Les sanctions du non respect du principe de légalité

Les sanctions du non respect du principe de légalité :

Le principe de légalité se définit comme la soumission de l’administration au droit. C’est le principe selon lequel l’administration, lorsqu’elle agit, est soumise au respect des règles de droit.
Une norme établie par l’administration (ex : décret, arrêté) doit donc toujours être conforme à celles qui lui sont supérieures (obligation de conformité). Le terme « légalité » indique que la loi est la norme supérieure essentielle à respecter pour l’administration. Mais elle est loin d’être la seule.

Le principe de légalité n’aurait aucune signification si les contrôles ne débouchaient pas sur des sanctions. La sanction normale d’un acte est son invalidité juridique. Cette illégalité peut entrainer la responsabilité de l’administration.

Section 1 : illégalité et invalidité juridique

L’illégalité d’un acte l’entache de nullité. Mais parfois, l’illégalité est considérée comme étant tellement grave qu’elle entraîne la reconnaissance de l’inexistence juridique de l’acte.

 

§1.  Illégalité et nullité 
A.   Les principes 

L’illégalité d’un acte administratif affecte sa validité et à cet égard, il y a peu de différence avec le droit privé.

Mais bien entendu cette nullité n’est pas de plein droit. C’est une règle de sécurité juridique. Cela signifie que l’acte juridique, règlement,  même illégal va produire tous ses effets jusqu’à son annulation.

Cela est vrai en droit privé comme en droit administratif, mais en droit administratif, ce principe a encore une force plus grande car il y a une présomption de conformité au droit, de respect de la légalité qui s’attache à l’acte administratif. En d’autres termes, l’administration est présumée agir conformément au droit.

Donc l’illégalité doit être constatée soit par l’administration elle-même soit par le juge.

Et par conséquent l’acte produit tous ses effets jusqu’à son annulation.

Cela explique tout d’abord que le recours formé contre un acte administratif n’a pas d’effets suspensifs. Le Conseil d’État considère qu’il s’agit d’un principe fondamental du droit public français. La rigueur du principe est atténuée par la possibilité de former une demande de suspension de l’acte.

Exemple : Cela veut dire qu’on demande l’annulation d’un acte. Mais on peut aussi demander au juge de suspendre l’application de l’acte.

Cette règle explique aussi que les recours en annulation soient enfermés dans des délais très brefs, ;2 mois mais en contre partie l’annulation a une portée absolue. L’annulation a des effets particulièrement fort  en ce sens que l’annulation fait disparaître l’acte. En principe, c’est l’annulation de l’acte tout entier. Mais l’annulation peut être partielle quand l’illégalité n’entache qu’une partie suffisamment individualisée de la décision.

Il arrive souvent que le juge n’annule qu’une partie de la circulaire.

L’annulation a un effet erga omnes (locution latine) : C’est-à-dire à l’égard de tous.

Et elle s’impose à l’administration, à l’administré, aux tiers, aux juridictions judiciaires et même au législateur.

L’annulation a une portée rétroactive : L’acte annulé n’est censé n’avoir jamais existé. Et l’administration doit remettre les choses en l’état, effacer toutes les conséquences de l’acte, et reconstituer la situation telle qu’elle se serait présentée à la date de l’annulation si l’acte n’avait été prit.

B.   La mise en application des principes.

Tout d’abord, parce que parfois l’annulation intervient trop tard. Et l’annulation de l’acte a alors une portée purement morale, censure purement morale.

D’où l’intérêt des procédures d’urgence mise en place par la loi du 30 juin 2000.

Dans d’autres cas, l’exécution sans être impossible s’avère difficile.

Comment par exemple reconstituer la carrière d’un fonctionnaire qui a été évincé ?

Le juge a toujours pris en compte cette réalité et sa jurisprudence a toujours recherché un équilibre entre la nécessaire stabilité des situations juridiques et la nécessité de donner au principe de légalité toute sa signification.

La jurisprudence dans certains cas fait prévaloir les exigences de la réalité sur la logique de la disparition rétroactive de l’acte annulé.

Ces mécanismes ont été insuffisants donc on a mis en place les lois dites de validation. Le parlement intervient pour régulariser. Cette pratique a été détournée et aujourd’hui cette pratique est encadrée et elle est reconnue et admise par la Cour EDH. Une telle loi ne pourra être adoptée que s’il existe un intérêt général suffisamment caractérisé et impérieux.

Le système en place donnait des situations peu satisfaisantes.

Le CE sous l’influence du droit communautaire et du droit comparé a apporté au principe de l’effet rétroactif de l‘annulation un tempérament de taille à l’occasion d’un arrêt du 11 mai 2004, l’arrêt association AC. Dans cette décision de 2004, le Conseil d’État a jugé qu’il était dans l’office du juge de pouvoir moduler dans le temps les effets d’une annulation contentieuse. Et cette possibilité ne peut cependant jouer qu’à titre exceptionnel. Notamment quand l’effet rétroactif de l’annulation est de nature a emporter des conséquences manifestement excessives en raison tant des effets que cette acte a produit que de l’intérêt général pouvant s’attacher à un maintien temporaire de ses effets. Aujourd’hui le principe est toujours celui d’un effet rétroactif de l’annulation car il s’agit d’une garantie essentielle pour les justiciables.

La modulation de ces effets dans le temps ne peut jouer qu’à titre exceptionnel quand il y a un intérêt général caractérisé et impérieux.

Cette solution a été reprise par le constituant et transposé à la QPC.

 

§2.  Illégalité et inexistence :

A coté de la simple nullité, le juge distingue un degré plus grave d’irrégularité qui entraine la reconnaissance de l’inexistence juridique de l’acte. CE 31 mai 1957 arrêt Rosan Girard.

Il ne faut pas confondre inexistence matérielle et inexistence juridique.

Inexistence matérielle : Il peut arriver qu’une personne forme un recours contre ce qu’il croit être un acte administratif. Alors qu’en réalité, aucune décision n’a été prise.

Donc dans ce cas, le juge constate tout simplement l’inexistence matérielle de l’acte.

Ex : recours contre une pseudo délibération d’un conseil municipal alors qu’en faite il n’y a qu’une réunion de quelques conseillers municipaux chez le maire.

Conseil d’État, le 28 février 1986 : commissaire de la République des Landes.

 

Inexistence juridique : peut être de nature différente. Le juge considère que certains actes ne sont pas entachés de nullité mais qui sont juridiquement inexistant. Ils sont entachés d’une irrégularité particulièrement grave et flagrante. Le  juge parle d’actes nuls et non avenus.

L’inexistence juridique est déterminée par la gravité de l’irrégularité.

Cette reconnaissance se situe dans le domaine du contentieux. Le Conseil d’État considère qu’il s’agit alors de sanctionner le comportement de l’administration et d’éviter la consolidation d’une situation irrégulière particulièrement grave.

La reconnaissance de l’inexistence entraîne un certain nombre de conséquences :

Quand l’inexistence est constitutive d’une voie de fait, le juge administratif et le juge judiciaire sont tous les deux compétents pour la constater et le juge judiciaire peut même la faire cesser.

Quand au point de vue procédural, aucun délai ne joue pour contester l’irrégularité d’un acte inexistant.

 

Par exemple, il y a inexistence juridique quand il y a voie de fait.

Quel est l’intérêt de la reconnaissance du caractère inexistant de l’acte ?

Section 2 : Illégalité et responsabilité

Si l’acte administratif est illégal, et est le fait générateur d’un dommage, la responsabilité de l’administration sera engagée. Ce qui veut dire que les notions de légalité et de faute sont liées. Et il s’agit d’une liaison à double sens. D’une part, si la décision est illégale, elle est par la même fautive. L’illégalité est toujours constitutive d’une faute, quelque soit cette illégalité, qu’il s’agisse d’une illégalité interne ou externe.

Arrêt 26 janvier 1973 CE, arrêt Driancourt.

Toutefois l’équation illégalité = faute ne signifie pas que la faute constitutive de l’illégalité sera toujours de nature à engager la responsabilité de l’administration.

En effet dans certains cas seule une faute dite lourde sera de nature à engager la responsabilité de l’administration.

Inversement, si la décision dommageable est légale, elle ne saurait être considérée comme fautive.

Une décision légale peut engager la responsabilité de l’administration sur le fondement de la rupture du principe d’égalité devant les charges publiques.

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