Les principes directeurs de l’instance

L’INSTANCE : Les principes directeurs de l’instance

La mise en œuvre de l’action en justice se traduit par ce que l’on appelle l’instance. Il s’agit d’une série d’actes procéduraux allant de la demande en justice jusqu’au jugement, ou parfois jusqu’à l’abandon de la prétention par un désistement. Cet ensemble de démarches crée un rapport d’instance entre les parties, lesquelles deviennent des plaideurs. Bien que toutes les règles relatives à l’instance relèvent du droit processuel, il est essentiel de comprendre les principaux principes directeurs de l’instance (I) ainsi que son issue, à savoir le jugement (II).

L’organisation judiciaire repose sur quelques principes essentiels qui régissent le déroulement de l’instance : Les principes de neutralité du juge et de contradictoire sont fondamentaux dans l’instance civile. Le juge agit à la demande des parties, veillant au respect des règles, mais sans intervenir directement dans les litiges. Le principe du contradictoire garantit à chaque partie le droit d’être entendue et d’examiner les preuves. Ces principes assurent un procès équitable et une justice rigoureuse.

Tableau résumant les Principes Directeurs de l’Instance Judiciaire Civile

Principe Directeur Description et Fonction Exemples et Références Juridiques
Neutralité du Juge Le juge intervient uniquement sur demande, les parties déterminent l’objet et la cause du litige. Article 1 du Code de procédure civile : seisine initiée par les parties.
Contradictoire Assure les droits de la défense en permettant aux parties de se faire entendre et d’accéder aux preuves. Articles 14-16 du Code de procédure civile : droit d’être entendu et de connaître les preuves.
Juge de la Mise en État Magistrat chargé de gérer la procédure, imposant délais et communication de pièces. Fonction créée en 1965, visant une procédure plus encadrée.
Limites de l’Intervention du Juge Le juge ne statue pas au-delà de la demande (ultra petita) et respecte les éléments présentés. Article 12 du Code de procédure civile : requalification possible des faits sans modifier leur nature.
Procédure par Défaut En cas d’absence d’une partie, possibilité de faire opposition pour un nouveau jugement. Garantit que le jugement puisse être réexaminé pour équité.

 

1) Le principe de la neutralité du juge : 

  • Saisine : Ce principe signifie que le juge ne prend jamais l’initiative de s’autosaisir d’un litige. Il intervient uniquement à la demande des parties ou, en matière pénale, par l’intermédiaire du ministère public. L’article 1er du Code de procédure civile le précise : « seules les parties introduisent l’instance, sauf dans les cas où la loi en dispose autrement ». Ce principe est interprété de manière large, et c’est toujours la partie concernée qui initie l’instance.
  • Déroulement de la procédure : Le principe de neutralité implique également que les parties contrôlent le déroulement de la procédure. Elles doivent accomplir les actes nécessaires dans les formes et délais prescrits par la loi, comme l’indique l’article 2 du Code de procédure civile. Le rôle du juge, selon l’article 3, se limite à veiller au bon déroulement de l’instance. Cette approche repose sur une tradition révolutionnaire qui considérait le juge comme un protecteur, non un intervenant direct dans le déroulement des affaires privées. Néanmoins, ce principe a connu des assouplissements depuis le Code de procédure civile de 1971, qui a conféré au juge civil des pouvoirs d’instruction accrus.

Une réforme notable est celle de 1965, qui a instauré la fonction de juge de la mise en état. Ce magistrat a un rôle actif dans la gestion des procédures, pouvant imposer des injonctions aux avocats, ordonner la communication de pièces et fixer des délais. Ces interventions sont une atteinte partielle au principe de neutralité du juge, et la procédure civile s’éloigne progressivement du modèle accusatoire, se rapprochant du modèle inquisitoire utilisé en matière pénale.

  • Objet et cause du litige : Conformément à la neutralité du juge, les parties déterminent elles-mêmes l’objet et la cause de leur action. L’objet est ce qui est réclamé, tandis que la cause est le fondement juridique de la demande. Le juge est tenu de respecter ces éléments et ne peut statuer ultra petita (au-delà de ce qui est demandé) ni extra petita (en dehors de la demande). Par exemple, si une partie demande 1 euro de dommages-intérêts, le juge ne peut accorder plus, même si le préjudice est manifestement supérieur. La Cour de cassation veille au respect de ce principe et annule les décisions qui modifient la cause de l’action.

Toutefois, bien que le juge ne puisse pas modifier les faits invoqués ou leur accorder des règles non demandées par les parties, il est tenu de requalifier les faits et les actes litigieux si nécessaire. En vertu de l’article 12 du Code de procédure civile, il peut donner aux faits leur exacte qualification juridique, sans pour autant modifier la nature des faits tels que présentés par les parties.

2) Le principe du contradictoire

Un des fondements du procès équitable est le principe du contradictoire, qui garantit les droits de la défense. Ce principe impose une certaine loyauté procédurale de la part des parties et du juge. Chacune des parties doit avoir la possibilité de se faire entendre, d’exposer ses arguments et de contester les éléments de preuve qui seront utilisés pour résoudre le litige. Le Code de procédure civile, dans ses articles 14 à 16, en est la parfaite illustration.

  • Article 14 énonce que « nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée ». Cela signifie que chaque partie doit être informée du procès et avoir la possibilité d’y participer.
  • Article 15 impose aux parties de se communiquer mutuellement les pièces sur lesquelles elles fondent leurs prétentions. Cette communication doit être faite suffisamment à l’avance pour que chaque partie puisse organiser sa défense.
  • Article 16 s’adresse au juge. Ce dernier doit veiller à ce que le principe du contradictoire soit respecté tout au long de la procédure. Le juge ne peut ainsi retenir dans sa décision des moyens ou des documents que les parties n’auraient pas pu discuter contradictoirement. De même, s’il décide de relever d’office un moyen de droit, il doit d’abord inviter les parties à présenter leurs observations.

Une procédure par défaut a été mise en place pour éviter que l’une des parties ne se soustraie au procès. Cette procédure permet à la partie défaillante de faire opposition au jugement rendu en son absence, permettant ainsi au tribunal de juger à nouveau l’affaire dans son intégralité, tout en garantissant le respect des droits de la défense.

Questions fréquentes sur les principes directeurs de l’instance

Qu’est-ce que l’instance en matière judiciaire ?

L’instance est une série d’actes procéduraux formant une action en justice, depuis la demande initiale jusqu’au jugement ou, parfois, jusqu’à l’abandon de la prétention par désistement.

Quel est le principe de la neutralité du juge ?

Le principe de neutralité signifie que le juge n’initie pas lui-même l’instance et se limite à intervenir à la demande des parties ou du ministère public en matière pénale. Les parties doivent accomplir tous les actes nécessaires au déroulement de l’instance, et le juge se contente de veiller à son bon déroulement sans intervenir de manière proactive.

Comment le rôle de juge de la mise en état affecte-t-il la neutralité du juge ?

La fonction de juge de la mise en état, instaurée en 1965, donne au magistrat un rôle plus actif dans la gestion des procédures. Il peut imposer des injonctions, ordonner la communication de pièces et fixer des délais, ce qui est une atténuation partielle du principe de neutralité en s’éloignant du modèle purement accusatoire vers un modèle plus inquisitoire.

Le juge peut-il modifier l’objet et la cause du litige fixés par les parties ?

Non, le juge ne peut ni statuer au-delà de ce qui est demandé (ultra petita) ni en dehors de la demande (extra petita). Cependant, il peut requalifier juridiquement les faits présentés pour leur donner leur exacte qualification juridique, en vertu de l’article 12 du Code de procédure civile, tout en respectant la présentation des faits faite par les parties.

Quel est le principe du contradictoire et pourquoi est-il essentiel ?

Le principe du contradictoire assure les droits de la défense en garantissant que chaque partie ait la possibilité d’être entendue, de présenter ses arguments et de contester les preuves de la partie adverse. Ce principe est inscrit dans les articles 14 à 16 du Code de procédure civile et est un fondement essentiel pour un procès équitable.

Comment le juge veille-t-il au respect du principe du contradictoire ?

Le juge s’assure que chaque partie est informée du procès et a eu l’opportunité de participer et de se défendre. Il ne peut se baser sur des moyens ou documents que les parties n’ont pas eu l’occasion de discuter contradictoirement et, s’il relève d’office un moyen de droit, il doit inviter les parties à donner leurs observations.

Qu’est-ce que la procédure par défaut et dans quel contexte est-elle utilisée ?

La procédure par défaut est mise en place lorsque l’une des parties ne se présente pas au procès. Elle permet au tribunal de juger l’affaire malgré l’absence d’une des parties, tout en offrant à la partie défaillante la possibilité de faire opposition au jugement afin que l’affaire soit rejugée dans son intégralité, garantissant ainsi les droits de la défense.

 

Le Cours complet d’Introduction au droit est divisé en plusieurs fiches (notion de droit, biens, acteurs de la vie juridique, sources du droit, preuves, responsabilité…)

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