La responsabilité pénale des personnes morales

La responsabilité pénale des personnes morales

             Cette responsabilité pénale a été introduite à l’article 121-1 du Code pénal, qui dispose que « les personnes morales, à l’exclusion de l’Etat, sont responsables pénalement des infractions commises pour leur compte par leurs organes ou représentants ; toutefois, les collectivités territoriales et leur groupement ne sont pénalement responsables que des infractions commises dans l’exercice d’activités susceptibles de faire l’objet de convention de délégation de service public. La responsabilité pénale des personnes morales n’exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes faits ».

            Les raisons de l’introduction d’une telle responsabilité dans le Code pénal sont les suivantes :

o   pour éviter que les poursuites soient à chaque fois dirigées contre le chef d’entreprise : on a voulu « détourner les foudres répressives du dirigeant vers la personne morale »

o   les personnes morales sont plus solvables que les personnes physiques

Cass. Crim., 8 septembre 2004 : le problème en l’espèce était de savoir si la relaxe du représentant de la personne morale devait se traduire par la relaxe de la personne morale. La Cour de cassation rappelle qu’il faut dissocier les deux responsabilités, et affirme que la relaxe prononcée en faveur des organes ou représentants n’exclut pas nécessairement la responsabilité de la personne morale.

Pour que la responsabilité pénale d’une personne morale puisse être recherchée, il faut que plusieurs conditions soient réunies :

o   toutes les personnes morales de droit public ou de droit privé peuvent engager leur responsabilité pénale, à l’exception de l’Etat

o   les collectivités territoriales ne peuvent engager leur responsabilité qu’en matière d’infractions commises dans le cadre d’une activité susceptible de faire l’objet d’une convention de délégation de service public (liste dressée par le Conseil d’Etat : ne sont pas concernées les activités qui, par leur nature ou par la volonté du législateur, ne peuvent être assurées que par la collectivité territoriale elle-même)

  • Cass. Crim., 12 décembre 2000 : il s’agissait d’un accident qui avait eu lieu pendant l’animation d’une classe de découverte pendant une période scolaire. La Cour de cassation a considéré qu’il s’agissait d’une action de service public, qui par sa nature ne peut donc pas faire l’objet d’une délégation de service public, et faisait donc obstacle à l condamnation de la collectivité territoriale
  •             Cass. Crim., 3 avril 2002 : il s’agissait d’un accident dans un théâtre, les juges du fond et la Cour de cassation ont considéré que le théâtre pouvait faire l’objet d’une délégation de service public, ce qui a permis la condamnation de la collectivité territoriale

            Le principe de généralité a été consacré par la loi Perben II du 2 mars 2004 : la responsabilité pénale des personnes morales peut être engagée pour toutes les infractions, sauf dispositions expresses contraires. La seule hypothèse pour laquelle la responsabilité des personnes morales ne peut être engagée est en matière d’infractions de presse.

            L’article 55 de la loi Perben II a prévu que lorsque la personne morale a commis un crime pour laquelle aucune peine d’amende n’a été prévue à l’encontre de la personne physique, la peine encourue par la personne morale est une amende de 1,000,000€.

            Il faut que l’infraction ait été commise par un de ses organes de gestion ou représentants agissant pour son compte.

  •             Cass. Crim., 23 mai 2006 : le salarié d’une société monte sur une nacelle, et chute mortellement. Le salarié coordinateur et la société sont poursuivis pour homicide involontaire, et la Cour d’appel condamne le salarié et la société sans préciser quel organe ou représentant a agi. Un pourvoi est formé contre cet arrêt, qui sera censuré par la Cour de cassation en estimant que la Cour d’appel aurait dû rechercher si les manquements aux obligations de prudence ou de sûreté avaient bel et bien été commis par un organe ou représentant de la société.
  •             Cass. Crim., 15 janvier 2008 : un salarié a utilisé une nacelle sans respecter la notice d’utilisation et a chuté mortellement. Les juges du fond ont condamné la société, et la Cour de cassation a rejeté le pourvoi. Cet arrêt a été très critiqué car on a retenu la responsabilité pénale de la personne morale sans préciser si le manquement aux obligations de prudence ou de sécurité avait été commis par un organe ou représentant de la société
  •             Cass. Crim., 24 mars 2009 : une campagne promotionnelle est organisée par la société « Lidl » indiquant la vente de fours micro-ondes au prix de 49€. Cette opération a eu un succès relativement important, et seules 11 personnes ont pu en acheter. Une plainte a été déposée pour pratique commerciale trompeuse contre la société « Lidl », et là non plus, les organes ou représentants de la société n’ont pas été identifiés. Selon la Cour de cassation, « les infractions retenues s’inscrivent dans le cadre de la politique commerciale des sociétés en cause et ne peuvent dès lors avoir été commises pour le compte des sociétés que par leurs organes ou représentants ».

            La personne morale qui commet un acte infractionnel va être pénalement sanctionnée, la peine ne pouvant être qu’une amende égale au quintuple de la peine d’amende prévue pour une personne physique qui aurait commis les mêmes faits.

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