L’imputabilité en droit pénal marocain

L’imputabilité en droit pénal marocain

C’est la capacité de comprendre et de vouloir. Il n’y a pas en droit marocain de texte posant un principe général de non imputabilité. Seule l’insuffisance des facultés intellectuelles constitue une cause de non imputabilité.

En droit pénal marocain, l’imputabilité permet de rattacher une infraction à son auteur et de déterminer sa responsabilité pénale. L’imputabilité est étroitement liée au principe de la légalité des délits et des peines, qui dispose que l’on ne peut être condamné pénalement qu’en vertu d’un texte pénal précis et clair.

Définition de l’imputabilité : Selon la définition donnée par la doctrine, l’imputabilité est la possibilité d’attribuer la responsabilité d’un fait à une personne [3]. En droit pénal marocain, l’imputabilité est le critère qui permet de retenir la responsabilité pénale de l’auteur d’une infraction.

Conditions d’imputabilité : Pour qu’une personne puisse être tenue responsable pénalement d’une infraction, trois conditions doivent être réunies :

  1. La condition de discernement : la personne doit être capable de comprendre la nature et la gravité de l’acte qu’elle commet et d’en mesurer les conséquences. Cette condition est souvent liée à l’état mental de la personne au moment des faits.
  2. La condition d’intentionnalité : la personne doit avoir agi intentionnellement, c’est-à-dire avec l’intention de commettre l’infraction. Si la personne a commis l’infraction par accident ou par erreur, elle ne peut pas être tenue responsable pénalement.
  3. La condition de causalité : il doit y avoir un lien de causalité direct entre l’acte de la personne et l’infraction commise. En d’autres termes, l’infraction doit être la conséquence directe de l’acte de la personne.

§ 1 : INSUFFISANCE DES FACULTÉS INTELLECTUELLES

Elle peut tenir à l’âge, ou à certains troubles.

A. L’AGE

L’insuffisance des facultés intellectuelles peut tenir à l’âge (minorité). On est majeur à 18 ans. Il existe cependant certains règles spéciales entre 12 et 18 ans :

1. MOINS DE 12 ANS

Le mineur de moins de douze ans est considéré comme irresponsable pénalement par défaut de discernement (article 134 du Code pénal marocain). Il peut être soumis aux mesures et dispositions de la loi n° 22.01 du 3 octobre 2003 relative à la Procédure Pénale

2. LE MINEUR DE 12 A 18 ANS

Le mineur de douze ans qui n’a pas atteint dix-huit ans est, pénalement considéré comme partiellement irresponsable en raison d’une insuffisance de discernement. Il bénéficie de l’excuse de minorité, et ne peut faire l’objet que des dispositions de la loi de la procédure pénale (article 138 du Code pénal marocain).

En matière de crimes et de délits, il bénéficie de l’excuse de minorité et peut faire l’objet, soit des mesures de protection ou de rééducation prévues à l’article 481 du Code de la Procédure Pénale, soit des peines atténuées prévues à l’article 482 du Code de la Procédure Pénale.

En matière de contravention, il peut faire l’objet d’une condamnation à une peine d’amende prévue par la loi.

3. AU DESSUS DE 18 ANS

Les délinquants ayant atteint la majorité pénale de dix-huit ans révolus, sont réputés pleinement responsable (article 140 du Code pénal marocain).

Toutefois, l’âge du mineur s’apprécie non du jour de la comparution en justice, mais au jour où l’infraction est commise. Et l’âge avancé n’est pas en soi une cause d’irresponsabilité pénale.

B. ALIÉNATION MENTALE

L’insuffisance des facultés intellectuelles peut tenir à des raisons congénitales ou à la maladie mentale : il s’agit des troubles psychiques ou neuropsychiques ; c’est le problème des psychopathes délinquants. L’existence et la nature de ces troubles sera établie par l’expertise médicale.

Les juges du fonds doivent s’expliquer sur l’état mental du prévenu à la date des faits, et sans se borner par exemple à viser le comportement du prévenu à l’audience.

A côté de l’irresponsabilité totale dont bénéficie le dément intégral, le Code pénal marocain consacre le concept d’irresponsabilité partielle dont il fait bénéficier le demi-fou.

1. IRRESPONSABILITÉ TOTALE

Les agents qui, au moment des faits qui leur sont reprochés, se trouvaient, par suite de troubles de leurs facultés mentales, « dans l’impossibilité de comprendre ou de vouloir », sont considérés comme totalement irresponsables et doivent être absous (article 134 du Code pénal marocain).

2. IRRESPONSABILITÉ PARTIELLE

En revanche, l’agent qui, au moment de la commission de l’infraction, se trouvait atteint d’ un affaiblissement de ses facultés mentales de nature à réduire sa compréhension ou sa volonté et entraînant une diminution partielle de sa responsabilité, doit être considéré comme partiellement irresponsable (article 135 du Code pénal marocain).

§ 2 : ALTÉRATION PASSAGÈRE DES FACULTÉS INTELLECTUELLES

L’altération passagère des facultés intellectuelles peut provenir d’événements accidentels : il s’agit d’une personne adulte et normale, mais qui est soumise provisoirement à une influence la privant du jeu normal de ses facultés.

La question se pose rarement à propos du somnambulisme ou de l’hypnose : il y aurait dans ces cas irresponsabilité (sauf dans le cas d’hypnose, la responsabilité de l’hypnotiseur).

A. LE SOMMEIL

L’individu qui dort n’a pas conscience des actes perpétrés durant son sommeil. Les infractions de commission commise pendant une crise de somnambulisme naturel doivent être regardées comme le fait d’un irresponsable obéissant à des impulsions inconscientes et irrésistibles. En revanche, l’incidence infractionnelle du somnambulisme provoqué par le sommeil hypnotique doit pouvoir être imputée non seulement à l’agent imprudent, mais surtout à l’hypnotiseur, en ce cas complice par provocation.

Quid de l’infraction d’omission commise durant un sommeil naturel ? Exemple : Un passager de l’O.N.C.F. s’endort durant le trajet, omettant ainsi de descendre à la station programmée sur son titre de transport et se trouvant par là même en infraction vis-à-vis du droit pénal des transports ferroviaires. Sa responsabilité doit normalement être engagée, sauf s’il démontre avoir pris les précautions nécessaires pour se faire réveiller à la station voulue.

B. L’IVRESSE

L’ivresse est un état passager dû à l’absorption excessive d’alcool. Elle peut enlever à l’agent toute faculté de discernement. Il faut la distinguer de l’alcoolisme, état pathologique durable.

L’ivresse est-elle une cause de non imputabilité ? Le Code pénal marocain est à cet égard sans équivoque. Aux termes de l’article 137, en effet, l’ivresse ne peut en aucun cas, exclure ou diminuer la responsabilité.

L’ivresse peut par ailleurs aggraver la répression des délits d’homicide et de blessures volontaires (article 434 du Code pénal marocain) ou constituer en soi un délit spécifique, lorsque étant le fait e parents, elle est regardée comme un exemple pernicieux pour les enfants (article 482 du Code pénal marocain), ou plus généralement lorsqu’elle est publique et manifeste (décret royal portant loi du 14 novembre 1967).

C. L’EMPLOI VOLONTAIRE DE SUBSTANCES STUPÉFIANTES

Le droit pénal assimile purement et simplement à l’ivresse ce type d’intoxication dont les conséquences peuvent être un facteur de criminalité. L’article 137 du Code pénal marocain refuse d’exclure ou de diminuer la responsabilité de l’agent.

D. LES ÉTATS PASSIONNELS OU ÉMOTIFS

Une violente passion, une trop forte émotion peuvent incontestablement altérer l’élément moral. Le Code pénal marocain pose ainsi une règle rigoureuse en estimant que « les états passionnels ou émotifs…ne peuvent, en aucun cas exclure ou diminuer la responsabilité »