Les 5 conditions d’admission aux emplois publics

Les 5 conditions salutaires d’admission aux emplois publics

Pour devenir fonctionnaire, il y a un certain nombre de conditions particulières prévues par les règlements des concours et par les statuts particuliers ordinaires de chaque corps.

Mais il existe aussi des conditions générales pour tous les concours. Ces 5 conditions statutaires sont mentionnées dans l’article 5 de la loi de juillet 83.

§1.Condition 1 : La nationalité française

La nationalité française et son rôle dans l’accès à la fonction publique : La nationalité française est traditionnellement requise pour occuper des fonctions publiques, principalement pour deux motifs :

  1. Loyalisme national : Il est habituellement admis que les tâches de nature publique doivent être réservées aux citoyens nationaux, afin de garantir leur loyauté envers l’État.
  2. Limitation de la concurrence : Cette exigence vise à réduire la concurrence émanant d’autres candidats.

Cependant, cette règle générale est tempérée par plusieurs exceptions, établies de longue date. Par exemple, la nationalité française n’est pas toujours requise pour les postes contractuels, sauf si le statut du poste spécifie le contraire. En outre, certains secteurs sont ouverts, de manière exceptionnelle, à tous les étrangers, qu’ils soient européens ou non.

Exceptions notables :

  • Corps enseignant universitaire : Ouvert aux étrangers.
  • Recherche scientifique : Accessible aux non-nationaux.
  • Ressortissants de l’UE : Emplois ouverts aux citoyens des États membres de l’Union Européenne.

Historiquement, les États membres de la Communauté Européenne interprétaient le Traité de Rome de manière restrictive, fermant l’accès à la fonction publique aux citoyens d’autres États membres. Toutefois, la Cour de Justice de l’Union Européenne a adopté une interprétation plus large de ce traité. Selon elle, les postes publics devraient être ouverts aux ressortissants communautaires, à l’exception de ceux impliquant une participation directe ou indirecte à l’exercice de la puissance publique et ceux liés à la sauvegarde des intérêts généraux de l’État ou des collectivités territoriales.

Évolution de l’accès à la fonction publique en France pour les ressortissants européens

Mouvement d’ouverture dans les années 80 :

  • Fin des années 80 : Un mouvement d’ouverture à l’échelle européenne commence à se manifester.
  • Réponse législative française : En réaction à la jurisprudence de la Cour de justice, la France adopte la loi du 26 juillet 1991.

Loi du 26 juillet 1991 :

  • Modification du statut de 1983 : Inclusion de l’article 5 bis.
  • Nouvelles dispositions : Les ressortissants de l’Union Européenne peuvent être recrutés dans des corps ou cadres d’emploi distincts de l’exercice de la souveraineté ou ne participant pas directement ou indirectement à l’exercice des prérogatives de puissance publique.
  • Application pratique : De nombreux décrets ont suivi, ouvrant la majorité des corps à l’exception de certains, initialement fermés aux étrangers européens dans les trois branches de la fonction publique.

Corps exclus :

  • Non-définis par la loi de 1991 : La définition est large et se base sur « l’exercice de la souveraineté ».
  • Appréciation au cas par cas : Les chefs de services évaluent individuellement.
  • Exemples de corps exclus : Corps militaires, police (tous grades), hauts fonctionnaires, diplomatie, administrations centrales, services fiscaux. Ces exclusions représentent environ 20 % des emplois publics, fermés aux européens.

Loi du 26 juillet 2005 – Bilan et confirmation d’ouverture :

  • Bilan des ouvertures : Confirmation du principe d’ouverture des corps et cadres d’emplois aux ressortissants européens.
  • Approche par emploi : Contrairement à la loi de 1991, la loi de 2005 se concentre sur les emplois plutôt que sur les corps, permettant une ouverture plus ciblée.
  • Question des diplômes : Exigence d’un niveau de diplôme équivalent pour les candidats européens aux concours français.

Puis, un décret du 13 février 2007 a créé une Commission d’accueil chargée d’évaluer l’équivalence entre les diplômes d’européens de l’UE et les diplômes français.

Le rôle de la commission ? Processus d’évaluation et mesures de compensation :

  1. Évaluation des diplômes : La Commission examine les diplômes européens et français pour déterminer leur équivalence.
  2. Refus d’équivalence : Si des différences fondamentales de niveau sont constatées, la Commission peut refuser l’équivalence, empêchant le candidat de se présenter au concours jusqu’à l’obtention d’un diplôme équivalent.
  3. Mesures de compensation : En cas de différences substantielles entre les diplômes, l’administration peut imposer au candidat européen une épreuve supplémentaire ou un stage d’adaptation pouvant durer jusqu’à trois ans.

Procédure et communication des décisions :

  • Décision écrite : La Commission communique sa décision au candidat par écrit.
  • Transmission à l’administration : Le candidat doit transmettre cette décision à l’administration concernée pour participer à un concours administratif.
  • Motivation en cas de décision défavorable : Toute décision défavorable doit être dûment motivée.

Impact sur le recrutement dans la fonction publique :

  • Pas d’afflux massif de candidatures européennes : L’ouverture de la fonction publique française aux ressortissants de l’UE n’a pas entraîné un nombre significatif de candidatures supplémentaires.
  • Raisons de la modération des candidatures :
    • Concours identiques à ceux des Français : Les candidats européens doivent passer les mêmes concours administratifs que les candidats français.
    • Handicap de connaissances : Les candidats européens peuvent être désavantagés par un manque de connaissances spécifiques.
    • Exigence linguistique : Les concours se déroulent exclusivement en langue française, ce qui peut représenter un obstacle supplémentaire pour les candidats non francophones.

§.2. Deuxième critère : nécessite de jouir de ses droits civiques

Les individus aspirant à occuper des postes au sein de la fonction publique doivent impérativement posséder pleinement leurs droits civiques. Ces droits incluent notamment le droit de vote, le droit d’être éligible à des fonctions publiques, ainsi que la capacité à agir en tant que juré ou témoin dans un cadre juridique. La perte de ces droits civiques peut survenir suite à une condamnation pour un crime, ou dans certains cas, à la suite d’une décision prise par un tribunal correctionnel. Cette privation touche à la fois les fonctionnaires et les agents contractuels.

De manière cruciale, un fonctionnaire qui se voit retirer ses droits civiques au cours de sa carrière ne peut plus continuer à exercer ses fonctions. Dans un tel cas, l’administration procède à une radiation des cadres, ce qui signifie effectivement la fin de son emploi dans la fonction publique. Ce principe souligne l’importance accordée à l’intégrité et à l’exemplarité des droits civiques pour les personnes en charge de fonctions publiques.

§.3. Troisième critère : un cassier judiciaire compatible avec l’exercice des fonctions

Distinction entre casier judiciaire et perte des droits civiques :

  • Casier judiciaire : La présence d’une condamnation au casier judiciaire n’entraîne pas automatiquement la perte des droits civiques.
  • Droits civiques : La perte des droits civiques est une sanction distincte, qui peut être consécutive à certaines condamnations.

Exigences liées au casier judiciaire dans les concours administratifs :

  • Présentation du bulletin numéro 2 : Les candidats doivent présenter le bulletin numéro 2 de leur casier judiciaire. Dans certains cas, c’est l’administration qui effectue la demande du casier judiciaire du candidat.
  • Compatibilité avec les fonctions : L’exigence n’est pas un casier vierge, mais l’absence de mentions incompatibles avec l’exercice des fonctions envisagées.
  • Évaluation au cas par cas : L’administration procède à une évaluation individuelle, prenant en compte la nature du corps et des fonctions.

Appréciation plus sévère dans certains corps :

  • Magistrature et police : L’évaluation du casier judiciaire est particulièrement rigoureuse pour des fonctions telles que la magistrature ou la police.

Exemples de compatibilité :

  • Gendarmerie : Une condamnation à 15 jours d’emprisonnement pour conduite en état d’ivresse est jugée incompatible avec l’exercice d’officier de carrière dans la gendarmerie.
  • Police : Une condamnation pour vol avec un mois de prison avec sursis n’est pas compatible avec la fonction de commissaire de police.

Révocation des fonctionnaires en poste :

  • Incompatibilité du casier : Si le casier judiciaire d’un fonctionnaire en activité devient incompatible avec l’exercice de ses fonctions, cela peut justifier sa révocation.
  • Non-obligation de déclaration : Un fonctionnaire n’est pas tenu d’informer son administration d’une condamnation inscrite à son casier.

Transition vers l’exigence du casier judiciaire compatible :

  • Remplacement de la notion de « bonne moralité » : L’ancien statut de 1946 exigeait la bonne moralité des candidats, une notion jugée imprécise et subjective.
  • Enquêtes de moralité : Ces enquêtes, considérées comme peu fiables et parfois humiliantes, ont pratiquement disparu.

Maintien de certaines enquêtes administratives :

  • Emplois impliquant l’exercice de la souveraineté : Des enquêtes administratives sont encore menées pour des postes sensibles comme dans la police ou la magistrature.
  • Critères du Conseil d’État : L’administration peut se baser sur les qualités morales d’un candidat pour l’écarter d’un concours, même si son casier judiciaire est vierge.
  • Évaluation étendue : Des faits connus de l’administration ou des faits amnistiés peuvent conduire à l’exclusion d’un candidat, en privilégiant l’intérêt du service.

Enquête de moralité spécifique :

  • École Nationale de la Magistrature : Une enquête de moralité reste en vigueur pour les candidats à cette institution.

§.4. 4eme critère : La nécessite d’être en position régulière au regard du Code du service national

Contexte du service militaire :

  • Avant la réforme : Lorsque le service militaire était obligatoire, il n’était pas nécessaire de l’avoir effectué pour se présenter à un concours administratif. Des dispenses étaient possibles (objection de conscience, réforme, etc.).
  • Exigences spécifiques : Certains corps, comme la police, exigeaient l’accomplissement du service militaire.

Changements avec la loi du 28 octobre 1997 :

  • Suppression du service national : La loi du 28 octobre 1997 a aboli le service national obligatoire.
  • Allégement de l’exigence : Bien que cette exigence se soit allégée, elle n’a pas complètement disparu du statut de 1983.
  • Remplacement par la Journée Défense et Citoyenneté (JDC) : La JDC inclut un recensement à partir de 16 ans et une attestation de participation, concernant à la fois les filles et les garçons.

Introduction du Service National Universel (SNU) :

  • Création en 2018 : Le SNU a été instauré en 2018.
  • Obligations futures : Il deviendra obligatoire en 2026, sous la forme d’un mois de service militaire obligatoire suivi de trois à six mois de volontariat.
  • Remplacement de la JDC : À partir de 2026, le SNU généralisé remplacera la Journée d’appel.

§.5. 5eme critère : La condition tenant à l’aptitude physique et dispositions spécifiques aux handicapés

L’admissibilité des candidats aux concours publics en fonction de leur condition physique est un sujet complexe. Il est crucial que les personnes inaptes physiquement ne postulent pas à des emplois qu’elles ne seraient pas capables d’exercer. Cependant, évaluer correctement un handicap représente toujours un défi. Il est essentiel que l’administration tente d’inclure des individus en situation de handicap dans la mesure du possible.

La condition physique requise varie selon les différents corps de métiers. Habituellement, ce sont les statuts spécifiques à chaque corps qui déterminent les exigences d’aptitude physique nécessaires. Dans certains corps, aucune condition physique spécifique n’est requise. Les limitations imposées à l’accès aux concours doivent uniquement se justifier par les nécessités de la fonction à exercer.

Un candidat écarté pour des raisons physiques peut contester cette décision via une procédure juridictionnelle, à savoir un Recours en Excès de Pouvoir devant le juge administratif. Le juge administratif effectue alors un examen approfondi et individualisé. Par exemple, il a été jugé qu’un candidat aveugle pouvait postuler dans l’enseignement supérieur ou comme principal adjoint, mais pas en tant que magistrat.

Exemples ou contre-exemple de motif valable pour refuser la candidature à un concours :

  • Concernant les personnes avec des troubles de l’élocution, elles peuvent être exclues du concours pour devenir conseiller principal d’éducation.
  • Toutefois, la surcharge pondérale ne constitue pas un motif valable pour refuser la candidature à un concours.
  • Pour les personnes atteintes de maladies graves, le Conseil d’État a établi des principes visant à faciliter leur accès aux concours. Ainsi, pour les candidats souffrant d’une maladie évolutive pouvant mener à un congé de longue maladie, l’administration ne peut pas systématiquement interdire leur participation.
  • Décision du Conseil d’État du 6 juin 2008 : Obligation pour l’administration d’évaluer chaque candidat handicapé individuellement, en prenant en compte les traitements médicaux pouvant améliorer ou stabiliser leur état. Refus d’accès à la fonction publique limité aux cas d’incompatibilité avérée entre l’état de santé et les fonctions envisagées.
  • Législation sur le handicap depuis 1975 :
    • Objectif d’intégrer davantage les personnes handicapées dans le monde du travail, y compris la fonction publique.
    • Article 6-6 du grand statut du 13 juillet 1983, établissant l’égalité de traitement pour les travailleurs handicapés.
    • Loi du 11 février 2005, dite « loi handicap », imposant un quota de 6 % de travailleurs handicapés dans les trois fonctions publiques.
  • Application du quota de 6 % :
    • Concerne les administrations employant au moins 20 personnes.
    • Inclut les travailleurs reconnus handicapés, victimes d’accidents du travail ou de maladies professionnelles, titulaires d’une pension d’invalidité, anciens militaires invalides, et sapeurs-pompiers volontaires invalides en service.
  • Processus de reconnaissance du statut de travailleur handicapé :
    • Évaluation initiale par des médecins généralistes agréés spécialisés en handicap.
    • Décision finale par la commission des droits et de l’autonomie.
  • Recrutement des personnes handicapées dans la fonction publique :
    • Vérification du statut de handicapé par l’administration.
    • Possibilité de recrutement direct par contrat, suivi d’une titularisation après un an en cas de performance satisfaisante.
    • Renouvellement possible du contrat pour un an en cas de performance insatisfaisante.
    • Obligation d’adapter le poste de travail au handicap de l’agent.
  • Financement des adaptations de poste : Utilisation des amendes collectées pour non-respect du quota de 6 %.
  • Évolution de carrière des agents handicapés :
    • Suivi des règles communes une fois titularisés.
    • Pas de facilitation supplémentaire liée au handicap pour les promotions futures.
  • Statistiques :
    • Fonction publique de l’État : 4,6 % de travailleurs handicapés.
    • Fonction publique hospitalière : 5,4 %.
    • Fonction publique territoriale : 6,67 %.