Le fonds agricole

Les structures de l’exploitation : le fonds agricole

Selon Capitant, l’exploitation agricole est l’ensemble des biens mobiliers et immobiliers affectés à une utilisation agricole et constituant une unité de culture autonome mais demeurée juridiquement indépendante. C’est une indépendance juridique des éléments qui composent l’exploitation.

Chap I ) De quelle structure juridique peut-on doter l’exploitation pour qu’elle soit économiquement efficace ?

À la différence des autres entreprises, les éléments ne viennent pas ici se fondre dans une universalité juridique ou de fait pour créer un élément nouveau. Ils restent isolés et c’est dommageable car il n’y a pas de transmission globale de l’exploitation.

La transmission élément par élément : vente séparée pour chaque bien en respectant le régime juridique propre.

Chaque élément remet donc en cause la pérennité de l’exploitation qui ne peut être cédée.

Ces difficultés sont aggravées par le fait que les éléments qui composent l’exploitation appartiennent à des propriétaires différents.

Le régime matrimonial des époux peut venir interférer dans ce système. Exemple : régime différent selon que le bien fut donné, soit en indivision, ou vendu. Les exploitations posent problème car elles sont souvent en faire-valoir mixte avec l’intervention de tiers.

Il faut donc essayer d’organiser cette structure et intégrer tous les biens dans une organisation qui met en avant un traitement global.

Avant 2006, le seul moyen était la création d’une société. Cela reste encore aujourd’hui un traitement majeur mais depuis 2006, on a une autre possibilité avec une structure copiée sur celle du fonds de commerce : c’est le fonds agricole.

On distingue :

– le fond agricole

– Les sociétés agricoles : c’est à dire :

 

Chap. II) Qu’est-ce qu’un fonds agricole

On permet à l’exploitation de se transformer en une entreprise cessible ayant une valeur patrimoniale propre. Le fonds agricole permet à l’exploitant de valoriser ses biens incorporels. L’article L. 311-3 du code rural énumèrent les éléments qui composent le fonds agricole et qui sont capables d’entrer dans le nantissement du fonds.

L’activité exercée est forcément agricole donc le fonds a une nature civile.

Ces biens représentent une universalité de fait mais elle ne pourra pas regrouper l’ensemble des éléments nécessaires à l’exploitation agricole alors même que sa raison d’être.

En sont exclus les terres et les bâtiments agricoles car le fonds agricole est un meuble incorporel car c’est un fonds et l’universalité de fait donc on ne peut pas intégrer d’immeubles dans un meuble.

Principale critique : est-il pertinent d’avoir créé une universalité économique pour en exclure les biens immeubles, principal support ?

Le fonds agricole ne peut remplir sa mission d’englober les biens que si le support de l’exploitation est un bail cessible.

Section 1 – La création du fonds agricole par l’exploitant

§1 – La nécessité d’une déclaration de l’exploitant

Ce n’est cependant pas une obligation. Le fonds agricole a donc un caractère facultatif. Un agriculteur peut librement décider de doter son exploitation de cette structure agricole.

L’option est ouverte à tout exploitant et se limite à révéler l’existence du fonds.

Il doit, s’il veut y adhérer, remplir une déclaration qu’il va chercher auprès de la chambre d’agriculture dont il dépend. Seul l’exploitant peut la faire.

Elle ne peut pas être faite par un tiers tel que ses créanciers qui auraient pu se trouver en avantage dans un fonds agricole ou les héritiers.

Il y a une incertitude : la déclaration est-elle révocable ou irrévocable ? On ne sait pas mais on peut supposer que si l’exploitant a consenti à une sûreté sur son fonds, on peut penser que la déclaration est irrévocable tant que la garantie perdure. Cela résulte aussi du caractère artificiel du fonds agricole.

§2 – La composition du fonds agricole

L’alinéa trois de l’article 311-3 du code rural énonce que sont compris le cheptel mort et le vif, les stocks y compris les récoltes sur pied, l’enseigne, les dénominations, la clientèle, le brevet et autre droit de propriétés industrielles qui y sont attachées. Tout dépend de l’activité car certains éléments ne sont pas forcément trouvables dans certaines exploitations.

Différence majeure avec le fonds de commerce où la clientèle est nécessaire ici elle n’est qu’éventuelle.

Le fonds agricole doit être cessible alors les contrats servant à l’exploitation du fonds sont également cessibles.

Certains droits peuvent être essentiels pour l’exportation telle que le bail cessible hors du cadre familial.

Certains droits sont extérieurs au fonds agricole tel que les immeubles et le droit à produire. Donc ils ne sont pas cessibles avec le fonds agricole : indépendance des terres.

Les seuls droits voisins qui pourront intégrer le fonds agricole se sont les nouveaux droits à paiement unique : la loi les déclare cessible (DPU).

Ils sont récents et issus d’une réforme de la PAC le 29 septembre 2003 et sont applicables depuis le 15 mai 2006.

Les DPU sont censés remplacer tous les droits précédemment octroyés aux agriculteurs : un seul paiement des anciennes subventions pour simplifier le régime et baisse de l’objet de la PAC.

Ils sont caractérisés par un découplage avec la production agricole donc on peut percevoir des DPU sans produire mais il n’est pas total car pour certains secteurs se sera indépendant.

Le montant est calculé de manière assez élaborée. Ils sont calculés exploitation par exploitation en fonction de la moyenne des aides octroyées à celle-ci divisée par le montant des aides totales perçues par toute exploitation. Le montant des aides totales représente la rente versée aux exploitants qualifiés et elle n’est pas illimitée dans le temps.

Il est nécessaire de maintenir les terres dans de bonnes conditions mais il n’est pas nécessaire de produire.

Après le découplage, on a une modulation c’est-à-dire que chaque année, on prélève un pourcentage sur les DPU censés augmenter le développement rural.

Il y a une conditionnalité des DPU donc le versement est subordonné au respect des dispositions réglementaires en matière de santé publique, de protection de l’environnement et du bien-être animal.

Sur leur nature juridique, ce sont des droits incorporels, patrimoniaux et qui sont cessibles soit avec les terres ou de manière indépendante.

Ils sont capables de s’intégrer dans le fonds agricole et de le valoriser.

Section 2 – Les opérations susceptibles de porter sur le fonds agricole

§1 – Le nantissement

C’est l’article L. 312-3 alinéa 2. Le fonds agricole peut être affecté en garantie de la dette de l’exploitant. C’est un gage sans dépossession.

Il relève entièrement des règles pour celui prévu pour le fonds de commerce. Il doit être constaté par écrit : par acte authentique ou sous seing privé.

Il doit faire l’objet d’un enregistrement qui va lui donner de date. Cela doit se faire auprès du greffe du tribunal de commerce. Il y a une inscription dans les 15 jours de l’acte nantissement à peine de nullité du nantissement.

Cela offre aux créanciers nantis un droit de préférence et un droit de suite.

Le nantissement est vu comme un moyen de se procurer du crédit. Il peut être le complément utile d’un nouveau plan de crédit transmission des exploitations : cela permet au vendeur de bénéficier d’une réduction d’impôt sur le revenu lorsqu’il consent des délais de paiement à l’acheteur. La réduction porte sur l’impôt sur le revenu et donc sur les intérêts du fait du délai de paiement.

Il doit être âgé de moins de 40 ans, il doit s’installer ou être installé depuis moins de cinq ans.

Ce nantissement, était-il nécessaire ? L’exploitant bénéficie déjà de garanties spécifiques comme les warrants qui peuvent avoir pour assiette le matériel de l’exploitation et les produits de celle-ci. Le nantissement fait donc double emploi avec les warrants.

Il y a un risque de chevauchement de ces deux garanties avec des régimes différents, il y a un risque de conflit entre les créanciers dus à la dispersion des informations. Il n’y a pas encore de centralisation de ces informations.

§2 – La vente

La vente n’est pas citée expressément par le texte. L’exploitant a la possibilité de tout vendre par un seul acte. La vente est soumise au droit commun de la vente. Le contrat de vente devrait être constaté par écrit.

Faut-il appliquer le formalisme de la vente du fonds de commerce, c’est-à-dire les mentions obligatoires dans l’acte à peine de nullité ? Certains pensent qu’il faut appliquer ce formalisme.

Toute vente pose la question de l’évaluation du fonds :

– additionner la valeur des éléments qui composent le fonds

– calculé selon la valeur de l’entreprise (son rendement)

§3 – L’apport en société

On va sans doute transposer les règles applicables pour les sociétés.

§4 – La donation

C’est une transmission à titre gratuit. Les donations portant sur le fond sont possibles : il y a une exonération des droits de mutation à titre gratuit lorsque la donation du fonds se fait au profit d’un salarié agricole, et à la condition que la valeur du fonds soit inférieure à 300 000 €.

§5 – La location-gérance

La location-gérance n’est ni évoquée par la loi ni par les débats parlementaires. Elle pourra donc être permise. Le formalisme du droit commun est vigoureux. Faut-il aussi l’appliquer au fonds agricole ? Dans le doute, il faudrait se référer au modèle du contrat de location-gérance du fonds de commerce.