouble dont il souffrait au moment des faits afin d’adapter la sanction pénale prononcée en conséquence.

Selon les criminologues, la normalité est une notion complexe qui est appréciée de manière différente et qui se présente sous des degrés différents. Il y a 2 grosses catégories :

– Le délinquant aliéné : dans cette catégorie, il y a ensuite 2 catégories : l’arriéré et le dément. L’arriéré possède un blocage dans son développement intellectuel qui l’empêche de se terminer. Ainsi, au lieu de se développer jusqu’à 23/25 ans, il s’est arrêté avant. Le dément lui s’est développé jusqu’au bout normalement sauf qu’à un moment de sa vie après 23/25 ans, un événement cause sur lui un effet boomerang et renvoie son développement intellectuel à un stade antérieur.

– Les maladies évolutives : dans les maladies évolutives, il y a les névroses et les psychoses.

  1. b) Le délinquant caractériel

Le délinquant caractériel est un type particulier de délinquant dont le passage à l’acte va être conditionné par un trait dominant de son caractère. Le plus souvent, il s’agit d’une combinaison entre une certaine orientation affective et un ou plusieurs traits de sa personnalité. Dans la plupart des cas, on rapproche le délinquant caractériel du délinquant anormal car il souffre d’un déséquilibre affectif voir psychique.

Exemple : c’est le cas typique chez les délinquants sexuels et les « sérial violeurs ».

2) Le critère physique d’inspiration psychologique

  1. a) Du délinquant passionnel au délinquant pervers

Le délinquant passionnel, c’est quelqu’un qui n’a rien d’un délinquant en temps normal mais qui, placé dans des circonstances exceptionnelles, va brutalement être incité à passer à l’acte. Ici encore, un manque de contrôle de lui-même explique la réalisation de l’infraction. Il serait réducteur de penser que le crime passionnel, c’est le crime d’amour. Il peut être perpétré dans une multitude de situation où une passion dominante chez l’individu va le pousser à diverses exactions.

Le délinquant pervers se situe bien au delà du délinquant passionnel à tel point qu’il se caractérise par une anomalie fondamentale de son affectivité voire de son psychisme. Le plus souvent, le délinquant pervers fait preuve d’une extrême cruauté et ne trouve du plaisir qu’en faisant souffrir ses victimes. Ex : Michel Fourniret

  1. b) Le délinquant toxicomane

Le délinquant toxicomane, au sens large, englobe toutes les formes de dépendance à une substance donnée que ce soit l’alcool ou la drogue et la consommation régulière de ces substances n’est pas sans effet sur son physique ou sa perception des réalités. Pour le délinquant alcoolique on distingue 2 situations :

– La cuite passagère : la vigilance est en recul, la perception est altérée.

– L’ivresse chronique : concerne une certaine catégorie d’individus dépendants de l’alcool. Tous les moyens sont bons pour se procurer le liquide qui leur manque Pour les délinquants toxicomanes, l’usage de certaines substances n’est pas sans effet sur le psychisme du consommateur peu importe les effets qu’elles produisent, que ce soit un effet d’excitation psychique ou, à l’inverse, un effet de léthargie avérée. Ce qu’il faut retenir, c’est que, dans un cas comme dans l’autre, le législateur tient compte des substances consommées par l’individu et dans de nombreuses situations, on procède à un dépistage pour voir si l’individu n’était pas sous l’emprise de ces substances au moment des faits. A côté de la politique menée en matière de sécurité routière, il faut savoir que la commission d’une infraction sous l’emprise de l’alcool ou de la drogue est considérée comme infraction avec circonstances aggravantes et le délinquant encourt une peine plus lourde.

3) Le critère temporel

  1. a) Délinquant d’occasion, délinquant d’habitude et délinquant professionnel

Ici, il est question de répertorier les délinquants en fonction de la fréquence avec laquelle ils passent à l’acte.

Le délinquant d’occasion est une catégorie de délinquants qui suscite parfois des divergences chez les criminologues. Certains sont convaincus que ces délinquants sont prédisposés à la délinquance mais ils restent minoritaires. Pour la plupart des criminologues, le délinquant d’occasion reste difficile à cerner car par définition son geste est imprévisible. L’individu va être confronté à des circonstances particulières pour ne pas dire exceptionnelle et ce sont ces circonstances qui vont soudainement conditionner son passage à l’acte. Ainsi, le délinquant d’occasion, en temps ordinaire, c’est quelqu’un de socialement adapté et intégré. En principe, cette catégorie d’individu ne récidive pas.

Vient ensuite le délinquant d’habitude. Cette variété est à l’origine des grandes interrogations de notre politique criminelle. Il s’agit d’individus qui ont sombré une première fois dans la délinquance, puis une deuxième, de sorte que ses expériences vont conditionner ses exactions futures. Le délinquant d’habitude correspond donc au délinquant récidiviste voire même multirécidiviste. Dans le délinquant d’habitude, il faut réserver un sort particulier à certains individus qui commettent certaines catégories d’infractions de façon méthodique et répétées : les serial-killers ou les serial- violeurs.

Le délinquant professionnel est en quelque sorte une variante du délinquant d’habitude et se distingue notamment par un certain degré d’organisation à tel point qu’à ce niveau, la délinquance est pratiquée comme un métier. Cette caractéristique est d’autant plus essentielle que le délinquant professionnel, par définition, est incapable de respecter les règles sociales, socialement inadapté, car il évolue au sein de structures spécifiques qui ont leurs propres règles par exemple les règles de délinquance, de criminalité.

  1. b) Délinquant mineur et délinquant majeur

La minorité est aussi une notion qui, à certains égards, opposent les criminologues et les pénalistes.

Pour les pénalistes, depuis plus d’un siècle, une politique dérogatoire est mise en œuvre à l’égard des délinquants juvéniles. L’âge de la majorité pénale étant fixé à 18 ans, le législateur élabore des tranches d’âge qui sont fonctions du degré de discernement du mineur. Ces tranches d’âge sont 16- 18, 13-16, 10-13 et les moins de 10. A l’origine, le mineur était considéré comme pénalement irresponsable. Par la suite, notamment avec la célèbre ordonnance de 1945, on a estimé que le mineur devait bénéficier d’une présomption d’irresponsabilité sachant que, pour les moins de 13 ans, cette présomption jouait de manière absolue alors que pour les 13-18, elle pouvait être levée. Cette démarche devait rester exceptionnelle. Depuis les années 2000, le droit pénal des mineurs a connu une importante réforme ; on admet désormais que la responsabilité pénale du mineur puisse être engagée. Mais, les mesures prononcées doivent être prioritairement préventives et non répressives.

Chez les criminologues, on distingue, bien sur, le délinquant mineur du délinquant majeur. Mais la perception de la minorité n’est pas la même. Le mineur est un être en construction, un adulte en devenir, dont la personnalité est en cours d’achèvement. Cet achèvement a lieu en principe vers les 23-25 ans. Les études criminologiques démontrent pourtant, malgré ce stade tardif, la fréquence avec laquelle les délinquants juvéniles passent à l’acte. On remarque qu’ils ont tendance à commettre des infractions de plus en plus graves, voire de plus en plus violentes mais aussi que l’âge de la délinquance baisse.