Le rôle des AAI dans la protection des libertés

  1. les Garanties non juridictionnelles DES LIBERTÉS

Les garanties non juridictionnelles. Elles ont un terrain privilégié de développement : le terrain international de protection des droits de l’homme. Au niveau international, tout dépend de la volonté des Etats, principe de souveraineté étatique, qui va jouer contre l’établissement d’une véritable juridiction. Ils vont être assez réticents à la mise en place d’un véritable juge.

Mais on en trouve aussi en droit interne, et en particulier en France, avec le dvpmt, en particulier dans les droits de l’homme, des autorités administratives indépendantes.

  1. I ) Au niveau interne : les autorités administratives indépendantes.

En France, on en trouve de nombreuses, dont certaines jouent un rôle important dans la garantie des droits fondamentaux. Ces Autorités Administratifs Indépendantes sont conçues comme des organes de médiation essentiellement, même si certaines ont des pouvoirs au-delà.

Une qualité importante de ces autorités : c’est leur indépendance.

Il y a deux champs dans lesquelles les Autorités Administratifs Indépendantes interviennent : le champ économique et les droits de l’homme. On a estimé que la régulation pouvait être utile dans ces champs. Une forme de souplesse est recherchée et trouvée dans ces structures.

En matière de Droits de l’Homme, c’est la Suède qui a initié le processus au 19e, en organisant un modèle alternatif de résolution des conflits entre l’Etat, l’administration et les citoyens. Ça a réussi en Suède. Par la suite, la France a suivi ce chemin.

On verra ensuite une Autorités Administratifs Indépendantes : le défenseur des droits, qui figure dans la constitution.

  1. Le modèle étranger suédois.

En Suède, la constitution de 1809 qui a créé la figure d’Ombudsman, qui est désigné par le parlement (légitimité démocratique), c’est un individu seul, qui bénéficie d’une totale indépendance, et dont la mission consiste à contrôler que l’administration respecte les lois et les règlements, respecte le droit.

Tout citoyen qui estimerait que l’administration n’a pas respecté le droit, peut saisir (par simple écrit), cette autorité, qui va pouvoir enquêter et jouer le rôle de médiateur. Quand plainte citoyen, il va procéder à une enquête, il a les pouvoirs d’enquêter : toutes les autorités qu’il va souhaiter entendre devront répondre à sa requête. S’il estime que la plainte est justifiée à la fin de l’enquête, il va faire des observations à l’administration en cause, et peut même porter en justice.

Ça existe, mais c’est rarement la solution adoptée, car c’est souvent au stade post-enquête que l’administration répond favorablement aux observations de l’Ombudsman.

Tout au long du 20e, d’autre Ombudsman ont été créé, comme celui de l’égalité homme-femme, celui de la protection des homosexuels en 1999… Au lieu de saisir la juridiction générale, on peut donc saisir l’Ombudsman pour ces questions particulières.

  1. Les Autorités Administratifs Indépendantes en France.

Les Autorités Administratifs Indépendantes sont apparues en France il y a une 30aines d’années. Elles sont apparues avec le médiateur de la république, et la CNIL de 1978.

Les Autorités Administratifs Indépendantes sont créés par le législateur en vertu de l’article 34 de la Constitution , et qui prévoit que le législateur est compétent pour fixer les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques. Sur ce fondement, le législateur a pu créer des Autorités Administratifs Indépendantes destinées à garantir l’exercice des libertés publiques.

Les Autorités Administratifs Indépendantes sont un objet original et atypique, et qui marque une rupture par rapport à un principe classique en droit français : la logique administrative fondée sur des rapports hiérarchiques. Les Autorités Administratifs Indépendantes sont extérieures à la chaîne hiérarchique, car elles sont indépendantes pas par rapport à une éventuelle autorité de tutelle.

Juridiquement, les Autorités Administratifs Indépendantes vont poser des questions. Le Conseil Constitutionnel dans une décision de 1989 a été saisi de la q° de la constitutionnalité de la loi sur le CSA. Il a affirmé que la loi pouvait, sans qu’il soit porté atteinte au principe de séparation des pouvoirs, doter une Autorités Administratifs Indépendantes de pouvoir de sanction dans la limite toutefois de la nécessité ou de l’accomplissement de sa mission.

Le problème que ça posait : certaines Autorités Administratifs Indépendantes avaient ce pouvoir de sanction, or normalement, c’est le juge qui a le pouvoir de sanction. Donc problématique par rapport à la séparation des pouvoirs, car l’autorité administrative sera alors dotée du pouvoir de sanction.

On a recours aux Autorités Administratifs Indépendantes dans le champ des Droits de l’HommE, pourquoi ? Ça résulte d’une certaine méfiance à l’égard de l’Etat et de son administration. D’ailleurs, cela transparaît, le Conseil d’Etat a fait un rapport consacré aux Autorités Administratifs Indépendantes. Dans le rapport, le Conseil d’Etat écrit que « parmi les justifications essentielles qui ont pu être avancées en faveur de la création des Autorités Administratifs Indépendantes, figure le soucis d’offrir à l’opinion une garantie d’impartialité renforcée des interventions de l’Etat ».

Les Autorités Administratifs Indépendantes sont donc le résultat d’une méfiance de l’Etat, mais en même temps, on recherche le lien avec l’administration, cette protection que seul l’Etat est à même d’apporter, mais on la recherche de manière impartiale.

D’autre part, le juge présente ces qualités d’impartialité, mais il y a aussi des résultats de lenteur… Donc critiques adressées à la justice. Les Autorités Administratifs Indépendantes présenteraient l’avantage d’une plus grande souplesse, voire même d’une plus grande efficacité que la sanction que peut prononcer le juge en matière de Droits de l’Homme.

On a aussi la recherche d’une expertise : les Autorités Administratifs Indépendantes sont plus spécialisées que ne l’est le juge sur un domaine précis.

Exemples d’Autorités Administratifs Indépendantes : dans le champ du respect de la vie privée, c’est la CNIL, crée en 1978. Elle a eu des pouvoirs qui ont été modifiés en 2004 de manière assez conséquente. C’est une autorité constituée de 17 membres désignés pour 5 ans. Le changement de 2004 est : les pouvoirs a priori (en amont) de la CNIL ont été réduits car face à la multitude des fichiers de tous ordres, elle n’avait plus le pouvoir de contrôler les fichiers a priori. Maintenant, c’est plutôt déclaratoire : on déclare la création d’un fichier, mais on n’attend pas d’autorisation. Mais c’est compensé par un accroissement de ses pouvoirs a posteriori : elle va pouvoir recevoir des observations, plaintes, et elle peut lancer des contrôles sur des fichiers dont elle a connaissance et de déclarer ces fichiers. Si elle contrôle une infraction, elle peut saisir le parquet, et peut faire ses propres contrôles, et prononcer des sanctions pécuniaires pouvant aller jusqu’à 300 000€.

2e ex : la liberté de communication audiovisuelle. Le CSA a été créé en 1989. ll est en charge de veiller à ce que l’ensemble des opérateurs qui interviennent dans le secteur de la radio et télévision respectent le pluralisme, not pluralisme des idée, not en période électorale, mais aussi la dignité humaine doit être respectée, c’est pourquoi des programmes sont déconseillés au moins de 10 ans… Mais aussi veille à la libre concurrence, qui permet pas la liberté d’expression.

A propos de l’actualité : nomination du nouveau président du CSA : Olivier Schraneck, nommé par le président de la République en janvier 2013. Ca a fait des débats, car pose la question des modalités de nomination, et la question de l’indépendance de ces Autorités Administratifs Indépendantes. Pouvoir de nomination est fondé sur l’article 13 Constitution . Il a été modifié lors de la dernière révision constitutionnelle de 2008. Elle avait pour but d’encadrer ce pouvoir de nomination du président de la République. Depuis 2008 en effet, pour les nominations présidentielles qui concernent la protection des droits fondamentaux (une loi organique précise les emplois concernés). Le ou les candidats pressentis par le président de la République doivent obligatoirement être auditionné par les commissions compétentes à l’Assemblée Nationale et au Sénat. À l’issue de ces auditions, les commissions compétentes peuvent opposer un véto à la nomination, mais il faut pour cela une majorité des 3/5e de la commission qui vote contre le candidat. Compte tenu de la composition de la commission, la majorité des 3/5e est presque impossible à atteindre. Olivier est un ancien collaborateur de Jospin, donc il n’est pas neutre, il a eu des engagements politiques.

Ça montre les limites de l’indépendance de la procédure introduite en 2008.

Actualité plus récente : q° qui a fait intervenir le CSA, à propos d’un clip d’Indochine, considéré comme violent. Donc des membres du CSA ont estimé que le CSA devait intervenir, ça a donné lieu à un rappel du CSA : il a rappelé qu’il était incompétent pour les diffusions sur internet, car le clip n’était diffusé que sur internet. En revanche, il a dit qu’il se saisirait de toutes les diffusions à la télé d’extraits violents du clip. Il a souligné la possibilité qu’il y avait d’interdire la vidéo pour les -18ans ou 16ans, ce qui a des répercussions sur la diffusion de l’œuvre.

Autre Autorités Administratifs Indépendantes : le contrôleur général des lieux de privation de liberté. Date de 2007. C’est une personne désignée par le président de la R qui a pour mission de visiter tout lieu de détention : ça couvre les établissements pénitentiaires, les centres de détention ou zones d’attente dans lesquelles sont détenus les étrangers en situation irrégulières, les cellules dans les commissariats où on est gardé à vue, mais aussi les hôpitaux psychiatriques. Dans son dernier rapport, rendu public en février 2013, rapport pour l’année 2012, il pointe différentes choses, not les zones d’accueil des étrangers. À l’occasion de son rapport, il a demandé à ce que sa compétence soit étendue aux établissements qui accueillent des personnes âgées dépendantes. Ça change la donne, car à l’heure actuelle, on a plutôt des lieux où les gens sont privés de leur liberté, mais ils sont contraints, un juge intervient. Le placement se fait souvent sous contrainte. Mais pour les personnes âgées, il n’y a pas véritablement privation de liberté, juridiquement en tout cas, mais pratiquement si.

Les Autorités Administratifs Indépendantes ont des pouvoirs très variés, qui vont de la simple recommandation au pouvoir de sanction, comme la CNIL, le CSA : le CSA peut interdire d’émettre par ex.

  1. Le défenseur des droits.

C’est une création de la révision constitutionnelle de 2008, qui introduit le défenseur des droits dans la Constitution à l’article 71-1.

Ce défenseur des droits succède à 4 Autorités Administratifs Indépendantes préexistantes : le médiateur de la république, le défenseur des enfants, la commission nationale de la déontologie et de la sécurité, la HALDE (haute autorité de lutte contre la discrimination en faveur pour l’égalité).

Elles ne disparaissent pas, mais sont réunies dans la grande Autorités Administratifs Indépendantes du défenseur des droits.

Il a fallu attendre la loi organique de 2011 pour l’entrée en vigueur, et la nomination du président de l’Autorités Administratifs Indépendantes, Dominique Bodisse, qui est lui aussi engagé politiquement.

Comment l’indépendance est-elle garantie ? Par la durée du mandat : 6 ans : c’est assez long. Le mandat n’est pas renouvelable ni révocable (donc à l’abri des pressions), et on ne peut pas lui faire de prescriptions.

Comment être sûr qu’il est impartial ? Il a un régime d’incompatibilité stricte. Le défenseur des droits ne peut pas cumuler cette fonction avec d’autres fonctions publiques, pas avoir de mandat électif, ça le rend inéligible, il ne peut pas avoir d’autre emploi public en même temps, et ne peut pas avoir d’activité privée, que ce soit professionnel, un mandat social dans une entreprise…

Il bénéficie en outre d’une immunité : il ne peut pas être poursuivi, recherché ou arrêté pour les opinions émises dans le cadre de l’exercice de ses fonctions.

Il va être secondé dans chacune de ses missions par un adjoint et un conseil : un adjoint en charge des enfants, un pour les discriminations… et un conseil correspondant. L’intérêt est qu’on avait des Autorités Administratifs Indépendantes qui fonctionnaient bien. On voulait leur donner plus d’importance, et les protéger constitutionnellement : avant, on pouvait les supprimer par simple loi. On ne voulait pas supprimer l’expertise que les Autorités Administratifs Indépendantes avaient acquise, c’est pourquoi on a ces conseils, qui proviennent des anciennes Autorités Administratifs Indépendantes. Le défenseur peut consulter ces conseils, pour toute question nouvelle. Il est seul juge pour considérer ce qu’est une question nouvelle. Ça dépend donc de la personnalité du défenseur et de ses rapports avec le conseil. Il n’est pas lié par la décision des conseils.

Il a un pouvoir d’observation et d’investigation : le défenseur des droits peut auditionner toute personne et se déplacer partout pour obtenir des informations : enquêtes sur place et sur pièce : il peut demander toute pièce, à toute personne…

L’objet de son pouvoir est de régler les litiges, c’est un mode alternatif au juge, entre contrôle et médiation : il a un pouvoir de recommandation, qui peut se transformer en une injonction. Il a la possibilité de rendre un rapport public, il peut donc donner une publicité négative.

Il va favoriser la résolution amiable, donc il peut proposer une transaction entre les parties au litige. Il va pouvoir déterminer les termes de la transaction, qui pourra être relayée par le juge.

La grande limite au défenseur des droits c’est le fait qu’il ne peut pas saisir le Conseil Constitutionnel. C’est une limite, car dans d’autre Etats, on a un homologue de défenseur des droits, not en Espagne, où là il peut saisir le Conseil Constitutionnel. Ça aurait pu être une innovation, mais non ce n’est pas le cas.

  1. II) Au niveau international et régional.

Quelles sont les garanties non juridictionnelles ?

On a déjà eu l’occasion de constater qu’au niveau international, on avait rarement de véritables juges compétents pour sanctionner un Etat qui ne respecterait pas ses obligations en matière de Droits Fondamentaux. Ce que les conventions internationales de protection des Droits de l’Homme prévoient le plus souvent, ce sont simplement des comités chargés d’examiner régulièrement les rapports que les Etats ont l’obligation de leur présenter sur la situation sur leur territoire, des Droits de l’Homme reconnus par les traités, auxquels les Etats sont partie.

Un comité d’expert, a une compétence dans un domaine, va étudier les rapports, et faire des observations à l’adresse des Etats, pour les aider à améliorer la protection des Droits Fondamentaux.

La limite de ce système c’est qu’il n’est pas contraignant : ces observations n’ont pas de caractère contraignant par les Etats. C’est donc plus une influence exercée par ces autorités, qu’une obligation juridique.

On peut parler du comité des droits économiques sociaux et culturels. Pour ceux qui l’ont ratifié, pouvoir de sanction si plainte individuelle. Pour les autres Etats, le CODESC va juste examiner les rapports des Etats, et faire des observations.

Comité pour la prévention de la torture. Au niveau européen, donc régional, il y a le comité pour la prévention de la torture, qui a été institué par la convention européenne pour la prévention de la torture et des traitements inhumains et dégradants, qui date de 1989. Ce comité peut visiter les lieux, et en particulier les lieux privatifs de liberté, car c’est dans ces lieux particulièrement que les traitements inhumains et dégradants, voire actes de torture, peuvent être fait.

Un rapport d’avril 2012 de ce comité concerne la France. En principe, les rapports ne sont pas rendus publics, sauf si les Etats sont d’accord. Pour sanctionner l’Etat aussi, le comité peut le rendre public pour sanctionner l’Etat. Là, c’était avec accord de la France. Rapport de 2012 après des visites en 2010. C’était au moment où beaucoup de réformes étaient en cours, not réformes de la garde-à-vue, et où réforme de l’hospitalisation psychiatrique. Malgré ces réformes, il relève des problèmes, not les violences perpétrées au moment des interpellations et après les interpellations par les policiers. Ensuite, concernant la prison : il affirme qu’il n’y a pas d’acte de torture, ou traitement inhumain ou dégradant, mais il souligne un usage un peu trop important de la force. Il critique aussi l’administration pénitentiaire sur son incapacité à empêcher la violence entre détenus. Car quand on est en prison, on est sous la protection de l’administration pénitentiaire. Critiques aussi sur l’accès au soin des détenus, et soins psychiatriques en particulier.

Ça montre là qu’au niveau européen, ça ressemble à ce qui se passe au niveau interne.